T-522-90
Bell Canada (requérante)
c.
Commission canadienne des droits de la personne
et Michelle Falardeau-Ramsay (intimées)
RÉPERTORIÉ: BELL CANADA c. CANADA (COMMISSION DES
DROITS DE LA PERSONNE) (1" INST.)
Section de première instance, juge Muldoon—
Ottawa, 5 juin et 18 octobre 1990.
Pratique — Affidavits — Requête en radiation de l'affidavit
déposé par Falardeau-Ramsay à l'occasion d'une requête
introductive d'instance — Les affidavits fondés sur les rensei-
gnements obtenus et sur la croyance qu'on peut avoir quant à
certains renseignements ne sont pas suffisants: Règle 332(1)
Le souscripteur d'affidavit se distingue du témoin faisant
l'objet d'un interrogatoire préalable; ce témoin doit s'informer
de la position de la partie intéressée même s'il s'agit d'un
out-dire — La Règle 332(1) limite la portée des affidavits à la
connaissance personnelle — La déposition doit se limiter aux
questions qui ont eu lieu à l'entrée en fonction, ou après, de
l'intimée comme vice-présidente de la CCDP en 1988 —
L'intimée est en droit de produire des documents qui existaient
auparavant et qui sont sous sa garde et son contrôle — Il est
interdit à la déposante de se livrer à l'explication de docu
ments et à l'interprétation de la loi — Cela conduirait à un
contre-interrogatoire abusif — Examen des paragraphes con
testés par rapport à la norme énoncée à la Règle 332(1) — Les
paragraphes détaillant le mandat et les initiatives de la Com
mission sous le régime de l'art. 10 et l'affirmation selon
laquelle la Commission na reconnu» quelque chose sans men-
tionner le lieu, la date, l'époque ni la connaissance personnelle
constituent une interprétation par la déposante de la Loi — La
requérante a droit au respect de la Règle malgré l'inconvénient
causé aux intimées — L'affidavit est radié dans sa totalité
avec l'autorisation de déposer un nouvel affidavit dans un
délai de quinze jours.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663, Règle
332(1).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Gingras c. Service canadien du renseignement de sécurité
(1987), 11 C.I.P.R. 327; 19 C.P.R. (3d) 283 (C.F. P'
inst.); Foodcorp Ltd. c. Hardee's Food Systems, Inc.,
[1982] 1 C.F. 821; (1982), 40 N.R. 349 (C.A.).
DÉCISION CITÉE:
Action Travail des Femmes c. Compagnie des chemins de
fer nationaux du Canada, [1987] 1 R.C.S. 1114; (1987),
40 D.L.R. (4th) 193; 27 Admin. L.R. 172; 87 C.L.L.C.
17,022; 76 N.R. 161.
AVOCATS:
Roy L. Heenan et Thomas E. F. Brady pour
la requérante.
Raj Anand pour les intimées.
PROCUREURS:
Heenan Blaikie, Montréal, pour la requé-
rante.
Scott & Aylen, Toronto, pour les intimées.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MULDOON: La requérante cherche à
faire radier l'affidavit que Falardeau-Ramsay a
établi sous serment le 11 mai 1990 et déposé le 17
mai 1990 ou, subsidiairement, à faire radier les
paragraphes 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14,
15, 16, 17, 19, 20, 22, 23, 24, 26, 36, 48 et 50 de
cet affidavit, avec l'autorisation accordée aux inti-
mées de déposer un affidavit conforme aux Règles
[Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663]
dans les sept jours de la date de la décision sur la
présente requête. Les intimées s'opposent à ce que
soit rendue une telle ordonnance portant radiation
de l'affidavit ou d'une partie de celui-ci.
Le cadre dans lequel le présent litige doit être
examiné est certainement celui qui est prévu par la
Règle 332(1) concernant tous les affidavits dépo-
sés dans les procédures devant cette Cour; cette
Règle est ainsi conçue:
Règle 332. (1) Les affidavits doivent se restreindre aux
faits que le témoin est en mesure de prouver par la connais-
sance qu'il en a, sauf en ce qui concerne les requêtes interlocu-
toires pour lesquelles peuvent être admises des déclarations
fondées sur ce qu'il croit et indiquant pourquoi il le croit.
L'affidavit de l'intimée est déposé à l'occasion
d'une requête introductive d'instance, et non d'une
requête interlocutoire, dans laquelle la requérante
conclut à une ordonnance accordant un bref de
prohibition ou un bref de certiorari à l'égard de
l'enquête tenue par la Commission intimée par
suite d'une plainte portée par celle-ci même (ci-
après appelée aussi CCDP) le 17 juillet 1989. En
conséquence, les affidavits fondés sur les rensei-
gnements obtenus et sur la croyance qu'on peut
avoir quant à certains renseignements ne sont pas
suffisants. Pour mieux situer l'affidavit contesté,
les motifs invoqués par la requérante pour deman-
der un redressement extraordinaire sont pertinents:
[TRADUCTION]
1. II devrait y avoir lieu au décernement d'un bref de prohibi
tion interdisant à la Commission canadienne des droits de la
personne d'instruire la plainte qu'elle a portée contre la
requérante le 17 juillet 1989, parce que ladite intimée a
outrepassé sa compétence en utilisant une telle plainte
comme un moyen vraisemblable lui permettant de poursui-
vre son plan ultra vires d'examen de la mise en œuvre par la
requérante de l'équité en matière d'emploi, notamment son
plan à cet égard sous le régime de la Loi sur l'équité en
matière d'emploi. La Commission canadienne des droits de
la personne, intimée, ne tient d'aucune loi du Parlement ni
d'aucun autre texte le pouvoir de le faire.
2. Il devrait y avoir lieu au décernement d'un bref de certiorari
annulant la décision par la Commission canadienne des
droits de la personne d'instruire la plainte déposée le 17
juillet 1989 par l'intimée Michelle Falardeau-Ramsay en sa
qualité de division de la Commission, parce que dans cette
plainte, il manque totalement les détails requis pour une
plainte valable en vertu de la Loi canadienne sur les droits
de la personne, et parce qu'on n'a pas informé la requérante
de la nature de la plainte à laquelle elle doit faire face. De
plus, les questions alléguées dans cette plainte sont tellement
vagues qu'elles ne peuvent donner aux intimées ou à l'une
d'elles des motifs raisonnables de croire que la requérante a
contrevenu à la Loi canadienne sur les droits de la personne.
3. Il devrait y avoir lieu au décernement d'un bref de certiorari
et d'un bref de prohibition à l'égard des actes des intimées,
qui consistent à instruire la plainte portée contre la requé-
rante parce que, dans la tentative de s'arroger une compé-
tence qu'elles n'ont pas, les intimées ou l'une ou l'autre
d'elles ont agi d'une manière qui, en tout état de cause, est
totalement injuste à l'égard de la requérante, et ont mani-
pulé les dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la
personne pour pouvoir porter une plainte inopportune et
illégale en vue de la réalisation de leur plan ultra vires qui
consiste dans l'examen de la mise en oeuvre de l'équité en
matière d'emploi et des plans à cet égard sous le régime de
la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
Le langage de la requérante est un peu mélodra-
matique et, il convient de le noter, il impute de la
mauvaise foi et l'intention de nuire aux intimées
aux paragraphes 1 et 3, au moins. Bien entendu,
on ne doit pas indûment empêcher les intimées de
rejeter, comme elles le jugent approprié, les alléga-
tions de tentative délibérée d'exercer des pouvoirs
excessifs relativement aux méthodes d'engagement
de la requérante et à la composition de sa
main-d'oeuvre.
Il importe de distinguer la position de l'intimée
Falardeau-Ramsay de celle qu'on peut observer
dans d'autres procédures ou dans des procédures
différentes, c'est-à-dire la position du cadre d'une
société qui est présenté aux fins d'interrogatoire
préalable. A l'interrogatoire préalable, le témoin
est tenu de décrire sous serment la position parti-
culière de la partie intéressée, même si cela s'en-
tend d'un ouï-dire pour être renseigné sur les
détails de la réclamation ou de la défense de la
partie intéressée, à savoir la position particulière
de la partie dans l'action. À l'interrogatoire préala-
ble, le témoin doit s'informer au risque de la
radiation des plaidoiries de la partie intéressée.
La position de l'intimée Falardeau-Ramsay rela-
tivement à son affidavit déposé en l'espèce est
déterminée et limitée par les restrictions de la
Règle 332(1). De plus, il ressort de l'affidavit
établi sous serment par Chantal Lamarche le 24
mai 1990, avec sa pièce jointe, que l'intimée Falar-
deau-Ramsay été nommée pour la première fois à
la CCDP, dans le rôle initial de vice-présidente
quelque temps en 1988. Les intimées ne nient pas
ce fait. L'intimée particulière a signé la plainte
portée contre la requérante par la CCDP le 17
juillet 1989.
Ce dernier fait limite encore la portée de la
déposition de l'intimée quant aux questions et aux
événements qui ont eu lieu au sein de la Commis
sion à son entrée en fonction ou après, de peur
qu'elle ne déterre le ouï-dire. Bien entendu, elle
serait tout à fait en droit de produire tous procès-
verbaux, toutes notes de service internes ou tout
autre document de la CCDP qui ont existé avant
la date cruciale et qui sont sous sa garde et con-
trôle, mais, dans un tel cas, les documents
devraient parler d'eux-mêmes sans aucun commen-
taire ni aucune explication de la part de l'intimée.
De même, cette déposante ou tout autre déposant
doit s'abstenir de donner des commentaires ou des
explications pour ce qui est de l'interprétation de
la loi. L'avocat des intimées peut le faire dans ses
observations soumises à la Cour ou dans ses dis
cussions avec celle-ci, qui est l'interprète suprême
compétent du droit. La tentative de contre-interro-
ger un déposant sur cette question finirait par être
un examen inapproprié de l'opinion du déposant
sur le sens des documents et sur l'interprétation de
la loi.
Ainsi donc, le genre d'examen auquel doit se
livrer la Cour en l'espèce est bien illustré par celui
fait par le juge Teitelbaum de cette Cour dans
l'affaire Gingras c. Service canadien du renseigne-
ment de sécurité (1987), 11 C.I.P.R. 327, où il a
examiné tous les paragraphes contestés de l'affida-
vit par rapport à la norme énoncée à la Règle
332(1). Une autre vision de ce type actuel de
décision se révèle encore dans la décision unanime
de la Section d'appel de cette Cour rendue par le
juge Heald dans l'affaire Foodcorp Ltd. c. Har-
dee's Food Systems, Inc., [1982] 1 C.F. 821, à la
page 824:
Un examen des affidavits versés au dossier de la procédure en
radiation par le paragraphe 3 de l'ordonnance de la Division de
première instance révèle qu'ils ne sont pas conformes à la Règle
332(1). Ils sont pleins de déclarations basées sur des renseigne-
ments et sur ce que l'auteur croit, de ouï-dire et d'opinions qui
ne sont pas fondées sur une connaissance personnelle. Selon
moi, il n'est pas possible de séparer ce qui est recevable de ce
qui ne l'est pas. Pour la même raison, je suis d'avis que les
contre-interrogatoires sur les affidavits et les aveux obtenus au
cours de ceux-ci sont également irrecevables et ne devraient pas
être déposés dans la procédure en radiation.
Parmi les nombreux paragraphes dont la requé-
rante demande la radiation, à défaut d'une radia
tion de l'affidavit tout entier, figurent les paragra-
phes 2 et 3 qui sont énoncés sous la rubrique
[TRADUCTION] MANDAT DE LA COMMISSION
CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE:
[TRADUCTION] 2. En 1977, la Parlement du Canada a adopté
la Loi canadienne sur les droits de la personne et a codifié le
principe selon lequel chaque individu devrait bénéficier de
l'égalité des chances dans l'arène publique, sans discrimination,
sur la base des facteurs énumérés dans la Loi. La Commission
canadienne des droits de la personne a été créée pour appliquer
ce principe et elle s'est vu accorder une variété de moyens
décrits dans la loi.
3. Ces moyens comprennent:
a) l'obligation et le pouvoir de faire enquête sur les plaintes;
b) le pouvoir de porter plainte de sa propre initiative;
c) le pouvoir d'obtenir une décision sur les plaintes lorsque cela
est justifié et de promouvoir l'intérêt public;
d) le pouvoir de prendre des ordonnances qui lient elle-même et
les tribunaux et qui définissent le respect de la Loi;
e) l'obligation d'élaborer et d'exécuter des programmes de
sensibilisation et d'autres activités pour décourager et réduire
les actes discriminatoires, et d'encourager la compréhension par
le public des principes fondamentaux des droits de la personne;
f) le pouvoir de donner des conseils et de l'aide aux employeurs
qui attendent l'établissement de programmes particuliers pour
corriger les actes discriminatoires et leurs effets;
g) le pouvoir de soumettre des recommandations directement
au Parlement sur les questions relatives à son large mandat.
Or, ces paragraphes frôlent un peu trop le
bavardage, mais on ne saurait prévoir qu'ils
feraient échec à la position de la requérante en
l'espèce. D'autre part, du point de vue d'un puriste,
ces paragraphes visent effectivement à donner l'in-
terprétation par l'intimée de la Loi alors que cel-
le-ci se passe de commentaires. Les intimées peu-
vent donner à leur avocat l'instruction d'exposer de
telles interprétations dans un argument oral ou
écrit, mais l'intimée en tant que déposante et en
tant que témoin à l'occasion d'un contre-interroga-
toire sur son affidavit ne saurait être autorisée à
rendre «témoignage» sur son interprétation du
texte législatif. L'avocat de la requérante fait
valoir que la déposante [TRADUCTION] «transpose
très habilement certains mots de la Loi en d'autres
mots qui leur donnent un sens tout à fait diffé-
rent». Qu'il en soit ainsi ou non, ces paragraphes
devraient donc être radiés.
De plus, sous la rubrique [TRADUCTION] INI
TIATIVES DE LA COMMISSION EN VERTU DE L'AR-
TICLE 10, les mêmes observations peuvent facile-
ment être vérifiées. Les paragraphes 4 et 5 sont à
l'évidence inacceptables, en ce sens qu'ils contien-
nent l'interprétation par la déposante de la Loi et
du ouï-dire. Le paragraphe 6 est ainsi rédigé:
[TRADUCTION] 6. Pour faciliter l'observation des objectifs
d'orientation à grande portée de la Loi ainsi que des articles
particuliers de celle-ci (articles 10 et 15 en particulier) [qui
interprètent tous et dans une grande mesure la loi qui parle
d'elle-même], la Commission a distribué en 1981 une publica
tion intitulée «Programmes spéciaux en matière d'emploi: critè-
res de mise en application» [assertion factuelle] qui comprenait
la déclaration suivante
[Également, un exposé de faits concernant ce qui a été inclus.]
Cette analyse a été adoptée et articulée par la Cour suprême du
Canada dans l'arrêt Action Travail des Femmes c. Compagnie
des chemins de fer nationaux du Canada.
L'avocat de la requérante ne s'oppose pas aux
assertions factuelles dont la pertinence peut être
déterminée plus tard dans les procédures, mais il
affirme qu'il connaît très bien l'arrêt Action Tra
vail [Action Travail des Femmes c. Compagnie
des chemins de fer nationaux du Canada, [1987]
1 R.C.S. 1114], ayant même écrit un article sur
cettte affaire, mais que cet arrêt ne dit rien de
semblable à ce que prétend la déposante. Il insiste
sur le fait que la déposante Falardeau-Ramsay
énonce de façon inappropriée sa vue de l'historique
de l'affaire Action Travail, et il est en outre affligé
par ce qu'il qualifie de [TRADUCTION] «histoire
révisionniste». L'avocat de la requérante affirme
qu'il doit élever une objection et chercher à faire
radier ces paragraphes de peur que la requérante
ne soit fixée sur le point de vue de la déposante sur
un jugement de la Cour suprême du Canada sim-
plement pour omission d'élever une objection. Ce
paragraphe doit être radié.
Lorsque, au paragraphe 7, la déposante Falar-
deau-Ramsay jure que [TRADUCTION] «la Com
mission a également reconnu», elle donne une con
clusion sans qu'il y ait un procès-verbal muni de
documents de la CCDP pour l'appuyer ni les dépo-
sitions de ses membres qui étaient présents à l'épo-
que, ni même des notes de service échangées entre
bureaux. C'est peut-être un petit point, mais l'af-
firmation de la déposante porte sur le fait que la
Commission l'a [TRADUCTION] «reconnu)), ou s'en
est «préoccupée», et elle ne fait nullement mention
du lieu, de la date, de l'époque ni de la connaisance
personnelle, mais exprime des avis personnels et
interprète encore la Loi en disant notamment ce
que [TRADUCTION] «l'exécution en matière de
droits de la personne devait être». C'est une déposi-
tion défectueuse qui doit être radiée. Le paragra-
phe 8 spécule beaucoup, du point de vue histori-
que, sur l'initiative de 1978, le mandat accessoire
de la CEIC et, par conséquent, sur l'établissement
d'une commission d'enquête, ce qui n'a rien d'une
connaissance personnelle. Ce paragraphe doit être
radié.
Une lecture attentive des autres paragraphes
contestés de l'affidavit de Falardeau-Ramsay
révèle qu'ils ne sont pas conformes aux règles pour
les motifs invoqués par l'avocat de la requérante.
Le paragraphe 48, par exemple, est tout aussi
inacceptable, puisqu'il s'agit d'un ouï-dire multi
ple:
[TRADUCTION] 48. M. Yalden m'informe, et je le crois vrai-
ment, que, le 23 juin 1989, il a parlé au vice-président exécutif
de Bell, (affaires juridiques et environnement), Roger Tassé.
M. Yalden a expliqué l'importance de l'existence d'une entente
écrite pour l'examen conjoint. Il a insisté sur le fait qu'il fallait
absolument trancher la question, parce que la Commission
avait autorisé l'institution d'une plainte si une entente n'avait
pas été conclue le 14 juillet 1989. Or, on m'a montré une copie
de la note de M. Yalden concernant cette conversation, qui
constitue la pièce 8 de cet affidavit. Or, on m'a montré la lettre
de M. Yalden qui porte la même date et qui constitue la pièce 9
de cet affidavit, contenant une version révisée du PE ...
Il en ressort que le président Max Yalden aurait
peut-être dû établir sous serment un affidavit,
s'exposant ainsi à un contre-interrogatoire sur cet
affidavit, si la prétendue conversation avec M.
Tassé est importante pour la cause de l'intimée. Le
paragraphe 48, tel qu'il est cité ci-dessus, doit être
radié, en même temps que les autres paragraphes
contestés par la requérante.
Dans un sens, il est dommage qu'il faille vider
ainsi l'affidavit. L'avocat des intimées prétend clai-
rement qu'il convient de permettre aux intimées
d'exposer à la Cour l'histoire tout entière pour
répondre aux allégations. Il sera maintenant beau-
coup plus compliqué pour les intimées de «rempla-
cer», par des dépositions appropriées, ce qui a
maintenant besoin d'être exprimé et précisé. Cer-
tains considéreront la Cour comme indûment
rigide et dure à l'égard de ces intimées et d'autres
dans des circonstances semblables, dans son appli
cation de la Règle 332(1) de la manière la plus
littérale. Un tel point de vue n'est pas mal fondé.
Cependant, la requérante est en droit de persuader
la Cour d'exiger que sa Règle soit respectée. La
requérante a légitimement à l'esprit les problèmes
du contre-interrogatoire de la déposante et, bien
que l'avocat des intimées ait renoncé à cet avan-
tage, la possibilité de sembler ratifier et adopter ce
qu'il a qualifié d'expressions [TRADUCTION] «révi-
sionnistes» qui font que le contre-interrogatoire ne
revêtirait pas un caractère factuel et serait peut-
être peu concluant.
Ainsi donc, bien qu'elle ait une certaine hésita-
tion quant à l'utilité finale de la Règle, mais étant
donné la certitude quant à son application en
l'espèce, la Cour considère que cette application
laisse l'affidavit mal conçu de l'intimée dans un
état tel que ce qui en reste devrait être, par
clémence, radié dans son intégralité. Cette radia
tion va, à l'évidence, créer un cas d'urgence pour
les intimées en ce qui concerne le présent litige. La
requérante a mis les intimées au défi d'expliquer
leur position, de défendre leurs pouvoirs et leur
compétence et de répondre aux allégations de
mauvaise foi ou d'accroissement arbitraire de leur
compétence vis-à-vis de la requérante en particu-
lier, mais réellement à l'égard de tous les impor-
tants employeurs en général. Maintenant que l'af-
fidavit de Falardeau-Ramsay n'existe plus, il sera
donc autorisé aux intimées, dans un délai de
quinze jours après la date de l'ordonnance donnant
suite aux conclusions tirées par la Cour en l'espèce,
à déposer un affidavit reformulé de la part de
l'intimée Falardeau-Ramsay ou d'un autre cadre
ou préposé, dans le passé ou dans le présent, de la
CCDP. Il serait hautement préférable qu'un seul
affidavit de ce genre soit déposé, mais si, en
réponse aux objections de la requérante contre
l'affidavit maintenant radié, il semble nécessaire
de relever et de déposer bien davantage de pièces
pour y répondre, un second affidavit de la même
déposante ou d'un autre, à cette fin, ne sera pas
irrecevable.
Les frais de la présente action, sur la base entre
parties, suivront l'issue de la cause.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.