Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

119701 R.C.$. FORTISR v. M.R.N 299 [TRADUCTION] La Reine (Demanderesse) v. Guildwood Nursing Home Ltd (Défenderesse) Le Juge CattanachCalgary, les 12 et 13 février; Ottawa, le 14 mars 1969. Banque d'expansion industrielleContrat de prêtInexécution des conditions stipulées Annulation du contratObligation de l'emprunteur de payer une prime et une compensationLoi sur la Banque d'expansion industrielle, S.R.C. 1952. ch. 151. Le 7 janvier 1966, la Banque d'expansion industrielle (un mandataire de la Couronne) a offert de prêter à la défenderesse la somme de $500,000 pour la construction d'une clinique dans la province d'Ontario. L'offre stipulait notamment que la défenderesse devait obtenir un prix ferme de contrat n'excédant pas $655,000, que l'offre de crédit deviendrait périmée le 30 avril, à moins qu'elle ne soit prolon-gée par consentement écrit, et que si les fonds n'étaient pas utilisés, la défenderesse devrait payer à titre de dommages-intérêts une prime de $9,550 et une compensation correspondant à l'intérêt au taux annuel de 2 p. 100 sur le montant des fonds non retirés après le 30 avril. La défenderesse a accepté l'offre, par lettre datée du 26 janvier, en demandant le report de la date de péremption. La Banque a notifié par téléphone à la défenderesse, le 1°' février, que la date de péremption avait été reportée au 21 octobre, et a modifié ses dossiers en conséquence. La défenderesse n'a pu obtenir qu'un prix ferme de contrat d'un montant de $691,000; par la suite, ayant pu se procurer ailleurs des ressources financières, elle a demandé l'annulation du prêt. Jugé: La défenderesse est tenue de payer la prime et la compensation stipulées au contrat, ainsi que les honoraires d'avocat encourus par la Banque. La stipulation exigeant un prix ferme de contrat n'excédant pas $655,000 n'était pas une condition suspensive mais une simple évaluation. Le contrat n'est pas annulable pour modification de la situation contractuelle, du simple fait que la défenderesse n'a pu obtenir un prix ferme de contrat n'excédant pas $655,000. La Banque a le pouvoir implicite, en vertu de la Loi sur la Banque d'expansion industrielle, d'exiger le paiement d'une prime et d'une compensation. Bien que la date de péremption n'ait pas été reportée par écrit, l'inscription à cet effet portée aux dossiers de la Banque était suffisante; de toute manière, les parties, par leur comportement, ont renoncé à l'exigence d'un écrit. La Banque n'est pas déliée
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 301 de ses obligations par le fait que la défenderesse ait pu obtenir ailleurs des ressources financières. L'obligation de la défenderesse de payer la prime et la compensation n'est pas abusive et exorbitante. ACTION. C. R. O. Munro, c.r., et N. D. Mullins pour la demanderesse. A. J. Harben pour la défenderesse. LE JUGE CATTANACHLa Cour est saisie, au moyen d'une information déposée par le Sous-procureur général du Canada au nom de la Banque d'expansion industrielle (désignée ci-après «la Banque»), d'une demande de recouvrement, dirigée contre la défenderesse et portant sur la somme de $13,170.77; en vertu de l'article 3 de la Loi sur la Banque d'expansion industrielle (S.R.C. 1952, ch. 151, dans sa forme amendée), la Banque est mandataire de Sa Majesté du chef du Canada. La défenderesse est une personne morale dûment constituée, conformé-ment au droit de la province d'Ontario; elle a établi son siège principal à Scarborough, dans cette même province. Les membres du bureau, adminis-trateurs et principaux actionnaires de la défenderesse sont Leon Libin, président, Alvin Libin, vice-président, David Laven, secrétaire et Marton Cohos, trésorier; toutes ces personnes sont domiciliées à Calgary (Alberta). En 1965, la défenderesse a envisagé la construction et l'exploitation d'une clinique pouvant loger 156 personnes, à Scarborough, pour un prix de revient évalué à $1,005,000. Elle avait une option d'achat sur le terrain de la future clinique, pour un prix de $135,000. On a estimé que le coût de construction de l'édifice s'élèverait à $655,000, et celui des installations et de l'équipement à $175,000. Il fallait ajouter à ces sommes des honoraires professionnels s'élevant à $40,000. La défenderesse disposait, à cet effet, des fonds que lui avaient prêtés ses actionnaires et la Domestic Finance Co. qui était possédée majoritaire-ment par Leon Libin et dans laquelle le frère de ce dernier possédait également des intérêts. On s'attendait à tirer environ $400,000 de ces différentes sources de financement, sous réserve de circonstances imprévues; on avait donc jugé qu'un emprunt d'environ $600,000 serait nécessaire pour compléter le financement du projet. Signalons que les actionnaires de la compagnie défenderesse étaient aussi actionnaires d'une clinique semblable, qu'ils avaient construite et qu'ils exploitaient avec profit à Calgary (Alberta). Si je ne m'abuse, l'un des facteurs ayant permis l'estimation du coût de construction du bâtiment à Scarborough, a été le coût d'un bâtiment semblable érigé à Calgary; et je crois qu'un prêt de $600,000 avait été obtenu auprès de la Great West Life Company pour contribuer au financement de la construction de ce dernier. En tout cas, au début de l'automne 1965, la défenderesse ne pouvait se procurer, auprès des sources commerciales conventionnelles, le finance-ment nécessaire à la construction de la clinique projetée à Scarborough. La défenderesse s'est vu refuser un prêt de la Great West Life compagnie qui
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 303 lui avait prêté des fonds pour la construction de la clinique de Calgary, ainsi que de la Canada Permanent Mortgage Corporation. On a par la suite retenu, sans succès, les services d'un courtier d'hypothèques, Murray and Company. Devant cette situation, Leon Libin a fixé rendez-vous, le 25 août 1965, aux responsables de la succursale de la Banque d'expansion industrielle à Calgary, afin de discuter de la possibilité d'un prêt, voulant explorer ainsi une source de financement à laquelle il ne s'était pas encore adressé. Il a exposé le projet dans son ensemble à M. Sedgwick, agent de crédit de la Banque. La proposition a été discutée en détail, des renseignements supplémentaires ont être fournis, à la suite de quoi, le 30 août 1965, la défenderesse a présenté une demande de prêt d'un montant de $600,000; cette demande a été déposée au dossier sous la cote P7. M. Libin a remis personnellement la demande de prêt à M. Sedgwick, le 31 août 1965, date à laquelle les termes et conditions portés au verso de la première page de la demande ont été discutés et expliqués. Ces conditions sont les suivantes: Les termes et conditions de tout crédit autorisé seront définis dans une lettre adressée au demandeur pour acceptation (A) Si l'offre de crédit est acceptée, elle deviendra périmée après la date stipulée dans l'offre à moins que la garantie requise par la Banque ait été fournie à ladite date ou qu'un sursis ait été convenu par écrit. (B) Si l'offre de crédit devient périmée après avoir été acceptée, aux termes du paragraphe (A) ci-dessus, ou si le crédit accepté est annulé à la demande même du demandeur, ce dernier versera immédiatement à la Banque une prime de $50, plus 2% du montant par lequel le crédit accordé excède $25,000. (C) Si le demandeur ne fait pas usage de tout le crédit accepté avant ün délai raisonnable stipulé dans l'offre de crédit ou dans des lettres subséquentes, soit parce que la garantie n'a pas été fournie ou pour toute autre raison, le demandeur pourra être tenu de verser à la Banque une compensation égale à l'intérêt depuis la date le crédit est devenu périmé, au taux annuel de 2%, calculé d'après le solde quotidien de cette partie du crédit qui n'aura pas été annulée ou utilisée. La compensation, s'il en est, s'ajoute à la prime mentionnée au paragraphe (B) ci-dessus dans le cas d'un crédit qui devient périmé ou qui est annulé à la demande même du demandeur. (D) L'emprunt pourra en tout temps et sans préavis être remboursé en tout ou en partie par anticipation pourvu que: (i) si le remboursement a lieu avant l'expiration de six années de la date de la signature des principaux documents de garantie, il soit sujet au paiement à la Banque d'une indemnité calculée sur le montant ainsi remboursé à l'avance aux taux suivants: 5% durant les deux premières années 4% durant la troisième année 3% durant la quatrième année 2% durant la cinquième année 1% durant la sixième année aucune indemnité après la fin de la sixième année, chaque année étant computée de la date de la passation des principaux documents de garantie; (ii) tous remboursements partiels soient imputés régressivement sur les verse-ments de capital dont les échéances sont les plus reculées. 92622-9
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 305 La demande a été étudiée ensuite par le personnel de la succursale de la Banque à Calgary, qui, après avoir fait enquête, l'a transmise au siège social de la Banque, à Montréal (Québec), au début du mois de décembre 1965, accompagnée d'une lettre recommandant son acceptation. Le 23 décembre 1965, M. Sedgwick a avisé M. Libin que la demande de prêt de $600,000 présentée par la défenderesse avait été rejetée, mais que la Banque acceptait de lui prêter $500,000, à condition que la Domestic Finance Co. accepte de fournir le supplément de $100,00 nécessaire à la réalisation du projet. Cette proposition a paru acceptable à la défen-deresse, et, le 7 janvier 1966, on a rédigé et transmis à cette dernière une offre de prêt pour ce montant. Cette offre a été versée au dossier sous la cote P2. Elle déclare que la Banque a autorisé un prêt de $500,000, qui devait être garanti comme il y était indiqué. L'offre comportait également un intitulé portant sur les «Conditions casuelles»: Avant tout paiement, la compagnie devra obtenir un contrat à prix ferme, d'un maximum de $655,000, pour la construction du bâtiment projeté, et le contracteur devra obtenir une garantie d'exécution des travaux couvrant au moins 50 p. 100 du montant du contrat. Avant tout versement de ce prêt, la Banque exigera la preuve qu'une banque à charte a accepté d'ouvrir en faveur de la compagnie un crédit d'au moins $50,000. Sous l'intitulé «Autres conditions» apparaissait le texte suivant: Ce prêt est également soumis aux conditions énoncées à l'Annexe «A» ci-jointe; vous voudrez bien noter en particulier la clause 5, qui expose les modalités de paiement anticipé du prêt. L'Annexe `BI renferme des observation supplémentaires quant aux dispositions du prêt relatives à l'assurance du capital fixe. La destination du prêt était exposée dans les termes suivants: Ce prêt est consenti afin de servir au financement du programme suivant: Programme Achat du terrain $ 135,000 Construction du bâtiment 655,000 Achat d'équipement 175,000 Honoraires 40,000 $1,005,000 Financement B.E.I. $ 500,000 Prêts des actionnaires et d'autres sources 305,000 Domestic Finance Co.: prêt sur seconde hypothèque 200,000 $1,005,000 Aucun changement important ne pourra être apporté à ce programme sans l'autorisation préalable de la Banque, donnée par écrit. Si le coût effectif du programme dépasse les chiffres donnés ci-dessus, l'excédent sera supporté par la compagnie ou par ses actionnaires, sur une base acceptable par la Banque, avant le dernier versement de notre prêt. Si le coût effectif est inférieur à ces chiffres, la Banque pourra, à sa discrétion, réduire en conséquence le montant du prêt. 92622-91
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 307 Parmi les conditions énoncées à l'Annexe «A» et dont il est fait mention sous l'intitulé «Autres conditions», voici celles qui nous intéressent: (1) Cette offre de crédit ne prendra effet que si elle est acceptée par écrit par le demandeur. Elle deviendra périmée si, en date du 28 janvier 1966, nous n'avons pas reçu d'acceptation écrite. (2) Si le crédit est accepté, il deviendra périmé le 30 avril 1966, à moins qu'on n'ait entre-temps fourni la garantie et utilisé le crédit, ou à moins qu'un sursis n'ait été convenu par écrit. (3) Si, après avoir été accepté, le crédit devient périmé ou est annulé à la demande même du demandeur, ce dernier paiera aussitôt à la Banque une prime de $9,550, que retiendra la Banque à titre de dommages-intérêts mais non de sanction. (4) Le demandeur devra verser à la Banque, en sus de la prime (s'il en est), une compensation égale à l'intérêt depuis le 30 avril 1966, au taux annuel de 2 p. 100, calculé d'après le solde quotidien de cette partie du crédit qui n'aura pas été annulée à la demande même du demandeur et n'aura pas été avancée par la Banque. La compensation sera due et payable à compter du 23 mai 1966 et cessera de l'être quand le solde non versé ne sera plus que de $25,000 au maximum. La compensation ne portera pas sur la partie du crédit qui sera affectée au remboursement du solde à recouvrer des précédentes avances de la B.E.I. (s'il en est). Une partie du crédit ne sera considérée comme annulée par le demandeur que lorsque la Banque recevra de lui une demande écrite d'annulation. * * * (6) Le paiement des fonds offerts par la présente est conditionné par la remise, dans les formes et dans les conditions acceptées par la Banque et ses conseils juridiques, de la garantie stipulée dans l'offre de crédit. (7) Si la Banque estime qu'une aggravation sensible des risques survient avant le paiement des fonds offerts, elle peut en suspendre le paiement à sa discrétion. (8) Cette offre de crédit peut, à la discrétion de la Banque, être annulée ou retirée dans le cas le demandeur serait impliqué dans un procès ou dans toute procédure devant une régie, un tribunal administratif ou un organisme d'État, sans que la Banque en ait été informée par le demandeur. * * * (12) Le demandeur reconnaît et accepte sa responsabilité à l'égard du paiement de tous honoraires d'avocat relatifs à l'établissement, à la confection et à l'enregistrement des actes de garantie. On doit noter que, d'après la clause 1 de l'Annexe «A», l'offre de crédit devenait périmée si, le 28 janvier 1966, elle n'avait pas été acceptée. Lors d'une conversation téléphonique entre M. Sedgwick et M. Libin, le 26 janvier 1966, ce dernier a annoncé que l'offre serait acceptée, et qu'une lettre d'acceptation serait envoyée avant la date d'expiration du délai. M. Libin a cependant laissé entendre que la construction ne pourrait pas com-mencer avant le 30 avril 1966, date mentionnée aux clauses 2 et 4 de l'Annexe «A», et a demandé en conséquence un sursis. M. Sedgwick lui a demandé de présenter cette requête par écrit. Par lettre en date du 26 janvier 1966 (Pièce P-3), la défenderesse a accepté dans les termes suivants l'offre de la Banque: Nous accusons par la présente réception de votre offre de crédit en date du 7 janvier 1966. Les conditions énoncées dans votre lettre et ses annexes «A» et «B» ont été examinées avec soin; et nous vous confirmons par la présente que nous acceptons ce prêt dans ces conditions.
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 309 Veuillez prier vos conseils juridiques de procéder à l'établissement des actes de garantie. Les documents nécessaires à ce sujet vous seront fournis sur demande, dans les plus brefs délais. Cette lettre a été signée par les quatre actionnaires de la défenderesse. Par lettre également datée du 26 janvier 1966, la défenderesse a demandé un sursis dans les termes suivants: Veuillez trouver ci-joint notre acceptation de votre offre de crédit en date du 7 janvier 1966. Nous aimerions également solliciter par la présente le report du 30 avril au 30 octobre de la date de péremption prévue par la clause 2 de l'Annexe «A., étant donné qu'il nous est impossible de faire notre premier retrait avant le 30 avril, notre programme ne prévoyant le début de la construction que dans le courant d'avril. Sur réception de cette requête, M. Sedgwick, le 26 janvier 1966, a recommandé de reporter la date de péremption du 30 avril au 31 octobre 1966. Cette recommandation avait le soutien de M. Russell, le supérieur de M. Sedgwick, et le sursis a été autorisé par le directeur général adjoint le 28 janvier 1966. Cette décision a été transcrite sur le formulaire 46 de la Banque, initulé «Modifications à l'autorisation» (Pièce P-8). Ce formulaire a été renvoyé à la filiale de Calgary le 31 janvier 1966. Le premier février 1966, M. Sedwick avertissait M. Libin par téléphone que la date de péremption avait été portée du 30 avril au 31 octobre 1966, mais que, bien que ce renseignement lui ait été communiqué, on ne le lui avait pas confirmé par écrit. La clause 2 de l'annexe «A» de l'offre de crédit de la Banque prévoyait de manière expresse que le sursis pouvait être convenu par écrit. Entre-temps, la défenderesse avait exercé son droit d'option sur l'emplacement de la clinique, et avait payé à cet effet, au comptant, en septembre 1965, la somme de $135,000, grâce au prêt des actionnaires. Au reçu de l'offre de crédit de la Banque, pour $500,000 au lieu de $600,000 comme on l'avait demandé, les actionnaires de la défenderesse se sont réunis et ont procédé à un nouveau tour d'horizon. A ce moment-là, le coût de la construction du bâtiment et le coût de son équipement restaient encore à l'état de pure estimation. On n'avait pas encore fait d'appel d'offres. Pour la défenderesse, l'offre de la Banque était la meilleure affaire qu'elle ait pu compter réaliser. Le crédit commercial conventionnel ne lui étant pas accessible, les actionnaires ont décidé de se contenter de l'offre de la Banque et de trouver auprès de la Domestic Finance Co. les $100,000 supplémentaires nécessaires pour couvrir les frais estimés. Comme on l'a déjà indiqué, l'offre de crédit de la Banque a été acceptée par lettre en date du 26 janvier 1966. La construction du bâtiment a été mise en adjudication en avril 1966. Les soumissions comportaient toutes des devis supérieurs au coût estimé de $655,000 et variaient de $800,000 à plus de $900,000. Ces renseignements ont été transmis à la Banque, mais celle-ci est restée inflexible et a limité son offre de crédit à $500,000. Devant cette situation, des négociations ont été entreprises avec les soumissionnaires afin de réduire leurs soumissions. Après consultation avec les architectes, des changements ont été apportés aux plans afin d'en réduire
[1970] R.C.E. LA REINE v. GUILDWOOD 311 le coût d'exécution. Finalement, un contrat a été passé avec un constructeur, le 10 juin 1966, pour la construction du bâtiment à un coût maximum de $691,000, avec possibilité de réaliser des économies qui ramèneraient cette somme à $681,000. Ces chiffres s'écartent de $36,000 et $26,000 du coût estimé de $655,000. La défenderesse a conclu un marché avec la Robert Simpson Company, Limited, pour la fourniture des équipements à un coût de $150,000, mais elle jugeait néanmoins qu'un prêt supplémentaire de $100,000 serait néces-saire pour mener l'exécution du projet à bonne fin. La défenderesse, soutenue par la Robert Simpson Company et sa banque à charte, a renouvelé ses demandes auprès de la Canada Permanent Mortgage Corporation, qui lui a alors offert un prêt de $600,000. M. Libin, au nom de la défenderesse, a alors averti la Banque qu'on lui offrait ce prêt, tout en l'invitant à faire une offre équivalente. La Banque a refusé de répondre à cette sollicitation, et ne pouvait d'ailleurs y donner suite, puisque sa mission était d'apporter une aide financière aux petites entreprises incapables de se procurer ailleurs les crédits ou les ressources financières dont elles avaient besoin. Or, ce n'était plus le cas de la défende-resse, qui pouvait désormais disposer d'un tel crédit. Devant ce refus, la défenderesse a accepté de la Canada Permanent Mortgage Corporation le prêt de $600,000 au même taux d'intérêt de 8 p. 100 qu'offrait la Banque, mais remboursable en 20 ans au lieu de 12 et dans des conditions légèrement plus favorables, si l'on considère la prime et la compensation. On s'est donc alors demandé ce qu'allait devenir l'offre de crédit de la Banque. La chose a été discutée par le personnel de la filiale de la Banque à Calgary; on a alors déclaré à M. Libin que la défenderesse disposait de trois moyens: elle pouvait (1) soit annuler l'offre de crédit de la Banque, conformément à la clause 4 de l'annexe «A» de l'offre du 7 janvier 1966, (2) soit laisser courir le délai de péremption de l'offre jusqu'au 31 octobre 1966, en restant simplement inactive, ou (3) soit se prévaloir de l'offre de crédit de la Banque pour $500,000. La défenderesse a choisi la première voie et, par lettre en date du 10 août 1966 (Pièce 11), a demandé l'annula-tion du prêt de la Banque, déclarant qu'étant donné des difficultés indé-pendantes de sa volonté et de celle de la Banque, elle était dans l'impossibilité de donner suite à l'offre. La Banque a alors fait savoir à la défenderesse qu'elle devrait payer la prime, soit $9,550, la compensation pour la période du 30 avril au 12 août 1966, soit $2,849.27, et les honoraires d'avocat, soit $771.50; soit un total de $13,170.77, somme que la Banque cherche aujourd'hui à recouvrer de la défenderesse. Lors de ses discussions avec la Banque, M. Libin a jugé que les sommes ainsi demandées étaient excessives, et a proposé de rembourser à la Banque ce qu'avaient effectivement coûté les transactions. La Banque a refusé, et par lettre en date du 23 août 1966, a demandé le paiement intégral du montant des frais et charges mentionné plus haut. On ne conteste pas l'exactitude du calcul de ces frais et charges; le litige porte sur le point de savoir dans quelle mesure on peut en exiger le paiement par la défenderesse.
[1970] R.C.E. LA REINE v. GUILDWOOD 313 L'avocat a déclaré au nom de la défenderesse que celle-ci n'avait pas passé de contrat avec la Banque. Cet argument s'appuie sur le fait que, d'après les termes de l'offre de crédit de la Banque, la défenderesse était tenue, avant tout versement du prêt, d'obtenir un prix ferme de contrat pour la construction du bâtiment, d'un montant n'excédant pas $655,000, et que cette condition annulait, par son incertitude, toute relation contractuelle entre la Banque et la défenderesse. La défenderesse a ensuite soutenu qu'en l'absence de faute de sa part et vu les circonstances indépendantes de sa volonté qui avaient été portées à la connaissance de la Banque, cette condition n'avait pas été et ne pouvait être remplie, et que par conséquent le contrat ne pouvait être exécuté. En troisième lieu, la défenderesse a prétendu qu'en exigeant une prime et une compensation, la Banque outrepassait les pouvoirs que lui avait conférés la Loi sur la Banque d'expansion industrielle. Par un quatrième argument, la défenderesse a prétendu qu'elle n'était pas obligée de payer la compensation, car on n'avait pas convenu par écrit de reporter la date de péremption, fixée au 30 avril, comme le stipulait l'offre de crédit faite par la Banque. Comme cinquième argument, la défenderesse a fait valoir une «illégalité survenante». Cet argument consiste à dire, si je ne m'abuse, que le prêt ne pouvait véritablement prendre naissance que lorsque l'argent aurait été matériellement avancé par la Banque à la défenderesse, avant quoi le prêt était simplement latent et la Banque prête à avancer l'argent quand la défenderesse lui manifesterait le désir de retirer des fonds. Cependant, puisque l'offre est devenue périmée avant que les fonds n'aient été retirés de la Banque, il aurait été illégal pour cette dernière d'avancer de l'argent par la suite, car le contrat n'existait plus; en outre, la défenderesse pouvant désormais se procurer des fonds auprès des sources conventionnelles de crédit, la Banque n'avait plus, en vertu de l'article 15(1)b), le pouvoir de lui avancer de l'argent. Enfin, sixièmement, la défenderesse a prétendu que l'obligation de payer la prime et la compensation était tout à fait abusive et exorbitante, et que l'equity devait l'en libérer. D'après le dossier, il me paraît évident que l'offre de crédit de $500,000 faite par la Banque à la défenderesse, en date du 7 janvier 1966 (Pièce P2), accepté par cette dernière le 26 janvier 1966 (Pièce P3), et signée par tous ses actionnaires, administrateurs et agents, au nombre de quatre, constitue un contrat obligatoire, à moins que ne manquent les éléments essentiels à son existence, ce qui le réduirait à l'état d'entente entre les parties pour passer ultérieurement un contrat. Si l'une des clauses fondamentales du contrat n'a pas été acceptée par les parties et doit être déterminée par un accord ultérieur, il n'existe pas de contract entre les parties. Ce principe a été établi par Lord Dunedin dans l'affaire May & Butcher v. The Kingl, mais Lord Dunedin avait poursuivi en disant: naturellement, il peut comporter un élément non encore déterminé, mais la détermination de cet élément ne doit pas supposer l'accord des parties. 1 [1934] 2K.B. 17.
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 315 Je pense que l'avocat de la défenderesse invoquait ici dans son plaidoyer les «conditions casuelles», d'après lesquelles, avant que la Banque n'effectue un paiement, la défenderesse devait obtenir un prix ferme de contrat pour la construction de la clinique projetée, prix qui ne devait pas dépasser $655,000, ainsi que l'ouverture en sa faveur par une banque à charte d'un crédit d'au moins $50,000. Cette dernière condition a été remplie: une banque à charte a ouvert en faveur de la défenderesse un crédit de $50,000. Il est indéniable que la somme de $655,000, envisagée comme coût éventuel de la clinique, n'était qu'une simple estimation faite antérieurement aux appels d'offre et à la réception des soumissions. Les deux parties ont reconnu que cet état de choses avait fondé et conditionné l'offre de crédit faite par la Banque. L'offre de crédit stipulait qu'aucune modification importante ne devait être apportée au programme projeté sans le consentement préalable de la Banque, et que si le coût effectif du programme devait être supérieur aux chiffres indiqués, le montant excédentaire devrait être fourni par la défenderesse ou ses actionnaires sur une base acceptable par la Banque, et ce, avant que celle-ci n'effectue le paiement final du prêt. On avait également prévu que, si le coût effectif était inférieur au coût estimé, la Banque, pourrait alors, à sa discrétion, réduire d'autant le montant du prêt. On a soutenu au nom de la défenderesse que la condition casuelle d'un prix ferme de contrat ne devant pas excéder $655,000 soumettait le contrat conclu entre les parties à une condition suspensive qui n'a pas été remplie, et que par conséquent, il n'existait pas de contrat obligatoire entre les parties, celui-ci étant nul pour incertitude. En outre, la clause 7 de l'Annexe «A» à l'offre de crédit prévoit que si, de l'avis de la Banque, il survient une aggravation notable du risque avant que les fonds n'aient été versés, les paiements peuvent être suspendus à la discrétion de la Banque. La défenderesse a fait valoir que si l'une de ces conditions survenait, la Banque jouissait d'une discrétion absolue pour suspendre les paiements, et il serait alors nécessaire de conclure un nouveau contrat. Il est certain que les principes d'interprétation s'appliquent à tout genre de documents, mais les conséquences de leur application dépendent quelque peu de la nature du document lui-même. On doit chercher, dans toute la mesure du possible à donner effet à la convention conclue entre les parties. A mon avis, le dossier révèle qu'il existe en l'espèce un contrat, par lequel la Banque s'est engagée à prêter une certaine somme d'argent et par lequel la défenderesse s'est engagée à emprunter ladite somme. On comprend que la Banque tienne à être remboursée et à subir le moins de risques possible; il me semble que les conditions stipulées dans cette offre de crédit sont raisonnables à cet effet. Les deux parties étaient conscientes du fait que le coût proposé de $655,000 pour la construction de la clinique n'était qu'une estimation. Ni l'une ni l'autre ne s'attendait à ce que le prix ferme du contrat, une fois connu, ne soit exactement de $655,000. Il pouvait être inférieur ou supérieur audit montant.
[1970] R.C.Ê. LA REINE v. GUILDWOOD 317 L'éventualité d'un coût excédentaire n'avait pas échappé à l'esprit des parties. Dans son témoignage, M. Libin a déclaré expressément qu'un excédent de $25,000 à $30,000 serait supporté par les actionnaires. C'est la Banque qui avait stipulé qu'on ne devait pas apporter de modification importante au programme projeté. S'il y en avait une, elle se réservait alors le droit de maintenir ou non son offre de prêt. A mon avis, pour conclure à l'existence d'une aggravation sensible des risques, la Banque devait se fonder sur des constatations faites de bonne foi. A mon avis, les parties à ce contrat n'ont rien reporté à une négociation ultérieure. Elles ont prévu des éventualités, et pris des dispositions pour y faire face. D'ailleurs, je ne crois pas qu'il soit inhabituel, dans les conventions d'affaires, que l'une des parties se réserve le droit, dans une éventualité donnée, de résilier le contrat. Or, c'est ici ce que la Banque a fait; j'estime donc que ce contrat est exactement ce qu'il se proposait d'être, c'est-à-dire un contrat valide obligeant les parties, et voulu tel par ces dernières. La défenderesse a ensuite prétendu que le contrat ne pouvait être exécuté en raison du bouleversement de la situation contractuelle. A mon sens, la théorie de la modification de la situation contractuelle ne peut s'appliquer qu'à un contrat dont l'exécution à la lettre, dans des conditions tout à fait différentes de celles en fonction desquelles il a été conclu, entraî-nerait par même une modification complète et radicale des engagements initiaux. Une difficulté importante, un inconvénient ou une perte substan-tielle n'entraînent pas l'application de cette théorie, à moins qu'il ne s'ensuive une modification radicale des obligations. La défenderesse a prétendu qu'en l'absence de faute de sa part, et vu les circonstances indépendantes de sa volonté dont la Banque avait eu connais-sance, elle était dans l'impossibilité d'obtenir, pour la construction de la clinique, un prix ferme de contrat n'excédant pas $655,000, et que, puisque cette condition n'était pas remplie et que la situation contractuelle s'en trouvait modifiée, le contrat ne pouvait être exécuté. A mon avis, c'est un principe fondamental qu'un contrat ne peut être résilié par la survenance d'un événement, si les parties l'ont prévu et ont pris des dispositions pour y faire face. L'obligation fondamentale découlant du présent contrat était que la Banque devait prêter et la défenderesse emprunter de la Banque la somme de $500,000. Tel que les faits ont été établis et d'après les termes du contrat, la défenderesse n'était pas dans l'impossibilité d'accepter le prêt ni la Banque de l'accorder. Il n'y a donc pas eu modification des circonstances. J'en déduis que la défenderesse a annulé le prêt parce qu'il lui convenait mieux d'accepter un prêt plus avantageux. Bien qu'il soit vrai que les soumissions qu'a d'abord reçues la défende-resse aient été sensiblement supérieures à $655,000, le contrat de construction qu'elle a effectivement passé (Pièce D7) prévoyait néanmoins un coût maximum de $691,000, avec possibilité de réaliser des économies susceptibles de le ramener à $681,000, de sorte qu'il y aurait eu un excédent de $36,000 ou de $26,000. Comme je l'ai déjà mentionné, les parties au contrat
[1970] R.C.É. LA REINE v. GUILDWOOD 319 avaient envisagé la possibilité d'excédents de cet ordre, et disposé en conséquence. C'est pourquoi je pense qu'en l'espèce la théorie de la modification de la situation contractuelle n'est pas applicable. D'autre part, les parties avaient également prévu l'éventualité la défenderesse renoncerait à se prévaloir du prêt. On prévoyait à cet effet la péremption de l'offre ou son annulation par la défenderesse. La clause 3 de l'Annexe «A» à l'offre de crédit prévoyait que si le crédit devenait périmé ou si la défenderesse annulait le prêt, elle devrait alors verser à la Banque, à titre de dommages-intérêts, une prime d'un montant de $9,550, et la compensation prévue par la clause 4 de l'Annexe «A». La défenderesse prétend qu'en demandant une indemnisation pour avoir engagé et immobilisé des fonds, la Banque a outrepassé ses pouvoirs. La défenderesse fonde cet argument sur le fait que les pouvoirs de la -Banque sont limités à ceux qui lui sont expressément conférés par sa loi constitutive. Or cette loi ne prévoit pas de manière expresse l'imposition d'une prime ou d'une compensation; l'avocat de la défenderesse soutient que ce qui n'est pas expressément conféré est implicitement interdit. A l'encontre de cet argument, il faut se rappeler que la Banque possède les pouvoirs qu'impliquent les fins qui lui sont expressément assignées, c'est-à-dire les pouvoirs qu'on peut raisonnablement considérer comme accessoires ou nécessaires à la réalisation de ces fins, ou qui découlent de leur poursuite; notons également que la jurisprudence recommande de n'appliquer la théorie de l'ultra vires qu'avec discernement—(Voir l'affaire A. G. v. Great Eastern Rly.)2 D'après l'article 15 (1) de la Loi sur la Banque d'expansion industrielle, la Banque «peut prêter de l'argent ou garantir des prêts d'argent» à toute personne présentant les qualifications exigées par l'article (et auxquelles répondait la défenderesse). L'article 24 accorde à la Banque les pouvoirs secondaires, y compris ceux de l'alinéa e), de «faire toutes autres choses qui peuvent être nécessaires pour réaliser l'intention et les objets de la présente loi, et non spécifiquement prohibées par cette dernière». Il est clair, d'après l'article 26 de la loi, que la Banque pouvait réaliser des bénéfices sur ses opérations. En affaires, il est de commune prudence, lorsqu'on négocie un prêt commercial important, de passer un contrat pour déterminer les conditions dans lesquelles les fonds seront prêtés. Un tel pouvoir est évidemment implicite-ment dévolu à la Banque, et il me semble que le Parlement a voulu laisser à la Banque le soin de déterminer les conditions de prêt avec l'emprunteur. C'est pourquoi, je ne pense pas qu'en l'espèce on puisse dire que la Banque n'avait pas le pouvoir d'exiger le paiement de la prime et de la compensation. La clause 2 de l'Annexe «A» à l'offre de crédit faite par la Banque pré-voyait que si le crédit n'était pas accepté par la défenderesse, l'offre devien-drait périmée le 30 avril 1966, à moins qu'un sursis ne soit convenu par écrit. Par lettre en date du 26 janvier 1966, la défenderesse a demandé 2 (1880) 5 App. Cas. 473. 92622-10
[1970] R.C.E. LA REINE v. GUILDWOOD 321 le report de la date de péremption au 30 octobre 1966. La Banque a informé la défenderesse par téléphone que la date de péremption avait été reportée au 31 octobre 1966, mais ne lui a pas confirmé par lettre cet avis verbal. Par conséquent, la première question qui se pose est de savoir si, puisque l'on n'avait pas convenu par écrit de reporter la date de péremption, le prêt a été annulé le 30 avril 1966. Un accord par écrit peut comporter plusieurs documents. La défenderesse avait demandé le report de la date dans sa lettre du 26 janvier 1966. De son côté, la Banque avait préparé pour ses propres dossiers (Pièce P8) un mémorandum écrit intitulé «Formulaire 46= Modifications à l'autorisation». La transaction qui nous concerne y est décrite avec précision et la modification y est définie comme le «report de la date de péremption du 30 avril 1966 au 31 octobre 1966. La compensation devant courir à partir du 30 avril 1966». La demande de sursis présentée par la défenderesse a fait l'objet d'une recommandation le 26 janvier 1966, sous la signature de M. Sedgwick, agent de crédit de la Banque, chargé de cette transaction en particulier, et de son supérieur M. Russell. Le report demandé a été autorisé par le directeur général adjoint de la Banque, sous sa signature, le 28 janvier 1966. On n'a pas cherché à prétendre que le directeur général adjoint n'avait pas compétence pour engager la Banque. Ce document fait partie des archives de la Banque et il est à mon avis suffisant pour la lier. Dans le cas d'une contestation il serait fondamental pour la défenderesse d'établir l'existence de ce document, on en exigerait la production par avis à cette fin. Je conclurai donc que le report de la date de péremption a été décidé par écrit, bien que je ne puisse résister à la tentation d'observer qu'on aurait pu éviter des difficultés considérables en donnant simplement confirmation écrite de l'avis téléphonique et qu'il aurait été de bonne pratique commerciale d'agir ainsi. De toute manière, il me semble évident que les parties, par leur comporte-ment, ont écarté l'exigence d'un accord écrit pour reporter la date de péremption. Elles ont considéré que cette date avait été reportée et ont agi en conséquence. La défenderesse a ensuite prétendu que la Banque avait outrepassé ses pouvoirs en lui prêtant de l'argent après qu'elle eut elle-même obtenu à des conditions raisonnables une aide financière d'un établissement de crédit conventionnel. Pour justifier cette thèse, la défenderesse devait affirmer que le prêt ne pouvait véritablement exister tant que les fonds n'avaient pas été matériellement avancés. On opposera simplement à cet argument que Banque avait passé un contrat de prêt avec la défenderesse à un moment celle-ci ne pouvait se procurer des fonds par un autre moyen, et que le contrat était donc valide lorsqu'il a été conclu.3 Ayant passé un contrat qui la liait, la Banque n'était pas dégagée vis-à-vis de la défenderesse de son s Bien qu'on puisse se demander si ce contrat correspond strictement aux termes de l'article 15(2) de la loi, il entre nettement dans le cadre de l'article 24e), placé en regard du préambule de la loi, si l'on envisage la manière dont ce genre de prêts est généralement négocié dans la pratique courante des affaires. 92622-101
119701 R.C.P. LA REINE v. GUILDWOOD 323 obligation de prêt conformément aux conditions de ce contrat, malgré les circonstances, qui ont fait qu'entre-temps la défenderesse ait pu obtenir du crédit d'une source financière conventionnelle. La défenderesse a enfin déclaré que l'obligation de payer la prime et la compensation était abusive et exorbitante, et que l'equity devait l'en libérer. Je ne pense pas qu'on puisse exercer le recours en rescision que recon-naît l'equity à l'égard d'un contrat juste et raisonnable en fonction des circon-stances existant lors de sa passation, pour le seul motif que l'une des parties puisse conclure ailleurs un marché plus avantageux. On a démontré que tous les établissements de prêt importants exigeaient invariablement le paiement d'une prime et d'une compensation pour parer au cas l'emprunteur n'utilise pas le crédit qu'on a mis à sa disposition. Si les fonds sont effectivement utilisés, alors la prime et la compensation sont absorbées dans le paiement normal des intérêts. Il a été démontré que les primes et les compensations exigées par les prêteurs commerciaux conven-tionnels sont légèrement inférieurs à celles que demandait la Banque, mais comme les resources de celle-ci ne sont accessibles qu'aux petites entre-prises qui ne peuvent se procurer des fonds par d'autres moyens, il s'ensuit logiquement que les risques sont plus grands et les indemnités en question proportionnellement plus élevées. Deux des membres du bureau de la défenderesse exploitaient eux-mêmes une entreprise de prêt, et, si je ne m'abuse, on a établi qu'ils exigeaient des indemnités comparables des emprunteurs avec lesquels ils négociaient. L'un des deux autres agents de la défenderesse était avocat et l'autre architecte; tous deux, par leur profession respective, avaient l'habitude de ce genre de trans action. Dans la lettre d'acceptation datée du 26 janvier 1966 et signée par les quatre agents de la défenderesse, il était déclaré qu'ils avaient soigneusement examiné toutes les conditions de l'offre de crédit, en fonction desquelles ils avaient accepté le prêt. Ce n'est que lorsque la défenderesse annonça à la Banque qu'elle avait négocié un prêt à des conditions plus favorables et qu'elle apprit alors que la Banque exigeait le paiement de la prime, de la compensation et des honoraires d'avocat, qu'elle a tenté d'en réduire le montant. En guise de compromis, la défenderesse a proposé de payer à la Banque les sommes qu'elle avait effectivement engager, mais la Banque a refusé d'accepter. A mon avis, et pour les motifs ci-dessus énoncés, aucun des moyens de défense présentés par la défenderesse n'est recevable. Lors du procès, la défenderesse a abandonné les prétentions qu'elle fondait sur l'Unconscionable Transactions Act 4 et l'argument de l'influence illégitime invoqué à l'alinéa Sb) de son exposé de défense. Le jugement sera donc rendu en faveur de l'auteur de l'information, pour la somme de $13,170.77 et les fais de cette action. ' Statutes of Alberta 1964, ch. 99.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.