À-748-88
Robert Thomson (appelant) (requérant)
c.
Sa Majesté la Reine représentée par le ministère
de l'Agriculture, le sous-ministre de l'Agriculture
(intimés)(intimés)
RÉPERTORIÉ: THOMSON c. CANADA (SOUS-MINISTRE DE
L'AGRICULTURE) (CA.)
Cour d'appel, juges Pratte, Urie et Mahoney,
J.C.A.—Ottawa, 16 et 17 mai 1990.
Juges et tribunaux — Appel du jugement de première
instance qui a refusé d'accorder des brefs de certiorari et de
mandamus — Malgré la décision de la Cour d'appel que le
sous-ministre était tenu d'appliquer la recommandation du
Comité de surveillance des activités de renseignement de sécu-
rité et d'accorder une habilitation de sécurité, le sous-ministre
a confirmé son refus de le faire — La Cour d'appel n'a pas
enjoint au sous-ministre d'accorder une habilitation de sécu-
rité parce qu'elle n'était pas compétente pour le faire, la
décision du sous-ministre n'étant pas susceptible de révision
sous le régime de l'art. 28 — La décision de la Cour d'appel
quant k l'obligation du sous-ministre n'est pas une remarque
incidente, et le juge de première instance était lié par cette
décision.
Renseignement de sécurité — L'appelant s'est vu refuser un
emploi dans le gouvernement malgré la recommandation du
Comité de surveillance des activités de renseignement de sécu-
rité — La C.A.F. a jugé que le sous-ministre devait appliquer
la recommandation du CSARS, mais qu'elle n'avait pas com-
pétence pour lui enjoindre de le faire — Le juge de première
instance, en refusant d'accorder lés recours de prérogative
sollicités, a dit qu'il n'était pas lié par la remarque incidente
de la Cour d'appel — Le juge de première instance a eu tort de
n'avoir pas suivi cette décision qui avait force obligatoire — Il
est ordonné au sous-ministre d'accorder une habilitation de
sécurité:
Fonction publique — Processus de sélection , — Le sous-
ministre de l'Agriculture a refusé d'accorder une habilitation
de sécurité en vue d'un emploi malgré la recommandation du
Comité de surveillance des activités de renseignement de sécu-
rité — La C.A.F. a conclu que le sous-ministre devait appli-
quer la recommandation du CSARS, mais qu'elle n'avait pas
compétence pour lui enjoindre de le faire - La Section de
première instance a rejeté la demande de recours de préroga-
tive — La C.A.F., en appel, a ordonné au sous-ministre
d'accorder une habilitation de sécurité.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, art.
28, 52b)(1).
Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. (1985),
chap. F-11, art. 13(1).
Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité,
L.R.C. (1985), chap. C-23, art. 52(2).
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), chap. P-35, art. 113(1).
JURISPRUDENCE
DÉCISION INFIRMÉE:
Thomson c. Canada (Sous-ministre de l'Agriculture),
[1989] I C.F. 86; (1988), 21 F.T.R. 254 (I" inst.).
DÉCISION EXAMINÉE:
Thomson c. Canada, [1988] 3 C.F. 108; (1988), 50
D.L.R. (4th) 454; 31 Admin. L.R. 14; 84 N.R. 169
(C.A.).
AVOCATS:
David J. Jewitt pour l'appelant (requérant).
Ivan G. Whitehall, c.r. pour les intimés
(intimés).
PROCUREURS:
Nelligan/Power, Ottawa, pour l'appelant
(requérant).
Le sous-procureur général du Canada pour
les intimés (intimés).
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance de la Cour prononcés à l'audience
par
LE JUGE MAHONEY, J.C.A.: Le sous-ministre
de l'Agriculture a refusé d'accorder à l'appelant
une habilitation de sécurité et, pour ce motif uni-
quement, lui a refusé un engagement malgré la
recommandation qu'a faite le comité de surveil
lance des activités de renseignement de sécurité en
vertu du paragraphe 52(2) de la Loi sur le Service
canadien du renseignement de sécurité, L.R.C.
(1985), chap. C-23. Dans un jugement publié,
[Thomson c. Canada] [1988] 3 C.F. 108 (C.A.),
cette Cour a statué que le sous-ministre était lié
par la recommandation et devait accorder l'habili-
tation de sécurité, mais qu'elle n'avait pas compé-
tence, sous le régime de l'article 28 de la Loi sur la
Cour fédérale, L.R.C. (1985), chap. F-7, pour lui
enjoindre de le faire, parce que le refus n'était pas
une décision ni une ordonnance susceptible d'une
révision fondée sur l'article 28. Le sous-ministre a
confirmé son refus, et l'appelant a saisi la Section
de première instance d'une demande de certiorari
et de mandamus. Dans une décision publiée,
[Thomson c. Canada (Sous-ministre de l'Agricul-
ture)] [1989] 1 C.F. 86, le juge de première ins
tance a conclu que la décision de cette Cour quant
à l'obligation du sous-ministre était une remarque
incidente, et il a refusé de la suivre. Appel est
interjeté de cette décision.
J'estime que c'est à tort que le juge de première
instance a qualifié de remarque incidente la déci-
sion relative à l'obligation du sous-ministre.
Certes, la Cour aurait pu adopter une approche
différente pour trancher la question de compé-
tence; mais elle ne l'a pas fait. En déterminant si le
refus par le sous-ministre était susceptible d'une
révision sous le régime de l'article 28, c'est-à-dire
s'il s'agissait d'une décision «exception faite de
celles de nature administrative résultant d'un pro-
cessus n'ayant légalement aucun caractère judi-
ciaire ou quasi judiciaire», elle a choisi de trancher
la question de savoir s'il était tenu en droit de
suivre la recommandation du comité. S'il ne l'était
pas, sa décision eût été rendue selon un processus
judiciaire et quasi judiciaire et, à ce titre, eût été
soumise à une révision fondée sur l'article 28; s'il
n'était pas investi du pouvoir discrétionnaire d'ap-
pliquer ou non cette recommandation, sa décision
était purement administrative et n'était pas, de ce
fait, exposée à cette révision.
Le juge de première instance était lié par la
décision de cette Cour et il a eu tort de ne l'avoir
pas suivie. Il appert que les intimés, par l'entre-
mise de leur avocat, ont présenté à la Cour et au
juge de première instance d'autres arguments que
ceux qu'ils avaient fait valoir à la Cour d'appel de
céans. Nous notons que, dans ses motifs, la Cour
n'a fait état ni du paragraphe 113 (1) de la Loi sur
les relations de travail dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), chap. P-35, ni de l'article 13 de la
Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C.
(1985), chap. F-11'. Nous ne sommes toutefois
pas persuadés qu'on puisse dire de la décision
antérieure de cette Cour qu'elle a été rendue per
incuriam, ni que nous soyons fondés dans les cir-
constances actuelles, sur ce fondement ou sur tout
autre fondement, à ne pas nous conformer à la
décision antérieure.
' 113. (I) La présente loi, ni aucune autre loi, n'a pas pour
effet d'imposer à l'employeur l'obligation de faire, ou de s'abs-
tenir de faire, quoi que ce soit de contraire à des directives,
instructions ou règlements établis par ou pour le gouvernement
du Canada, dans l'intérêt de la sécurité du pays ou d'un État
allié ou associé.
(Suite à la page suivante)
L'appel sera accueilli avec dépens devant cette
instance et devant l'instance inférieure. En vertu
du sous-alinéa 52b)(1) de la Loi sur la Cour
fédérale, qui permet de rendre l'ordonnance que la
Section de première instance aurait dû rendre,
nous infirmerons le refus par le sous-ministre d'ac-
corder l'habilitation de sécurité et nous lui enjoin-
drons de le faire.
(Suite de la page précédente)
13. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la présente loi ni
aucune autre loi fédérale n'ont pour effet de porter atteinte au
droit ou au pouvoir du gouverneur en conseil de suspendre ou
de destituer une personne employée dans la fonction publique
en raison d'une évaluation de sécurité.
(2) Une personne ne peut être destituée en vertu du paragra-
phe (1) si elle a porté plainte contre une évaluation de sécurité
devant le comité de surveillance des activités de renseignement
de sécurité constitué par le paragraphe 34(1) de la Loi sur le
Service canadien du renseignement de sécurité et si l'enquête
sur la plainte n'est pas terminée.
(3) Pour l'application du paragraphe (1), un décret de sus
pension ou de destitution pris par le gouverneur en conseil fait
foi de son contenu.
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