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A-576-91
Sa Majesté la Reine (appelante) (défenderesse) c.
William Erasmus, Felix Lockhart, Gerry Cheezie, Helen Hardisty, Ethel Liske, Angeline Villebrun, en leur nom propre et au nom des employés de la Nation 'Dénée, et la Nation Dénée (intimés) (demandeurs)
RÉPERTORIA' NATION DÉNÉE C. CANADA (CA.)
Cour d'appel, juges Pratte, MacGuigan et Desjardins, J.C.A.—Vancouver, 10 janvier; Ottawa, 30 mars 1992.
Compétence de la Cour fédérale Section de première ins tance Action en jugement déclarant que le salaire versé aux employés indiens d'une bande en vertu d'un accord avec la Couronne est exempté d'impôt, et en remboursement de l'ar- gent déjà payé pour l'impôt Assujettissement à l'impôt sur le revenu établi par cotisation L'art. 29 de la Loi sur la Cour fédérale ne prive pas la Cour de sa compétence Cette disposition ne s'applique pas puisqu'il ne s'agit pas d'un appel contre la cotisation La Loi de l'impôt sur le revenu ne limite pas la compétence de la Section de première instance pour rendre un jugement déclaratoire.
Loi de l'impôt sur le revenu Pratique Appel contre le rejet de la requête en radiation de la déclaration Action en jugement déclarant que le salaire versé aux employés indiens d'une bande en vertu d'un accord avec la Couronne est exempté d'impôt, et en remboursement de l'argent déjà payé pour l'impôt Assujettissement à l'impôt établi par cotisa- tions, lesquelles n'ont pas été contestées Appel accueilli Aucune cause raisonnable d'action à l'égard des années pour lesquelles l'assujettissement à l'impôt a été établi par cotisa- tions, lesquelles sont réputées valides tant qu'elles ne sont pas annulées ou Modifiées sous le régime de la Loi (art. 152(8))— Le ministre ayant le droit de retenir les sommes versées au•titre de l'impôt jusqu'à ce que l'assujettissement à l'impôt soit déterminé par voie de cotisation, la Cour ne peut ordonner le remboursement, à moins que la cotisation ne fasse ressortir un paiement en trop et que le ministre ne refuse illégalement de rembourser l'excédent Le fait que ,les demandeurs habitent dans la réserve et y travaillent au bénéfice d'Indiens qui y vivent n'a aucun rapport avec la question de savoir si leur revenu est imposable.
Peuples autochtones Taxation La constitution de terres au bénéfice d'Indiens en vertu de la Loi sur les terres territo- riales ne revient pas à créer une réserve au sens de la Loi sur les Indiens Le fait que des Indiens habitent dans une réserve et y travaillent n'a aucun rapport avec la question de savoir si le revenu est imposable ou non.
Pratique Parties Qualité pour agir Requête en radiation de la Nation Dénée et des employés non nommés de la liste des demandeurs dans l'action en jugement déclarant que le salaire versé aux employés indiens d'une bande en vertu d'un accord avec la Couronne est exempté d'impôt Requête rejetée La Nation Dénée et ses employés ont un intérêt dans l'instance puisque la bande continuera à avoir à l'avenir des employés qui recevront un revenu du même genre que celui des demandeurs nommés.
Appel contre le rejet de la requête en radiation de la déclara- tion. Les individus demandeurs sont soit des employés de la Nation Dénée, dont le salaire provenait de fonds reçus en application d'un accord avec la Couronne, soit des étudiants qui ont reçu des bourses accordées par le gouvernement territo rial avec des fonds reçus de l'État fédéral. Les individus demandeurs sont Indiens, et la plupart vivaient sur des terres réservées en application de la Loi sur les terres territoriales, ils travaillaient au service des membres de leur bande. Ils ont payé l'impôt sur le revenu frappant ces salaires ou ces bourses. Les demandeurs soutiennent que leur revenu est exempté d'im- pôt par application des articles 87 et 90 de la Loi sur les Indiens et aussi par ce motif que, les terres réservées sous le régime de la Loi sur les terres territoriales étant des réserves au sens de la Loi sur les Indiens, ils faisaient leur travail sur ces terres au bénéfice des membres de bande qui y habitent. La déclaration conclut à jugements déclarant que: (1) les deman- deurs ne sont pas assujettis à l'impôt; (2) l'argent versé à titre d'impôt doit être remboursé; (3) le revenu gagné sur les terres réservées en application de la Loi sur les terres territoriales n'est pas imposable sous le régime de la Loi sur les Indiens, par application des articles 87 et 90. Il a été établi par affidavit que pour la plupart des années en question, l'assujettissement des demandeurs à l'impôt avait été déterminé par voie de coti- sations, lesquelles n'avaient jamais été contestées avec succès. L'appelante soutient que la Cour est privée de sa compétence par l'article 29 de la Loi sur la Cour fédérale, attendu que jus- qu'au ler janvier 1991, une cotisation est une décision pouvant être portée en appel devant la Cour fédérale et, à compter de cette date, devant la Cour canadienne de l'impôt. L'appelante soutient encore que la Cour est implicitement privée de sa compétence par la Loi de l'impôt sur le revenu qui prévoit un mécanisme de dépistage des cotisations d'impôt sur le revenu et de recouvrement des paiements en trop. Enfin, elle soutient que la déclaration ne révèle aucune cause raisonnable d'action, qu'elle est futile et vexatoire et constitue un abus des procé- dures de la Cour, et que la Nation Dénée et les employés non nommés devraient être radiés de la liste des demandeurs. Elle conclut aussi à la radiation des allégations selon lesquelles les demandeurs habitaient et travaillaient sur des terres réservées en application de la Loi sur les terres territoriales, par ce motif que ces terres ne sont pas des réserves et qu'en tout cas, le fait que les demandeurs habitaient et travaillaient dans une réserve n'a aucun rapport avec la question de savoir si leur revenu est imposable ou non.
Arrêt: l'appel devrait être accueilli.
L'article 29 de la Loi sur la Cour fédérale ne s'applique pas en l'espèce puisque les demandeurs ne contestent aucune coti-
sation d'impôt, mais ne font que conclure à jugement déclara- toire quant à leur assujettissement à l'impôt. Ils ne pourraient avoir gain de cause à l'égard des années d'imposition leur assujettissement à l'impôt a été déterminé par cotisation, puis- que toute cotisation d'impôt sur le revenu est réputée être valide et exécutoire tant qu'elle n'est pas annulée ou modifiée conformément à la Loi (paragraphe 152(8)). L'affidavit ne fait que montrer que les demandeurs ne justifient pas d'une cause raisonnable d'action à l'égard de ces années, conclusion à laquelle il ne saurait servir.
Rien dans la Loi de l'impôt sur le revenu ne limite la compé- tence de la Section de première instance pour rendre, le cas échéant, un jugement déclaratoire sur l'assujettissement à l'im- pôt de certains revenus ou une ordonnance portant rembourse- ment des sommes que le ministre retient indûment. Mais étant donné que le ministre a le droit de retenir toutes les sommes versées par le contribuable au titre de l'impôt jusqu'à ce que l'assujettissement de ce dernier à l'impôt ait été déterminé par voie de cotisation (article 164), la Cour ne peut lui ordonner de rembourser les sommes indûment versées au titre de l'impôt, à moins qu'il ne soit établi que le ministre, après avoir constaté à la suite de la cotisation que la somme versée excède l'impôt à payer, refuse illégalement de rembourser le paiement en trop. La déclaration ne faisant nullement état de pareille situation, il faut en radier la partie qui conclut au remboursement.
La constitution de terres au bénéfice d'Indiens dans le cadre de la Loi sur les terres territoriales ne revient pas à créer une réserve au sens de la Loi sur les Indiens. Le fait que les indivi- dus demandeurs habitent dans une réserve et y travaillent au bénéfice d'Indiens qui y vivent, n'a aucun rapport avec la question de savoir si le revenu qu'ils tirent de ce travail est imposable ou non. Il faut donc radier cette partie de la déclara- tion.
Vu la portée générale des jugements déclaratoires auxquels concluent les demandeurs et étant donné que la Nation Dénée continuera à avoir à l'avenir des employés qui recevront un revenu du même genre, la Nation Dénée et ses employés non nommés ont un intérêt dans l'instance et ne devraient pas être radiés de la liste des demandeurs.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 152, 164.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 29
(mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 51, art. 12). Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), eh. I-5, art. 2, 87, 90. Loi sur les terres territoriales, L.R.C. (1985), ch. T-7. Règles de la Cour fédérale, C..R.C., ch. 663, Règle 419.
JURISPRUDENCE DÉCISIONS CITÉES:
La ville de Hay River e. R., [1980] I C.F. 262; (1979), 101 D.L.R. (3d) 184; [1979] 2 C.N.L.R. 101 (Ire inst.); R. e. Drybone.c, [1970] R.C.S. 282; (1969), 9 D.L.R. (3d) 473; 71 W.W.R. 161; [1970] 3 C.C.C. 355; 10 C.R.N.S.
334; R. c. National Indian Brotherhood, [1979] 1 C.F. 103; (1978), 92 D.L.R. (3d) 333; [1978] CTC 680; 78 DTC 6488 (1« inst.); Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29; (1983), 144 D.L.R. (3d) 193; [1983] 2 C.N.L.R. 89; [1983] CTC 20; 83 DTC 5041; 46 N.R. 41; Williams c. Canada, [1990] 3 C.F. 169; (1990), 72 D.L.R. (4th) 336; [ 1990] 2 C.T.C. 124; 90 DTC 6399 (C.A.).
APPEL contre le rejet d'une requête en radiation
de la déclaration, [1991] 1 C.T.C. 337. Appel accueilli en partie.
AVOCATS:
P. F. Partridge pour l'appelante (défenderesse). J. F. Sayers pour les intimés (demandeurs).
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour l'ap- pelante (défenderesse).
Judith F. Sayers, Port Alberni (Colombie-Bri- tannique) pour les intimés (demandeurs).
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE PRATTE, J.C.A.: Il y a en l'espèce appel contre la décision par laquelle la Section de première instance [[1991] 1 C.T.C. 337] a rejeté la requête introduite par l'appelante, défenderesse en première instance, en radiation de la déclaration des intimés (appelés ci-après «les demandeurs») en application
de la Règle 419 des Règles de la Cour fédérale [C.R.C., ch. 663].
La déclaration, déposée le 22 janvier 1991, émane de six individus (agissant en leur nom propre et au nom des employés de la Nation Dénée, personne morale constituée sous le régime des lois des Terri- toires du Nord-Ouest et représentant les 28 bandes de la Nation Dénée) et de la Nation Dénée elle-même. Elle fait valoir que les demandeurs individuellement nommés sont Indiens au sens de l'article 2 de la Loi sur les Indiens [L.R.C. (1985), ch. I-5] et membres de bandes indiennes qui étaient parties soit au Traité 8 soit au Traité 11; que depuis 1982 ils ont été au service de la Nation Dénée en diverses qualités et pour des périodes déterminées; que leur salaire pro- venait de fonds reçus par la Nation Dénée en applica tion d'un ou des accords qu'elle avait conclus avec Sa Majesté; que les demandeurs William Erasmus et Gerry Cheezie étaient aussi employés et rémunérés
par le Secrétariat Déné-Métis, organisme subven- tionné par la Nation Dénée au moyen de fonds reçus en application d'un accord avec Sa Majesté; qu'en outre, de 1980 1986, William Erasmus poursuivait ses études à l'Université d'Alberta grâce à une bourse accordée par le gouvernement territorial avec des fonds que celui-ci avait reçus à cette fin de l'État fédéral; que la plupart des individus demandeurs vivaient sur les terres réservées à leur bande en appli cation de la Loi sur les terres territoriales [L.R.C. (1985), ch. T-7], et y travaillaient au service des membres de leur bande; qu'à l'égard de la plupart des années en question, les demandeurs individuellement nommés ont payé l'impôt sur le revenu frappant les salaires ou les bourses qu'ils recevaient comme indiqué ci-dessus; que leur revenu était cependant exempté d'impôt, par application des articles 87 et 90 de la Loi sur les Indiens, conformément aux traités et aussi, les terres réservées sous le régime de la Loi sur les terres territoriales étant des réserves au sens de la Loi sur les Indiens, par ce motif qu'ils faisaient leur travail sur ces terres au bénéfice des membres de bande qui y habitent.
S'appuyant sur ces allégations, les demandeurs concluent aux mesures de réparation suivantes:
[TRADUCTION] LES DEMANDEURS CONCLUENT A CE QUI SUIT:
a) Jugement déclarant que le revenu gagné par les employés de la Nation Dénée qui sont Indiens et qui sont rémunérés conformément à un accord entre la Nation Dénée et Sa Majesté, n'est pas imposable.
b) Jugement déclarant que l'argent versé à titre d'impôt par les employés de la Nation Dénée qui sont Indiens et qui ont été rémunérés au moyen de fonds reçus en application d'un accord entre la Nation Dénée et Sa Majesté, doit être remboursé avec intérêts à tous les employés de la Nation Dénée.
c) Jugement déclarant que les terres réservées sous le régime de la Loi sur les terres territoriales sont des réserves au sens de la Loi sur les Indiens, que les articles 87 et 90 leur sont applicables et que le revenu gagné sur ces terres réser- vées n'est pas imposable.
d) Ordonnance portant que l'argent versé à titre d'impôt par les employés de la Nation Dénée sur le revenu gagné sur les terres réservées doit, conformément à l'article 87 de la Loi sur les Indiens, être remboursé avec intérêts à tous les employés de la Nation Dénée qui réunissent les conditions voulues.
e) Jugement déclarant que l'argent reçu par le gouvernement territorial pour l'éducation des étudiants indiens, en appli cation d'un accord entre le gouvernement fédéral et le gou- vernement territorial, n'est pas imposable.
f) Dépens de cette action.
g) Toute autre mesure de réparation à laquelle pourrait con- clure l'avocate des demandeurs avec l'autorisation de l'ho- norable Cour.
Comme indiqué plus haut, l'appèlante a conclu à la radiation de cette déclaration et a déposé, à l'appui de sa requête, l'affidavit d'un employé du ministère du Revenu pour établir que, pour la plupart des années en question, l'assujettissement des demandeurs à l'impôt sur le revenu avait été déterminé par cotisa- tion sous le régime de l'article 152 de la Loi de l'im- pôt sur le revenu [S.C. 1970-71-72, ch. 63]. L'appe- lante faisait valoir que vu l'article 29 de la Loi sur la Cour fédérale [L.R.C. (1985), ch. F-7 (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 51, art. 12)], la Cour n'avait pas compétence pour connaître de cette action, et que tout ou partie de la déclaration ne révé- lait aucune cause raisonnable d'action, ou était futile, vexatoire et constituait un abus des procédures de la Cour.
Le juge Pinard a rejeté la requête, n'étant pas con- vaincu que la Cour n'avait pas compétence ou que la déclaration ne révélait pas une cause raisonnable d'action.
L'avocat de l'appelante fait valoir trois motifs d'appel. Son principal argument est que si le juge Pinard avait pris en considération l'affidavit déposé à l'appui de la requête en radiation, il aurait conclu que la Cour n'avait pas compétence pour connaître de cette action vu les termes mêmes de l'article 29 de la Loi sur la Cour fédérale et vu le sens général de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il soutient en outre qu'en tout cas, certaines allégations de la déclaration devraient être radiées puisqu'elles ne révèlent aucune cause raisonnable d'action, et que la Nation Dénée et les employés non nommés de cette dernière devraient être radiés de la liste des demandeurs.
En ce qui concerne ce dernier argument, il faut reconnaître que la déclaration ne comporte aucune allégation concernant les employés non nommés de la Nation Dénée ou expliquant l'intérêt de cette dernière en la matière, puisque tous les faits articulés se rap- portent au revenu gagné par les individus deman- deurs par le passé. Cependant, si on considère la por- tée générale des jugements déclaratoires auxquels concluent les demandeurs, et si on considère le fait, évident quoique non articulé, que la Nation Dénée
continuera à avoir à l'avenir des employés qui rece- vront un revenu du même genre que celui reçu par le passé par les demandeurs individuellement nommés, on ne peut éviter de conclure que, malgré les lacunes de la déclaration, la Nation Dénée et ses employés non nommés ont un intérêt dans cette instance et ne devraient pas être radiés à titre de demandeurs.
J'examine maintenant les deux autres motifs d'ap- pel.
I—Compétence de la Cour
L'avocat de l'appelante fait observer, en préam- bule de son argument à ce sujet, que la fin de non- recevoir prévue à la Règle 419(2) 1 ne s'appliquant qu'en cas de requête en radiation d'une plaidoirie au motif qu'elle ne révèle aucune cause raisonnable d'action, il faut prendre en considération l'affidavit déposé à l'appui de la requête pour examiner s'il y a lieu de radier la déclaration par ce motif qu'elle fait valoir une cause d'action qui échappe à la compé- tence de la Cour. Cet argument est si manifestement juste que je doute que le juge Pinard entendît décider le contraire.
L'affidavit déposé par l'appelante à l'appui de la requête montre que pour la plupart des années d'im- position en cause, l'assujettissement des demandeurs individuellement nommés à l'impôt sur le revenu était confirmé par des cotisations qui n'ont jamais été contestées avec succès sous le régime de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il s'ensuit, soutient l'avocat de l'appelante, que pour ces années à tout le moins, la Cour est privée par l'article 29 de la Loi sur la Cour fédérale 2 de la compétence pour accorder les mesures
Voici les passages applicables de la Règle 419:
Règle 419. (1) La Cour pourra, à tout stade d'une action, ordonner la radiation de tout ou partie d'une plaidoirie avec ou sans permission d'amendement, au motif
a) qu'elle ne révèle aucune cause raisonnable d'action ou de défense, selon le cas,
(2) Aucune preuve n'est admissible sur une demande aux ternies de l'alinéa (1)a).
2 L'art. 29, abrogé depuis [L.C. 1990, ch. 8, art. 8], pré- voyait ce qui suit:
29. Par dérogation aux articles 18 et 28, lorsqu'une loi fédé- rale prévoit expressément qu'il peut être interjeté appel,
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de réparation recherchées par les demandeurs, attendu que jusqu'au ler janvier 1991, une cotisation d'impôt sur le revenu pouvait être portée en appel devant la Cour fédérale et, à compter de cette date, devant la Cour canadienne de l'impôt.
Ce raisonnement serait irréfutable si les deman- deurs cherchaient par leur action à faire annuler ou modifier des cotisations d'impôt sur le revenu. Tel n'est cependant pas le cas. Ils ne font que conclure à jugement déclarant que certains types de revenu sont exemptés d'impôt et que l'argent qu'ils ont versé à titre d'impôt doit leur être remboursé. Attendu qu'ils ne contestent aucune cotisation d'impôt, l'article 29 n'a pas application en l'espèce.
Cela ne signifie pas que les demandeurs pourraient avoir gain de cause à l'égard des années d'imposition leur assujettissement à l'impôt a été déterminé par cotisation. Il est manifeste qu'ils ne le pourraient pas. La raison n'en est cependant pas que la Cour n'a pas compétence pour accorder les mesures de réparation demandées pour ces années, mais plutôt que pour ces années, les demandeurs n'ont pas droit à cette répara- tion puisque selon le paragraphe 152(8) de la Loi de l'impôt sur le revenu, toute cotisation d'impôt sur le revenu est réputée être valide et exécutoire tant qu'elle n'est pas annulée ou modifiée conformément aux dispositions de cette Loi.
Il s'ensuit que, contrairement à l'argument avancé par l'avocat de l'appelante, l'affidavit déposé à l'ap- pui de la requête ne montre pas que l'article 29 prive la Section de première instance de sa compétence à l'égard des années l'assujettissement des deman- deurs à l'impôt a été confirmé par cotisation; il ne fait que montrer que pour ces mêmes années, les deman- deurs ne justifient pas d'une cause raisonnable d'ac- tion, conclusion à laquelle l'affidavit ne saurait ser- vir.
(Suite de la page précédente)
devant la Cour fédérale, la Cour suprême, la Cour cana- dienne de l'impôt, le gouverneur en conseil ou le Conseil du Trésor, d'une décision ou ordonnance d'un office fédéral rendue à tout stade des procédures, cette décision ou ordon- nance ne peut, dans la mesure elle est susceptible d'un tel appel, faire l'objet de révision, de restriction, de prohibition, d'évocation, d'annulation ni d'aucune autre intervention, sauf dans la mesure et de la manière prévues dans cette Loi.
L'appelante soutient encore que, de toute façon, la Cour est implicitement privée de sa compétence pour connaître de l'action des demandeurs par la Loi de l'impôt sur le revenu qui prévoit un mécanisme de dépistage des cotisations d'impôt sur le revenu et de recouvrement des paiements en trop. Je ne saurais en convenir. Je ne vois rien dans la Loi qui limite la compétence de la Section de première instance pour rendre, le cas échéant, un jugement déclaratoire sur l'assujettissement à l'impôt de certains revenus ou une ordonnance portant remboursement des sommes que le ministre retient indûment.
Il est cependant important de noter que les disposi tions de la Loi de l'impôt sur le revenu sont, pour une raison différente, essentielles pour la solution de notre problème. Selon cette Loi, le ministre a le droit de retenir toutes les sommes versées par le contribua- ble au titre de l'impôt jusqu'à ce que l'assujettisse- ment de ce dernier à l'impôt ait été déterminé par voie de cotisation 3 . Il s'ensuit que tant que la cotisa- tion n'a pas été établie, un tribunal ne peut ordonner le remboursement des sommes versées au titre de l'impôt sur le revenu puisque jusque là, le ministre a le droit de les retenir, peu importe qu'elles aient été indûment versées ou non. Ce n'est qu'une fois la cotisation établie que le ministre est tenu de rembour- ser l'excédent par rapport au montant fixé par la coti- sation. Il s'ensuit que la Section de première instance ne peut ordonner au ministre de -rembourser les sommes indûment versées au titre de l'impôt, à moins qu'il ne soit établi que le ministre, après avoir constaté à la suite de la cotisation que la somme ver sée par le contribuable excède son assujettissement à l'impôt, refuse illégalement de rembourser le paie- ment en trop. La déclaration des demandeurs ne fait nullement état de pareille situation. Pour cette raison, il faut radier la partie de la déclaration, savoir les ali- néas b) et d) des chefs de demande, concluant à juge- ment déclarant que l'appelante doit rembourser les sommes versées à titre d'impôt par les demandeurs. À supposer même que toutes les allégations de la déclaration soient avérées, les demandeurs n'auraient quand même pas droit à cette réparation.
3 Voir l'art. 164 de la Loi de l'impôt sur le revenu.
II—Défaut de cause raisonnable d'action
L'avocat de l'appelante soutient enfin que cer- taines allégations de la déclaration doivent être radiées par ce motif qu'elles ne révèlent aucune cause raisonnable d'action. Il s'agit des allégations selon lesquelles les demandeurs individuellement nommés habitent sur des terres réservées en application de la Loi sur les terres territoriales et y travaillaient au bénéfice des Indiens qui y habitent. Selon l'avocat de l'appelante, il est établi que les terres réservées sous le régime de la Loi sur les terres territoriales ne sont pas des réserves 4 et, en tout cas, le fait que les demandeurs habitent dans une réserve et y travaillent n'a aucun rapport avec la question de savoir si leur revenu est exempté d'impôt ou non.
J'accueille cet argument. Il ressort de la déclara- tion que de l'avis des demandeurs, la constitution de terres au bénéfice d'Indiens dans le cadre de la Loi sur les terres territoriales revient à créer une réserve au sens de la Loi sur les Indiens. Cette position est à mon sens indéfendable. De toute façon, le fait que les individus demandeurs habitent dans une réserve et y travaillent au bénéfice d'Indiens qui y vivent, n'a aucun rapport avec la question de savoir si le revenu qu'ils tirent de ce travail est imposable ou non 5 . Je me prononce en conséquence pour la radiation de la dernière phrase du paragraphe 3, de la deuxième phrase des paragraphes 4, 8, 9 et 12, de la première phrase du paragraphe 13, du paragraphe 17, de la deuxième phrase du paragraphe 18, de la dernière phrase du paragraphe 19 et du paragraphe 21, de tout le paragraphe 24 et de l'alinéa c) des chefs de demande.
Par ces motifs, je me prononce pour l'accueil de l'appel avec dépens devant les deux Cours, l'infirma- tion de l'ordonnance de la Section de première ins tance et la radiation des parties susmentionnées de la déclaration. Je suis aussi d'avis qu'il y a lieu d'or- donner aux demandeurs de déposer dans les 15 jours une nouvelle déclaration modifiée, ne figureront
4 La ville de Hay River c. R., [1980] I C.F. 262 (1fe inst.); R. c. Drybones, [1970] R.C.S. 282, aux p. 282-285, 288-289, 299- 300.
5 R. c. National /ndian Brotherhood, [1979] 1 C.F. 103 (lre inst.); Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29; Williams c. Canada, [1990] 3 C.F. 169 (C.A.).
pas les parties radiées ci-dessus de la déclaration ini- tiale.
LE JUGE MACGUIGAN, J.C.A.: Je souscris aux motifs ci-dessus.
LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.: Je souscris aux motifs ci-dessus.
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