T-1922-87
Jake Friesen (demandeur)
c.
Sa Majesté la Reine (défenderesse)
RÉPERTORIÉ.' FRIESEN C. CANADA (Ire INST.)
Section de première instance, juge Rouleau—Van-
couver, 20 novembre 1991; Ottawa, 12 mars 1992.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Déductions —
Appel de nouvelles cotisations du revenu d'entreprise du con-
tribuable — Terrain vague acheté dans le but d'être revendu à
profit — Il s'agit de déterminer si le bien figure ou non dans
«l'inventaire» d'une entreprise au sens des art. 10(1) et 248(1)
de la Lai de l'impôt sur le revenu — Sens des mots «entre-
prise» et «inventaire» — Distinction établie entre «commerce»
et «risque ou affaire de caractère commercial» — Revue de la
jurisprudence — Un terrain vague ne figure pas dans «l'in-
ventaire» aux fins de l'art. 10(1) de la Lai — La méthode
comptable doit refléter la position véritable du contribuable au
chapitre du revenu — La valeur des stocks ne devient perti-
nente que dans la mesure où elle peut influer sur le bénéfice
brut de l'entreprise et elle n'est pas en soi déductible du
revenu du contribuable — Une «réduction de valeur» du bien
ne refléterait pas la position véritable du contribuable au cha-
pitre du revenu — L'art. 10(J) de la Loi ne s'applique pas —
Action rejetée.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, ch. 148 (mod.
par S.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 1), art. 9(1), 10(1),
248(l) (mod. par L.C. 1988, ch. 55, art. 188).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536;
[1984] CTC 294; (1984), 84 DTC 6305; 53 N.R. 241;
Maritime Telegraph and Telephone Co. Ltd. c. La Reine
(1990), 91 DTC 5038; 41 F.T.R. 301 (C.F. Ire inst.);
Ministre du Revenu national c. Shofar Investment Corpo
ration, [1980] 1 R.C.S. 350; (1979), 105 D.L.R. (3d) 486;
[1979] CTC 433; 79 DTC 5347; 30 N.R. 60; Bailey (D.R.)
c. M.R.N., [1990] I C.T.C. 2450; (1990), 90 DTC 1321
(C.C.I.).
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Commissioners of Inland Revenue v. Livingston and
others (1926), 11 T.C. 538 (Scot. Ct. Sess.); Minister of
National Revenue v. Taylor, faines A., [1956-60] R.C.É 3;
[1956] C.T.C. 189; (1956), 56 DTC 1125; Gilmour (R.) c.
M.R.N., [1989] 2 C.T.C. 2454; (1989), 89 DTC 658
(C.C.I.); Van Dongen, Q.C. c. La Reine (1990), 90 DTC
6633; 38 F.T.R. 110 (C.F. lre inst.); Weatherhead (J.E.) c.
M.R.N., [ 1990] 1 C.T.C. 2579; (1990), 90 DTC 1398
(C.C.I.).
APPEL interjeté contre les nouvelles cotisations du
revenu d'entreprise du demandeur établies par le
ministre du Revenu national pour les années d'impo-
sition 1983 et 1984. Action rejetée.
AVOCATS:
Craig C. Sturrock et Nicholas P. Smith pour le
demandeur.
Robert W. McMechan et Al Meghji pour la
défenderesse.
PROCUREURS:
Thorsteinssons, Vancouver, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du
jugement rendus par
LE JUGE ROULEAU: M. Jake Friesen interjette appel
des nouvelles cotisations de son revenu d'entreprise
établies par le ministre du Revenu national pour les
années d'imposition 1983 et 1984.
Le demandeur est un homme d'affaires domicilié
dans la municipalité de Clearbrook, en Colombie-
Britannique. Il fait partie d'un groupe de personnes
qui a acheté, le 29 janvier 1982, un terrain vague
situé dans la ville de Calgary et connu sous le nom de
«Styles Property». Ce bien a été enregistré au nom du
Trinity Western College qui était chargé de le détenir
comme fiduciaire pour le demandeur et les autres
membres du groupe.
Le terrain a été acheté dans le but d'être revendu à
profit. Une partie du bénéfice anticipé devait être ver
sée sous forme de don de charité au collège ainsi
qu'à d'autres oeuvres de charité semblables; le reste
devait être réparti au prorata entre les membres du
groupe, y compris le demandeur.
Le demandeur a évalué son intérêt dans le bien au
coût ou à la juste valeur marchande, selon le moindre
des deux, en conformité avec le paragraphe 10(1) de
la Loi de l'impôt sur le revenu [S.R.C. 1952, ch. 148
(mod. par S.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 1)] (ci-après
appelée la Loi). Dans ses déclarations d'impôt sur le
revenu pour 1983 et 1984, il a indiqué des pertes
d'entreprise de 252 954 $ et de 25 800 $ respective-
ment. Il est maintenant reconnu qu'une erreur a été
commise dans le calcul du montant de 252 954 $ ini-
tialement déclaré par le contribuable et que le mon-
tant exact s'élève à 197 690 $.
Le ministre a refusé d'admettre ces pertes d'entre-
prise au motif que le bien ne figure pas dans «l'in-
ventaire d'une entreprise» exploitée par le demandeur
au sens des paragraphes 10(1) et 248(1) de la Loi de
l'impôt sur le revenu. Le ministre a également
affirmé que le demandeur a exagéré la part du coût
qu'il a supporté et a omis d'indiquer la juste valeur
marchande de son intérêt dans le terrain à la fin des
années d'imposition 1983 et 1984 lorsqu'il a
demandé les «réductions de valeur».
La question en litige est de savoir si le terrain
vague acheté par le demandeur, qui n'exploite pas
une entreprise commerciale ordinaire, figure ou non
dans «l'inventaire» d'une entreprise au sens du para-
graphe 10(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, et,
partant, si le contribuable peut ou non demander une
«réduction de valeur».
Le demandeur prétend que le terrain figure dans un
inventaire et, par conséquent, qu'il a le droit de rame-
ner sa valeur du coût à la juste valeur marchande con-
formément au paragraphe 10(1) de la Loi qui dispose
que:
10.(l) Aux fins du calcul du revenu tiré d'une entreprise, les
biens figurant dans un inventaire sont évalués au coût supporté
par le contribuable ou à leur juste valeur marchande, le moins
élevé de ces deux éléments étant à retenir, ou de toute autre
façon permise par les règlements.
Afin d'interpréter cette disposition de la Loi et de
l'appliquer correctement, il est important de vérifier
le sens des mots «entreprise» et «inventaire».
Le mot «entreprise» défini au paragraphe 248(1)
(mod. par L.C. 1988, ch. 55, art. 188) «comprend une
profession, un métier, un commerce, une industrie ou
une activité de quelque genre que ce soit et, sauf pour
l'application de l'alinéa 18(2)c), de l'article 54.2 et
de l'alinéa 110.6(14)f ), un projet comportant un ris-
que ou une affaire de caractère commercial, mais ne
comprend pas une charge ou un emploi». Au fil des
ans, les tribunaux ont défini bon nombre de ces
termes. Ainsi, le mot «commerce» a été examiné
dans l'arrêt Commissioners of Inland Revenue v.
Livingston and others (1926), 11 T.C. 538 (Scot. Ct.
Sess. Éco.), à la page 542:
[TRADUCTION] ... une opération unique est loin de constituer
le commerce d'un négociant, tout comme une hirondelle ne fait
pas le printemps. Le commerce d'un négociant consiste forcé-
ment en un ensemble d'opérations, qui sont effectivement en
cours ou qui sont de toute façon envisagées et destinées à se
concrétiser.
La Cour de l'Échiquier du Canada a examiné l'ex-
pression «risque ou affaire de caractère commercial»
dans l'arrêt Minister of National Revenue v. Taylor,
James A., [1956-60] R.C.É. 3, à la page 13:
[TRADUCTION] Selon moi, il ressort clairement du libellé de la
loi canadienne, toute décision judiciaire mise à part, que les
expressions «commerce» et «risque ou affaire de caractère
commercial» ne sont pas synonymes ...
À propos des circonstances dans lesquelles une
opération peut être «un risque ou une affaire de
caractère commercial», le juge Thorson s'est exprimé
en ces termes à la page 25:
[TRADUCTION] Cependant, un «commerce» n'est pas la même
chose qu'«un risque de caractère commercial», et une opéra-
tion pourrait fort bien être un risque de caractère commercial
sans être un commerce ... Le mot «risque» suppose une opéra-
tion unique ou isolée, et c'est une erreur que d'arguer de son
caractère unique ou isolé pour dire que ce n'était pas un risque
de caractère commercial.
Dans une cause plus récente, Bailey (D.R.) c.
M.R.N., [1990] 1 C.T.C. 2450 (C.C.I.), le juge Rip a
conclu que, pour l'application du paragraphe 10(1), le
mot «entreprise» tel qu'il est défini au paragraphe
248(1) comprend «un risque ou une affaire de carac-
tère commercial». Il a ajouté que le caractère continu
n'est pas nécessaire pour calculer le revenu tiré d'une
entreprise. D'après ce raisonnement, on peut conclure
qu'une opération isolée peut être une «entreprise» au
sens du paragraphe 10(1).
Compte tenu de ce qui précède, l'avocat du deman-
deur se fonde sur la définition du mot «entreprise»
pour dire qu'en dépit du fait que le demandeur n'était
pas dans le [TRADUCTION] «commerce des biens» et
qu'il s'agissait d'une opération isolée, il est permis
d'affirmer que le demandeur a pris un risque de
caractère commercial et, partant, exploite une «entre-
prise» pour l'application des paragraphes 248(1) et
10(1) de la Loi.
La question de savoir si un terrain acheté dans le
cadre d'une opération constituant un risque de carac-
tère commercial figure ou non dans un inventaire
pour l'application du paragraphe 10(1) a également
été examinée à fond dans l'arrêt Bailey, précité, dans
lequel il a été établi qu'un terrain acheté pour être
revendu dans le cadre d'une opération constituant un
commerce ou un risque de caractère commercial
pourrait être considéré comme un bien figurant dans
un inventaire pour l'application du paragraphe 10(1).
Toutefois, si l'intention du contribuable était de déte-
nir le terrain en tant qu'investissement comme un
«bien en immobilisation», ce terrain ne pourrait être
considéré comme un bien figurant dans un «inven-
taire» pour l'application du paragraphe 10(1). Le juge
Taylor de la Cour de l'impôt a passé la question en
revue dans l'arrêt Gilmour (R.) c. M.R.N., [1989] 2
C.T.C. 2454 (C.C.I.), à la page 2455:
À mon avis, le contribuable a toujours considéré le lot
comme un actif immobilisé et non pas comme un capital de
roulement, en ajoutant à son prix d'achat les frais d'intérêt et
les taxes, permis aux termes des articles 53 et 54 de la Loi de
l'impôt sur le revenu.
Dans cette affaire-là, on a statué que le terrain vague
était détenu par le contribuable en tant que bien
immobilisé et ne pouvait donc pas faire l'objet d'une
évaluation en application du paragraphe 10(1).
Dans l'arrêt Van Dongen, Q.C. c. La Reine (1990),
90 DTC 6633 (C.F. I r e inst.), mon collègue le juge
Cullen a tenu la décision Bailey, précitée, pour repré-
sentative de l'état du droit sur la question. Comme je
l'ai déjà mentionné, il a été établi dans l'arrêt Bailey
précité, qu'un terrain détenu à titre de risque de
caractère commercial pouvait faire l'objet d'une
«réduction de valeur»; qu'une parcelle de terre agri-
cole en friche achetée par le contribuable aux fins de
revente était un bien figurant dans un «inventaire»
pour l'application du paragraphe 10(1) en dépit du
fait que l'achat du terrain n'était pas un commerce
mais une opération isolée. Ce raisonnement a égale-
ment été appliqué dans l'arrêt Weatherhead (J.E.) c.
M.R.N., [1990] 1 C.T.C. 2579 (C.C.I.).
Comme les deux parties ont admis que le bien liti-
gieux a été acheté à des fins de spéculation, le
demandeur prétend que d'après la jurisprudence, on
peut considérer le terrain comme un bien figurant
dans un «inventaire» pour l'application du para-
graphe 10(1) de la Loi. Le demandeur devrait donc
avoir le droit de réduire la valeur du bien durant les
années d'imposition 1983 et 1984.
À mon avis, il ne convient pas d'interpréter le
paragraphe 10(1) comme on le suggère. Il est un prin-
cipe reconnu selon lequel toute disposition de la Loi
de l'impôt sur le revenu doit être interprétée en fonc-
tion de la Loi prise dans son ensemble. On ne peut
interpréter un article de la Loi isolément (Stubart
Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536).
Pour interpréter le paragraphe 10(1), on doit tenir
compte d'autres dispositions pertinentes de la Loi, à
savoir les paragraphes 248(1) et 9(1).
10. (1) Aux fins du calcul du revenu tiré d'une entreprise,
les biens figurant dans un inventaire sont évalués au coût sup
porté par le contribuable ou à leur juste valeur marchande, le
moins élevé de ces deux éléments étant à retenir, ou de toute
autre façon permise par les règlements.
248. (I) Dans la présente loi, .. .
«inventaire» signifie la description des biens dont le prix ou la
valeur entre dans le calcul du revenu qu'un con-
tribuable tire d'une entreprise pour une année
d'imposition;
«entreprise» ou «affaires» comprend une profession, un
métier, un commerce, une industrie ou une acti-
vité de quelque genre que ce soit et, sauf pour
l'application de l'alinéa 18(2)c), de l'article 54.2
et de l'alinéa 110.6(14)f), un projet comportant
un risque ou une affaire de caractère commer
cial, mais ne comprend pas une charge ou un
emploi;
9. (I) Sous réserve des dispositions de la présente Partie, le
revenu tiré par le contribuable d'une entreprise ou d'un bien
pour une année d'imposition est le bénéfice qu'il en tire pour
cette année. [C'est moi qui souligne.]
Le calcul du bénéfice du contribuable pour l'appli-
cation du paragraphe 9(1) doit se faire conformément
aux pratiques et aux principes comptables et commer-
ciaux ordinaires. La méthode comptable applicable
devrait être celle qui reflète le mieux la position véri-
table du contribuable au chapitre du revenu. Ce prin-
cipe est clairement énoncé dans plusieurs décisions,
notamment dans celle que Madame le juge Reed de la
Section de première instance de la Cour fédérale a
rendue récemment dans l'arrêt Maritime Telegraph
and Telephone Co. Ltd. c. La Reine (1990), 91 DTC
5038.
Les pratiques et les principes commerciaux ordi-
naires prescrivent qu'on doit rapprocher les recettes
et les dépenses d'une entreprise avant de voir s'il y a
une perte ou un bénéfice. Dans le cas d'une entre-
prise commerciale, on utilise généralement la
méthode suivante parce qu'elle reflète le mieux la
position véritable de l'entreprise au chapitre du
revenu:
Bénéfice (perte) = Produit des ventes —
coût des ventes*
* Coût des ventes = (Valeur attribuée aux
stocks au début de
l'année + coût des
acquisitions) — valeur
attribuée aux stocks à
la fin de l'année
Cette formule permet à une entreprise commerciale
d'établir le coût des ventes en calculant le change-
ment dans la valeur de ses stocks du début à la fin
d'une période donnée. L'évaluation des stocks peut
donc influer sur le bénéfice brut de l'entreprise. C'est
seulement dans cette mesure que la valeur des stocks
devient pertinente. Elle n'est pas en soi déductible du
revenu du contribuable.
Cette approche est étayée par la décision rendue
par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Minis-
tre du Revenu national c. Shofar Investment Corpora
tion, [1980] 1 R.C.S. 350. Dans cet arrêt, la Cour a
dit, au sujet du paragraphe 14(2) [maintenant le para-
graphe 10(1)] de la Loi, à la page 355:
La valeur des stocks, utilisée pour établir le profit, est calculée
sur la base du prix coûtant ou de la juste valeur marchande,
selon le moindre des deux, ou de telle autre manière que les
règlements peuvent autoriser. Donc, en vertu du par. 14(2), le
coût d'un bien en stock est un facteur pertinent quand il s'agit
d'établir la valeur des stocks. Il peut, dans cette mesure, modi
fier le calcul du profit brut de l'entreprise, mais il n'est pas, en
soi, déductible du revenu du contribuable.... [C'est moi qui
souligne.]
Les biens en stock qui ne sont pas encore vendus
entrent dans le calcul du bénéfice d'une entreprise
commerciale puisqu'ils sont pris en considération
dans la formule susmentionnée relative au coût des
ventes. Le bénéfice ou la perte dépend toujours de
l'évaluation des stocks.
Le calcul du bénéfice d'une entreprise qui fait très
peu d'opérations est quelque peu différent du calcul
du bénéfice d'une entreprise commerciale dont l'ex-
ploitation est continue. La formule relative au «coût
des ventes» n'est généralement pas appliquée dans un
cas semblable parce qu'elle ne reflète pas la position
véritable de l'entreprise au chapitre du revenu.
Ainsi, lorsqu'il n'y a qu'un bien en stock, c'est
uniquement au moment où le bien est cédé qu'on
peut calculer le bénéfice ou la perte puisqu'avant la
disposition, il n'y a pas de recettes desquelles on peut
déduire les coûts.
Le paragraphe 10(1) dispose clairement que seuls
les biens figurant dans un «inventaire» peuvent faire
l'objet d'une réduction de valeur. Aux termes du
paragraphe 248(1), un «inventaire» comprend des
biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du
revenu d'un contribuable. Dans le cas d'une entre-
prise qui fait peu d'opérations, la valeur d'un bien en
stock n'entre dans le calcul du revenu qu'au moment
de la disposition. Par conséquent, au cours d'une
année où il n'y a pas de disposition, le bien n'entre
pas dans le calcul du revenu aux fins de l'impôt et,
partant, le paragraphe 10(1) ne s'applique pas.
L'avocat du demandeur fait valoir que la définition
du mot «entreprise» au paragraphe 248(1) comprend
expressément un risque de caractère commercial, sauf
pour l'application de l'alinéa 18(2)c), de l'article 54.2
et de l'alinéa 110.6(14)f). Comme le paragraphe
10(1) ne figure pas parmi les exceptions, le mot
«entreprise» employé dans ce paragraphe comprend
nécessairement un risque de caractère commercial. Je
ne partage pas cet avis.
Il est constant que ce qui n'est pas expressément
exclu d'une disposition législative peut quand même
être exclu s'il en résultait autrement une absurdité. En
l'espèce, j'estime qu'il serait absurde d'appliquer le
paragraphe 10(1) un risque de caractère commercial
puisque la Loi n'assujettit pas à l'impôt des bénéfices
non réalisés; il s'ensuit logiquement qu'elle ne
devrait pas s'appliquer à des pertes non réalisées. Si
la valeur du bien augmentait au cours de la période
durant laquelle celui-ci est détenu, la valeur majorée
ne serait assujettie à l'impôt qu'au moment de la dis
position.
Prenons le cas d'un juge qui se porte acquéreur
d'un terrain vague dans le cadre d'une opération
constituant un risque de caractère commercial. Par
suite d'un recul de l'économie, la valeur de ce terrain
chute. Ce juge devrait-il pouvoir réduire la valeur du
terrain aux termes du paragraphe 10(1) de la Loi et
déduire une perte d'entreprise de son salaire? D'un
point de vue pratique, je pense que non.
Comme le paragraphe 10(1) de la Loi porte sur
l'évaluation des biens figurant dans un inventaire
pour calculer le revenu tiré d'une entreprise, on ne
peut l'interpréter sans tenir compte du paragraphe
9(1) de la Loi. À la lecture du paragraphe 9(1), on
constate qu'une «réduction de valeur» du terrain
«Styles Property» ne refléterait pas la position vérita-
ble du demandeur au chapitre du revenu. Le para-
graphe 10(1) ne s'applique donc pas au contribuable
en l'espèce.
En conséquence, l'action du demandeur est rejetée.
La défenderesse a droit aux dépens.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.