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T-218-89
Sharon Boechler, exécutrice testamentaire de feu Alexander Boger (demanderesse)
c.
Sa Majesté la Reine (défenderesse)
RÉPERTORIA' ROGER, SUCCESSION C. CANADA (/re /NST.)
Section de première instance, juge en chef adjoint Jerome—Edmonton, 13 septembre et 30 novembre 1990; Ottawa, 16 août 1991.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Gains en capital Disposition relative au transfert libre d'impôt de terres agri- coles accordant un allégement . fiscal aux membres survivants d'une famille en reportant les conséquences . fiscales de la réa- lisation présumée Signification des mots «par dévolution, irrévocablement acquis par l'enfant» à l'art. 70(9) La demande présentée par l'épouse survivante en application de la Family Relief Act empêche-t-elle l'acquisition par l'enfant? Signification des termes «transféré ou transmis lors d'un partage» à l'art. 70(9) Examen de l'arrêt Hillis c. R. de la C.A.F. Examen des définitions de dictionnaires Les notions et la terminologie du droit des successions et du droit des biens immobiliers aident-elles à interpréter la Loi? La vente de terres par l'exécutrice testamentaire signifie-t-elle qu'il n'y a pas eu transfert aux enfants du défunt? Faut-il un acte de cession en bonne et due forme?
Impôt sur le revenu Pratique Conséquences de la déli- vrance du certificat de décharge à l'exécutrice testamentaire de la succession L'exécutrice testamentaire est déchargée de son obligation personnelle en vertu de l'art. 159(3) Elle demeure responsable à titre de représentante personnelle La succession n'est pas libérée de son obligation fiscale.
Par suite du décès d'Alexander Boger, un fermier, en mars 1979, le ministre du Revenu national a établi un avis de nou- velle cotisation refusant, conformément au paragraphe 70(9) de la Loi de l'impôt sur le revenu, le transfert libre d'impôt de terres agricoles et de biens amortissables légués par testament à ses enfants et utilisés par le contribuable, immédiatement avant son décès, dans le cadre de l'exploitation d'une entre- prise agricole. En qualité d'exécutrice testamentaire de la suc cession de son père, la demanderesse en a appelé de la décision de la Cour canadienne de l'impôt confirmant la nouvelle coti- sation. Aux termes du testament, l'épouse du défunt a hérité d'un domaine viager sur le terrain bâti et ses quatre enfants, d'un quart du reliquat chacun. En 1979, l'épouse a présenté une demande sous le régime de la Family Relief Act de l'Al- berta afin d'obtenir une part plus importante de la succession. En août 1981, la Cour du Banc de la Reine a rendu une ordon- nance portant remise à l'épouse d'espèces et d'une partie du matériel agricole; en outre, des fonds ont été répartis entre les enfants. Par suite d'une réunion entre les comptables de la suc cession et Revenu Canada en février 1983, celui-ci a établi une
nouvelle cotisation à l'égard de la déclaration de revenus défi- nitive du contribuable pour 1979, appliquant un transfert libre d'impôt au conjoint dans le cas du terrain bâti, mais refusant le transfert libre d'impôt quant au reste des terres agricoles et quant au matériel agricole. En février 1987, le ministre a déli- vré un certificat de décharge, prenant effet à la date du décès, qui attestait le règlement de toutes les sommes dues par la suc cession. La demanderesse a soutenu que les droits du contri- buable sur les biens avaient été transférés aux bénéficiaires ou irrévocablement acquis par eux conformément au testament immédiatement avant son décès ou, subsidiairement, dans le délai fixé aux paragraphes 70(6) et 70(9). Le transfert libre d'impôt aux enfants n'est demandé qu'en ce qui concerne les biens qui leur ont été transmis par testament, suivant l'ordon- nance de la Cour du Banc de la Reine. Le transfert libre d'im- pôt à l'épouse, prévu au paragraphe 70(6), n'est pas en litige.
Trois questions principales devaient être tranchées: (1) Quel est le sens des mots «par dévolution, irrévocablement acquis par l'enfant» du paragraphe 70(9) et s'appliquent-ils en l'es- pèce? La demande présentée par l'épouse survivante en appli cation de la Family Relief Act de l'Alberta empêche-t-elle que les biens soient «par dévolution, irrévocablement acquis par l'enfant»? (2) Le reste des terres et des biens amortissables a-t- il été, au moment du décès du contribuable ou postérieurement, et par suite de ce décès, «transféré ou transmis lors d'un par- tage» aux enfants du contribuable? (3) Les certificats de décharge délivrés par Revenu Canada l'empêchent-ils d'affir- mer que le défunt, l'exécutrice testamentaire/fiduciaire ou les bénéficiaires sont redevables d'impôts?
Jugement: l'action devrait être accueillie quant à la première et à la deuxième questions et rejetée quant à la troisième.
(1) Le paragraphe 70(9), l'une des dispositions relatives au transfert libre d'impôt de la Loi de l'impôt sur le revenu, est une exception au paragraphe 70(5), le contribuable étant réputé avoir disposé d'un bien-fonds immédiatement avant son décès et avoir réalisé tous les gains ou pertes en capital; il permet le transfert libre d'impôt des terres agricoles ou des biens amor- tissables utilisés dans le cadre de l'exploitation d'une entre- prise agricole s'ils sont «transférés ou transmis lors d'un par- tage» à l'enfant, au moment du décès du défunt ou postérieurement, et par suite de ce décès, et qu'il puisse être établi, dans les quinze mois qui suivent le décès du défunt, qu'ils ont été «par dévolution, irrévocablement acquis» par l'enfant au plus tard dans les quinze mois suivant le décès. Pour interpréter le paragraphe 70(9), il est utile d'examiner les définitions que donnent les dictionnaires de termes comme droit dévolu, révocable, titre révocable, irrévocable. Les notions et la terminologie du droit des successions et du droit des biens immobiliers aident à interpréter la Loi de l'impôt sur le revenu; il faut tenir compte du sens qui y est donné à ces termes. En droit des biens immobiliers, une distinction a été établie entre les droits «dévolus» et les droits «éventuels». Deux conditions doivent être remplies pour qu'un droit soit dévolu: (i) la personne qui y a droit doit être déterminée; (ii) elle doit être prête à en prendre possession immédiatement et n'en être empêchée que par l'existence d'un droit antérieur. Un «droit éventuel» est un droit qui n'attribue pas de droit de
jouissance avant qu'un événement futur ne se réalise, c'est-à- dire l'accomplissement d'une condition suspensive. Un droit dévolu est susceptible d'être résilié ou «révocable» s'il est l'objet d'une condition résolutoire, notamment en cas de dévo- lution d'héritage. Pour qu'un droit soit dévolu «irrévocable- ment», il ne doit pas être l'objet d'une telle condition. En l'es- pèce, le droit sur les biens a incontestablement été dévolu: il n'y avait aucune condition suspensive qui devait se réaliser avant que la libéralité prît effet; les enfants, soit les ayants droit, étaient déterminés; ils étaient prêts à en prendre posses sion immédiatement, puisqu'il n'y avait aucun autre droit anté- rieur existant. Le droit dévolu aux enfants n'était pas non plus révocable car il n'était pas l'objet d'une condition résolutoire contenue dans le testament. Cette conclusion est conforme à la décision du juge suppléant Clement dans l'arrêt Hillis c. R., dans lequel la Cour d'appel fédérale devait interpréter le para- graphe 70(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu, la disposition relative au transfert libre d'impôt à l'épouse, et se prononcer sur l'effet d'une ordonnance rendue en vertu de la Dependants' Relief Act de la Saskatchewan, augmentant la part de la veuve dans la succession du défunt. Si, comme l'ont décidé le juge suppléant Clement et le juge Pratte, J.C.A., dans Hillis, d'autres biens reçus en vertu d'une ordonnance sous le régime de la loi sur le secours aux personnes à charge n'étaient pas dévolus avant la date effective de l'ordonnance, il s'ensuit qu'en l'espèce, les enfants n'ont pas non plus été dépossédés de leurs droits sur ceux-ci avant cette date. En dépit du fait que leurs droits aient été, de fait, réduits par l'ordonnance, ils avaient néanmoins été, par dévolution, irrévocablement acquis conformément au paragraphe 70(9), du moins dans la mesure ils n'étaient pas visés par l'ordonnance.
(2) Il semble que la Cour fédérale ait, dans certaines déci- sions, reconnu qu'un acte de cession en bonne et due forme n'était peut-être pas nécessaire pour qu'il y ait «transfert» ou «transmission lors d'un partage». Les définitions que donnent les dictionnaires sont assez larges pour viser la libéralité faite par testament. En l'occurrence, le testament valide fait par le contribuable, transmettant ses biens à son épouse et à ses enfants, est un «transfert» suffisant pour l'application du para- graphe 70(9). Le fait que le «reliquat» des biens a été légué aux enfants n'a pas modifié la nature des biens susceptibles d'être l'objet d'un transfert libre d'impôt. Il n'est pas nécessaire que soit fait un legs à titre particulier de chaque partie des terres agricoles et des biens amortissables pour que puisse s'opérer le «transfert libre d'impôt des biens agricoles», l'objet du para- graphe 70(9) étant d'accorder une exemption fiscale au moment du transfert de ces biens d'une génération à la sui- vante. C'était sur les instructions et avec l'assentiment des enfants, propriétaires, que la fiduciaire a vendu la terre à un tiers. Le fait que les biens ont été vendus dans le délai de quinze mois n'est pas opposable à la demanderesse. Le para- graphe 70(9) ne dit pas que les biens doivent rester entre les mains des enfants pour que le transfert libre d'impôt s'ap- plique. Dans la mesure les biens sont transférés aux bénéfi- ciaires, la succession peut demander le transfert libre d'impôt prévu au paragraphe 70(9).
(3) Le fait qu'un certificat de décharge a été délivré à un exécuteur testamentaire de la succession, «représentant person-
nel», ne libère pas la succession de son obligation fiscale. Le paragraphe 159(3) dispose que le représentant personnel est personnellement responsable des impôts, intérêts et pénalités non payés s'il n'obtient pas un certificat avant de répartir les biens placés sous son contrôle. La succession n'est pas libérée de son obligation fiscale. Autrement dit, le représentant per sonnel reste redevable à ce titre, mais il est déchargé de son obligation personnelle imposée par le paragraphe 159(3).
LOIS ET RÈGLEMENTS
Dependants' Relief Act, R.S.S. 1978, chap. D-25, art. 14. Devolution of Real Property Act, R.S.A. 1980, chap. D-34, art. 3, 9, 10(1).
Family Relief Act, R.S.A. 1980, chap. F-2, art. 5(1),(4), 11(1), 17(1), 18(1).
Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 70(5),(6),(9) (édicté par S.C. 1973-74, chap. 14, art. 19; 1976-77, chap. 4, art. 27(4)), 159(2),(3).
Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès, S.C. 1958, chap. 29, art. 7(1).
JURISPRUDENCE
DECISIONS APPLIQUÉES:
Hillis c. R., [1982] CTC 293; (1982), 82 DTC 6249 (C.F. I 1 e inst.); Hillis c. R., [1983] 6 W.W.R. 577; [1983] CTC 348; (1983), 83 DTC 5365; 15 E.T.R. 156; 49 N.R. 1 (C.A.F.); Tory Estate c. Le ministre du Revenu national, [1973] C.F. 820; [1973] CTC 434; (1973), 73 DTC 5354 (C.A.); appel rejeté sub nom. Montreal Trust Co. c. M.R.N., [1976] 1 R.C.S. x; [1976] CTC 415; (1976), 76 DTC 6312; 9 N.R. 394; Fasken, David v. Minister of National Revenue, [1948] R.C.E. 580; [1948] C.T.C. 265; (1948), 49 DTC 491.
DECISIONS EXAMINÉES:
La succession Dontigny c. La Reine, [1974] 1 C.F. 418; [1974] CTC 532; (1974), 74 DTC 6437 (C.A.); Lucky, M c MRN., [1972] CTC 2412 (C.R.I.); Succession Green- wood c. La Reine (1990), 90 DTC 6690; 39 F.T.R. 234 (C.F. Ire inst.).
DÉCISIONS CITÉES:
Succession Willis c. M.R.N. (1968), 68 DTC 204 (C.A.I.); Succession Hrycej (A) c MRN, [1984] CTC 2115; (1984), 84 DTC 1089; 17 E.T.R. 183 (C.C.I.); Gathercole v. Smith (1880-81), 17 Ch.D. 1 (C.A.); Succession Boger (A.) c. M.R.N., [1989] 1 C.T.C. 2110; (1988), 89 DTC 15 (C.C.I.).
DOCTRINE
Anger and Honsberger: The Law of Real Property, Vol. 1, 2nd ed., by Oosterhoff, A. H. et Rayner, W. B., Aurora (Ont.): Canada Law Book Inc., 1985.
Black's Law Dictionary, 5th ed., St. Paul, Minn.: West Publishing Co., 1979, «vested interest», «defeasible», «defeasible tille», «indefeasible», «transfer».
Feeney, Thomas G. The Canadian Law of Wills, Vol. 2, Toronto: Butterworths, 1987.
Jowitt 's Dictionary of English Law, vol. 1, 2nd ed., Lon- don: Sweet & Maxwell Ltd., 1977, «indefeasible».
Megarry, Robert and Wade, H.W.R. The Law of Real Pro perty, 5th ed., London: Stevens & Sons Ltd., 1984.
Osborn's Concise Law Dictionary, 6th ed., by John Burke, London: Sweet & Maxwell, 1976, «defeasible», «distribution».
Shorter Oxford English Dictionary, vol. 1, 3rd ed., Oxford: Clarendon Press, 1969, «indefeasible», «trans- fer», «distributed».
AVOCATS:
David P. Jones, c. r., et Anne S. de Villars pour la demanderesse.
J.E. Fulcher et Naomi R. Goldstein pour la défenderesse.
PROCUREURS:
de Villars Jones, Edmonton, pour la demande- resse.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT JEROME: J'ai entendu cette affaire à Edmonton (Alberta), le 13 septembre 1990. L'exécutrice testamentaire de la succession de feu Alexander Boger (la «demanderesse») en appelle de la décision de la Cour canadienne de l'impôt, en date du 3 novembre 1988, qui a rejeté l'appel interjeté par la demanderesse de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (le «ministre»), en date du 12 janvier 1984, l'égard de la déclaration de revenus définitive d'Alexander Boger (le «contribua- ble»), produite pour l'année 1979. La nouvelle cotisa- tion refusait le transfert libre d'impôt, en application du paragraphe 70(9) de la Loi de l'impôt sur le revenu [S.C. 1970-71-72, chap. 63 (édicté par S.C. 1973-74, chap. 14, art. 19; 1976-77, chap. 4, art. 27(4))] (la «Loi»), de terres agricoles et de biens amortissables légués par testament aux enfants du contribuable, parce que ces biens n'avaient pas été «transférés ou transmis lors d'un partage» aux enfants et qu'il n'avait pas été établi qu'ils avaient été, «par dévolution, irrévocablement acquis» dans le délai fixé au paragraphe 70(9). À la fin de l'audience,
j'ai mis l'affaire en délibéré en attendant les mémoires des avocats.
FAITS
Les faits ne sont pas contestés. Le résumé qui suit est tiré de l'«exposé conjoint partiel des faits». Le contribuable, un fermier, est décédé le 10 mars 1979 en laissant un testament à son épouse, Olga Boger (l' «épouse») et à ses quatre filles (les «enfants»), dont une mineure. Dans son testament, le contribua- ble a désigné sa fille, Sharon Boechler, comme exé- cutrice testamentaire et fiduciaire (la «demande- resse»). Il a disposé de ses biens de la manière suivante: en faveur de la veuve domaine viager sur le terrain S.W. 1/4 14-38-13-W4 (le «terrain bâti»); en faveur des enfants 1/4 du reliquat chacun. Des lettres d'homologation ont été délivrées à la deman- deresse le 9 juillet 1979. La succession du contribua- ble avait une valeur totale de 446 180,42 $ et consis- tait dans les biens-fonds et les biens agricoles énumérés ci-après, ainsi que dans des espèces, des actions et des biens personnels:
Fonds de terre (valeur homologuée)
S.W. 1/4 14-38-13-W4 («terrain bâti») 50 000,00 $
N.E. 1/4 15-38-13-W4 47 250,00 $
N.W. 1/4 15-38-13-W4 48 750,00 $
S.W. 1/4 17-38-13-W4 45 700,00 $
S.E. 1/4 18-38-13-W4 47 300,00 $
S. 1/2 7-38-13-W4 54 300,00 $
293 300,00 $
Biens agricoles
Matériel agricole 83 483,00 $
Bétail 18 490,75 $
Grains 860,50 $ 102 834,25 $
Immédiatement avant son décès, le contribuable utili- sait les terres et les biens agricoles dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise agricole.
Une déclaration de revenus définitive, établie à la date du décès, a été produite et Revenu Canada l'a reçue le 30 avril 1980. On y demandait un transfert libre d'impôt à l'épouse du terrain bâti, conformé- ment au paragraphe 70(6), et un transfert libre d'im- pôt des biens agricoles, soit les biens-fonds et le matériel agricole, conformément au paragraphe 70(9). Par conséquent, aucun gain (ni perte) en capi tal n'a été déclaré à l'égard de ce qui aurait autrement
constitué une disposition présumée de ces biens en application du paragraphe 70(5).
En 1979, l'épouse a demandé, en conformité avec la Family Relief Act, R.S.A. 1970, chap. 134, modi- fiée, qu'une part plus importante de la succession lui soit dévolue. Le ministre a, en date du 14 octobre 1980, délivré un certificat de décharge prenant effet à la date du décès. Toutefois, aucune répartition n'a eu lieu avant la décision définitive sur la demande de l'épouse, soit vingt-neuf mois après la, date du décès. Par ordonnance de la Cour, datée du 4 août 1981 (l' «ordonnance»), l'épouse a reçu ce qui suit:
a) 75 000 $ en espèces, en sus des intérêts, en novembre 1981;
b) le domaine en fief simple absolu sur le terrain bâti (valeur homologuée de 50 000 $), qui lui a été transféré le 6 janvier 1982;
c) une partie du matériel agricole, qui lui a été remise immé- diatement:
(i) camionnette Chevrolet 1967, 1/2 tonne, avec caravane (valeur homologuée de 4 000 $);
(ii) six silos à grains sur le terrain S. 1/2 15-38-13-W4 (valeur homologuée de 4 200 $).
En septembre 1979, le matériel agricole restant dans la succession du contribuable a été vendu aux enchères. En avril 1981, la succession a été transmise à la demanderesse, en qualité d'exécutrice testamen- taire, et elle est devenue propriétaire enregistrée des biens. En août 1982, trois quarts de section de terrain ont été vendus avec l'assentiment des bénéficiaires majeurs et du curateur public de l'Alberta pour le compte de la mineure. Des sommes ont été versées, sur la succession, à l'épouse, conformément à l'or- donnance, et des fonds répartis entre les enfants comme suit:
Septembre 1981 26 000,00 $ chacun 104 000,00 $
Décembre 1981 2 500,00 $ chacun 10 000,00 $
Mai 1982 2 000,00 $ chacun 8 000,00 $
Septembre 1982 47 000,00 $ chacun 188 000,00 $
En octobre 1982, après que les comptables de la succession eurent fait part de leur inquiétude au sujet de la déclaration de revenus définitive pour l'année 1979, et compte tenu de la décision Hillis c. R., [1982] CTC 293 (C.F. Ire inst.), les services d'avo- cats spécialistes des successions ont été retenus et une réunion avec Revenu Canada a été demandée en
février 1983. Par suite de celle-ci, la déclaration défi- nitive du contribuable pour 1979 a fait l'objet d'une nouvelle cotisation:
a) un transfert libre d'impôt au conjoint a été appliqué dans le cas du terrain bâti;
b) le transfert libre d'impôt quant au reste des terres agricoles a été refusé parce que le contribuable a été réputé avoir disposé du reste des biens-fonds à leur juste valeur mar- chande immédiatement avant son décès et des gains en capital ont été déclarés;
c) le transfert libre d'impôt à l'égard du matériel agricole a été refusé. Le produit de la vente aux enchères a été inclus dans le calcul du revenu du contribuable en 1979;
d) le revenu en intérêts a fait l'objet de révisions.
Le ministre a en outre admis que les revenus gagnés durant les années d'imposition 1980 et 1981 de la succession doivent être imposés entre les mains de la fiduciaire parce que l'action engagée par l'épouse en application de la Family Relief Act était encore pen- dante au cours de ces années-là. Les revenus et les gains ou pertes en capital, le cas échéant, pour l'an- née d'imposition 1982 de la succession et pour les suivantes, devaient être répartis entre les bénéficiaires du reliquat.
L'avis de nouvelle cotisation faisant état de ces modifications a été mis à la poste le 19 août 1983. Aucune opposition n'a été produite, mais le 12 jan- vier 1984, le ministre a délivré un autre avis de nou- velle cotisation relativement à la déclaration de reve- nus définitive. La demanderesse a produit un avis d'opposition le 14 mars 1984. Le 10 février 1987, le ministre a délivré un certificat de décharge, prenant effet à la date du décès, dont la teneur suit:
[TRADUCTION] Nous attestons que toutes les sommes dues par le contribuable désigné ci-dessous [feu Alexander Boger] et dont vous pouvez vraisemblablement devenir redevable en qualité de représentant personnel du contribuable pour la période se terminant à la date de son décès et pour toute année d'imposi- tion précédente en application des dispositions de [diverses lois dont la Loi de l'impôt sur le revenu] ont été payées ou qu'une garantie a été acceptée par le ministre.
La demanderesse déclare que, en conformité avec les dispositions du testament du contribuable, les droits du contribuable sur les biens ont été transférés aux bénéficiaires ou irrévocablement acquis par eux conformément au testament, au moment même de son décès ou, subsidiairement, dans le délai fixé aux paragraphes 70(6) et 70(9). La demanderesse demande donc ce qui suit:
[TRADUCTION] a) Un jugement déclaratoire reconnaissant au défunt le droit aux transferts libres d'impôt prévus aux paragraphes 70(6) et 70(9) de la Loi pour ce qui est de cal- culer le produit de la disposition réputée avoir eu lieu au décès d'Alexander Boger;
b) Un jugement déclaratoire interdisant à la défenderesse de percevoir d'autres impôts parce qu'elle a déjà délivré deux certificats de décharge prenant effet à la date du décès;
c) Tous les dépens de cette action.
En l'espèce, le transfert libre d'impôt aux enfants n'est demandé qu'en ce qui concerne les biens qui leur ont été transmis par testament, tel qu'il a été modifié par l'ordonnance de la Cour du Banc de la Reine.
QUESTIONS EN LITIGE
L'objet de cette action est l'interprétation qu'il convient de donner à la disposition relative au trans- fert libre d'impôt de biens agricoles que contient le paragraphe 70(9) de la Loi de l'impôt sur le revenu et l'effet des certificats de décharge délivrés par le ministre en conformité avec le paragraphe 159(2) de la Loi. Le transfert libre d'impôt à l'épouse, prévu au paragraphe 70(6), n'est pas en litige. Voici donc les questions principales et secondaires qu'il faut tran- cher:
1. Quel est le sens des mots «par dévolution, irrévocablement acquis par l'enfant» du paragraphe 70(9)? La demande présentée par l'épouse survivante en application de la Family Relief Act empêche-t-elle que les biens soient «par dévolution, irrévocablement acquis par l'enfant»?
2. Quel est le sens des mots «transféré ou transmis lors d'un partage» du paragraphe 70(9)? L'exécutrice testamentaire, qui est aussi fiduciaire de l'actif du défunt, doit-elle accomplir un acte pour transférer ou transmettre les biens agricoles à l'enfant du défunt qui est bénéficiaire en vertu du testament? Le transfert libre d'impôt est-il possible quand l'exécutrice testamentaire, qui est aussi fiduciaire, vend par la suite les biens agricoles directement à un tiers acquéreur?
3. Le ministre est-il empêché d'affirmer que le défunt, l'exé- cutrice testamentaire, qui est aussi fiduciaire, ou les béné- ficiaires sont redevables des impôts une fois qu'un certifi- cat de décharge a été délivré?
DISPOSITIONS DE LA LOI
Les dispositions pertinentes de la Loi de l'impôt sur le revenu sont le paragraphe 70(9) relatif aux transferts libres d'impôt de biens agricoles et les paragraphes 159(2) et (3) portant sur les certificats de décharge:
70. ...
(9) Lorsqu'un fonds de terre d'un contribuable qui est situé au Canada ou un bien amortissable d'une catégorie prescrite d'un contribuable qui est situé au Canada, et auquel les alinéas (5)a) et c) ou les alinéas (5)b) et d), selon le cas, s'applique- raient par ailleurs, était utilisé, immédiatement avant le décès du contribuable, par ce dernier, son conjoint ou l'un de ses enfants dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise agricole et que le bien a, au moment du décès du contribuable ou posté- rieurement, et par suite de ce décès, été transféré ou transmis lors d'un partage à un enfant du contribuable qui résidait au Canada immédiatement avant le décès du contribuable et qu'il peut être établi, dans les 15 mois qui suivent le décès du contri- buable ou dans le délai plus long qui est raisonnable dans les circonstances, que ce bien a été, par dévolution, irrévocable- ment acquis par l'enfant au plus tard dans les 15 mois suivant le décès du contribuable, les règles suivantes s'appliquent: ...
159. ...
(2) Avant de procéder à la répartition de tous biens placés sous son contrôle, tout mandataire, liquidateur, administrateur, exécuteur testamentaire ou autre personne semblable, à l'ex- clusion d'un syndic de faillite, doit obtenir du Ministre un cer- tificat attestant que les impôts, intérêts ou pénalités qui ont été fixés en vertu de la présente loi et qui sont imputables ou payables sur les biens, ont été acquittés ou que la garantie rela tive à leur acquittement a, conformément aux dispositions du paragraphe 220(4), été acceptée par le Ministre.
(3) Toute répartition de biens faite sans le certificat requis par le paragraphe (2) rend la personne tenue d'obtenir ce certi- ficat personnellement responsable des impôts, intérêts et péna- lités non payés.
Les autres dispositions pertinentes de la loi sont, notamment, les paragraphes 5(1), 5(4), 11(l), 17(1) et 18(1) de la Family Relief Act, R.S.A. 1980, chap. F-2 et les articles 3, 9 et 10 de la Devolution of Real Pro perty Act, R.S.A. 1980, chap. D-34, modifiées:
Family Relief Act
[TRADUCTION] 5(1) Dans l'ordonnance prévoyant des disposi tions pour l'entretien d'une personne à charge, le juge peut fixer les conditions et les restrictions qu'il estime convenables.
(4) S'il ordonne le transfert ou la cession de biens, le juge peut prendre les dispositions suivantes:
a) donner toutes les instructions nécessaires pour l'exécution du transfert ou de la cession par l'exécuteur testamentaire ou l'administrateur ou par les autres personnes qu'il désigne;
b) prononcer une ordonnance assignant les biens.
11(1) Lorsqu'une ordonnance est rendue en application de la présente loi, l'ordonnance prend effet à compter du décès du
défunt et le testament, le cas échéant, prend effet à compter de cette date, comme s'il avait été fait, compte tenu des modifica tions nécessaires, dans le but de donner effet à l'ordonnance.
17(1) Avant l'expiration d'un délai de six mois suivant la date à laquelle les lettres d'homologation du testament ou les lettres d'administration auront été accordées, l'exécuteur testamen- taire, l'administrateur ou le fiduciaire ne doit pas assigner une part de la succession à un bénéficiaire sans l'assentiment de toutes les personnes à charge du défunt, ou sans l'autorisation contenue dans une ordonnance d'un juge rendue sur demande sommaire.
18(1) Si l'avis de la présentation d'une demande est donné à l'exécuteur testamentaire, à l'administrateur ou au fiduciaire, la succession est assujettie à toute ordonnance qui peut être rendue et l'exécuteur testamentaire, l'administrateur ou le fidu- ciaire ne doit pas faire la distribution de l'actif, sauf en confor- mité avec l'ordonnance.
Devolution of Real Property Act
[TRADUCTION] 3 Sous réserve des pouvoirs, droits, devoirs et obligations mentionnés dans la présente Loi, le représentant personnel du défunt détient les biens réels en qualité de fidu- ciaire des personnes qui disposent d'un droit bénéficiaire sur lesdits biens et ces personnes ont le même droit de demander le transfert des biens réels que celui que possèdent les personnes ayant un droit bénéficiaire sur des biens personnels de deman- der le transfert de ces derniers.
9 Le représentant personnel peut vendre les biens réels afin non seulement de payer les dettes, mais aussi de distribuer l'ac- tif aux personnes qui disposent d'un droit bénéficiaire sur celui-ci, peu importe qu'il y ait ou non des dettes, et il n'est pas nécessaire que les personnes qui disposent d'un droit béné- ficiaire consentent à cette vente, excepté si elle est effectuée dans le seul but de distribuer l'actif.
10(1) Sous réserve de la présente Loi, aucune vente de biens réels faite dans le seul but de distribuer l'actif n'est opposable aux personnes qui disposent d'un droit bénéficiaire, sauf si elles y consentent.
Le paragraphe 70(9) est l'une des dispositions rela tives au transfert libre d'impôt que contient la Loi de l'impôt sur le revenu. C'est une exception au para- graphe 70(5) selon lequel le contribuable est réputé avoir disposé d'un bien-fonds immédiatement avant son décès et avoir réalisé tous les gains ou pertes en capital. Le transfert libre d'impôt accorde un allége- ment fiscal aux membres survivants d'une famille en reportant les répercussions fiscales de la réalisation présumée jusqu'à ce que le bénéficiaire dispose des biens. Le paragraphe 70(9) permet donc le transfert
libre d'impôt des terres agricoles ou des biens amor- tissables utilisés dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise agricole s'ils sont «transférés ou transmis lors d'un partage» à l'enfant, au moment du décès du défunt ou postérieurement, et par suite de ce décès, et qu'il puisse être établi, dans les 15 mois qui suivent le décès du défunt [ou dans le délai plus long qui est raisonnable], qu'ils ont été «par dévolution, irrévoca- blement acquis» par l'enfant au plus tard dans les 15 mois suivant le décès.
Première question: Les biens ont-ils été, par dévolu- tion, irrévocablement acquis par les enfants? Quel est le sens des mots «par dévolution, irrévoca- blement acquis par l'enfant» du paragraphe 70(9)? La demande présentée par l'épouse survivante en application de la Family Relief Act empêche-t-elle que les biens soient «par dévolution, irrévoca- blement acquis par l'enfant»?
À l'appui de leur thèse respective, les parties se sont toutes deux référées à la décision de la Cour d'appel fédérale Hillis c. R., [1983] 6 W.W.R. 577. Dans l'arrêt Hillis, la Cour devait interpréter le para- graphe 70(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu, la disposition relative au transfert libre d'impôt à l'épouse, et se prononcer sur l'effet d'une ordon- nance rendue en vertu de la Dependants' Relief Act de la Saskatchewan, R.S.S. 1978, chap. D-25, aug- mentant la part de la veuve dans la succession du défunt. Les mots clefs du paragraphe 70(6) sont sem- blables à ceux du paragraphe 70(9); il y a donc lieu d'étudier en détail l'arrêt Hillis. Les trois juges for- mant la Cour d'appel ont toutefois adopté des points de vue très divergents sur la question soumise et ont donné des motifs tout à fait distincts. Par voie de con- séquence, quoique l'arrêt Hillis soit très pertinent, les solutions préconisées par la Cour d'appel sont un peu ambiguës.
Dans l'arrêt Hillis, le contribuable était décédé intestat en Saskatchewan. Selon la loi provinciale sur les successions, sa veuve et ses deux fils ont acquis des droits sur la succession. Longtemps après l'expi- ration du délai de 15 mois fixé au paragraphe 70(6), le fils du contribuable a signé un acte de renonciation A la succession et la veuve a obtenu une ordonnance
en vertu de la Dependants' Relief Act lui attribuant tout l'actif. Conformément à l'article 14 de cette Loi, l'ordonnance était présumée rétroactive à la date du décès du contribuable. Les administrateurs ont pro- duit la déclaration de revenus définitive et demandé le transfert libre d'impôt à l'épouse en application du paragraphe 70(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard de tout l'actif. Le ministre a établi une nou- velle cotisation en considérant qu'aucune partie de l'actif n'était l'objet du transfert libre d'impôt.
Le juge suppléant Clement et le juge Pratte, J.C.A., ont décidé que la loi provinciale n'avait pas d'effet quant à l'impôt fédéral. Par conséquent, l'article 14 de la Dependants' Relief Act ne pouvait pas changer le fait que le délai de 15 mois était expiré et que les biens n'avaient pas été acquis dans le délai fixé au paragraphe 70(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu. A la page 598, le juge suppléant Clement fait observer:
Lorsqu'une ordonnance d'exonération est rendue, elle a pour effet d'influer sur les perspectives ou sur la dévolution décou- lant d'une disposition testamentaire ... Ce texte [article 14] ne peut d'aucune façon introduire un testament présumé dans une autre loi ni agir dans un but différent.
Il a conclu que la loi sur les successions entraînait néanmoins une dévolution irrévocable à la veuve d'une somme de 10 000 $ et d'un tiers du reliquat et il a permis le transfert libre d'impôt à l'égard de cette somme. Il a fait le raisonnement suivant, aux pages 596 à 598:
Sous réserve de ce que j'aurai à dire plus tard, la question de la dévolution irrévocable doit être réglée par une loi provin- ciale. La Intestate Succession Act est nécessairement le point du départ ... A mon avis, les dispositions prennent effet au décès de l'intestat et entraînent une dévolution irrévocable des droits prescrits en faveur du bénéficiaire. Les administrateurs doivent donner effet à cette dévolution, bien que sous réserve de la disposition, par le bénéficiaire, des droits dévolus. Dans cette optique, la dévolution des droits ne dépend pas d'une ordonnance de la Cour accordant l'administration de la succes sion de l'intestat: elle se produit en vertu d'une disposition légale impérative entrant en vigueur au moment du décès de l'intestat.
En outre, on peut relever qu'il n'était pas certain que, dans le délai de 15 mois prescrit, une partie de la succession, au-delà de celle qui avait déjà été dévolue à la veuve par la Intestate Succession Act, serait assujettie à une ordonnance d'exonéra- tion, pas plus qu'on ne savait quelles seraient les conditions que la Cour pourrait imposer. [Non souligné dans le texte ori ginal.]
À la page 599, il a reconnu que la renonciation du fils et l'ordonnance avaient «pour effet un accroissement du droit du conjoint dans la valeur nette de la succes sion qui pouvait exister à l'époque», mais il a décidé qu'ils s'étaient produits «à un moment son droit à une exonération fiscale s'était déjà cristallisé en vertu des dispositions de la Intestate Succession Act». Il a donc conclu que l'accroissement n'avait pas été, par dévolution, irrévocablement acquis par le conjoint dans le délai prescrit de 15 mois.
Le juge Pratte, J.C.A., a rejeté l'appel. Il a dit lui aussi que le droit aux deux tiers du reliquat accordé par l'ordonnance n'avait pas été, par dévolution, irré- vocablement acquis dans le délai, mais il a ajouté qu'aucune partie de la succession ne pouvait être transférée libre d'impôt. Selon son raisonnement, comme l'administration de la succession n'avait pas été achevée avant l'expiration du délai, la veuve n'avait aucun droit particulier à un des biens, mais seulement le droit de recevoir des sommes d'argent. A son avis la page 584], «les droits de madame Hillis en vertu de la Intestate Succession Act por- taient uniquement sur une somme d'argent et sur une part du reliquat de la succession». Il a examiné la question la page 583]: «Quand est-ce que les biens ont été, par dévolution, irrévocablement acquis par madame Hillis?», puis a fait remarquer, à la page 583:
À mon avis, lorsque les renonciations ont été signées et que l'ordonnance a été rendue, étant donné que les effets des unes et de l'autre, en dépit de leur rétroactivité, n'existaient pas tant que les renonciations n'avaient pas été signées et que l'ordon- nance de la Cour n'avait pas été rendue. Ce n'est que lorsque cela a été fait que madame Hillis a eu droit à la totalité de la succession de son mari, avec effet rétroactif à la date du décès de ce dernier. Par conséquent, si, comme le prétendent les appelants, les renonciations et l'ordonnance de la Cour avaient eu pour effet de transmettre les biens à madame Hillis, cet effet ne n'est pas produit dans les 15 mois qui ont suivi le décès de M. Hillis.
En revanche, le juge Heald, J.C.A., a été d'avis qu'il ressortait clairement du libellé du paragraphe 70(6) que, à la page 587 «le législateur envisageait que la loi des provinces concernant la disposition de biens lors du décès ou postérieurement, étant une matière relative aux biens et aux droits civils, s'appli- querait de manière à contrôler l'application du para- graphe 70(6)». Il a donc décidé que l'ordonnance ren- due en vertu de l'article 14 de la Dependants' Relief
Act avait pris effet à la date du décès et, à compter de cette date, la page 588] «transmis la totalité de la succession du contribuable décédé à la veuve, trans mission qui est réputée avoir pris effet à partir du décès de ce contribuable». Il avait été établi que le droit du conjoint avait été acquis dans un délai rai- sonnable et, par conséquent, toute la succession fai- sait l'objet d'un transfert libre d'impôt.
Ainsi, dans l'arrêt Hillis, la Cour a permis, en con- formité avec le paragraphe 70(6) de la Loi, en ce qui concerne la succession du contribuable décédé, le transfert libre d'impôt à l'épouse d'une somme de 10 000 $ et d'un tiers du reliquat qui lui avait été transmis en application de la loi sur les successions. Toutefois, le transfert libre d'impôt des autres biens attribués à l'épouse conformément à la loi sur le secours aux personnes à charge n'a pas été autorisé. Il convient de noter qu'en vertu du paragraphe 9(2) de la Dependants' Relief Act de la Saskatchewan, aucune ordonnance en vertu de cette Loi ne pouvait accorder à l'épouse du testateur une allocation infé- rieure à ce que la loi sur les successions lui aurait attribué.
Arguments Première question
La demanderesse soutient que les biens avaient été, «par dévolution, irrévocablement acquis» par les enfants, en dépit de la demande de l'épouse en appli cation de la Family Relief Act. Puisque l'«acquisition par dévolution» est une notion relevant de l'equity, il faut appliquer les principes de l' equity pour en déter- miner le sens. Par conséquent, la demanderesse affirme qu'un droit est «irrévocablement acquis, par dévolution» si la donation ne dépend pas d'une con dition suspensive ou d'une condition résolutoire ou d'un événement futur. Le pouvoir qu'accorde la Family Relief Act de redistribuer les droits bénéfi- ciaires n'est pas pertinent par rapport à la notion d'«acquisition irrévocable par dévolution» car, sui- vant les règles de la common law en matière immobi- lière, un droit acquis par dévolution ne peut être révo- cable que si une condition résolutoire est contenue dans l'acte créant ce droit. La demanderesse soutient que dans le cas contraire, l'existence même d'une loi sur le secours aux personnes à charge ou de tout autre pouvoir attribué par la loi de redistribuer les droits bénéficiaires (telles les lois sur l'expropriation et sur
la taxation municipale qui prévoient la confiscation de biens en cas de défaut de payer les impôts fonciers municipaux) révoquerait le droit acquis par dévolu- tion, qu'une demande soit présentée ou non. Par con- séquent, aucun transfert libre d'impôt ne serait jamais possible pour un contribuable décédé.
La demanderesse affirme que le fait que, dans l'ar- rêt Hillis, le droit de la veuve en vertu de la loi pro- vinciale sur les successions ne pouvait pas être réduit par l'application d'une ordonnance rendue sous le régime de la loi sur le secours aux personnes à charge, n'était pas un facteur déterminant en fonction duquel la Cour a décidé que ce droit avait été, par dévolution, irrévocablement acquis. La Dependants' Relief Act de la Saskatchewan est une loi extraordi- naire en ce sens que les lois correspondantes des autres provinces ne contiennent pas de disposition semblable selon laquelle la part de la veuve est irré- ductible. Par conséquent, si l'irréductibilité était le critère selon lequel est déterminée l'irrévocabilité, alors les transferts libres d'impôt prévus dans la Loi de l'impôt sur le revenu ne seraient possibles que pour les veuves de la Saskatchewan. De la même façon, parce que les lois provinciales sur le secours aux personnes à charge n'attribuent pas une part irré- ductible aux enfants, aucun transfert libre d'impôt aux enfants ne serait possible.
Toutefois, si la loi sur le secours aux personnes à charge est réputée avoir le même effet qu'une condi tion résolutoire, la demanderesse soutient que les enfants ont droit au transfert libre d'impôt des biens qu'ils ont effectivement reçus et que ne visait pas l'ordonnance. Parce que seule une demande accordée conformément à la Family Relief Act peut avoir pour effet de priver les bénéficiaires de leurs droits en vertu du testament initial, l'ordonnance n'a aucun effet à l'égard du reste des biens transmis aux enfants. Par conséquent, le transfert libre d'impôt s'applique aux biens non visés par l'ordonnance car ils ont toujours été dévolus aux enfants et le restent même après l'ordonnance. De l'avis de la demande- resse, si, comme dans l'arrêt Hillis, la veuve n'avait pas, par dévolution, acquis les autres biens avant la date à laquelle l'ordonnance a été rendue, il s'ensuit que les enfants n'ont pas été privés de leurs droits sur ceux-ci avant cette même date.
La défenderesse soutient que, même si les biens avaient été, par dévolution, acquis par les bénéfi- ciaires dès le décès du contribuable, ils ne pouvaient pas être, «par dévolution, irrévocablement acquis» tant que la demande n'avait pas été réglée et l'ordon- nance rendue conformément à la Family Relief Act de l'Alberta, dans les délais fixés au paragraphe 70(9). Quoique les enfants aient acquis des droits sur le reli- quat en vertu du testament, la nature exacte de ces droits n'a été déterminée qu'après que la Cour eut rendu son ordonnance. La Family Relief Act permet à une personne à charge de présenter une demande dans les six mois suivant l'homologation du testa ment et prévoit que, sur avis de la demande à l'exécu- teur testamentaire, la distribution de l'actif ne doit pas être faite, sauf en conformité avec cette Loi. En application de l'article 5, le tribunal est habilité à des- saisir un bénéficiaire du titre de propriété légué par testament. Par conséquent, la défenderesse affirme qu'en Alberta, les biens ne peuvent être, par dévolu- tion, irrévocablement acquis par un bénéficiaire que, soit à l'expiration du délai de six mois, si aucune demande n'a été présentée, soit par l'effet de l'ordon- nance du tribunal. Jusqu'à ce moment-là, les enfants n'ont pas de droit particulier ou déterminé sur les biens.
La défenderesse affirme que cette interprétation du paragraphe 70(9) est compatible avec l'objectif de l'État d'aider les enfants qui veulent s'établir sur la ferme et continuer d'utiliser les biens amortissables à des fins agricoles. Au surplus, l'exigence que les biens aient été «transférés ou transmis lors d'un par- tage» met à l'épreuve le caractère sérieux de leur engagement à continuer l'exploitation de la ferme. La défenderesse reconnaît que le délai de 15 mois impose aux parties l'obligation de s'assurer que les questions fiscales seront réglées dans un délai raison- nable. Selon son argument, en cas de demande de secours à la famille, les parties doivent prendre les mesures qui s'imposent car la demande peut les pri- ver de la possibilité de se prévaloir de l'exonération d'impôt prévue au paragraphe 70(9).
La défenderesse soutient que, dans l'affaire Hillis, le fait que la part de la veuve, soit un tiers du reliquat, n'était «aucunement en danger» a été un facteur cru cial qui a amené le juge Clement à conclure que cette part avait été, par dévolution, irrévocablement
acquise. De l'avis de la défenderesse, les décisions combinées du juge suppléant Clement et du juge Pratte, J.C.A., indiquent que, si un doute ou une incertitude subsiste à l'expiration du délai fixé au paragraphe 70(9), une disposition présumée s'ap- plique en conformité avec le paragraphe 70(5). En l'espèce, parce qu'il n'y avait aucune certitude à quelque moment que ce soit au cours de la période de 15 mois quant à la question de savoir qui aurait en définitive droit à une parcelle déterminée, la défende- resse soutient qu'aucun droit sur les biens n'avait été, par dévolution, irrévocablement acquis.
Analyse Première question
Il est utile d'examiner les définitions que donnent les dictionnaires des termes en cause:
[TRADUCTION] Droit dévolu. Droit ou titre actuel sur une chose qui comporte le droit d'aliéner, encore que le droit à la pos session ou à la jouissance soit différé à une date incertaine dans l'avenir, par opposition à un droit futur, qui peut ne jamais se concrétiser ni être consacré dans un titre, et le temps durant lequel la possession future ou le droit à la jouissance peut être différé importe peu, si le droit d'aliéner et de transmettre le titre existe déjà. [ ... J Ce n'est pas l'in- certitude de la jouissance dans l'avenir, mais l'incertitude du droit de jouir, qui fait la différence entre un droit «dévolu» et un droit «éventuel».
Révocable. Susceptible d'être annulé ou résilié si un événe- ment futur se produit ou si une condition résolutoire se réa- lise, notamment en cas de dévolution d'héritage. S'entend d'ordinaire des biens et des droits réels. Par exemple, le droit du créancier hypothécaire est révocable (susceptible d'être annulé) par le droit de rachat du débiteur hypothé- caire.
Titre révocable. Titre susceptible d'être annulé, autre qu'un titre déjà nul ou radicalement nul.
Irrévocable. Qui ne peut pas être annulé. Ce terme vise d'or- dinaire les droits réels ou autres qui ne peuvent pas être révoqués.
Black's Law Dictionary, 5th Ed. [TRADUCTION] Irrévocable. Ne pouvant être annulé.
Jowitt's Dictionary of English Law
[TRADUCTION] Irrévocable ... Non révocable; non suscepti ble d'être annulé ou résilié, qui ne peut pas être perdu.
Shorter Oxford English Dictionary, 3rd Edition
Dans son ouvrage The Canadian Law of Wills, vol. 2, (Toronto: Butterworths, 1987), Thomas G. Feeney étudie la signification du mot «dévolution», à la page 258:
[TRADUCTION] Le mot «dévolution» s'entend aussi, soit de la donation de droits de jouissance immédiate, ou payables ou transférables, dans le cas du legs de sommes en espèces ou de la donation de biens personnels, soit du droit à la possession acquis par le légataire, dans le cas de bien-fonds. C'est le sens du mot «dévolution» quand une donation est purement et sim- plement exécutée au décès du testateur et n'est aucunement différée ... En outre, une donation emporte la jouissance immédiate quand elle n'est plus susceptible d'être différée con- formément à la loi.
La question de savoir si les biens avaient été «dévolus irrévocablement» au conjoint, au sens du paragraphe 7(1) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès, S.C. 1958, chap. 29, a été exami née dans l'arrêt La succession Dontigny c. La Reine, [1974] 1 C.F. 418 (C.A.). Dans cette affaire-là, le tes tament du défunt disposait que la veuve était légataire universelle sous réserve de l'obligation, si elle se remariait, de remettre tous les biens-fonds à ses enfants ou à ses petits-enfants vivant à ce moment-là. Le juge en chef Jackett a décidé, au nom de la Cour, à la page 421, que les biens n'avaient pas été «dévo- lus irrévocablement» à la veuve, étant donné cette condition:
[ ...1 la question de savoir si le testateur a créé une «substitu- tion», au sens du Code civil de la province de Québec, en léguant ses immeubles à sa veuve sous réserve de l'obligation de les remettre, si elle se remarie, aux enfants ou aux petits- enfants vivant au moment du second mariage. Indépendam- ment de cette question, il est constant que, aux termes du testa ment, la propriété des biens n'était pas dévolue purement et simplement à la veuve, mais devait, au cas de son remariage, passer aux enfants, ou aux petits-enfants. À mon sens, un tel testament n'attribue pas «irrévocablement» les biens à la veuve. Une libéralité qui est susceptible d'être annulée ou rési- liée lors d'un événement tel qu'un remariage, est révocable et, par conséquent, ne relève pas de la partie principale de l'article 7(1)a). [Non souligné dans le texte original.]
Dans Lucky, M c MRN, [1972] CTC 2412 (C.R.I.), Maurice Boisvert, c.r., se réfère à la définition du mot «révocable» donnée dans le Osborn's Concise Law Dictionary [TRADUCTION] «droit réel susceptible d'être résilié ou annulé par l'effet d'une condition résolutoire, notamment en cas de dévolution d'héri- tage». Il fait observer, à la page 2415, que [TRADUC-
TION] «le testament n'avait pas pour effet de rendre irrévocable la dévolution des biens» et il a conclu que [TRADUCTION] «dès l'homologation du testament, l'ap- pelante avait acquis un titre absolu sur les biens». Pour terminer, dans Succession Greenwood c. La Reine (1990), 90 DTC 6690 (C.F. 1 r inst.), Madame le juge Reed a dit la page 6691] que, «pour qu'un bien soit irrévocablement dévolu, il faut que le béné- ficiaire ait le droit de décider s'il le gardera ou s'il l'aliénera.» Dans cette affaire-là, la succession du contribuable décédé avait été l'objet d'une conven tion de vente qu'il avait signée avant son décès et les biens visés par la convention n'ont pas été tenus pour irrévocablement dévolus à la fiducie en faveur du conjoint constituée en vertu du testament.
Je ne conviens pas avec l'avocat de la défenderesse que les notions et la terminologie du droit des succes sions et des biens immobiliers n'aident pas à interpré- ter la Loi de l'impôt sur le revenu. C'est le langage associé à ces domaines qui a été employé et toute interprétation doit tenir compte du sens donné à ces termes. En droit des biens immobiliers, une distinc tion a été établie entre les droits «dévolus» et les droits «éventuels». Un «droit dévolu» peut être un droit «acquis de jouissance immédiate» si le bénéfi- ciaire a le droit actuel de jouissance, ou un droit «acquis de jouissance future» si le droit de jouissance est différé, encore qu'un droit existant ait été acquis par le propriétaire. Deux conditions doivent être rem- plies pour qu'un droit soit dévolu: (i) la personne qui y a droit doit être déterminée; (ii) elle doit être prête à en prendre possession immédiatement et n'en être empêchée que par l'existence d'un droit antérieur: Megarry and Wade, The Law of Real Property (Lon- don: Stevens & Sons Limited, 1984), aux pages 231 et 232. En revanche, un «droit éventuel» est un droit qui n'attribue pas de droit de jouissance avant qu'un événement futur ne se réalise, c'est-à-dire l'accom- plissement d'une condition suspensive.
Un droit dévolu est susceptible d'être résilié ou «révocable» s'il est l'objet d'une condition résolu- toire, notamment en cas de dévolution d'héritage. L'on peut s'appuyer sur nombre d'autorités pour sou- tenir que la condition doit être contenue dans l'acte de concession. Par exemple, Oosterhoff & Rayner, dans Anger and Honsberger: The Law of Real Prop erty, 2e éd.: Canada Law Book, 1985, la page 125,
affirment que [TRADUCTION] «une condition résolu- toire est créée par l'insertion d'une condition dans un acte de concession qui peut mettre fin au droit à la demande du concédant» [soulignements ajoutés]. Il semble donc qu'un droit est dévolu «irrévocable- ment» s'il n'est pas l'objet d'une condition résolu- toire, notamment en cas de dévolution d'héritage, énoncée dans l'acte de concession.
En l'espèce, le droit sur les biens a incontestable- ment été dévolu: il n'y a aucune condition suspensive qui doit se réaliser avant que la libéralité prenne effet; les enfants, soit les ayants droit, sont déterminés; ils sont prêts à en prendre possession immédiatement, puisqu'il n'y a aucun autre droit antérieur existant. Le droit dévolu aux enfants n'est pas non plus révocable car il n'est pas l'objet d'une condition résolutoire contenue dans le testament. De toute évidence, le contribuable n'a pas limité de quelque autre manière le droit des enfants de conserver, d'aliéner ou de ven- dre les biens, comme ils l'ont fait en l'occurrence. Le droit est donc, «par dévolution, irrévocablement acquis» au sens de ces termes tels que définis. Cette conclusion est conforme à la décision du juge sup pléant Clement dans Hillis, selon laquelle les disposi tions de la Intestate Succession Act prennent effet au décès de l'intestat et entraînent une dévolution irrévo- cable des droits prévus en faveur du bénéficiaire.
Toutefois, une autre question gênante demeure. Dans l'arrêt Hillis, le juge suppléant Clement a fait remarquer, à la page 597, que le droit de la veuve en vertu de la Intestate Succession Act était irréductible étant donné le paragraphe 9(2) de la Dependants' Relief Act:
Le par. 9(2) prescrit, en termes impératifs, qu'aucune alloca tion pour entretien accordée 'a un conjoint ne doit être infé- rieure ce que ce dernier aurait reçu dans une succession ab intestat. Cela, à mon avis, exprime la politique gouvernemen- tale en Saskatchewan quant aux droits minimums que possède un conjoint dans la succession de son conjoint décédé sous réserve, évidemment, de restrictions qui ne sont pas appli- cables en l'espèce. Aucune ordonnance prise en vertu de la susdite loi ne peut porter préjudice à la dévolution des biens prévue par la Intestate Succession Act.
Les observations antérieures du juge Clement, aux pages 596 et 597, étayent cependant le point de vue de la demanderesse, qui affirme qu'en dépit du fait que les droits des enfants aient été, de fait, réduits par
l'ordonnance, ils avaient néanmoins été, par dévolu- tion, irrévocablement acquis, du moins dans la mesure ils n'étaient pas visés par l'ordonnance:
L'article 4 [de la Intestate Succession Act] [mod. 1978 (Suppl.), chap. 34, art. 3] donne droit au conjoint, en termes impératifs, à 10 000 $ et en garantit le paiement par un privi- lège sur la succession. Il prévoit, en outre, et toujours en termes impératifs, qu'un tiers du reliquat doit lui être attribué. Il faut en déduire nécessairement que les deux autres tiers du reliquat sont attribués aux enfants de la même manière. En soi, ces dispositions ne permettent aucune équivoque ni ne pré- voient une renonciation ultérieure ab initio: il n'est pas dou- teux que le bénéficiaire peut ensuite disposer de son droit mais non pas par révocation de celui que la loi lui a octroyé. À mon avis, les dispositions prennent effet au décès de l'intestat et entraînent une dévolution irrévocable des droits prescrits en faveur du bénéficiaire. Les administrateurs doivent donner effet à cette dévolution, bien que sous réserve de la disposition, par le bénéficiaire, des droits dévolus. Dans cette optique, la dévolution des droits ne dépend pas d'une ordonnance, de la Cour accordant l'administration de la succession de l'intestat: elle se produit en vertu d'une disposition légale impérative entrant en vigueur au moment du décès de l'intestat. [Non sou- ligné dans le texte original.]
En l'espèce, les droits réels des enfants en vertu du testament, modifié par l'ordonnance, avaient été, par dévolution, irrévocablement acquis en conformité avec le paragraphe 70(9). Naturellement, une demande sous le régime de la loi sur le secours aux personnes à charge peut entraîner le transfert des droits au détriment des enfants. Pourtant, si, comme l'ont décidé le juge suppléant Clement et le juge Pratte, J.C.A., dans Hillis, d'autres biens reçus en vertu d'une ordonnance sous le régime de la loi sur le secours aux personnes à charge ne sont pas dévolus avant la date effective de l'ordonnance, il s'ensuit qu'en l'espèce, les enfants ne sont pas non plus dépossédés de leurs droits sur ceux-ci avant cette date. Par conséquent, le droit attribué aux enfants par le testament qui n'est pas visé par l'ordonnance doit certainement être tenu pour acquis irrévocablement, par dévolution, par les enfants.
J'estime que la position du ministre serait contra- dictoire s'il refusait le transfert libre d'impôt, prévu au paragraphe 70(6), dans le cas des biens supplé- mentaires attribués à l'épouse, comme dans l'arrêt Hillis, et s'il refusait aussi le transfert libre d'impôt prévu au paragraphe 70(9) quant aux biens transmis aux enfants par le testament, tels que réduits par l'or- donnance en l'espèce.
Ce résultat concorde avec ce que je crois être l'ob- jet du paragraphe 70(9) et les observations du juge Heald, J.C.A., dans l'arrêt Hillis, à la page 589, sem- blent appuyer ce point de vue:
Ces deux alinéas [70(5)] prévoient, en définitive, qu'un gain en capital est réputé avoir été réalisé lors du décès du contri- buable lorsque la juste valeur marchande d'un bien à la date de ce décès dépasse le prix de base rajusté de ce bien. C'est là, évidemment, une disposition onéreuse et, dans de nombreux cas, ce concept théorique de gain en capital cause indûment un énorme préjudice aux bénéficiaires d'une succession, en parti- culier une succession composée en grande partie de biens immobiliers comprenant peu de biens liquides permettant de régler l'impôt sur le revenu devenu exigible à cause du gain théorique en capital ... Si l'on restreignait le bénéfice du rou- lement prévu au paragraphe 70(6) aux veuves qui ont pu obte- nir une ordonnance de la Cour dans les 15 mois de la date du décès du contribuable, cela aurait pour effet de soumettre toutes les veuves à un certain nombre d'éventualités indépen- dantes de leur volonté ... j'estime qu'un nombre important de conjoints de contribuables décédés seraient privés de l'exemp- tion prévue au paragraphe 70(6) si l'on admettait l'interpréta- tion avancée par l'intimée.
Les délais fixés au paragraphe 70(9), de toute façon, ne posent pas de problème en l'occurrence car je suis disposé à donner une certaine latitude au con- tribuable puisque rien n'indique que les parties n'aient pas agi expéditivement dans cette affaire.
Deuxième question: Les terres agricoles et les biens amortissables qui restent (les «biens») ont-ils, au moment du décès du contribuable ou posté- rieurement, et par suite de ce décès, été «transférés ou trans- mis lors d'un partage» aux enfants du contribuable?
Arguments
La demanderesse soutient qu'en vertu du testa ment, dont les dispositions sont valables à compter du moment précédant le décès, un droit bénéficiaire dévolu sur le reste des terres agricoles et des biens amortissables (les «biens») a effectivement été «transféré ("transferred") ou transmis lors d'un par- tage ("distributed")» aux enfants. Les droits des enfants sur les biens ont été déterminés immédiate- ment au moment du décès du contribuable et aucune autre action n'était nécessaire pour leur attribuer la propriété pure et simple. Elle affirme que le sens ordinaire des mots «transférer» et «transmettre lors
d'un partage» est très large et n'exige pas la transmis sion du titre en common law ou de la possession. Le paragraphe 70(9) ne comporte pas non plus cette exi- gence; il dispose que le transfert doit être fait «au moment du décès du contribuable ou postérieure- ment, et par suite de ce décès», et la demanderesse fait remarquer que le mot «biens», dont la définition large est énoncée au paragraphe 248(1), doit viser les biens reconnus en equity. L'exécutrice testamentaire n'a donc pas à prendre de mesure additionnelle pour «transférer» les biens aux enfants.
La demanderesse soutient que le fait qu'elle déte- nait le titre en common law sur les biens en qualité de fiduciaire, en conformité avec l'article 3 de la Devo lution of Real Property Act, quand ils ont été vendus à un tiers, ne modifie pas, en l'espèce, le fait que les biens avaient été transférés aux enfants par suite du décès du contribuable. Une fois acquittées les dettes de la succession, les enfants avaient le droit de récla- mer les biens à tout moment et, à ce moment-là, la demanderesse devenait la mandataire des enfants. Les biens ont été vendus par la demanderesse à un tiers sur les instructions des propriétaires bénéficiaires et avec leur assentiment. Conformément aux usages en matière successorale en Alberta, aucun acte de trans mission en bonne et due forme du titre en common law n'a été rédigé en faveur des bénéficiaires avant la cession du titre au tiers acquéreur. Enfin, la demande- resse affirme que la demande de l'épouse sous le régime de la Family Relief Act n'empêche pas que les biens aient été «transférés ou transmis lors d'un par- tage» aux enfants immédiatement, au moment du décès du contribuable, pour les fins de l'application du transfert libre d'impôt prévu au paragraphe 70(9), quoiqu'une telle demande puisse empêcher un repré- sentant personnel de céder les biens.
La défenderesse soutient que, parce que les biens n'ont jamais été transmis en bonne et due forme aux enfants du contribuable et parce que les biens ont été vendus par l'exécutrice testamentaire à un tiers, ceux- ci n'ont pas été «transférés ou transmis lors d'un par- tage» aux enfants en conformité avec le paragraphe 70(9). Elle affirme que les définitions et l'examen par les tribunaux des termes «transférés ou transmis lors d'un partage ("distributed")» supposent une transmis sion en bonne et due forme. Elle se reporte à l'affaire Succession Willis c. M.R.N. (1968), 68 DTC 204
(C.A.I.), à la page 210, dans laquelle la Commission
a décidé qu'une ordonnance d'un tribunal obligeant un exécuteur testamentaire à transférer tous les biens d'un défunt ne transfère pas, en soi, les biens. L'or- donnance habilite seulement l'exécuteur testamen- taire à agir et c'est seulement lorsqu'il exécute l'or- dre reçu que le transfert s'opère. S'appuyant sur la décision du juge Rip dans l'affaire Succession Hrycej (A) c MRN, [1984] CTC 2115 (C.C.I.), la défende- resse affirme de plus que le fait que les biens ont été vendus par l'exécutrice testamentaire à un tiers étaye le point de vue selon lequel les biens n'avaient jamais été transférés aux enfants. Elle fait observer, en outre, que le contribuable n'a pas légué de parcelles ni de matériel en particulier à ses enfants. Le testament dis pose plutôt qu'ils recevront le «reliquat» de la suc cession en parts égales. La défenderesse émet donc l'avis que ce qui devait être transmis aux enfants, c'est vraisemblablement de l'argent et non des biens visés par le paragraphe 70(9).
Analyse Deuxième question
Les parties ont cité les définitions qui suivent des termes «transférés» («transferred») et «transmis lors d'un partage» («distributed»):
[TRADUCTION] Transférer, v. tr. Transporter d'un lieu ou d'une personne à une autre, etc.; faire passer d'une personne à une autre; spécialement, transmettre la possession ou le contrôle (par exemple, transférer un titre immobilier). Vendre ou don- ner. Chappel v. State, 216 Ind. 666, 25 N.E.2d 999, 10001.
Transfert, n.m. Acte des parties ou effet de la loi par lequel un titre immobilier est transmis d'une personne à une autre. Vente et tout autre moyen, direct ou indirect, de disposer d'un bien ou d'un droit sur un bien, ou de s'en défaire, ou d'en céder la possession, ou de grever d'un privilège un bien ou un droit sur un bien, absolument ou conditionnellement, volontairement ou involontairement, par procédure judi- ciaire ou non, par exemple, cession, vente, paiement, gage, hypothèque, privilège, charge, donation, garantie ou autre. C'est un mot dont le sens est général et qui peut désigner la donation par testament. Hayter v. Fern Lake Fishing Club, Tex.Civ.App., 318 S.W.2d 912, 915.
Transfert s'entend de tout moyen, direct ou indirect, absolu ou conditionnel, volontaire ou involontaire, de disposer d'un bien ou d'un droit sur un bien, ou de s'en défaire, y compris la rétention du titre comme sûreté.
Black's Law Disctionary, 5th Ed.
Distribution ou Transmission lors d'un partage, («distribu- tion»). Répartition des biens personnels d'un intestat à sa famille, ...
Osborn's Concise Law Distionary, 6th Ed.
Transfert ... (transféré ... ). I. Transporter d'un lieu ou d'une personne à une autre, etc.; transmettre, transporter; faire passer d'une personne à une autre; 2. Droit. Transporter ou transmettre (titre, droit ou propriété) par acte ou procédé juri- dique...
Distribuer ou transmettre lors d'un partage («Distri- bute»). I. Répartir ou donner des parties ou des parts à plu- sieurs personnes prises séparément, attribuer ou assigner à cha- cun sa part; rendre, dispenser (la justice, etc.) ... 3. Répartir d'une manière particulière, selon un certain ordre. 4. Diviser et ranger dans des classes ou catégories; classer. 5. Diviser et répartir dans plusieurs endroits ... 7. Rendre susceptible de répartition .. .
Shorter Oxford English Dictionary, 3rd Edition
Dans l'arrêt Succession Tory c. Le ministre du Revenu national, [1973] C.F. 820 (C.A.) (pourvoi du ministre devant la C.S.C. refusé [1976] CTC 415, 76 DTC 6312), le juge suppléant Bastin a étudié le sens des mots «cédée ou distribuée aux bénéficiaires» («transferred or distributed») employés alors au para- graphe 64(3) de la Loi. Il a conclu, à la page 823:
Le terme «distribuée» est utilisé pour couvrir les cas la ces sion est répartie entre plusieurs bénéficiaires. Le terme «cédée» a été inséré pour couvrir le cas la cession ne va qu'à une seule personne.
La signification du terme «cédée» à ce paragraphe est res- treinte par son association au mot distribuée. Cette règle est résumée par l'expression «noscuntur a sociis». Citons un extrait de l'ouvrage de Maxwell On Interpretation of Statutes, 12e édition, à la page 289:
[TRADUCTION] deux ou plusieurs mots pouvant présenter une analogie sont groupés, noscuntur a sociis, ils sont utili- sés dans leur sens parent. Ils prennent, pour ainsi dire, une couleur commune, le sens du plus général étant restreint à un sens analogue à celui du moins général.
Les observations du juge suppléant Bastin dans l'arrêt Tory ne laissent cependant pas supposer qu'il faut un acte de cession en bonne et due forme pour qu'il y ait «transfert» ou «transmission lors d'un par- tage» («distribution»). Les définitions que donnent les dictionnaires sont, à l'évidence, assez larges pour viser la libéralité faite par testament. Dans l'affaire Fasken, David v. Minister of National Revenue,
[1948] R.C.É. 580, le président Thorson a décidé, à la page 592, ce qui suit:
[TRADUCTION] Le mot «cession» [«transfer>] n'est pas un terme de l'art et n'a pas un sens technique. Il n'est pas néces- saire qu'un transport de biens par un mari en faveur de son épouse soit fait sous une forme particulière ni qu'il le soit directement. Il suffit que le mari agisse de façon à se départir des biens et les remettre à son épouse, c'est-à-dire transporter les biens de l'un à l'autre. Les moyens d'arriver à cette fin, qu'ils soient directs ou non, peuvent être à juste titre appelés une cession. [Non souligné dans le texte original.]
Il s'est référé à l'affaire Gathercole v. Smith (1880- 81), 17 Ch.D. 1 (C.A.), dans laquelle le lord juge Lush déclare, à la page 9, que [TRADUCTION] «l'ex- pression "qui peut être cédé", ... est une expression d'une très large portée et comprend tous les moyens par lesquels la propriété peut être transmise d'une personne à une autre».
En l'espèce, le contribuable a désigné, dans son testament, la demanderesse comme exécutrice testa- mentaire et fiduciaire et a légué tous ses biens à la demanderesse en fiducie au profit de son épouse et de ses enfants. Par conséquent, le titre sur ses biens a été transmis, à son décès, à la fiduciaire pour l'aider à administrer la succession et le droit bénéficiaire a été transmis aux bénéficiaires. Le contribuable s'est ainsi départi de la propriété de ses biens. En l'occurrence, le testament valide fait par le contribuable, transmet- tant ses biens à son épouse et à ses enfants, est un «transfert» suffisant pour l'application du paragraphe 70(9). Le fait que le «reliquat» des biens a été légué aux enfants ne modifie pas, à mon sens, la nature des biens susceptibles d'être l'objet d'un transfert libre d'impôt. Le législateur n'avait certainement pas l'in- tention d'exiger qu'un legs à titre particulier de chaque partie des terres agricoles et des biens amor- tissables soit fait pour que puisse s'opérer le «trans- fert libre d'impôt des biens agricoles», l'objet du paragraphe 70(9) étant d'accorder une exemption fis- cale au moment du transfert de ces biens d'une géné- ration à la suivante.
La défenderesse et la Cour de l'impôt en première instance, dans l'affaire Succession Boger (A.) c. M.R.N., [1989] 1 C.T.C. 2110 (C.C.I.), à la page 2117, se fondent sur la décision Hrycej pour étayer leur point de vue selon lequel, parce que les biens ont été vendus directement par l'exécutrice testamentaire, [TRADUCTION] «il n'y a pas eu de transfert ou de trans-
mission, lors d'un partage, du terrain aux enfants du défunt». Dans l'affaire Hrycej, le contribuable décédé avait donné par testament à sa fille une option d'achat de matériel agricole qui, si elle ne la levait pas dans un délai imparti, s'ajouterait au reliquat de l'actif légué à la veuve. La fille a levé l'option et la veuve a reçu le produit de la vente en espèces. La succession a demandé le transfert libre d'impôt prévu au para- graphe 70(6) parce que la veuve avait acquis le maté riel au décès du contribuable, mais le juge Rip, C.C.I., a pourtant décidé que, parce que le matériel agricole faisait l'objet d'une option, il n'avait pas été acquis par la veuve. Certes, le juge Rip a déclaré que la page 2117] [TRADUCTION] «le matériel agricole n'a jamais été transféré ou transmis à l'épouse», mais je remarque qu'il n'a pas tiré de conclusion sur la question précise du transfert ou de la transmission, car les parties avaient admis que le matériel agricole [TRADUCTION] «était resté en la possession des exécu- teurs testamentaires et n'avait pas été transféré ou transmis lors d'un partage à Mme Hrycej».
Pour terminer, le juge suppléant Clement, dans l'arrêt Hillis, à la page 596, semble lui aussi avoir reconnu qu'une cession en bonne et due forme n'est peut-être pas nécessaire:
En fait, dans les circonstances de l'espèce, l'épouse doit être capable d'établir, qu'en droit, elle a irrévocablement acquis le bien dans le délai prescrit de 15 mois. Selon l'ensemble du contexte, il est clair qu'il n'est pas nécessaire que le transfert réel du bien en sa faveur ait été exécuté dans ce délai: si elle rapporte la preuve exigée, en droit, le transfert doit suivre auto- matiquement. Ce qui doit inévitablement se produire doit être considéré comme s'étant produit. Cette interprétation permet une conciliation logique de cette expression avec l'expression précédente qui parle d'un bien qui a été, lors du décès du con- tribuable ou postérieurement, transféré ou transmis lors d'un partage: elle reconnaît dans une certaine mesure les difficultés et la complexité qui accompagnent parfois une administration et un partage satisfaisants d'une succession et qu'il faut peut- être régler, en particulier lorsque l'interprétation et la validité d'un testament sont contestées, avant qu'on ne puisse procéder au partage. [Non souligné dans le texte original.]
Je conclus que la vente de la terre à un tiers par la fiduciaire a été faite sur les instructions et avec l'as- sentiment des enfants et qu'elle n'agissait pas au nom du contribuable à ce moment-là mais au nom de ses enfants, propriétaires du bien-fonds. Je ferai remar- quer qu'à la suite de l'ordonnance, le titre sur le ter rain bâti a été transféré à l'épouse le 8 janvier 1982. Vraisemblablement, le titre sur le reste des terres
agricoles aurait pu aussi être transféré aux bénéfi- ciaires quand il a été vendu en août 1982 et j'accepte l'explication de la demanderesse selon laquelle ce titre n'a pas été transmis aux enfants en conformité avec les «usages en matière successorale en Alberta». J'admets donc que les termes «transférer ou transmet- tre lors d'un partage» englobent la transmission des biens en vertu d'un testament et je suis convaincu que les biens ont été «transférés» aux enfants du contri- buable au sens du paragraphe 70(9).
En dernier lieu, je n'accepte pas l'argument de la défenderesse selon lequel le fait que les biens ont été vendus dans le délai de 15 mois est opposable à la demande. Le paragraphe 70(9) ne dit absolument pas que les biens doivent rester entre les mains des enfants pour que le transfert libre d'impôt s'applique. Dans la mesure les biens sont transférés aux béné- ficiaires, la succession peut demander le transfert libre d'impôt prévu au paragraphe 70(9). Toutefois, quand les bénéficiaires disposent ensuite des biens, comme ils l'ont fait en l'occurrence, ils sont, à titre de propriétaires des biens, redevables des gains en capital résultant de la disposition même si c'est le fiduciaire qui les vend.
Troisième question: Étant donné qu'il a délivré les certificats de décharge, Revenu Canada est-il empêché d'affir- mer que le défunt, l'exécutrice testamentaire, qui est aussi fidu- ciaire, ou les bénéficiaires sont redevables d'un impôt?
Subsidiairement, la demanderesse soutient que le ministre ne peut établir une nouvelle cotisation à l'égard de la demanderesse, vu les certificats de décharge délivrés respectivement le 14 octobre 1980 et le 10 février 1987. Inversement, la défenderesse affirme que la délivrance des certificats de décharge est inapplicable à cette action car ils sont établis au nom de Sharon Boechler personnellement et n'empê- chent nullement le ministre de déterminer les obliga tions fiscales de feu Alexander Boger.
Je suis tout à fait d'accord avec la Cour de l'impôt qui a dit, en première instance, que le fait qu'un certi- ficat de décharge a été délivré à un exécuteur testa- mentaire de la succession,. «représentant personnel», ne libère pas la succession de son obligation en vertu
de la Loi. Le paragraphe 159(3) porte simplement que si le représentant personnel n'obtient pas un cer- tificat comme l'exige le paragraphe 159(2) avant de répartir les biens placés sous son contrôle en sa qua- lité de représentant personnel, il est personnellement responsable des impôts, intérêts et pénalités non payés. La succession n'est aucunement libérée de son obligation fiscale. Pour parler simplement, le repré- sentant personnel reste redevable à titre de représen- tant personnel, mais il est déchargé de son obligation personnelle imposée au paragraphe 159(3). Par con- séquent, l'appel de la demanderesse sur ce point est rejeté.
CONCLUSION
Le transfert libre d'impôt prévu au paragraphe 70(9) s'applique à la terre et au matériel agricole transmis aux enfants en vertu du testament du contri- buable, modifié par l'ordonnance, et il est fait droit à l'appel de la demanderesse quant à la première et à la deuxième questions. J'inviterais les avocats à prépa- rer un projet de jugement conforme aux présents motifs afin que j'y appose ma signature. Les dépens sont adjugés à la demanderesse.
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