A-438-89
Sa Majesté la Reine (appelante)
c.
Canadian Marconi Company (intimée)
RÉPERTORIA' CANADIAN MARCONI CO. C. CANADA (CA.)
Cour d'appel, juges Mahoney, Stone et Desjardins,
J.C.A.—Ottawa, 30 octobre et 14 novembre 1991.
Impôt sur le revenu — Nouvelle cotisation — Appel d'une
décision de la Section de première instance portant que le
M.R.N. n'est pas empêché par la loi d'établir une nouvelle
cotisation de l'impôt à l'égard de l'intimée pour les années
d'imposition 1977 1981 en dépit des dispositions relatives au
délai et à la renonciation de l'art. 152(4) de la Loi de l'impôt
sur le revenu — Selon l'art. 152(4)c), le M.R.N. peut établir
une nouvelle cotisation dans les quatre années qui suivent le
jour visé à l'art. 152(4)a)(ii) — L'art. 152(4)a)(ii) exige le
dépôt d'une renonciation dans un délai de quatre ans à comp-
ter du jour de l'expédition par la poste d'un avis de première
cotisation — Le litige portant sur le traitement fiscal d'un
revenu de placement pour les années d'imposition 1973 à 1976
a été tranché seulement le 6 novembre 1986 par la Cour
suprême du Canada — En l'absence de renonciation, le délai
de quatre ans commence à courir aux dates auxquelles la coti-
sation a été établie — Aucun avis d'opposition n'a été produit
— L'intimée demande l'établissement d'une nouvelle cotisa-
tion pour les années 1977 à 1981 conformément au jugement
rendu par la Cour suprême du Canada — Appel accueilli —
En l'absence d'une renonciation prévue à l'art. 152(4)a)(ii),
une nouvelle cotisation hors délai comprend implicitement une
allégation de présentation erronée des faits — Bien que la défi-
nition du mot «cotisation» vise une nouvelle cotisation, elle ne
saurait être invoquée pour rendre les mots «cotisation» et
«nouvelle cotisation» parfaitement synonymes dans une dispo
sition établissant clairement une distinction entre l'une et
l'autre et assujettissant chacun à un régime différent — En
application de l'art. 152(4), le ministre peut établir une cotisa-
tion à une date quelconque, mais une fois cette cotisation éta-
blie, il peut seulement en établir une nouvelle dans les délais
prescrits après avoir avisé le contribuable de la cotisation.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63,
art. 125.1(1), 152(4) (mod. par S.C. 1984, chap. 1, art.
84; chap. 45, art. 59), (6) (mod. par S.C. 1984, chap. 1,
art. 84), (8), 248.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art.
52b)(iii).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Minister of National Revenue v. Taylor, Maurice, [1961]
R.C.É. 318; [1961] C.T.C. 211; 61 DTC 1139; Sussex
Peerage Case, [1844] 11 Cl. and Fin. 85; (1844), 8 E.R.
1034 (H.L.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Davis (WW) c La Reine, [1984] CTC 564; (1984), 84
DTC 6518 (C.F. Ire inst.); Smerchanski c. Ministre du
Revenu national, [1974] 1 C.F. 554; (1974), 45 D.L.R.
(3d) 254; [1974] CTC 241; 74 DTC 6197; 2 N.R. 197
(C.A.); Smerchanski c. Ministre du Revenu national,
[1977] 2 R.C.S. 23; [1976] CTC 488; (1976), C.R.N.S.
228; 76 DTC 6247; 9 N.R. 459.
DÉCISION INFIRMÉE:
Canadian Marconi Co. c. Canada, [1990] 1 C.F. 141;
[1989] 2 C.T.C. 128; (1989), 89 DTC 5370 (1 re inst.).
DÉCISION CITÉE:
Canadian Marconi c. R., [1986] 2 R.C.S. 522; (1986), 33
D.L.R. (4th) 481; [1986] 2 C.T.C. 465; 86 DTC 6526; 70
N.R. 174.
AVOCATS:
Ian S. MacGregor et Josée Tremblay pour l'ap-
pelante.
Wilfrid Lefebvre, c. r. et Patrice Marceau pour
l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour l'ap-
pelante.
Ogilvy Renault, Montréal, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du
jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY, J.C.A.: Appel est interjeté d'une
décision publiée de la Section de première instances
qui a rendu un jugement déclaratoire en faveur de
l'intimée portant que le ministre du Revenu national
n'est pas empêché par la Loi d'établir une nouvelle
cotisation de l'impôt de l'intimée à l'égard des
années d'imposition 1977 1981, nonobstant les dis
positions relatives au délai et à la renonciation du
paragraphe 152(4) de la Loi de l'impôt sur le revenu
[S.C. 1970-71-72, chap. 63 (mod. par S.C. 1984,
chap. 1, art. 84)]. Aux époques pertinentes, ce para-
graphe disposait:
1 [1990] 1 C.F. 141 (PC inst.).
152....
(4) Le Ministre peut, à une date quelconque, fixer des
impôts, intérêts ou pénalités en vertu de la présente Partie, ou
donner avis par écrit, à toute personne qui a produit une décla-
ration de revenu pour une année d'imposition, qu'aucun impôt
n'est payable pour l'année d'imposition, et peut,
a) à une date quelconque, si le contribuable ou la personne
produisant la déclaration
(i) a fait une présentation erronée des faits, par négli-
gence, inattention ou omission volontaire, ou a commis
quelque fraude en produisant la déclaration ou fournissant
quelque renseignement sous le régime de la présente loi,
ou
(ii) a adressé au Ministre une renonciation, en la forme
prescrite, dans un délai de 4 ans à compter du jour de l'ex-
pédition par la poste d'un avis de première cotisation ou
d'une notification portant qu'aucun impôt n'est payable
pour une année d'imposition,
b) dans un délai de 7 ans à compter du jour visé au sous-
alinéa a)(ii), lorsque
(i) une cotisation ou une nouvelle cotisation de l'impôt du
contribuable a été exigée conformément au paragraphe
(6), ou l'aurait été, en application de ce paragraphe, si ce
n'avait été de la production par le contribuable de la for-
mule prescrite visée à ce paragraphe au plus tard à la date
qui y est mentionnée, ou
(ii) il y a lieu, à la suite de l'établissement de la cotisation
ou d'une nouvelle cotisation de l'impôt d'un autre contri-
buable, conformément au présent alinéa, ou au paragraphe
(6), d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation de
l'impôt du contribuable pour toute année d'imposition
pertinente, et
c) dans un délai de 4 ans à compter du jour visé au sous-
alinéa a)(ii), dans tous les autres cas,
procéder à de nouvelles cotisations ou en établir de supplémen-
taires, ou fixer des impôts, intérêts ou pénalités en vertu de la
présente Partie, selon que les circonstances l'exigent, sauf
qu'une nouvelle cotisation, une cotisation supplémentaire ou
une cotisation peuvent être établies en vertu de l'alinéa b) plus
de 4 ans après la date visée au sous-alinéa a)(ii) seulement si
cette mesure peut être raisonnablement considérée comme se
rapportant à la cotisation ou à la nouvelle cotisation visée à cet
alinéa.
Depuis lors, les délais de sept et de quatre ans ont été
réduits à six et trois anse, mais le paragraphe 152(4)
n'a pas été modifié par ailleurs. Le sous-alinéa a)(i)
et l'alinéa b) ne sont pas directement en cause, bien
qu'ils doivent, bien entendu, être examinés dans le
contexte de l'économie de la Loi. Il n'est pas ques
tion de présentation erronée des faits ou de fraude. La
prorogation de trois ans autorisée par l'alinéa b) per-
met la cotisation ou la nouvelle cotisation qui serait
2 S.C. 1984, chap. 45, art. 59(1).
autrement empêchée par la Loi seulement lorsque le
contribuable obtient le droit à une déduction dans
l'un des cas énumérés au paragraphe 152(6) [mod.
par S.C. 1984, chap. 1, art. 84], à savoir l'accroisse-
ment ou l'établissement d'une perte qui peut être
reportée rétrospectivement sur l'année d'imposition
visée par la cotisation ou par la nouvelle cotisation.
L'action a été entièrement instruite à partir d'un
exposé conjoint des faits. Le premier litige entre le
ministre et l'intimée portait sur le traitement fiscal
des intérêts réalisés sur des valeurs à court terme. Le
ministre a jugé qu'il s'agissait de revenus tirés de
biens et a exclu ces sommes du calcul des bénéfices
de fabrication et de transformation au Canada réalisés
par l'intimée, en vertu du paragraphe 125.1(1) de la
Loi. L'intimée avait soutenu qu'il s'agissait d'un
revenu tiré d'une entreprise exploitée activement, et
qu'il fallait donc en tenir compte dans ce calcul. Pour
ce qui était de ses années d'imposition 1973 à 1976,
inclusivement, l'intimée s'était opposée aux nou-
velles cotisations établies par le ministre. Elle a fina-
lement eu gain de cause dans un pourvoi devant la
Cour suprême du Canada 3 , qui a rendu son jugement
le 6 novembre 1986.
Pendant les années d'imposition en cause en l'es-
pèce, c'est-à-dire de 1977 à 1981, inclusivement,
l'intimée a continué à toucher des intérêts sur des
placements à court terme, pour les inclure dans son
calcul des bénéfices de fabrication et de transforma
tion au Canada, et à produire ses déclarations de
revenus en conséquence. Une première cotisation a
été établie à l'égard de chacune de ces années le 29
janvier 1980, le 25 septembre 1979, le 24 janvier
1980, le 11 décembre 1980 et le 18 mars 1982, res-
pectivement. En ce qui a trait aux années d'imposi-
tion en cause, chacune de ces dates représente, res-
pectivement, le «jour visé au sous-alinéa a)(ii)» à
partir duquel le délai de quatre ans prévu à l'alinéa
152(4)c) commençait à courir. Pendant que les tribu-
naux étaient saisis de l'appel des nouvelles cotisa-
tions établies à l'égard des années 1973 à 1976, le
ministre a établi, par des avis à cet effet en date du 4
juillet 1983, des nouvelles cotisations à l'égard des
années d'imposition 1977 à 1981 de l'intimée, par
lesquelles il excluait les revenus de placement du cal-
cul des bénéfices de fabrication et de transformation
3 [1986] 2 R.C.S. 522.
au Canada. L'intimée n'a pas produit d'avis d'oppo-
sition ni de renonciation dans le délai de quatre ans.
Ce délai expira à l'égard de toutes les années d'impo-
sition en cause avant que la Cour suprême ne rende
son jugement.
L'intimée a demandé au ministre d'établir une
nouvelle cotisation à son égard pour les années 1977
à 1981, en accord avec le jugement de la Cour
suprême. Le ministre affirme qu'il n'a pas le pouvoir
de le faire. Il n'est pas question de l'y contraindre.
Les conclusions du juge de première instance sont
exposées à partir de la page 159 de la décision
publiée. Dans un premier temps, il a conclu que la loi
était ambiguë, puis il a énoncé les deux interpréta-
tions possibles en ces termes [à la page 1601:
1. Pour lever l'ambiguïté de la formulation du paragraphe
152(4), faut-il voir dans cette disposition l'intention du législa-
teur de mettre un point final à tout le mécanisme de l'établisse-
ment d'une cotisation si les délais qui y sont prévus ne sont pas
respectés? Dans l'affirmative, la question serait tranchée.
2. Par contre, s'il s'avère que les délais prévus existent pour le
bénéfice du contribuable, le pouvoir du ministre d'établir des
cotisations à une date quelconque serait toujours en vigueur, et
il serait loisible au contribuable d'invoquer les moyens de
défense que lui accorde la Loi, s'il le désire.
Il convient de signaler que le juge de première ins
tance ne s'est pas demandé si le contribuable pouvait
renoncer au délai avant que le ministre n'établisse sa
nouvelle cotisation, autrement que dans le délai et de
la manière prescrits au sous-alinéa 152(4)a)(ii), et
cette question n'a pas été soulevée devant nous.
L'argument veut que, malgré le délai, le ministre
peut, à une date quelconque, établir une nouvelle
cotisation à l'égard de tout contribuable et à l'égard
de toute année d'imposition. Le contribuable peut
ensuite choisir de renoncer au délai en ne l'invoquant
pas en défense. Voilà comment la renonciation s'ins-
crit dans le processus et, si le ministre avait le pou-
voir d'établir une nouvelle cotisation, il n'y aurait
aucune raison, à mon avis, qui empêcherait un contri-
buable de renoncer au délai en s'abstenant d'exercer
un droit personnel de s'opposer à une nouvelle coti-
sation 4 . Puisque le ministre peut établir une nouvelle
4 Smerchanski c. Ministre du Revenu national, [1974] 1 C.F.
554 (C.A.); [1977] 2 R.C.S. 23. Cet arrêt, sur lequel s'est
appuyé le juge de première instance, portait sur la renonciation
(Suite à la page suivante)
cotisation à l'égard de n'importe quelle année d'im-
position à une date quelconque, il s'ensuit que tout
contribuable, au gré du ministre, risque d'avoir à
invoquer, dans les délais, d'abord par avis d'opposi-
tion, puis, si le ministre ne revient pas sur sa déci-
sion, en interjetant appel à la Cour de l'impôt pour
invoquer le bénéfice du délai, et doit être prêt à con-
tester l'affaire jusqu'à la dernière instance d'appel
devant laquelle le ministre pourra choisir de faire
valoir la nouvelle cotisation, avec permission ou de
plein droit.
L'intimée invoque la décision du juge Reed dans
l'affaire Davis (WW) c. La Reines, au soutien de cette
proposition. Dans ce jugement, le juge s'était
exprimé en ces termes:
Le ministre n'est pas tenu de prouver les fausses déclarations
avant d'envoyer un avis de nouvelle cotisation établi après
l'expiration du délai de quatre ans prévu par la loi. Les fausses
déclarations n'ont à être prouvées que si l'affaire est instruite.
Le contribuable qui reçoit un avis de nouvelle cotisation a deux
choix: il peut acquitter cette dernière ou la contester. S'il est
d'accord avec la nouvelle cotisation, il ne prendra normale-
ment pas d'autre mesure et acquittera la somme demandée; s'il
est en désaccord avec la nouvelle cotisation, il s'y opposera et
portera l'affaire devant les tribunaux; dans un cas comme celui
qui nous occupe, c'est alors que le ministre a le fardeau de
prouver les fausses déclarations.
Apparemment, dans cette affaire, le ministre avait
allégué les fausses représentations du fait qu'il avait
établi une nouvelle cotisation après l'expiration du
délai de quatre ans. Dans ce cas, l'énoncé de la règle
de droit est inattaquable, pourvu que le ministre ne
change pas d'idée avant que l'affaire ne soit instruite.
Manifestement, une nouvelle cotisation fondée sur
une présentation erronée des faits visée par le sous-
alinéa 152(4)a)(i) peut être établie après l'expiration
du délai de quatre ans, et il est tout aussi manifeste
que l'allégation doit être prouvée à l'instruction.
(Suite de la page précédente)
à un droit d'appel d'une nouvelle cotisation imposée comme
l'une des conditions auxquelles le ministre avait accepté de ne
pas poursuivre le contribuable pour évasion fiscale. En donnant
son accord, le contribuable se trouvait à reconnaître implicite-
ment qu'il avait commis une fraude ou, du moins, qu'il avait
fait une présentation erronée des faits, au sens du sous-alinéa
152(4)a)(i), si bien qu'aucun délai ne s'appliquait en l'espèce.
5 [1984] CTC 564 (C.F. lre inst.), à la p. 565.
La décision qui fait jurisprudence en la matière est
celle du juge Cameron dans l'affaire Minister of
National Revenue v. Taylor, Maurice 6 , qui a affirmé
ce qui suit:
[m oucrtox] ... dans tout appel à la Commission d'appel de
l'impôt ou à cette Cour relatif à une nouvelle cotisation établie
après l'expiration du délai prévu dans la loi et fondée sur la
fraude ou une présentation erronée des faits, il incombe au
ministre de convaincre d'abord la Cour que le contribua-
ble ... a «fait une présentation erronée des faits ou a commis
quelque fraude ... » à moins que le contribuable, dans ses
plaidoiries ... ou à l'audience, n'ait avoué avoir agi de la
sorte. Du fait qu'il établit une nouvelle cotisation après l'expi-
ration du délai prévu dans la loi, il faut tenir pour acquis que le
ministre allègue quelque présentation erronée des faits ou
quelque fraude, si bien qu'il est tenu de la prouver. [C'est moi
qui souligne.]
En l'absence d'une renonciation prévue au sous-ali-
néa 152(4)a)(ii), une nouvelle cotisation hors délai
comprend implicitement une allégation de présenta-
tion erronée des faits.
Lorsque le ministre allègue, expressément ou
implicitement, une présentation erronée des faits ou
de la fraude, le fait d'obliger un contribuable à s'op-
poser à une nouvelle cotisation hors délai n'a rien
d'odieux. En toute déférence, il en va tout autrement
lorsqu'il n'y a pas eu d'allégation de fraude ou de
présentation erronée des faits. Cette distinction de
traitement est fondée sur des principes évidents rela-
tifs à la politique.
S'appuyant sur le paragraphe 152(8), le juge de
première instance a conclu que le législateur avait
voulu qu'une nouvelle cotisation hors délai soit annu-
lable plutôt que nulle.
152... .
(8) Sous réserve de modifications qui peuvent y être appor-
tées ou d'annulation qui peut être prononcée lors d'une opposi
tion ou d'un appel fait en vertu de la présente Partie et sous
réserve d'une nouvelle cotisation, une cotisation est réputée
être valide et exécutoire nonobstant toute erreur, vice de forme
ou omission dans cette cotisation ou dans toute procédure s'y
rattachant en vertu de la présente loi.
Le juge s'est exprimé ainsi [à la page 164]:
[Le paragraphe 152(4)] doit être interprété à la lumière de ses
premiers mots, «le Ministre peut, à une date quelconque, fixer
des impôts», et à la lumière de la présomption de validité de
toute cotisation en vertu du paragraphe 152(8) ...
6 [1961] R.C.É. 318, à la p. 320.
Il est vrai que le paragraphe 248(1) de la Loi dispose:
248. (1) .. .
«cotisation» comprend une nouvelle cotisation.
À mon avis, cette disposition interprétative ne saurait
prévaloir de manière à rendre les mots «cotisation» et
«nouvelle cotisation» parfaitement synonymes dans
une disposition qui établit clairement une distinction
entre l'une et l'autre et dont les termes exprès assujet-
tissent chacun à un régime différent, comme le fait, à
mon sens, le paragraphe 152(4). Le ministre peut éta-
blir une cotisation à une date quelconque. Cependant,
une fois cette cotisation établie, il peut seulement en
établir une nouvelle dans les délais prescrits après
avoir avisé le contribuable de la cotisation 7 .
La présente affaire est difficile du point de vue de
l'intimée. Cependant, j'estime que le présent appel
porte sur une question plutôt simple d'interprétation
législative. Il suffit de s'en rapporter au principe
jurisprudentiel énoncé dans l'arrêt Sussex Peerage
Cases,
[TRADUCTION] Si le libellé de la loi est précis et sans ambiguïté,
il suffit d'accorder aux mots leur sens propre ordinaire.
À mon avis, le paragraphe 152(4), en ce qui concerne
la question qui se pose en l'espèce, ne présente
aucune ambiguïté. Il me semble que le paragraphe
152(4) est clair et on ne m'a rien signalé dans son
contexte immédiat ou dans d'autres dispositions de la
Loi qui m'inciterait à l'interpréter autrement que
dans son sens manifeste.
J'accueillerais l'appel avec dépens et, conformé-
ment au sous-alinéa 52b)(iii) de la Loi sur la Cour
fédérale [L.R.C. (1985), chap. F-7], je déclarerais
qu'eu égard aux faits admis de part et d'autre, le
ministre du Revenu national n'avait aucun pouvoir
d'établir des nouvelles cotisations à l'égard de l'inti-
mée pour ses années d'imposition 1977 à 1981, inclu-
sivement, à compter du 6 novembre 1986.
LE JUGE STONE, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.: Je souscris à ces
motifs.
7 De la même manière, malgré les mots introductifs du para-
graphe, s'il n'établit aucune cotisation mais qu'il avise le con-
tribuable qu'aucun impôt n'est payable, il ne peut établir de
cotisation à une date quelconque: il doit l'établir dans le délai
prescrit.
8 [1844] 11 Cl. and Fin. 85, à la p. 143; (1844), 8 E.R. 1034
(H.L.), à la p. 1057.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.