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T-2230-89
Edelbert Tetzlaff et Harold Tetzlaff (requérants)
' c.
Ministre de l'Environnement (intimé)
et
' Saskatchewan Water Corporation (intervenante)
RÉPERTORIÉ: TETZLAFF c. CANADA (MINISTRE DE L'ENVIRON- NEMENT) (1" INST.)
Section de première instance, juge Muldoon — Winnipeg, 23 janvier; Ottawa, 4 février 1991.
Pratique Parties Intervention Motifs supplémen- taires de l'ordonnance reléguant Sask. Water dans un rôle d'intervenante Dans l'arrêt Société des Acadiens du Nou- veau-Brunswick Inc. et autres c. Association of Parents for i Fairness in Education et autres, il a été statué que la compé- tence des cours supérieures provinciales en matière de pratique et de procédure, sauf dans les cas elle a été modifiée par voie législative, est celle de la High Court of Chancery d'An- gleterre La Court of Chancery avait le pouvoir discrétion- naire d'accorder l'autorisation d'appel à une personne qui n'avait pas été partie à l'action La Cour de l'Échiquier et la Cour fédérale sont les successeurs de la High Court of Chan cery La compétence inhérente en common law sur la procé- dure de la Cour et les parties peut être exercée en vertu du pouvoir discrétionnaire judiciaire, sauf interdiction légale L'étendue de la compétence autorisée peut être déterminée en fonction des art. 92, 96 ou 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 La Cour exerce son pouvoir discrétionnaire sur des principes à la fois de common law et d'equity pour rendre la justice conformément à la Règle 5, par analogie, en exerçant le pouvoir prévu à la Règle 1010(3).
Pratique Règle des «lacunes» Lorsque l'art. 2 de la Loi sur la Cour fédérale interdit d'ester en qualité d'intimé, la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire sur des principes à la fois de common law et d'equity pour rendre la justice confor- mément à la Règle 5 La Règle 1010 a été invoquée par analogie pour accorder la qualité pour agir à titre d'interve- nante La Règle 5 peut être invoquée par les deux sections de la Cour.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, 1) [L.R.C. (1985), appendice II, 5], art. 92(14), 96, 101.
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art. 2,3,4.
Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663, Règles 5, 1010(3).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick Inc. et autres c. Association of Parents for Fairness in Educa tion et autres, [1986] 1 R.C.S. 549; (1986), 69 N.B.R. (2d) 271; 27 D.L.R. (4th) 406; 177 A.P.R. 271; 66 N.R. 173; conf. Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick Inc. et Association de Conseillers Scolaires Francopho- nes du Nouveau-Brunswick c. Minority Language School Board No. 50 (défendeur) and Association of Parents for Fairness in Education, Grand Falls District 50 Branch (intervenante éventuelle) (1984), 54 N.B.R. (2d) 198; 8 D.L.R. (4th) 238; 140 A.P.R. 198; 8 Admin. L.R. 138 (C.A.); Sobeys Stores Ltd. c. Yeomans et Labour Standards Tribunal (N.-E.), [1989] 1 R.C.S. 238; (1989), 90 N.S.R. (2d) 271; 57 D.L.R. (4th) 1; 230 A.P.R. 271; 25 C.C.E.L. 162; 89 CLLC 14,017; 92 N.R. 179; Attorney -General for Ontario and Others v. Attor- ney -General for Canada and Others and Attorney -Gene ral for Quebec, [1947] A.C. 127 (C.P.).
AVOCATS:
Allan W. Scarth, c.r. et Gordon H. A. Mac kintosh pour les requérants.
Craig J. Henderson pour le ministre de l'En- vironnement, intimé.
D. E. Gauley, c.r., C. Wheatley et R. G. Kennedy pour Saskatchewan Water Corpora tion, intervenante.
PROCUREURS:
Thompson, Dorfman & Sweatman, Winni- peg, pour les requérants.
Le sous-procureur général du Canada pour le ministre de l'Environnement, intimé.
Gauley & Company, Saskatoon (Saskatche- wan) et Saskatchewan Water Corporation pour Saskatchewan Water Corporation, inter- venante.
Ce qui suit est la version française des motifs supplémentaires de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MULDOON: Les présents motifs com- plètent ceux qui ont été rendus en l'espèce, le 1" février 1991, au sujet de la qualité pour agir de Saskatchewan Water Corporation (Sask. Water).
Les motifs rendus le 1 er février 1991 ne faisaient pas référence à l'arrêt effectivement unanime de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick Inc. et autre c. Association of Parents for Fairness in Educa-
tion et autres, [ 1986] 1 R.C.S. 549. La question de la compétence inhérente d'accorder la permission d'en appeler à une personne qui n'est pas partie a été entièrement analysée et la compétence inhé- rente déterminée par le juge d'appel La Forest (ce qu'il était alors) dans la Cour d'appel du Nouveau- Brunswick [(1984), 54 N.B.R. (2d) 198], a été maintenue et confirmée à l'unanimité par la Cour suprême du Canada. Naturellement, il ne s'agit pas de la même situation qu'en l'espèce, puisque ces cas sont extrêmement rares, mais on y trouve une impression vivante du droit.
Une brève citation de la rubrique de l'arrêt Société des Acadiens aidera à bien cerner la ques tion en litige [aux pages 550 et 551]:
1) La question de la compétence
La Cour: Rien ne justifie la Cour à intervenir dans la décision de la Cour d'appel de faire droit aux demandes de l'intimée visant à obtenir l'autorisation d'appel et la proroga- tion du délai d'appel. La Cour d'appel du Nouveau-Brunswick possède une compétence inhérente en vertu du par. 8(2) de la Loi sur l'organisation judiciaire pour accorder l'autorisation d'appel à une personne non partie à l'instance. La compétence de la Cour d'appel en matière de pratique et de procédure est, sauf dans les cas elle a été modifiée par voie législative, essentiellement celle qu'exerçait la High Court of Chancery d'Angleterre. À l'examen de sa jurisprudence, on constate que, chaque fois que cela était approprié, cette dernière cour accor- dait l'autorisation d'appel à une personne qui n'avait pas été partie à l'action. Les Règles de procédure de la Cour d'appel l'autorisent aussi à faire droit à une demande de prorogation de délai. Cette compétence, qui existait très tôt dans la pratique des cours de chancellerie pour les demandes d'autorisation d'appel présentées par des personnes non parties, à l'instance, n'a pas été modifiée par les règles actuelles. La manière dont la cour de chancellerie allait exercer son pouvoir discrétionnaire dans une situation donnée ne tenait pas à un facteur en particulier ni à un groupe de facteurs; cela dépendait plutôt d'une combinaison des facteurs pertinents. En l'espèce, la Cour d'appel, agissant dans les limites de sa compétence, a pris en considération tous les facteurs pertinents et a fait droit aux demandes. Elle a exercé judiciairement son pouvoir discrétion- naire et sa décision ne saurait faire l'objet d'un pourvoi pour cause d'erreur. [Le texte original n'était pas souligné.]
La High Court of Chancery exerçait essentielle- ment une compétence en equity, et elle était tout autant l'ancêtre de la Cour de l'Échiquier et de la Cour fédérale, dûment créées par le Parlement, conformément à l'article 101 de la Loi constitu- tionnelle de 1867 [30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitution- nelle de 1982, 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5]], qu'elle était l'ancêtre des cours supérieures
provinciales créées par les assemblées législatives provinciales respectives conformément à l'article 92, rubrique 14 de cette même Loi constitution- nelle.
Les articles 3 et 4 de la Loi sur la Cour fédé- rale, L.R.C. (1985), chap. F-7, et ses modifica tions, disposent de façon valide:
3. Tribunal de droit, d'équité et d'amirauté du Canada, la Cour fédérale du Canada est maintenue à titre de tribunal additionnel propre à améliorer l'application du droit canadien. Elle continue d'être une cour supérieure d'archives ayant com- pétence en matière civile et pénale.
4. La Cour est formée de la Section d'appel, aussi dénommée la Cour d'appel ou la Cour d'appel fédérale, et de la Section de première instance.
Aussi la Loi établit une Cour fédérale composée de deux sections, successeur de la Cour de l'Échiquier du Canada, et de par ses racines historiques, aussi successeur de la High Court of Chancery. Point n'est besoin de rappeler que l'article 101 a conféré au Parlement, non seulement la compétence d'éta- blir la Cour suprême du Canada, mais aussi de scinder la Cour fédérale en deux sections «pour la meilleure administration des lois du Canada» et «nonobstant toute disposition de cette Loi» (consti- tutionnelle). Il est utile à cet égard de réexaminer le jugement du Comité judiciaire du Conseil privé dans l'affaire Attorney -General for Ontario and Others v. Attorney -General for Canada and Others and Attorney -General for Quebec, [1947] A.C. 127; Olmsted vol. 3, à la page 508, décision dans laquelle le pouvoir prépondérant du Parle- ment, en vertu du même article 101, d'abolir les appels devant le Conseil privé a été interprété comme étant valide et suprême. L'effet de cette clause «nonobstant» à l'article 101 a été défini par lord Jowitt L.C., et rapporté aux pages 153 A.C.; 535 Olmsted. A noter aussi ces termes du lord chancelier au nom du Comité (aux pages 151 A.C.; 533 Olmsted):
Les domaines du judiciaire et du législatif ne se confondent pas, les tribunaux provinciaux réglant toutes les questions, en dehors de celles pour lesquelles on a établi une cour spéciale en vertu de l'article 101, que les droits des parties procèdent de la common law, des lois du Dominion ou de celles de la province. [Le texte original n'est pas souligné.]
Sur cette base, il est logique que le pouvoir précé- dent, dont ont hérité des tribunaux appelés «tribu- naux de l'article 96» et «de l'article 101», soit aussi déterminé de cette manière, surtout dans les ques-
tions de procédure. Les tribunaux au Canada ont, de par leur nature, un pouvoir inhérent de contrôle sur leur propre procédure, sauf interdiction par la loi et, a fortiori, les tribunaux créés en vertu de la loi. Ce fondement a été déterminé à l'égard des tribunaux créés pour et avec des juges nommés en vertu de l'article 96 par Madame le juge Wilson pour elle-même et par le juge en chef Dickson, le juge McIntyre et le juge Lamer dans l'affaire Sobeys Stores Ltd. c. Yeoman et Labour Stan dards Tribunal (N.-É.), [1989] 1 R.C.S. 238, il est expliqué comment remonter à ces organismes antérieurs anglais, à l'instar de ce qui a été fait dans l'affaire Société des Acadiens.
En conséquence, la Cour conclut que la compé- tence inhérente en common law (parfois aussi appelé compétence implicite, bien que rien ne gêne son caractère véritablement inhérent) sur cette procédure de la Cour et les parties peut être exercée entièrement et équitablement en vertu du pouvoir discrétionnaire judiciaire, sauf interdiction légale. La présente Cour ne manque pas plus d'ancêtres ou de compétence en equity que les cours supérieures provinciales qui sont toutes aussi des tribunaux créés en vertu de la loi. L'étendue de la compétence autorisée peut être déterminée, de façon respective, en fonction de l'article 92, rubri- que 14, à la lumière de l'interprétation jurispru- dentielle afférente à l'article 96; ou d'après l'arti- cle 101, avec son interprétation plus restrictive, et leurs facultés «génétiques» respectives, selon les arrêts Société des Acadiens et Sobeys Stores susmentionnés.
Dans l'affaire Société des Acadiens, il est rap porté la page 586) que M. le juge La Forest a noté que, dans une partie des règles du Nouveau- Brunswick, le mot «cour», comme il y est défini, ne désigne que la Cour du Banc de la Reine et non pas la Cour d'appel. Dans les règles de la présente Cour [Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663], cependant, «Cour» désigne la Cour fédérale du Canada et, selon le contexte, doit s'entendre soit de la Section de première instance, soit de la Cour d'appel, soit de l'une et l'autre. En l'espèce, la Règle 5 peut clairement être invoquée par les deux sections et la Règle 1010, avec laquelle le juge a dressé une analogie pour définir le droit d'appel de Sask. Water, pour prendre part à l'ins-
tance en tant qu'intervenante, bien qu'elle soit une règle en matière d'amirauté pour les actions in rem, pourrait aussi être invoquée par la Section d'appel dans différents cas.
En somme, la Cour exerce son pouvoir discré- tionnaire sur des principes à la fois de common law et d'equity pour rendre la justice conformément à la Règle 5, par analogie, en exerçant le pouvoir prévu à la Règle 1010(3). Bien que reléguée dans un rôle d'intervenante, Sask. Water voit ses droits de participation à l'instance définis de façon à inclure le droit d'appel. La jurisprudence susmen- tionnée, en particulier la décision Société des Aca- diens, permet de fonder rationnellement cette con clusion. La seule permission que la Cour ne peut pas accorder est celle qui autoriserait un orga- nisme constitué sous le régime d'une loi provin- ciale, Sask. Water, à ester en qualité d'intimée dans cette instance fondée sur l'article 18, vu que la définition même d'noffice fédéral> à l'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale l'interdit.
À tous les autres égards, les motifs de la Cour rendus le 1" février 1991, dans cette instance, sont confirmés par les présentes. Ces motifs doivent être rapprochés des présents motifs. L'ordonnance prononcée en conséquence le 1" février 1991 est aussi confirmée, sans modification.
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