A-1057-90
Procureur général du Québec (appelant)
c.
Office national de l'énergie (intimé)
RÉPERTORIÉ: QUÉBEC (PROCUREUR GÉNÉRAL) c. CANADA
(OFFICE NATIONAL DE L'ÉNERGIE) (C.A.)
Cour d'appel, juges Pratte, Marceau et Desjardins,
J.C.A.—Montréal, 10, 11, 12, 13 et 14 juin;
Ottawa, 9 juillet 1991.
Énergie — L'ONÉ a accordé à Hydro -Québec des licences
d'exportation d'électricité aux É.-U. à condition qu'elle res-
pecte le Décret sur le PEEE — Hydra-Québec a fait appel de
l'imposition de cette condition — Des Indiens ont interjeté
appel de l'octroi des licences — L'ONE n'a pas compétence
pour imposer des conditions quant à la production d'énergie
dans une licence d'exportation — L'Office n'a pas commis
d'erreur en tenant compte des modifications législatives récen-
tes, qui visaient à la déréglementation et qui posaient des
conditions moins strictes, pour se prononcer sur les demandes
d'exportation — Il n'y a pas eu violation des règles de justice
naturelle — L'Office a conclu qu'on avait satisfait aux ancien-
nes exigences quant au prix d'exportation — S'il est vrai qu'il
n'existait aucune preuve directe quant à la récupération des
coûts, il existait cependant des éléments de preuve qui
étayaient la conclusion de l'Office quant à la rentabilité.
Environnement — L'ONÉ a accordé à Hydro -Québec des
licences d'exportation d'électricité à la condition qu'elle res-
pecte le Décret sur le PEEE — Cette condition a été écartée
puisque l'ONÉ ne disposait pas de renseignements pour impo-
ser des conditions quant à la production d'énergie dans la
licence d'exportation — L'Office ne doit se préoccuper que des
conséquences environnementales du fait de transporter de
l'électricité à l'extérieur du Canada — Des autorités autres
que l'ONE s'occupent des problèmes environnementaux
sérieux posés par la construction d'installations de production
d'énergie.
En septembre 1990, l'Office national de l'énergie a accordé à
Hydro -Québec sept licences autorisant l'exportation, au cours
d'une période de vingt ans, de 1 450 mégawatts d'électricité aux
États-Unis, ce qui générerait un revenu de près de 25 milliards
de dollars. Les licences étaient toutes assujetties aux mêmes
conditions qui avaient pour effet d'exiger d'Hydro-Québec
qu'elle se conforme au Décret sur les lignes directrices visant le
PEEE. Le procureur général du Québec et Hydro -Québec
cherchent à faire annuler ces conditions alors que le Grand
Conseil des Cris et l'Administration régionale crie s'opposent à
l'octroi des licences elles-mêmes.
Arrêt: l'appel principal et l'appel incident relativement aux
conditions devraient être accueillis et les conditions annulées.
Les appels relativement à la décision portant octroi des licences
devraient être rejetés.
Il ressort des motifs rendus par l'Office qu'il a imposé les
conditions touchant la construction d'installations de produc
tion parce qu'il s'estimait lié par le Décret sur les lignes
directrices visant le PEEE, et qu'il a conclu que les demandes
d'Hydro-Québec étaient visées par ce décret.
L'Office n'a pas compétence pour assujettir l'octroi d'une
licence d'exportation à des conditions se rapportant à la produc
tion. Les facteurs qui peuvent être pertinents dans l'examen
d'une demande d'autorisation d'exporter de l'électricité et les
conditions auxquelles l'Office peut assujettir son autorisation
ne peuvent se rapporter à autre chose qu'à l'exportation de
l'électricité. L'exportation, telle que l'entend la Loi dans le cas
de l'électricité, ne couvre pas la production elle-même. Ce sont
les conséquences environnementales de l'exportation dont il
peut uniquement s'agir. Les problèmes environnementaux
sérieux posés par la construction d'installations de production
d'énergie électrique relèvent d'autres autorités que l'Office. Les
conditions imposées en l'espèce ne sauraient tenir, mais puis-
qu'elles sont dissociables des licences elles-mêmes, l'annulation
des conditions n'entraîne donc pas l'annulation de la décision
elle-même.
Contrairement à ce qu'a prétendu le Grand Conseil des Cris,
l'Office n'a pas commis une erreur de droit en appliquant les
dispositions des modifications apportées à la Loi sur l'office
national de l'énergie qui sont entrées en vigueur en juin 1990,
soit avant la décision mais après l'audition et la prise des
demandes en délibéré. Les nouvelles dispositions législatives ont
été édictées dans une optique de déréglementation et ont soumis
l'exercice de la discrétion de l'Office, dans l'examen des deman-
des d'exportation d'électricité, à des règles moins rigides. L'Of-
fice était lié par la nouvelle Loi plutôt que par les dispositions
concernant la récupération des coûts en vigueur au moment où
les demandes de licence ont été faites. L'application de la
nouvelle Loi n'est pas contraire aux règles de justice naturelle,
puisque le Grand Conseil des Cris a eu toute latitude d'agir au
cours de l'audition dans la perspective que l'entrée en vigueur
de la Loi nouvelle pouvait influer sur la décision à venir. De
toute façon, l'application des dispositions nouvelles ne fournis-
sait pas matière à la réouverture de l'enquête ni à la tenue
d'une audition spéciale additionnelle. De plus, l'argument,
même s'il était fondé, ne pourrait conduire nulle part puisque
l'Office a choisi d'analyser la preuve à la lumière de l'ancienne
Loi et de décider, conformément aux obligations qu'il avait sous
le régime de celle-ci, que les demandes d'Hydro-Québec ont
satisfait aux exigences traditionnelles d'un prix d'exportation
qui était juste et raisonnable en fonction de l'intérêt public.
Hydro -Québec s'est refusée à révéler ouvertement son esti
mation détaillée de certains coûts de peur que la divulgation de
ceux-ci ne lui cause un préjudice dans ses négociations commer-
ciales avec ses voisins. C'est donc à juste titre que les Indiens
ont noté que l'Office ne disposait d'aucune preuve directe sur
laquelle il pouvait fonder sa conclusion que le prix d'exporta-
tion permettrait la récupération d'une bonne part des coûts
assumés au Canada. Toutefois, rien ne force l'Office à ne se
satisfaire que d'une preuve directe. 11 existait une preuve, qui
n'était peut-être pas directe en tous points, mais sa force
probante relativement à la détermination de la rentabilité était
de poids. La Cour ne saurait donc critiquer la conclusion de
l'Office sur cette base.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Décret sur les lignes directrices visant le processus
d'évaluation et d'examen en matière d'environnement,
DORS/84-467.
Loi modifiant la Loi sur l'Office national de l'énergie et
abrogeant certaines lois en conséquence (Projet de loi
C-23), L.C. 1990, chap. 7.
Loi sur le ministère de l'Environnement, L.R.C. (1985),
chap. E-10, art. 6.
Loi sur Hydra-Québec, L.R.Q. 1987, chap. H-5.
Loi sur l'Office national de l'énergie, L.R.C. (1985),
chap. N-7, art. 2, 22, 118 (mod. par L.C. 1990, chap.
7, art. 32), 119.06(2)(b) (édicté par idem, art. 34),
119.08(2) (édicté, idem), 119.09(2) (édicté, idem).
Loi de 1979 sur l'organisation du gouvernement, S.C.
1978-79, chap. 13, art. 14.
Règlement sur l'Office national de l'énergie (Partie VI),
C.R.C., chap. 1056, art. 6(1),(2)(z),(aa), 15(m).
Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663, Règle
1307.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
L'Ass'n des Consommateurs (Can.) c. Hydro -Ontario ln°
11, [1974] 1 C.F. 453; (1974), 2 N.R. 467 (C.A.).
AVOCATS:
Jean-K. Samson, Robert Monette, Alain
Gingras, Jean Robitaille pour le procureur
général du Québec.
Bernard A. Roy, Pierre Bienvenue, Jean G.
Bertrand pour Hydro - Quebec.
Robert Mainville, James O'Reilly, Johanne
Mainville pour le Grand Conseil des Cris du
Québec et l'Administration régionale crie.
Jean-Marc Aubry, René Leblanc, James
Mabbutt, F. Jean Morel pour l'Office natio
nal de l'énergie et le procureur général du
Canada.
William G. Lea pour Maritime Electric Co.
Ltd.
Harvey Morrison, John K. Poirier pour Nova
Scotia Power Corp.
PROCUREURS:
Bernard Roy & Ass., Montréal, pour le pro-
cureur général du Québec.
Ogilvy Renaud, Montréal, pour Hydro -Qué-
bec.
O'Reilly, Mainville, Montréal, pour le Grand
Conseil des Cris du Québec et l'Administra-
tion régionale crie.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'Office national de l'énergie et le procureur
général du Canada.
Campbell, Lea, Michael, McConnell & Pigot,
Charlottetown, pour Maritime Electric Co.
Ltd.
Nova Scotia Power Corp., Halifax, pour
Nova Scotia Power Corp.
Voici les motifs du jugement rendus en français
par
LE JUGE MARCEAU, J.C.A.: Le 28 juillet 1989,
Hydro -Québec s'adressait à l'Office national de
l'énergie pour obtenir l'autorisation de procéder à
l'exportation d'une certaine quantité d'électricité.
Ses demandes, soumises en conformité des disposi
tions de la Partie VI de la Loi sur l'Office national
de l'énergie, L.R.C. (1985), chap. N-7, avaient
pour but: l'une, l'émission d'une licence autorisant
l'exportation à New York Power Authority de
deux blocs de puissance et d'énergie garanties
pendant une période de vingt ans; l'autre, l'émis-
sion de six licences autorisant l'exportation à Ver-
mont Joint Owners de sept blocs de puissance et
d'énergie garanties durant des périodes variant de
cinq à vingt-deux ans.
Hydro -Québec, un agent de la Couronne provin-
ciale créé par la Loi sut , Hydro -Québec, L.R.Q.
1987, chap. H-5, a pour rôle de prévoir et de
satisfaire les demandes en énergie du Québec et à
cette fin elle est habilitée à produire, acquérir,
vendre, transporter et distribuer l'énergie. De fait,
Hydro -Québec exploite dans la province un vaste
réseau, composé d'installations de production, ainsi
que d'installations de transport et de distribution
d'énergie électrique, dont la capacité est aujour-
d'hui de plus de 30 000 mégawatts (MW). Afin de
répondre à des besoins sans cesse croissants,
Hydro -Québec a élaboré un plan de développe-
ment de ses équipements qu'elle compte mettre en
service au cours des années à venir, plan qui
envisage la vente hors du Québec d'une certaine
quantité d'électricité venant de la production d'en-
semble de ses installations. Les deux demandes
présentées à l'Office visaient à donner effet à deux
ententes, négociées et signées peu de temps aupa-
ravant, portant sur une quantité totale de 1 450
MW et devant assurer des revenus de près de 25
milliards de dollars.
Les demandes d'Hydro-Québec devaient donner
lieu à une longue audience publique à laquelle
participèrent plusieurs intervenants et qui se pour-
suivit jusqu'au 5 mars 1990. Le 27 septembre
1990, l'Office rendait publique la décision qu'il
avait prise quelques jours auparavant et publiait
les motifs qui l'y avaient conduit. Sous réserve de
l'approbation du gouverneur en conseil—approba-
tion qui devait effectivement être donnée peu
après—l'Office accordait les sept licences deman-
dées sauf qu'il les soumettait toutes au respect des
mêmes conditions, parmi lesquelles se retrouvaient,
sous les numéros 10 et 11, les deux suivantes:
10. La présente licence ne demeure valide que dans la mesure
où
a) toute installation de production requise par Hydro -Québec
pour alimenter les exportations autorisées par la présente et
dont la construction n'était pas encore autorisée conformé-
ment à la preuve faite devant l'Office lors de l'audience
EH-3-89 terminée le 5 mars 1990, aura été soumise, préala-
blement à sa construction, aux évaluations et examens en
matière d'environnement ainsi qu'aux normes environnemen-
tales applicables en vertu des lois et règlements du gouverne-
ment fédéral.
b) Hydro -Québec, suite à tout processus d'évaluation et
d'examen en matière d'environnement mentionné à la sous-
modalité a), aura déposé auprès de l'Office
i) un sommaire de toutes les évaluations environnementa-
les et de tous les rapports faisant état des conclusions et
des recommandations de ces études et rapports;
ii) les autorisations gouvernementales reçues; et
iii) un énoncé des mesures qu'Hydro-Québec entend pren-
dre pour atténuer les impacts environnementaux défavora-
bles.
1l. La production de l'énergie thermique qui sera exportée en
vertu de la présente ne doit pas contrevenir aux normes ni aux
lignes directrices fédérales pertinentes en matière d'environne-
ment.
La décision de l'Office parut contestable à plu-
sieurs. Au cours du mois d'octobre 1990, Hydro -
Québec d'abord puis le procureur général du
Québec s'adressaient tous deux à cette Cour, en
vertu de l'article 22 de la Loi sur l'Office national
de l'énergie, pour obtenir permission d'en. appeler
de la décision relativement à ces conditions 10 et
11, pendant que le Grand Conseil des Cris du
Québec et l'Administration régionale crie procé-
daient de leur côté pour pouvoir s'en prendre à
l'octroi même des licences. Les trois permissions
demandées ayant été accordées, le premier avis
d'appel inscrit fut désigné, en vertu des Règles de
la Cour fédérale [C.R.C., chap. 663], appel princi
pal, les deux autres, appels incidents.
Maritime Electric Company Limited, qui avait
comparu devant l'Office, et Nova Scotia Power
Corporation intervinrent à l'appel, en vertu de la
Règle 1307 des Règles de pratique de la Cour,
toutes deux pour appuyer l'opposition d'Hydro-
Québec et du procureur général du Québec à
l'imposition des conditions 10 et 11.
Relativement aux motifs de jugement que je
m'apprête à faire valoir, deux remarques sont de
mise.
L'audition des appels principal et incidents a
duré cinq jours et a donné lieu à de longs plai-
doyers présentés avec l'appui d'une foule d'autori-
tés. L'exposé de ma façon de voir et de mes
conclusions sera loin de refléter l'importance et la
complexité des arguments développés. C'est que,
comme j'expliquerai dans un moment, plusieurs
des moyens invoqués ne furent mis de l'avant par
les procureurs que subsidiairement et il ne m'a pas
été nécessaire de les aborder.
D'autre part, c'est l'attaque portée contre l'im-
position des conditions 10 et 11 que je considérerai
d'abord. Ce n'est pas seulement qu'elle vient du
demandeur devant l'Office, Hydro -Québec, qu'elle
est appuyée par trois des quatre autres appelants
et intervenants, et qu'elle a été plaidée avant l'au-
tre à l'audition, c'est aussi qu'en en disposant en
premier, je pense pouvoir simplifier mon exposé
d'ensemble.
L'attaque du procureur général du Québec et
d'Hydro-Québec contre l'imposition des conditions
l0 et 11
Il est clair, à la lecture des «attendus» introduc-
tifs de chacune des licences' et des longs motifs
publiés au soutien de la décision, que l'Office a
imposé les conditions 10 et 11 parce qu'il s'est
estimé lié par le Décret sur les lignes directrices
visant le processus d'évaluation et d'examen en
matière d'environnement, DORS/84-467, adopté le
22 juin 1984, sur avis conforme du ministre de
l'Environnement et en vertu du paragraphe 6(2) de
la Loi de 1979 sur l'organisation du gouverne-
ment, S.C. 1978-79, chap. 13, art. 14 2 (ci-après
Décret sur le PEEE), et qu'il a considéré que les
demandes d'Hydro-Québec étaient visées par ce
Décret sur le PEEE. Ce lien évident entre l'imposi-
tion des conditions et le respect du Décret sur le
PEEE met en cause le problème de l'application de
ce Décret, d'abord à l'Office lui-même puis au
promoteur Hydro -Québec en tant qu'agent de la
Couronne provinciale, et même par delà celui de sa
validité constitutionnelle elle-même. Ce sont ces
problèmes, soulevés parmi les moyens d'attaque
des appelants, qui ont requis les développements
les plus considérables. Mais, comme je viens de
dire, ils ne se présentent que subsidiairement, et
voici pourquoi.
Si le lien entre l'imposition des conditions con-
testées et le Décret sur le PEEE n'est pas formelle-
ment exprimé dans le texte formel du dispositif de
la décision (un fait que le procureur général du
Canada a fait valoir pour tenter de dissocier la
validité des conditions prises en elles-mêmes des
problèmes d'application et de constitutionnalité du
Décret sur le PEEE, une tentative à mon sens sans
portée), il ressort du texte même des conditions
qu'elles se rapportent aux installations de produc
tion. C'est parce qu'il a jugé qu'il pouvait et devait,
de par son mandat légal, s'inquiéter des effets
environnementaux susceptibles d'être causés par la
' Parmi lesquels les deux suivants:
ET ATTENDU que conformément au Décret sur les lignes
directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en
matière d'environnement («Décret sur le PEEL.), l'Office a
procédé à un examen préalable de la demande en considérant
la preuve déposée au cours de l'audience publique ci-haut
mentionnée;
ET ATTENDU que l'Office a déterminé que les exigences du
Décret sur le PEEE seront respectées sous réserve d'un
engagement à soumettre aux évaluations et examens en
matière d'environnement, préalablement à leur construction,
les installations de production utilisées en partie pour alimen-
ter les exportations proposées; ...
2 Devenu l'article 6 de la Loi sur le ministère de l'Environne-
ment, L.R.C. (1985), chap. E-10.
construction éventuelle d'installations de produc
tion que l'Office a soumis les licences aux condi
tions 10 et 11. D'où la question première qui se
pose, celle de savoir si effectivement la juridiction
de l'Office s'étend aux installations de production
des biens devant être exportés ou, en d'autres
termes, si l'Office peut assujettir l'octroi d'une
licence d'exportation de certains biens à des condi
tions relatives à leur production. Une réponse
négative à cette question initiale rendra évidem-
ment académique toute question relative au Décret
sur le PEEE. Or, je crois justement que la réponse
est négative.
L'Office, naturellement, tire son autorité et sa
juridiction de sa loi constitutive, la Loi sur l'Office
national de l'énergie, cette loi qui interdit à qui-
conque d'exporter de l'électricité sans une autori-
sation de l'Office. À la date du dépôt des deman-
des d'Hydro-Québec, cette autorisation prenait
nécessairement la forme d'une licence et certains
des facteurs dont l'Office devait tenir compte
étaient expressément prévus. Aujourd'hui, suite à
l'entrée en vigueur, le Zef juin 1990, du projet de loi
C-23, Loi modifiant la Loi sur l'Office national de
l'énergie et abrogeant certaines lois en consé-
quence, L.C. 1990, chap. 7 (»Projet de loi C-23»),
l'autorisation peut consister en un permis ou une
licence et les critères que l'Office doit considérer
ne sont plus les mêmes. On verra plus loin que
l'application des nouvelles dispositions aux deman-
des d'Hydro-Québec alors en délibéré a soulevé un
problème. Mais, de toute façon, ce sur quoi porte
la juridiction de l'Office est encore et a toujours
été l'autorisation d'exporter de l'électricité. Les
facteurs qui peuvent être pertinents dans l'examen
d'une demande d'autorisation d'exporter de l'élec-
tricité et les conditions auxquelles l'Office peut
assujettir son autorisation ne peuvent évidemment
se rapporter à autre chose qu'à l'exportation de
l'électricité. Or, l'article 2 de la Loi définit ce qu'il
faut entendre par exportation (en anglais «export»)
dans le cas d'électricité:
2....
«exportation»
a) Dans le cas de l'électricité, le fait de transporter de
l'électricité produite au Canada à l'extérieur du pays par une
ligne de fil métallique ou un autre conducteur ...
Il me paraît clair que l'exportation, telle que
l'entend la Loi dans le cas de l'électricité, ne
couvre pas la production elle-même, et ce n'est que
rationnel qu'il en soit ainsi. Bien sûr, celui qui veut
exporter un bien doit le produire ou se le procurer
ailleurs, mais quant il le produit ou se le procure
ailleurs il ne l'exporte pas, et quand il l'exporte il
ne le produit pas.
Personne, je pense, ne songerait un moment à
contester qu'en considérant une demande d'autori-
sation d'exporter de l'électricité, l'Office soit tenu
de s'inquiéter des conséquences environnementales,
puisqu'il y va de l'intérêt public. Le mandat de
l'Office à cet égard est d'ailleurs confirmé dans
plusieurs textes'. Mais ce sont les conséquences
environnementales de l'exportation dont il peut
uniquement s'agir, soit les conséquences sur l'envi-
ronnement du «fait de transporter de l'électricité
produite au Canada à l'extérieur du pays». Peut-
être pourrait-on imaginer une situation où une
usine de production serait tellement intégrée à des
opérations d'exportation qu'il serait possible de
faire tomber l'utilisation de cette usine dans le
champ de compétence de l'Office—encore que je
voie mal comment une telle situation pourrait se
présenter et je doute même fort sérieusement que
la conséquence que je suppose s'ensuivrait—; mais
il est évident qu'il n'y a rien de tel ici. Quelques-
uns des projets de construction d'Hydro-Québec
seront devancés de quelques années pour satisfaire
aux besoins des contrats d'exportation, mais la
réalisation de ces projets n'est nullement liée aux
exportations qui seront alimentées par le réseau
lui-même et ne couvrent qu'une faible fraction de
sa capacité totale.
Il est évident que la construction d'installations
de production d'énergie électrique pose des problè-
mes environnementaux sérieux qui doivent être
considérés et résolus, mais ces problèmes relèvent
d'autres autorités que l'Office et ces autorités
n'ont nullement besoin pour agir du support de
3 i faut noter d'abord que ce mandat s'appuie sur les art.
119.06(2)b), 119.08(2) et 119.09(2) de la Loi sur l'Office
national de l'énergie (L.R.C. (1985), chap. N-7, telle que
modifiée par la Loi modifiant la Loi sur l'Office national de
l'énergie et abrogeant certaines lois en conséquence, L.C. 1990,
chap. 7, art. 34), et sur les art. 6(2)aa) et 15m) du Règlement
sur l'Office national de l'énergie (Partie VI), C.R.C., chap.
1056, tel qu'amendé, et on peut ajouter sur la Politique cana-
dienne de l'électricité de septembre 1988 et sur les Directives
de l'Office national de l'énergie de décembre 1988, quoique
cette Politique et ces Directives n'ont reçu aucune sanction
législative ou réglementaire.
l'Office, qui n'a d'ailleurs aucunement reçu mis
sion de le leur accorder.
En imposant les modalités 10 et 11, l'Office, à
mon avis, a clairement excédé les limites de sa
juridiction et de son autorité. Une telle imposition
ne saurait tenir. Faut-il alors en conclure que la,
décision elle-même est viciée et que l'Office doit
procéder à une nouvelle considération? Je ne le
crois pas. Il s'agit de conditions manifestement
dissociables des licences elles-mêmes et rien dans
les motifs de la décision ne peut permettre de
penser que, dans les limites de sa compétence,
l'Office avait des raisons pour refuser d'accéder
aux demandes qui lui avaient été faites. L'annula-
tion des deux conditions ne devrait donc pas
entraîner l'annulation de la décision elle-même.
Mais évidemment la décision peut être nulle
pour d'autres motifs.
L'attaque du Grand Conseil des Cris du Québec et
l'Administration régionale crie contre l'octroi des
licences elles-mêmes
Le Grand Conseil des Cris du Québec et l'Ad-
ministration régionale crie (ci-après «le Grand
Conseil des Cris») soutiennent qu'en disposant des
demandes d'Hydro-Québec comme il l'a fait, l'Of-
fice n'a pas respecté les exigences de son mandat et
que sa décision est nulle parce qu'elle n'a pas été
prise en conformité des prescriptions de la Loi.
Leur prétention s'appuie sur deux propositions.
1. Le Grand Conseil des Cris argumente
d'abord que l'Office a erré en droit en appliquant
aux demandes d'Hydro-Québec les dispositions
nouvelles de la Loi modifiant la Loi sur l'Office
national de l'énergie et abrogeant certaines lois en
conséquence, précitée (la «Loi C-23») qui, comme
nous l'avons vu plus haut, est entrée en vigueur le
ler juin 1990, soit bien avant la décision mais
néanmoins après l'audition et la prise des deman-
des en délibéré.
Il faut savoir que, dans une optique de dérègle-
mentation, la Loi C-23 a soumis l'exercice de la
discrétion de l'Office, dans la considération des
demandes d'exportation d'électricité, à des règles
moins rigides. L'article 118 de la Loi sur l'Office
national de l'énergie se lisait, avant juin 1990,
comme suit:
118. Pour délivrer une licence, l'Office tient compte des
facteurs qui lui semblent pertinents; il doit notamment:
a) s'assurer que la quantité de pétrole, de gaz ou d'électricité
à exporter ne dépasse pas l'excédent sur les besoins normale-
ment prévisibles du Canada, eu égard, dans le cas du pétrole
et du gaz, à l'orientation des découvertes de pétrole ou de gaz
au Canada;
b) s'assurer que, dans les cas d'exportation d'électricité, le
prix à demander est juste et - raisonnable en fonction de
l'intérêt public;
c) tenir compte, dans les cas d'importation, ou d'exportation
pour réimportation, du pétrole, ou du gaz, de la distribution
équitable du pétrole ou du gaz, selon le cas, au Canada.
et le Règlement sur l'Office national de l'énergie
(Partie VI), sous le titre «Renseignements à fournir
par les requérants de licences visant l'exportation
de force motrice», avait fait écho à cette obligation
prévue à l'alinéa b) en édictant:
6. (1) Tout requérant d'une licence pour l'exportation de
force motrice doit fournir à l'Office des renseignements exigés
par ce dernier.
(2) Sans restreindre la portée générale du paragraphe (1), les
renseignements que tout requérant décrit au paragraphe (1) est
tenu de fournir doivent, sauf autorisation contraire de l'Office,
comprendre
z) une preuve démontrant que le prix que doit exiger le
requérant pour la puissance et l'énergie électriques destinées
par lui à l'exportation est juste et raisonnable par rapport à
l'intérêt public et, en particulier, que le prix d'exportation
(i) permettra la récupération d'une bonne proportion des
coûts assumés au Canada,
(ii) ne sera pas inférieur au prix exigé des Canadiens pour
un service équivalent dans des régions connexes, ...
Depuis juin 1990 et l'entrée en vigueur de la Loi
C-23, l'article 118 se lit simplement:
118. Pour délivrer une licence, l'Office tient compte de tous
les facteurs qu'il estime pertinents; il doit notamment:
a) veiller à ce que la quantité de pétrole ou de gaz à exporter
ne dépasse pas l'excédent de la production par rapport aux
besoins normalement prévisibles du Canada eu égard aux
perspectives liées aux découvertes de pétrole ou de gaz au
Canada;...
et un nouveau paragraphe 119.08(2), relatif aux
facteurs à considérer pour délivrer une licence,
répète sans plus:
119.08.. .
(2) L'Office tient compte de tous les facteurs qui lui sem-
blent pertinents.
L'Office a eu tort, dit le Grand Conseil des Cris,
d'avoir tenu compte des prescriptions de la Loi
C-23, ce qui l'emmena à négliger ou à tout le
moins à ne pas appliquer de même façon les
critères de prix de la Loi telle qu'elle existait au
moment où les demandes d'Hydro-Québec ont été
faites et prises en délibéré, tout spécialement le
premier critère, relatif à la récupération des coûts,
défini au sous-alinéa 6(2)z)i) du Règlement.
Il est vrai que l'Office s'est considéré lié par la
nouvelle Loi mais je crois que c'est avec pleine
raison et son raisonnement à cet égard me paraît
sans faille:
L'Office partage l'opinion des parties sur l'application de la
règle de la non-rétroactivité des lois au projet de loi C-23 et ne
peut que constater qu'aucune disposition de ce projet de loi
visant les exportations d'électricité ne fait exception expresse à
cette règle. L'Office est d'avis aussi que les dispositions du
projet de loi C-23 doivent commencer à produire leurs effets à
compter de leur entrée en vigueur, le 1" juin 1990, selon le
principe général de l'effet immédiat des lois.
Les dispositions de fond du projet de loi C-23 touchant l'électri-
cité ont essentiellement pour but de modifier les critères dont
l'Office doit tenir compte pour en autoriser l'exportation ainsi
que l'étendue de la juridiction de l'Office dans certains cas.
D'autres dispositions modifient la procédure applicable aux
demandes d'autorisation d'exporter. Aucune disposition du
projet de loi ne traite de la façon dont l'Office doit disposer des
demandes pendantes devant lui ni ne suspend l'effet immédiat
des modifications à l'article 118 de la Loi sur L'ONÉ ou aux
autres règles applicables auparavant à l'exportation de
l'électricité.
L'Office est d'avis que les modifications relatives à la procédure
doivent avoir un effet immédiat. Quant aux modifications de
fond, leur application immédiate ne devrait porter atteinte à
des droits acquis, des obligations contractées ou des responsabi-
lités encourues avant leur entrée en vigueur.
Les procureurs du Grand Conseil des Cris ont
tenté de faire valoir que l'application de la nouvelle
Loi aux demandes en délibéré pouvait ici aller à
l'encontre des règles de justice naturelle applica-
bles à leurs clients en tant qu'intéressés opposés à
l'octroi des licences. Mais j'avoue être quelque peu
dérouté par l'argument étant donné que le Grand
Conseil des Cris a eu toute latitude d'agir au cours
de l'audition dans la perspective nette que l'entrée
en vigueur de la Loi nouvelle pouvait influer sur la
décision à venir et que, de toute façon, l'adoucisse-
ment des exigences résultant de l'application des
dispositions nouvelles ne fournissait certes pas
matière à réouverture d'enquête ou audition spé-
ciale additionnelle.
Il y a d'ailleurs beaucoup plus. L'argument,
même s'il était fondé, ne pourrait conduire nulle
part. Il appert, en effet, des motifs de la décision,
que sitôt après avoir affirmé sa conclusion que la
nouvelle Loi s'appliquait, l'Office a librement
choisi d'analyser la preuve offerte à la lumière du
premier critère de prix de l'ancienne Loi et de
décider conformément à l'obligation qu'il avait
sous l'ancienne Loi. Voici ce qu'écrit l'Office à la
page 29 de sa décision:
Avec l'entrée en vigueur, le Pr juin 1990, du projet de loi C-23,
et conformément à la nouvelle méthode de traitement des
demandes visant des exportations d'électricité, l'Office n'a plus
l'obligation explicite d'appliquer ces dispositions. Néanmoins, il
n'y a rien dans la Loi modifiée qui empêche l'Office de tenir
compte de ces considérations s'il estime qu'elles sont pertinen-
tes, soit en recommandant au gouverneur en conseil qu'un
projet d'exportation soit assujetti au processus de délivrance de
licence, soit en décidant d'accorder ou non une licence.
Puisque les présentes demandes ont été déposées avant l'entrée
en vigueur du projet de loi C-23 qui a entraîné la disparition
des dispositions relatives aux excédents et aux prix, l'Office
s'est penché sur ces questions lors de l'examen des demandes.
Demandes d'exportation
L'Office a soigneusement examiné toute la preuve et les témoi-
gnages présentés et a tiré les conclusions suivantes.
6.1 Prix à l'exportation
Afin de s'assurer que le prix demandé sur le marché d'exporta-
tion est juste et raisonnable par rapport à l'intérêt public,
l'Office a utilisé les deux critères suivants: le prix à l'exporta-
tion a) devrait permettre de récupérer les coûts applicables
engagés au Canada et b) ne devrait pas être inférieur au prix
d'un service équivalent fourni aux clients canadiens.
Et de fait, la lecture de l'analyse et des commen-
taires de l'Office sur le premier critère de prix en
témoigne clairement, l'Office a jugé comme si les
demandes d'Hydro-Québec devaient satisfaire aux
exigences traditionnelles d'avant juin 1990. C'est
bel et bien en se référant aux renseignements
fournis par Hydro -Québec en réponse aux exigen-
ces du sous-alinéa 6(2)z)i) du Règlement que l'Of-
fice dit s'être assuré que le prix d'exportation était
juste et raisonnable en fonction de l'intérêt public.
Les dispositions nouvelles de la Loi C-23 n'ont eu
sur ce plan aucune influence. La première proposi
tion du Grand Conseil des Cris est sans portée.
2. Même si l'Office a prétendu vouloir tenir
compte du premier critère de prix du sous-alinéa
6(2)z)i) du Règlement, poursuit le Grand Conseil
des Cris dans sa seconde proposition alternative, il
ne pouvait arriver valablement à la conclusion que
le prix «permettra(it) la récupération d'une bonne
proportion des coûts assumés au Canada» parce
qu'il n'avait de cela aucune preuve directe devant
lui.
La proposition ne se comprend que située dans
son contexte. Hydro -Québec avait démontré que
les exportations de puissance et d'énergie devaient
provenir de l'ensemble de son réseau mais que,
pour satisfaire aux besoins additionnels résultant
des deux contrats, il lui faudrait, comme dit plus
haut, devancer la date de mise en service de certai-
nes installations hydro-électriques prévues dans
son plan de développement. L'Office avait ainsi
conclu que les coûts à récupérer en vertu du
premier critère de prix devaient inclure tous les
coûts marginaux de production, les coûts d'oppor-
tunité pour la partie des exportations provenant
des installations existantes et spécialement les
coûts de devancement des nouvelles installations
hydro-électriques projetées. Au moment du dépôt
de sa preuve, Hydro -Québec néanmoins s'objecta à
révéler ouvertement, tous les livres à l'appui, son
estimation détaillée des coûts de devancement des
installations de production en soutenant que la
divulgation de ces coûts lui causerait un préjudice
sérieux dans ses négociations commerciales avec
ses voisins. L'Office ne crut pas nécessaire d'insis-
ter et permit à Hydro -Québec de faire sa preuve
par un moyen indirect, soit en déposant le témoi-
gnage d'un comptable agréé qui, après vérification,
fut en mesure d'attester: d'abord, que les coûts
utilisés pour réaliser les études de rentabilité
étaient bien les coûts des équipements utilisés par
Hydro -Québec et ensuite, que la méthodologie
suivie par Hydro -Québec pour déterminer la renta-
bilité des exportations permettait d'en arriver aux
résultats attestés quant à l'importance de la récu-
pération des coûts impliqués. Ainsi, le Grand Con-
seil des Cris a raison d'affirmer que la preuve n'a
pas été en tous points directe.
Mais pourquoi faudrait-il que la preuve ait été
en tous points directe? Rien ne force l'Office à ne
se satisfaire que d'une preuve directe. L'Office
avait devant lui la série de témoignages et l'abon-
dante preuve documentaire qu'Hydro-Québec
avait soumis relativement à la question de rentabi-
lité. Il avait aussi devant lui l'attestation non négli-
geable que le Gouvernement du Québec avait
approuvé les contrats en raison du bénéfice net que
la province était en mesure d'en retirer. Il avait pu
en même temps recueillir les commentaires et
noter l'absence d'intérêt des responsables des
réseaux voisins canadiens interconnectés à Hydro -
Québec (qui utilisent des sources de production
d'électricité beaucoup moins axées sur l'hydrauli-
que et dont les coûts de production sont, partant,
plus élevés) à l'égard de l'électricité à être vendue
au prix prévu. Toute cette preuve n'était peut-être
pas directe en tous points mais sa force probante
relativement à la détermination de la rentabilité
était certes de poids.
L'Office a jugé que cette preuve le convainquait
et je ne vois pas sur quelle base cette Cour pourrait
se permettre de critiquer sa conclusion. Un appel
logé en vertu de l'article 22 de la Loi sur l'Office
national de l'énergie ne peut porter que sur des
questions de droit et de compétence. Il ne peut
porter sur la façon dont l'Office s'est formé une
opinion à la lumière des faits établis devant lui.
Les propos souvent cités que le juge en chef Jac-
kett tenait sur ce point dans l'arrêt L'Ass'n des
Consommateurs (Can.) c. Hydro -Ontario [N» 1],
[1974] 1 C.F. 453, aux pages 457 et 458, méritent
d'être repris:
L'article 836) demande à l'Office de décider si le prix est »juste
et raisonnable» en fonction de l'intérêt public. Il me semble
qu'en général, lorsque le Parlement laisse à un tribunal la
détermination de ce qui est »équitable et raisonnable» ou «juste
et raisonnable», en matière de taux, de prix ou de ce qui est
adapté ou nécessaire au public, le tribunal en cause a le pouvoir
discrétionnaire de décider de quelle manière il obtiendra les
renseignements; les tribunaux judiciaires n'ont donc pas le droit
d'examiner l'opinion de l'Office, cette opinion étant fondée sur
des faits établis devant lui. Voir les arrêts Northwest Utilities
Ltd. c. La cité d'Edmonton, Union Gas Company of Canada,
Limited c. Sydenham Gas and Petroleum Company, Limited et
Memorial Gardens Association (Canada) Limited c. Colwood
Cemetery Company. En outre, lorsqu'un tribunal adopte une
règle de pratique qui doit régir l'exercice de ses fonctions
statutaires, la question de savoir s'il interprète correctement sa
propre règle ne peut être une question de droit. De même
[TRADUCTION] »la question de savoir si, dans un cas précis,
l'Office a interprété correctement les faits dans le but d'appli-
quer la règle en cause ne peut être considérée comme une telle
question. Il en est ainsi parce qu' ... il n'existe ni règle
statutaire ni principe juridique qui indique expressément sur
quelles considérations l'Office doit se fonder dans l'exercice de
son pouvoir discrétionnaire administratif ... ». Voir l'arrêt La
Cie Bell Téléphone c. Le Canadien National, rendu par le juge
en chef du Canada Duff (prononçant le jugement de la Cour
suprême du Canada), à la page 21.
La deuxième proposition que le Grand Conseil
des Cris a avancée au soutien de son appel est
aussi dénuée de fondement que la première.
Conclusion
Ainsi pour tous les motifs que je viens d'exposer,
je suis d'avis que la Cour devrait rejeter l'appel
incident logé par le Grand Conseil des Cris du
Québec et l'Administration régionale crie, mais
accueillir l'appel du procureur général du Québec
et celui incident d'Hydro-Québec. Elle devrait
ainsi annuler les conditions numéros 10 et 11
auxquelles l'Office national de l'énergie a assujetti
les licences EL-179, EL-180, EL-181, EL-182,
EL-183, EL-184 et EL-185 qu'il a délivrées à
Hydro -Québec, tout en déclarant lesdites licences
valides par ailleurs.
LE JUGE PRATTE, J.C.A.: Je suis d'accord.
LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.: J'y souscris.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.