A-761-86
CN Marine Inc. (appelante) (défenderesse)
c.
Carling O'Keefe Breweries of Canada Limited et
Norlab Ltd. (intimées) (demanderesses)
et
The Labrador Shipping Co. Ltd., Le navire «New-
foundland Coast» et Roger Sirois (intimés)
(défendeurs)
RÉPERTORIÉ: CARLING O'KEEFE BREWERIES OF CANADA LTD.
c. CN MARINE INC. (CA.)
Cour d'appel, juge en chef Iacobucci, juges Heald
et Stone, J.C.A.—Halifax, 31 octobre et 1°'
novembre; Ottawa, 21 décembre 1989.
Droit maritime — Transport de marchandises — Perte
d'une cargaison par mer houleuse due au fait que les mar-
chandises avaient été mal arrimées et attachées — Les dispo
sitions d'exclusion de responsabilité contenues au connaisse-
ment ne peuvent exonérer l'affréteur à temps car elles sont
nulles et non avenues en vertu des Règles de La Haye — La
défense fondée sur les périls de la mer est irrecevable car les
conditions de la mer n'avaient rien d'inhabituelles -- Il n'y a
pas eu d'erreur comme telle dans la navigation ou l'adminis-
tration du navire, seulement une erreur dans la prise en charge
de la cargaison — La responsabilité n'est pas limitée à 500 $
par conteneur car le connaissement indiquait le nombre de
colis expédiés.
Droit maritime — Pratique — Intérêt — Action en domma-
ges-intérêts pour la perte d'une cargaison en mer — Le juge de
première instance a commis une erreur en n'accordant pas
d'intérêt antérieur au jugement à compter de la date de la
perte — Rien ne permet d'écarter la règle d'amirauté suivant
laquelle l'intérêt fait partie intégrante des dommages-intérêts.
Il s'agit de l'appel d'un jugement de la Section de première
instance aux termes duquel les intimés-défendeurs ont été tenus
responsables des dommages ayant résulté de la perte en mer de
4 240 caisses de bière chargées dans trois conteneurs de 20
pieds à bord du Newfoundland Coast pour livraison de St.
John's à Happy Valley/Goose Bay au Labrador, en vertu d'un
connaissement libellé «reçu» et délivré en octobre 1980. Le
navire avait été affrété à temps par l'appelante CN Marine
(CN). L'intimé Sirois, capitaine du navire, et CN ont tous deux
décidé que les conteneurs devraient être arrimés transversale-
ment sur le pont, l'un des bouts des conteneurs dépassant
d'environ deux pieds le côté du navire. Les conteneurs ont
ensuite été fixés à l'aide de câbles d'acier plutôt qu'avec
d'autres accessoires disponibles qui leur étaient de loin
supérieurs.
Pendant la traversée, la mer houleuse — ce qui n'était pas
inhabituel pour cette région à cette époque de l'année —
frappait le dessous des conteneurs, ce qui a entraîné le bris des
câbles d'acier et la perte en mer des conteneurs.
L'appelante a fait valoir que le juge de première instance
avait commis une erreur (1) en refusant de donner effet à la
clause 18 du connaissement qui visait à faire porter exclusive-
ment au propriétaire du navire transporteur les obligations du
transporteur, en l'espèce Labrador Shipping Co. Ltd.; (2) en
rejetant les moyens de défense fondés sur les erreurs «dans la
navigation ou dans l'administration du navire», sur les «périls de
la mer» et sur «toute autre cause», prévus aux règles 2a),c) et q)
de l'article IV des Règles de La Haye; et enfin (3) en fixant la
limitation de responsabilité «par colis» en fonction du nombre
de caisses de bière transportées plutôt que du nombre de
conteneurs. L'expéditeur, Carling O'Keefe, attaque pour sa
part, par voie d'appel incident, la décision du juge de première
instance de limiter l'intérêt antérieur au jugement à une
période de deux ans à compter de la date d'introduction de
l'action, au lieu de l'accorder pour toute la période écoulée à
compter de la perte.
Arrêt: l'appel devrait être rejeté et l'appel incident accueilli.
Il n'y a aucune «erreur manifeste et dominante» susceptible
d'avoir faussé les conclusion de faits du juge de première
instance.
À l'exception de la clause 18, ou clause d'affrètement coque
nue, tout indique qu'il existait un contrat de transport entre
l'intimée, Carling O'Keefe, et l'appelante, CN, faisant de cette
dernière le «transporteur». De même, une interprétation juste
du connaissement amène à conclure qu'en délivrant ce docu
ment, CN a signé le contrat de transport en sa qualité person-
nelle et, qu'à titre d'affréteur à temps, elle est devenue dès lors
un «transporteur» au sens du connaissement ainsi que des
Règles de La Haye. En outre, le rôle qu'a joué l'affréteur à
temps relativement au chargement et à l'arrimage de la cargai-
son à bord du navire était compatible avec l'exécution de
l'obligation qui lui incombait à titre de «transporteur» aux
termes d'un contrat de transport soumis aux Règles de La
Haye.
Le juge de première instance a également conclu à bon droit
que la clause 18 était nulle, non avenue et sans effet entre
l'expéditeur et l'affréteur à temps puisque, contrairement à la
règle 8 de l'article III des Règles de La Haye, cette clause
visait à exonérer l'affréteur à temps des droits et obligations qui
lui incombaient, aux termes de la règle 2 du mêmearticle, de
procéder de façon appropriée et soigneuse à l'arrimage des
marchandises transportées.
Les conditions dans lesquelles s'est effectuée la traversée
n'étaient pas telles qu'elles pouvaient justifier le moyen de
défense fondé sur les «périls de la mer» que prévoit la règle 2c)
de l'article IV, le juge de première instance ayant conclu que
ces conditions étaient exactement celles auxquelles il fallait
s'attendre. Aucun acte, négligence ou défaut dans l'administra-
tion du navire ne pouvait non plus étayer une défense fondée
sur la règle 2a) car il y a eu en l'espèce manque de vigilance à
l'égard de la cargaison et non manque de vigilance à l'égard du
navire mettant indirectement en danger la cargaison. Enfin
aucune «autre cause» ne permettait d'invoquer la défense
fondée sur la règle 2q).
Le juge de première instance n'a pas commis d'erreur en
concluant, sur la foi des documents de transport, des déclara-
tions des parties et des négociations intervenues entre elles, que
la cargaison se composait de 4 240 colis, soit le nombre de
caisses de bière transportées. La responsabilité ne saurait donc
être limitée à 500 $ le conteneur aux termes de la règle 5 de
l'article IV.
Étant donné le délai de six ans écoulé avant que l'affaire ne
soit mise en état, le juge de première instance, sans d'abord
demander d'explications à Carling O'Keefe à ce sujet, a limité
le paiement de l'intérêt antérieur au jugement à une période de
deux ans à compter de la date d'introduction de l'action au lieu
de l'accorder pour toute la période écoulée depuis la perte. Le
juge de première instance a commis une erreur à cet égard. En
vertu des principes du droit de l'amirauté, l'intérêt est alloué à
titre de partie intégrante des dommages subis. En l'espèce, rien
ne permettait d'écarter la règle normale en matière d'allocation
d'intérêt antérieur au jugement en cas de perte totale. II y a
donc lieu d'accorder l'intérêt à compter de la date où la perte
est survenue.
Rien ne permet de retenir l'argument du capitaine portant
qu'il a été privé du droit à la justice naturelle en ce qu'il n'a pas
eu, lors du procès, la possibilité de présenter une défense. En
fait, c'est de son propre gré que le capitaine a quitté la salle
d'audience. Même si les avocats de l'expéditeur et de l'affréteur
à temps ont indiqué qu'ils ne s'attendaient pas à recouvrer de
lui quoi que ce soit, compte tenu de sa situation financière, cela
ne signifiait pas qu'il n'y aurait pas enquête sur sa responsabi-
lité éventuelle et encore moins que jugement ne serait pas rendu
contre lui.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi du transport des marchandises par eau, 1936, S.C. •
1936, chap. 49.
Loi sur le transport des marchandises par eau, S.R.C.
1970, chap. C-15, ann., art. la), III(2),(8),
IV(2)a),c),q), 5.
JURISPRUDENCE
DECISIONS APPLIQUÉES:
Stein et autres c. Le navire «Kathy K» et autres, [ 1976] 2
R.C.S. 802; Samuel, Samuel & Co. v. West Hartlepool
Steam Navigation Company (1906), 11 Com. Cas. 115
(S.C.); The Ferro, [1893] P. 38 (Div. Ct.); The Gleno-
chil, [1896] P. 10 (Div. Ct.); International Factory Sales
Service Ltd. c. Le «Alexandr Serafimovich», [1976] 1
C.F. 35 (1" inst.); In re the «Dundee» (1827), 2 Hagg.
137 (Adm.); In re the «Gazelle» (1844), 2 W. Rob. 279
(Adm.); In re the «Hebe» (1847), 2 W. Rob. 530 (Adm.);
Canadian Brine Ltd. v. The Ship Scott Misener and Her
Owners, [1962] R.C.É. 441; The Joannis Vatis (No. 2),
[1922] P. 213 (P.D.A.); The Northumbria (1869),
L.R.A. & E. 6; The Berwickshire, [1950] P. 204; Cana-
dian General Electric Company Limited c. Pickford &
Black Limited, [ 1972] R.C.S. 52; Drew Brown Limited c.
Le navire «Orient Trader» et autres, [1974] R.C.S. 1286;
Bell Telephone Co. c. Le «Mar- Tirenno», [1974] 1 C.F.
294 (l'a inst.); Davie Shipbuilding Limited c. La Reine,
[1984] 1 C.F. 461 (C.A.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Cormorant Bulk-Carriers Inc. c. Canficorp (Overseas
Projects) Ltd. (1984), 54 N.R. 66 (C.A.F.).
DÉCISION EXAMINÉE:
Paterson SS Ltd. c. Aluminum Co. of Can., [19511
R.C.S. 852; [1952] 1 D.L.R. 241.
DÉCISIONS CITÉES:
The Berkshire, [1974] 1 Lloyd's Rep. 185 (Q.B.D.); The
Vikfrost, [1980] 1 Lloyd's Rep. 560 (C.A.); Kenya Rail
ways v. Antares Co. Pte. Ltd. (The Antares) (No. 1),
[1986] 2 Lloyd's Rep. 626 (Q.B. Corn. Ct.); Ngo Chew
Hong Edible Oil Pte. Ltd. v. Scindia Steam Navigation
Co. Ltd. (The Jalamohan), [1988] 1 Lloyd's Rep. 443
(Q.B. Corn. Ct.); Kaleej International Pty Ltd v Gulf
Shipping Lines Ltd (1986), 6 NSWLR 569 (C.A.);
Anderson's (Pacific) Trading Co Pty Ltd v Karlander
New Guinea Line Ltd, [ 1980] 2 NSWLR 870 (Com. Law
Div.); Epstein v. U.S., 86 F. Supp. 740 (D.C.N.Y., 1949);
Blanchard Lumber Co. v. S. S. Anthony II, 259 F. Supp.
857 (D.C.N.Y., 1966); The Iristo, 43 F. Supp. 29
(D.C.N.Y., 1941); conf., 137 F. 2d 619 (2d Cir., 1943);
cert. refusé, 320 U.S. 802 (1943); Aris Steamship Co.
Inc. c. Associated Metals & Minerals Corporation,
[1980] 2 R.C.S. 322; (1980), 101 D.L.R. (3d) l; 31 N.R.
584; Apex (Trinidad) Oilfields, Ltd. v. Lunham & Moore
Shipping, Ltd., [1962] 2 Lloyd's Rep. 203 (C. de l'E.
Can.); Delano Corp. of America v. Saguenay Terminals
Ltd., [1965] 2 R.C.E. 313; Kennedy & Co., Ltd., v.
Canada Jamaica Line, Canada West Indies Shipping
Company, Ltd., and Aldag, [ 1967] 1 Lloyd's Rep. 336
(C.S. Qué.); Atlantic Traders Ltd. v. Saguenay Shipping
Ltd. (1979), 38 N.S.R. (2d) 1; 69 A.P.R. 1 (C.S. I re
inst.); Weyerhaeuser Co. et autres c. Anglo Canadian
Shipping Co. et autres (1984), 16 F.T.R. 294 (lr` inst.);
Canadian Klockner Ltd. c. D/S A/S Flint, [1973] C.F.
988 (I re inst.); Farr Inc. c. Tourloti Compania Naviera
S.A., T-5847-80, juge Pinard, jugement en date du
3-7-85, C.F. I re inst., non publié; conf. A-645-85, juge
Marceau, J.C.A., jugement en date du 30-5-89, C.A.F.,
encore inédit; Q.N.S. Paper Co. c. Chartwell Shipping
Ltd., [1989] 2 R.C.S. 683; Falconbridge Nickel Mines
Ltd. et al. v. Chimo Shipping Ltd. et al., [1969] 2 R.C.E.
261; Gosse Millard v. Canadian Government Merchant
Marine, [1928] 1 K.B. 717 (C.A.); conf. [1929] , A.C. 223
(H.L.).
DOCTRINE
Tetley, William Marine Cargo Claims, 3 e éd., Toronto:
Butterworths, 1988.
AVOCATS:
James D. Youden et E. A. Gores, pour l'appe-
lante (défenderesse) CN Marine Inc.
Kristine Arnet Connidis, pour l'intimée
(demanderesse) Carling O'Keefe Breweries.
D. Peter Mancini, pour l'intimé (défendeur)
Roger Sirois.
PROCUREURS:
James D. Youden, Halifax, pour l'appelante
(défenderesse) CN Marine Inc.
Campbell, Godfrey & Lewtas, Toronto, pour
l'intimée (demanderesse) Carling O'Keefe
Breweries.
Nova Scotia Legal Aid, Sydney, pour l'intimé
(défendeur) Roger Sirois.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE STONE, J.C.A.: Il s'agit en l'espèce de
l'appel d'un jugement du juge Martin de la Section
de première instance, rendu le 31 août 1987
[[1987] 2 C.F. 107], et aux termes duquel l'appe-
lante et les intimés (défendeurs) ont été tenus
responsables des dommages ayant résulté de la
perte en mer de 4 240 caisses de bière chargées
dans trois conteneurs de 20 pieds à bord du navire
intimé Newfoundland Coast pour livraison de St.
John's à Happy Valley/Goose Bay au Labrador, en
vertu d'un connaissement libellé «reçu» et délivré à
St. John's le 29 octobre 1980. Pour plus de clarté,
je désignerai désormais l'appelante comme l'«affré-
teur à temps», la première intimée (demanderesse)
comme l'«expéditeur», la première intimée (défen-
deresse) comme les «propriétaires du navire» et le
capitaine Sirois comme le «capitaine».
En rendant jugement en faveur de l'expéditeur
contre l'affréteur à temps, le juge de première
instance a conclu que ce dernier était un «transpor-
teur» de la cargaison, malgré la présence, au
nombre des conditions imprimées sur le connaisse-
ment, d'une clause (la clause 18) visant à faire
porter exclusivement au propriétaire du navire
transporteur les obligations du «transporteur». Le
juge de première instance a également rejeté les
autres moyens de défense. Il a en outre jugé que le
droit à la limitation «par colis» aux termes du
contrat de transport devait être fondé sur le
nombre de caisses de bière comprises dans le char-
gement plutôt que sur le nombre de conteneurs
dans lesquels ces caisses ont été transportées.
Les questions en litige
Le présent appel soulève la question de savoir si
le juge de première instance a commis une erreur
en refusant de donner effet à la clause 18, en
rejetant les moyens de défense fondés sur les
erreurs «dans la navigation ou dans l'administra-
Lion» du navire, sur les «périls de la mer» et sur
«toute autre cause», prévus aux règles 2a),c) et q)
de l'article IV des Règles (les «Règles de La
Haye») annexées à la Loi sur le transport des
marchandises par eau, S.R.C. 1970, chap. C-15',
et en fixant la limitation de responsabilité «par
colis» en fonction du nombre de caisses de bière
plutôt qu'en fonction du nombre de conteneurs.
Par voie d'appel incident, l'expéditeur attaque
pour sa part la décision du juge de première
instance de limiter l'intérêt antérieur au jugement,
accordé sur les dommages-intérêts, à une période
de deux ans à compter de la date d'introduction de
l'action, savoir le 21 octobre 1981.
Les faits ayant entouré le chargement et la perte
Pour trancher les questions en litige, il importe
d'examiner la preuve documentaire et circonstan-
cielle sur laquelle le juge de première instance a
appuyé ses conclusions. Ainsi, le libellé du connais-
sement revêt une importance toute particulière car
son interprétation est cruciale. Il s'agit d'une for-
mule combinée destinée tant au transport par eau
qu'au transport ferroviaire. L'intitulé «CANADIAN
NATIONAL RAILWAYS» y est suivi de la reconnais
sance de la réception, le 29 octobre 1980, de la
cargaison [TRADUCTION] «pour livraison en con-
formité et sous réserve de toutes les conditions
stipulées au recto et au verso du présent titre, au
lieu habituel de livraison à la destination désignée».
Des espaces sont ensuite prévus pour y inscrire le
nom du destinataire, le lieu de destination des
marchandises ainsi que le nom du bâtiment trans-
porteur. Juste après se trouve l'espace réservé aux
précisions sur les marchandises (fournies par l'ex-
péditeur), puis suivent une série de dispositions
imprimées ainsi libellées:
[TRADUCTION] Les dispositions de la Partie A font partie des
conditions régissant le transport des marchandises pendant tout
le temps où celles-ci sont sous la garde de la compagnie et de
ses transporteurs associés, en tant que transporteur par eau; les
dispositions de la partie B font partie des conditions régissant le
transport des marchandises pendant tout le temps où celles-ci
sont sous la garde de la compagnie et de ses transporteurs
associés, en tant que transporteur ferroviaire. Dans le cas où les
marchandises doivent être transportées par rail après leur
transport par eau, les dispositions de la Partie A s'appliquent à
compter du moment où les marchandises sont déchargées des
wagons.
'Anciennement la Loi du transport des marchandises par
eau, 1936, S.C. 1936, chap. 49.
Dans le cas où les marchandises, en tout ou en partie, ne sont
pas chargées, pour quelque cause que ce soit, sur le ou les
navires auxquels elles étaient destinées, ou sont transportées
au-delà de leur destination ou débarquées dans un port intermé-
diaire, il sera loisible au transporteur de les charger ou de les
retourner conformément aux conditions du présent connaisse-
ment sur le premier navire disponible lui appartenant ou, à son
choix, sur celui de toute autre société de navigation.
Il est entendu que la garde et le transport des marchandises
sont assujettis à toutes les conditions du présent connaissement
stipulées au recto et au verso du présent titre, lesquelles condi
tions régissent les relations, quelles qu'elles soient entre, d'une
part, l'expéditeur et le destinataire et, d'autre part, les transpor-
teurs, le capitaine et le navire, dans toute éventualité, en
quelque lieu et à quelque moment qu'elle se produise, et aussi
en cas de déroutement ou d'innavigabilité du navire au moment
du chargement ou du début du voyage et par la suite. Aucune
des conditions du présent connaissement ne sera réputée avoir
fait l'objet d'une renonciation de la part des transporteurs, sauf
par écrit signé par un mandataire dûment autorisé des
transporteurs.
Toute modification, addition ou rature dans le présent connais-
sement, au recto ou au verso, doit être signée ou initialée dans
la marge par le mandataire du transporteur qui le délivrera, à
défaut de quoi, elle sera sans effet et le présent connaissement
sera exécutoire selon ses termes originaux.
EN FOI DE QUOI, le mandataire a signé le présent connaisse-
ment au nom de la Compagnie des chemins de fer nationaux du
Canada et de ses sociétés de navigation et de voie ferrée qui s'y
rattachent, conjointement mais non solidairement.
Et, tout de suite après:
D.M. Mercer
Surveillant du terminal
Mandataire des
transporteurs,
conjointement mais non
solidairement.
Carling O'Keefe, expéditeur
Par: F. Walsh
Cette section du connaissement est suivie de deux
parties, la première intitulée [TRADUCTION] «CON-
DITIONS DU CONNAISSEMENT — Partie A —
Transport par eau» et la seconde intitulée [TRA-
DUCTION] «Partie B — Transport ferroviaire».
Seule la Partie A est pertinente en l'espèce et je
n'en reproduirai ici que les dispositions ayant été
invoquées au cours du débat:
[TRADUCTION] 1. (a) Le présent connaissement produira tous
ses effets sous réserve des dispositions de la Loi du transport
des marchandises par eau, 1936, édictée par le Parlement du
Canada, ou en cas d'application des lois des États-Unis, sous
réserve des dispositions du Carriage of Goods by Sea Act des
États-Unis, lesquelles dispositions sont réputées être incorpo-
rées au présent titre. Le transporteur et le navire jouissent de
tous les privilèges, droits et exonérations conférés par lesdites
lois.
(b) Rien dans le présent titre ne doit être interprété comme
une renonciation, par le transporteur, à l'un quelconque de ses
droits ou exonérations, ou comme un accroissement de ses
responsabilités ou obligations en vertu des lois, règles ou ordon-
nances applicables, ou comme privant le transporteur du droit
de se prévaloir devant les tribunaux de tout pays d'une limita
tion quelconque de la responsabilité que la loi accorde au
transporteur ou au navire, ou du droit de limiter toute protec
tion ou exonération quelconque. En cas d'incompatibilité entre
l'une des dispositions du présent connaissement et l'une quel-
conque des lois applicables ou rendues applicables par le pré-
sent titre, cette disposition est nulle dans la mesure de l'incom-
patibilité mais pas davantage.
(c) Les droits et exonérations énoncés à l'article IV des
Règles annexées à la Loi du transport des marchandises par
eau, 1936, sont en vigueur avant le chargement et après le
déchargement des marchandises, de même que pendant tout le
temps où elles sont sous la garde du transporteur. Toutefois, en
cas de perte ou d'avarie, c'est à la personne invoquant cette
perte ou cette avarie qu'il incombe de prouver la faute ou le fait
du transporteur ou encore la faute ou la négligence de ses
mandataires ou préposés. Le transporteur n'est pas responsable,
en quelque qualité que ce soit, pour tout retard, non-livraison
ou mauvaise livraison, perte ou avarie des marchandises, quelle
qu'en soit la cause, survenu pendant que les marchandises ne
sont pas sous sa garde véritable.
2. Dans le présent connaissement, le terme «navire» comprend
tout bâtiment substitué, embarcation, chaland ou autres
moyens de transport possédés, affrétés ou exploités par le
transporteur; le terme «transporteur» comprend le navire, son
propriétaire, exploitant, affréteur coque nue, affréteur à temps,
capitaine, ainsi que tout transporteur y substitué, que le pro-
priétaire, l'exploitant, l'affréteur ou le capitaine agisse à titre
de transporteur ou de dépositaire; le terme «expéditeur» com-
prend la personne désignée à ce titre dans le présent connaisse-
ment et la personne pour le compte de laquelle les marchandi-
ses sont expédiées; le terme «destinataire» comprend le porteur
du connaissement, régulièrement endossé, ainsi que le récep-
tionnaire et le propriétaire des marchandises; le terme «frais»
comprend le fret et toutes les dépenses et obligations pécuniai-
res engagées et payables par le propriétaire des marchandises,
l'expéditeur, le destinataire ou l'un d'eux.
18. Si le navire n'appartient pas au transporteur maritime par
lequel les marchandises doivent être transportées en vertu des
présentes (comme ce peut être le cas malgré toute disposition
contraire) ou ne lui est pas affrété coque nue, le présent
connaissement constitue un contrat ne liant que le propriétaire
ou l'affréteur coque nue, selon le cas, à titre de mandant, ce
contrat étant conclu par l'intermédiaire de la Compagnie des
chemins de fer nationaux du Canada ou dudit transporteur
maritime qui, dans l'un ou l'autre cas, n'agit qu'à titre de
mandataire et dont la responsabilité personnelle ne peut en
aucun cas être engagée.
L'affréteur à temps était lui-même propriétaire
d'une flotte de navires et il en affrétait d'autres.
Étant donné que le Newfoundland Coast était
affrété à temps et que le connaissement contenait
la clause 18, l'affréteur à temps conteste vivement
la conclusion du juge de première instance portant
qu'il était un «transporteur» de la cargaison. Si
l'arrimage n'a pas été effectué adéquatement, pré-
tend-il, c'était en raison de la négligence des pro-
priétaires du navire en tant que seul «transpor-
teur», et cela n'engageait en aucune façon la
responsabilité de l'affréteur à temps. Ce dernier
invoque également certaines dispositions de la
«Charte-partie à temps» qu'il a conclue le 23 mai
1980 avec les propriétaires du navire à l'égard du
Newfoundland Coast. La clause 1 de ce document
stipule que l'obligation de charger et de décharger
le navire incombe à [TRADUCTION] «l'équipage du
navire». Les clauses 8 et 9 méritent d'être repro-
duites en entier:
[TRADUCTION] 8. Les affréteurs peuvent, à leurs frais, retenir
les services d'un commissaire à bord du navire. Le propriétaire
lui fournira la nourriture et le logement. Le commissaire reçoit,
signe et prend en charge tous les documents d'expédition,
perçoit le fret et voit à ce que les cargaisons soient enlevées ou
déchargées aux différents ports d'escale. À cette fin, le commis-
saire est réputé agir comme mandataire du capitaine, sans
préjudice toutefois à l'autorité de ce dernier quant à l'adminis-
tration, à la garde et au contrôle du navire. En l'absence d'un
commissaire, le capitaine en remplit les fonctions.
Tous les frais afférents à la manutention de la cargaison entre
les ports d'escale devront être payés à l'avance, suivant la
pratique de l'affréteur. Les connaissements devront être signés
par le capitaine ou le commissaire du navire. Les sommes
perçues pour le fret ainsi que les copies de tous les connaisse-
ments seront remises par le capitaine ou le commissaire aux
mandataires des affréteurs se trouvant dans les ports de
destination.
9. Le capitaine et/ou les propriétaires sont responsables de la
manutention soigneuse des cargaisons et en cas de perte, d'ava-
rie ou de livraison incomplète desdites cargaisons, le navire sera
tenu responsable s'il est prouvé que la perte ou l'avarie a été
causée par la négligence du capitaine et/ou des propriétaires.
J'évoquerai maintenant brièvement les circons-
tances ayant entouré le chargement et le transport
de la cargaison de St. John's au Labrador. L'expé-
diteur est allé chercher les conteneurs sur les lieux
de l'entreprise de l'affréteur à temps pour les
apporter à son entrepôt où il les a remplis avec les
marchandises en cause. Dans le bureau du surveil-
lant de l'entrepôt se trouvait une tablette de for-
mules de connaissement en blanc. La preuve a
démontré que c'est ce surveillant qui avait rempli
l'une des formules en y indiquant «St. John's»
comme lieu de réception des marchandises, la date
de leur réception, le nom de l'expéditeur, celui du
destinataire (Norlab Ltd.), la destination et la
nature des marchandises. Sous la colonne intitulée
[TRADUCTION] «Nombre de colis» et les deux
colonnes situées immédiatement à droite et intitu-
lées respectivement [TRADUCTION] «Description
des articles et marques spéciales» et [TRADUC-
TION] «Poids (sujet à correction)», le surveillant a
inscrit le nombre de caisses, les marques de bière
et leur poids. Dans la partie inférieure de l'espace
réservé aux «précisions» sur les marchandises
(enjambant les deux premières colonnes), il a indi-
qué le numéro d'identification des trois conteneurs
qui ont été perdus. Les conteneurs ont été livrés à
l'affréteur à temps le 29 octobre 1980, date à
laquelle une secrétaire agissant au nom du surveil-
lant du terminal a signé la formule de connaisse-
ment dans l'espace prévu au recto et en a fait ainsi
la délivrance.
Le nom du navire transporteur n'a en aucun
moment été inscrit dans l'espace prévu à cette fin
au recto du connaissement. Plusieurs jours se sont
écoulés avant que l'affréteur à temps ne choisisse
un navire, que les marchandises ne soient chargées
à bord et que le navire ne lève l'ancre.
Le juge de première instance a manifestement
attaché un certain poids à la connaissance que
pouvait avoir l'expéditeur de l'identité du navire
qui serait chargé d'amener les marchandises à
destination. Il ressort des feuilles de route de l'af-
fréteur à temps, préparées le 29 octobre 1980 mais
reçues par l'expéditeur après le départ du navire,
qu'il avait apparemment d'abord été décidé de
charger les marchandises à bord du Sir R Bond,
l'un des navires de l'affréteur à temps. Quoi qu'il
en soit, on a allégué qu'étant donné les négocia-
tions antérieures entre les parties et les usages en
cours à St. John's, l'expéditeur savait ou aurait dû
savoir que c'est le Newfoundland Coast qui serait
utilisé. Aux pages 110 et 111 C.F., le juge de
première instance tire des conclusions très précises
quant à la connaissance de l'expéditeur à cet
égard:
On n'a pas indiqué à Walsh sur quel navire les marchandises
seraient chargées et celui-ci ne l'a pas demandé. Le capitaine
William Embleton, qui est chef des opérations du service de
cabotage de CN, a déclaré que CN n'avait pas pour habitude
de donner aux chargeurs le nom du navire sur lequel la
cargaison est chargée à moins qu'on ne lui présente une
demande spécifique à cet effet. Il a aussi affirmé que CN n'a
pas informé la demanderesse, tout comme elle n'informe pas en
général les autres chargeurs, que ses marchandises seraient
transportées par un navire affrété plutôt que par un navire dont
elle était propriétaire.
À mon avis, il ne serait pas opportun pour cette
Cour d'intervenir dans des conclusions qu'étayent,
de l'aveu même de l'affréteur à temps, certains
éléments de preuve. Il n'y a pas lieu non plus de
réévaluer cette preuve en l'absence de tout motif
valable de le faire. Bref, on n'a démontré aucune
«erreur manifeste et dominante» qui aurait faussé
l'appréciation des faits au point de nous autoriser à
écarter ces conclusions. (Voir Stein et autres c. Le
navire «Kathy K» et autres, [1976] 2 R.C.S. 802).
Peu de temps après le départ du navire de St.
John's le 15 novembre 1980, le capitaine a décidé
de chercher refuge dans un petit port de la côte
après avoir reçu par radio un avis de coup de vent
lancé par la Garde côtière canadienne. En fait, cet
avis était destiné à la côte ouest de Terre-Neuve,
alors que le navire longeait encore la côte nord-est.
Quoi qu'il en soit, les conteneurs ont été perdus en
mer ce même jour près du cap Bonavista lorsque,
selon le capitaine, [TRADUCTION] «de grosses
lames de fond et des contre-courants» ont fait que
la «mer déchaînée a frappé par-dessous les conte-
neurs ... et a provoqué la rupture des saisines»,
faisant ainsi «passer par-dessus bord trois conte-
neurs qui sont partis à la dérive». Le juge de
première instance a considéré que ces conditions
n'exonéraient pas le «transporteur» de toute res-
ponsabilité, estimant qu'elles étaient «exactement
celles auxquelles il fallait s'attendre». Il a conclu
que la perte avait été causée par l'arrimage inadé-
quat de la cargaison. Il s'exprime ainsi aux pages
114 et 115 de ses motifs:
Le capitaine a attribué la perte à la mer houleuse frappant le
dessous des conteneurs et les soulevant, et au fait qu'il était
possible selon lui que le câble d'acier ait été coupé par une arête
tranchante de l'un des conteneurs.
Compte tenu de la vitesse des vents et de celle des vagues
produites par ceux-ci ainsi que du roulis du navire et étant
donné que les conteneurs dépassaient de chaque côté de
celui-ci, je n'ai aucune hésitation à conclure que la perte est due
au fait que les conteneurs avaient été arrimés de manière à ce
que leurs extrémités dépassent les côtés du navire. Arrimés
ainsi, ils constituaient une trappe sur laquelle les vagues, même
si elles étaient de hauteur moyenne, heurtaient violemment les
côtés du navire et exerçaient une force ascendante énorme sur
le fond des conteneurs. Le fait qu'à tout moment la force des
vagues pouvait augmenter considérablement par suite de leur
déferlement et du roulis descendant du navire renforce ma
conclusion que la perte était directement attribuable à l'arri-
mage inadéquat des conteneurs.
Le juge de première instance a aussi conclu que les
saisines d'acier fournies par l'affréteur à temps,
conformément à l'obligation que lui imposait la
charte-partie à temps, ne pouvaient suffire à atta-
cher les conteneurs ainsi arrimés en travers sur le
pont supérieur. Voici ce qu'il affirme, à la page
111, sur cette question du chargement et de l'arri-
mage de la cargaison:
Bien que le capitaine ait le dernier mot quant à l'emplace-
ment de la cargaison sur son navire et quant à la quantité de
marchandises qui sera chargée, en pratique le capitaine Sirois
travaillait en collaboration avec le personnel de CN pour
déterminer la disposition et la quantité de marchandises char
gées à bord de son navire. CN indiquait, par exemple, quels
conteneurs elle souhaitait voir arrimés sous le pont. Elle déter-
minait la quantité de marchandises qui seraient chargées à bord
du navire et Sirois surveillait le chargement effectué par des
acconiers engagés par CN. Sirois et CN ont décidé que les
conteneurs de 20 pieds devraient être arrimés par le travers, ou
transversalement, plutôt que longitudinalement ou de l'avant à
l'arrière. En fait, étant donné que CN était déterminé, vers la
fin de la saison de la navigation, à utiliser chaque pouce de
l'espace disponible sur le navire défendeur, le capitaine n'avait
d'autre choix que d'arrimer les conteneurs de cette manière.
J'examinerai maintenant les questions soulevées
dans le présent appel, la première étant de savoir si
le juge de première instance a commis une erreur
en concluant que l'affréteur à temps agissait à titre
de «transporteur» de la cargaison au moment de la
perte.
La défense fondée sur la clause d'affrètement
coque nue
L'affréteur prétend qu'il n'agissait pas comme
«transporteur» et c'est en termes simples qu'il
explique sa position: il n'était pas partie au contrat
de transport constaté par le connaissement et,
partant, ne pouvait être considéré comme le «trans-
porteur» de la cargaison; le contrat de transport a
été conclu entre les propriétaires du navire et
l'expéditeur; en signant le connaissement, l'affré-
teur à temps a agi uniquement comme mandataire
des propriétaires du navire et non pour son propre
compte; la clause dite d'affrètement coque nue
(clause 18) figurant au connaissement démontre
clairement que seuls les propriétaires du navire
devaient être liés comme «transporteur»; enfin c'est
contre les propriétaires du navire et uniquement
contre eux que l'expéditeur doit exercer ses recours
pour la perte qu'il a subie.
En concluant, à partir de la preuve, que l'affré-
teur à temps était un «transporteur» de la cargai-
son, le juge de première instance s'est appuyé sur
l'arrêt qu'a rendu cette Cour dans Cormorant
Bulk -Carriers Inc. c. Canficorp (Overseas Pro
jects) Ltd. (1984), 54 N.R. 66 (C.A.F.). Je recon-
nais, comme l'ont soutenu les avocats des deux
parties, que les faits de cette affaire sont tels qu'il
y a lieu d'opérer une distinction avec l'espèce.
L'avocat de l'expéditeur n'en prétend pas moins
que cet arrêt énonce un principe applicable dans la
présente affaire, savoir qu'une clause tendant à
désigner les propriétaires du navire, au lieu de
l'affréteur à temps, comme «transporteur» n'immu-
nise pas ce dernier de toute responsabilité à titre
de «transporteur» si les faits démontrent qu'il avait
en réalité assumé ce rôle aux termes du contrat de
transport conclu avec l'expéditeur.
Des clauses de ce genre ont été reconnues vali-
des en Angleterre 2 et en Australie 3 , mais semblent
avoir été considérées avec méfiance aux États-
Unis 4 . Il n'y a pas lieu, en l'espèce, d'examiner
cette question à fond sauf peut-être pour souligner
que, de façon générale, la jurisprudence cana-
dienne a jusqu'à maintenant eu tendance à favori-
ser la validité de ces clauses: Paterson SS Ltd. c.
Aluminum Co. of Can., [1951] R.C.S. 852; [1952]
1 D.L.R. 241; Aris Steamship Co. Inc. c. Associa
ted Metals & Minerals Corporation, [1980] 2
2 Voir not. The Berkshire, [1974] 1 Lloyd's Rep. 185
(Q.B.D.); The Vikfrost, [1980] 1 Lloyd's Rep. 560 (C.A.);
Kenya Railways v. Antares Co. Pte. Ltd. (The Antares) (No.
1), [1986] 2 Lloyd's Rep. 626 (Q.B. Corn. Ct.); Ngo Chew
Hong Edible Oil Pte. Ltd. v. Scindia Steam Navigation Co.
Ltd. (The Jalamohan), [1988] 1 Lloyd's Rep. 443 (Q.B. Corn.
Ct.).
3 Voir not. Kaleej International Pty Ltd v Gulf Shipping
Lines Ltd (1986), 6 NSWLR 569 (C.A.). Comparer Ander-
son's (Pacific) Trading Co Pty Ltd v Karlander New Guinea
Line Ltd, [1980] 2 NSWLR 870 (Corn. Law Div.).
° Voir not. Epstein v. U.S., 86 F. Supp. 740 (D.C.N.Y.,
1949); Blanchard Lumber Co. v. S. S. Anthony II, 259 F.
Supp. 857 (D.C.N.Y., 1966). Comparer The Iristo, 43 F.
Supp. 29 (D.C.N.Y., 1941); conf., 137 F. 2d 619 (2d Cir.
1943); cert. refusé, 320 U.S. 802 (1943).
R.C.S. 322; (1980), 101 D.L.R. (3d) 1; 31 N.R.
584 5 . Dans l'affaire Paterson par exemple, les
conditions de la charte-partie stipulaient que le
capitaine du navire était placé sous les ordres des
affréteurs pour toute question d'emploi et de
mandat, et que ces derniers étaient tenus de char
ger et d'arrimer la cargaison à leurs frais, sous la
surveillance du capitaine qui devait signer sur
présentation les connaissements relatifs aux char-
gements effectués conformément aux reçus de
bord ou aux reçus du pointeur. Le navire devait
demeurer en la possession de ses propriétaires qui
étaient tenus de payer la pension et les salaires du
capitaine et des membres d'équipage, en plus de
conserver la classe du navire. S'exprimant en son
nom et en celui de deux de ses collègues, le juge
Rand déclare, à la page 854:
[TRADUCTION] Aux termes d'une charte-partie de cette
nature et en l'absence d'un engagement de la part de l'affré-
teur, le propriétaire demeure le transporteur à l'égard de
l'expéditeur et, quand il délivre des connaissements, le capitaine
agit en tant que mandataire du propriétaire. En l'espèce, le
connaissement a été signé pour le capitaine par les mandataires
nommés par les affréteurs très certainement en leur nom et
probablement aussi au nom du navire. Ce fait soulève le
premier des deux seuls points qui méritent d'être étudiés.
Parlant aussi en son nom et en celui de deux autres
collègues, le juge Locke ajoute, aux pages 860 et
861:
[TRADUCTION] Bien que l'affréteur ait ainsi eu le pouvoir de
décider de l'utilisation du navire et de nommer des mandataires
du navire aux ports d'escale, le navire demeurait en la posses
sion de l'appelante par l'intermédiaire du capitaine. La règle
applicable a été formulée par le juge Channell dans Wehner v.
Dene Steam Shipping Company ([1905] 2 K.B. 92, à la p. 98),
savoir qu'en temps normal, lorsque la charte-partie ne prévoit
pas le transfert de la gestion nautique et commerciale du navire
et que ce dernier demeure en la possession du propriétaire, le
contrat est alors conclu avec le propriétaire et non avec
l'affréteur.
Voir également Apex (Trinidad) Oilfields, Ltd. v. Lunham
& Moore Shipping, Ltd., [1962] 2 Lloyd's Rep. 203 (C. de l'É.
Can.); Delano Corp. of America v. Saguenay Terminals Ltd.,
[1965] 2 R.C.É. 313; Kennedy & Co., Ltd. v. Canada Jamaica
Line, Canada West Indies Shipping Company, Ltd., and
Aldag, [1967] 1 Lloyd's Rep. 336 (C.S. Qué.); Atlantic Tra
ders Ltd. v. Saguenay Shipping Ltd. (1979), 38 N.S.R. (2d) 1;
69 A.P.R. 1 (C.S. 1" inst.); Weyerhaeuser Co. et autres c.
Anglo Canadian Shipping Co. et autres (1984), 16 F.T.R. 294
(1" inst.). Comparer Canadian Klockner Ltd. c. DIS A/S Flint,
[1973] C.F. 988 (1" inst.); Farr Inc. c. Tourloti Compania
Naviera S.A. (T-5847-80, juge Pinard, jugement en date du
3-7-85, C.F. 1" inst., non publié; conf., A-645-85, juge
Marceau, J.C.A., jugement en date du 30-5-89, encore inédit
(C.A.F.).
Il était manifeste que le contrat de transport
conclu dans cette affaire l'avait été avec les pro-
priétaires du . navire, lesquels convenaient ainsi
d'être liés en tant que «transporteur» de la cargai-
son. L'affréteur à temps n'était pas partie à
l'instance.
Même s'il ressort de ces décisions de la Cour
suprême du Canada que dans les cas où un contrat
de transport stipule une clause de ce genre, ce
contrat sera alors normalement conclu entre l'ex-
péditeur et les propriétaires du navire, il serait
inapproprié comme on l'a déjà souligné [TRADUC-
TION] «d'énoncer une règle ferme et rigide» d'ap-
plication générale puisque [TRADUCTION] «les cir-
constances et le libellé des documents peuvent
varier selon les espèces» 6 . Ce tempérament semble
avoir été clairement accepté par la Cour suprême
elle-même dans l'affaire Paterson, où le juge Rand
tire sa conclusion [TRADUCTION] «en l'absence
d'un engagement de la part de l'affréteur» et où le
juge Locke s'en tient à la règle applicable [TRA-
DUCTION] «en temps normal». Ainsi dans l'arrêt
Cormorant, cette Cour a considéré qu'elle n'était
pas en présence d'une affaire normale étant donné
que l'ensemble de la preuve démontrait que, par
leurs paroles et leurs actions, les affréteurs
s'étaient en réalité engagés à agir comme «trans-
porteur» de la cargaison et s'étaient par là même
liés en tant que mandants aux termes du contrat
de transport conclu avec l'expéditeur.
Or, s'agit-il en l'espèce d'une affaire normale ou,
en d'autres termes, la preuve démontre-t-elle que
l'affréteur à temps s'est engagé à agir comme
«transporteur»? Pour répondre à cette question, il
convient une fois de plus d'examiner la preuve
documentaire et circonstantielle. Sur cette der-
nière, nous disposons d'importantes conclusions de
fait arrêtées par le juge de première instance.
Ainsi, bien que l'obligation de signer les connaisse-
ments ait été dévolue au capitaine ou au commis-
saire (le représentant de l'affréteur à temps à bord
du navire) sous l'empire de la charte-partie, le
connaissement a en fait été signé par le surveillant
du terminal de l'affréteur à temps ou en son nom.
Voici ce qu'en conclut le juge de première instance
à la page 117 de ses motifs:
6 Le juge Walton dans Samuel, Samuel & Co. v. West
Hartlepool Steam Navigation Company (1906), 11 Com. Cas
115 (S.C.).
4. Le connaissement était un connaissement de CN, signé et
rempli exactement comme si la cargaison devait être chargée
sur un navire appartenant à CN. Il n'est indiquée nulle part
sur le connaissement que l'employé a signé celui-ci au nom
du capitaine ou des propriétaires du navire; il est seulement
dit qu'il l'a signé au nom de CN. Le texte suivant est
imprimé sous l'espace réservé à la signature:
Mandataire des transporteurs, conjointement mais non
solidairement.
Et le texte qui suit est imprimé juste au-dessus du même
espace:
EN FOI DE QUOI, le mandataire a signé le présent connais-
sement au nom de la Compagnie des chemins de fer natio-
naux du Canada et de ses sociétés de navigation et de voie
ferrée qui s'y rattachent, conjointement mais non solidaire-
ment.
Il me semble que si un chargeur interprétait correctement cette
partie du connaissement, il serait amené à conclure que CN se
présentait comme le transporteur et que le contrat de transport
devait lier le chargeur et CN. En outre, la clause 2 de la partie
A des conditions du connaissement relatives au transport par
eau prévoit expressément que le terme «transporteur» qui figure
dans le connaissement désigne également l'affréteur à temps 7 .
Le juge de première instance poursuit, à la page
118, en constatant le rôle qu'a joué l'affréteur à
temps dans le chargement et l'arrimage de la
cargaison à bord du navire:
6. CN a en partie agi comme un transporteur lors du charge-
ment et de l'arrimage de la cargaison. Il a fourni les saisines
des conteneurs. Il a déterminé la quantité de marchandises
qui seraient chargées à bord du navire. Le capitaine s'est
contenté d'acquiescer. C'est CN qui a décidé d'utiliser
chaque pouce d'espace disponible sur le navire, y compris sur
le pont. C'est encore CN qui a déterminé le nombre de
conteneurs chargés à bord du navire. Par suite de cette
décision, les conteneurs ont dû inévitablement être arrimés en
travers, leurs extrémités dépassant de chaque côté du navire.
C'est également CN qui a décidé que les conteneurs ainsi
arrimés seraient attachés avec des câbles d'acier plutôt qu'a-
vec les «accessoires adéquats».
Ces conclusions de fait ont établi, à la satisfaction
du juge de première instance, qu'à l'exception de
la clause 18, [à la page 118] «tout [indiquait] qu'il
existait un contrat de transport entre la demande-
resse et le CNb.
En ce qui a trait aux documents, l'avocat de
l'affréteur à temps soutient qu'il y a un vice fatal
dans l'analyse qu'a faite le juge de première ins
tance du texte du connaissement. Il affirme en
Comparer les arrêts anglais The Birkshire et The Vikfrost,
précités, note 2, portant que lorsque, en vertu de la charte-par-
tie, le capitaine est requis de signer un connaissement donné sur
ordre de l'affréteur, la signature de ce dernier a le même effet
que celle du capitaine, s'agissant simplement d'un [TRADUC-
TION] «acte ministériel».
effet que le juge a mal évalué la véritable portée
des mots [TRADUCTION] «Mandataire des trans-
porteurs, conjointement mais non solidairement»
imprimés sous la ligne réservée à la signature, au
recto du connaissement, particulièrement lorsqu'on
les rapproche du libellé de la clause 18, savoir que
le connaissement [TRADUCTION] «constitue un
contrat ne liant que le propriétaire ou l'affréteur
coque nue, selon le cas, à titre de mandant, ce
contrat étant conclu par l'intermédiaire de la
Compagnie des chemins de fer nationaux du
Canada ou dudit transporteur maritime qui, dans
l'un ou l'autre cas, n'agit qu'à titre de manda-
taire», l'accent étant mis sur ces quatre derniers
mots. Selon l'avocat de l'affréteur à temps, il
ressort de ce libellé que son client n'a agi qu'à titre
de mandataire des propriétaires du navire et non à
titre de mandant.
Je conviens, certes, qu'il nous incombe essentiel-
lement en l'espèce d'interpréter le texte du con-
naissement. Nous ne saurions toutefois nous
acquitter correctement de cette tâche en mettant
en lumière une partie seulement de la clause 18 à
l'exclusion du reste. À mon sens en effet, les mots
introductifs de cette clause revêtent une impor
tance prépondérante puisque l'ensemble de la
clause ne devait s'appliquer que dans des circons-
tances très précises, soit dans le cas où [TRADUC-
TION] «le navire n'appartient pas au transporteur
maritime par lequel les marchandises doivent être
transportées en vertu des présentes ... ou ne lui est
pas affrété coque nue». Il ne fait aucun doute que,
dans cette clause comme ailleurs dans les disposi
tions pertinentes du connaissement, les mots «le
navire» renvoient au «bâtiment» dont le nom devait
figurer dans l'espace en blanc prévu au recto: le
but visé était de faire en sorte qu'en signant le
document rempli, l'affréteur n'agisse «qu'à titre de
mandataire» du «propriétaire» du «navire» ainsi
désigné. Le défaut d'identifier le navire transpor-
teur est d'une importance particulièrement cru-
ciale, étant donné la conclusion du juge de pre-
mière instance portant que l'expéditeur n'était pas
par ailleurs informé du fait que les marchandises
seraient transportées à bord du navire affrété à
temps plutôt que sur un navire appartenant à
l'affréteur à temps. Si «le navire» avait été désigné
dans le connaissement, il aurait peut-être été possi
ble de soutenir que l'affréteur à temps n'agissait
alors «qu'à titre de mandataire» de ses propriétai-
res'. Mais tel n'est pas le cas en l'espèce. Dans le
vide ainsi créé, les mots «mandataire», «mandat» et
«qu'à titre de mandataire» ne peuvent avoir aucun
effet juridique puisque, au moment où le connais-
sement a été délivré, le seul mandant visé était
l'affréteur à temps lui-même 9 . Par conséquent,
force m'est de reconnaître qu'en délivrant le con-
naissement, l'affréteur à temps a signé le contrat
de transport en sa qualité personnelle et, qu'à titre
d'affréteur à temps, il est devenu dès lors un
«transporteur» au sens de la clause 2 de la Partie A
du document ainsi que de l'article 1 des Règles de
La Haye 10 . De plus, le rôle qu'il a joué relative-
ment au chargement et à l'arrimage de la cargai-
son à bord du navire était compatible avec l'exécu-
tion de l'obligation qui lui incombait à titre de
«transporteur» aux termes d'un contrat de trans
port soumis aux Règles de La Haye.
La règle 8 de l'article III; les propriétaires comme
«transporteur»
Après être arrivé à la conclusion que l'affréteur
à temps avait accepté d'agir à titre de «transpor-
teur», le juge de première instance a statué que la
clause 18 était nulle, non avenue et sans effet entre
lui et l'expéditeur étant donné que, contrairement
à la règle 8 de l'article III des Règles de La
Haye", cette clause visait à l'exonérer des droits et
e Voir Q.N.S. Paper Co. c. Chartwell Shipping Ltd.,
[1989] 2 R.C.S. 683.
9 La définition de «navire» figurant à la clause 2 de la Partie
A, qui comprend un «bâtiment substitué» ne pouvait manifeste-
ment pas englober le navire initialement choisi mais, plutôt, un
navire qui lui a été substitué.
1° Le terme «transporteur» y est défini comme comprenant «le
propriétaire ou l'affréteur, partie à un contrat de transport avec
un chargeur».
1' La règle 8 de l'article III s'énonce ainsi:
Article III .. .
8. Toute clause, convention ou accord dans un contrat de
transport exonérant le transporteur ou le navire de responsa-
bilité pour perte ou dommage concernant des marchandises
provenant de négligence, faute ou manquement aux devoirs
ou obligations édictées dans cet article ou atténuant cette
responsabilité autrement que ne le prescrivent les présentes
Règles, sera nulle, non avenue et sans effet.
Une, clause cédant le bénéfice de l'assurance au transporteur
ou toute clause semblable sera considérée comme exonérant
le transporteur de sa responsabilité.
obligations qui lui incombaient, aux termes de la
règle 2 du même article 12 , de procéder «de façon
appropriée et soigneuse ... à l'arrimage ... des
marchandises transportées». Je souscris entière-
ment à cette conclusion.
L'affréteur à temps a par ailleurs repris à son
compte la conclusion du juge de première instance
portant que le navire et ses propriétaires «sont
aussi des transporteurs, 'au sens des Règles»: dans
ces conditions, a-t-il fait valoir, il ne pouvait être
également un «transporteur». Cette qualité lui
aurait été attribuée de façon manifestement erro-
née puisque, selon l'économie des Règles de La
Haye, il ne peut y avoir qu'un seul transporteur
agissant à ce titre à un moment et en vertu d'un
contrat de transport donnés. Comme j'ai déjà
déterminé que c'est en sa qualité personnelle que
l'affréteur à temps s'est engagé par contrat à
transporter les marchandises, et non en tant que
mandataire des propriétaires, je ne puis voir com
ment ces derniers pourraient, en vertu de ce même
contrat, être considérés comme un «transporteur»
étant donné qu'aux termes de l'alinéa la) des
Règles de La Haye, il ressort clairement que le
propriétaire ou l'affréteur d'un navire ne peut être
un «transporteur» que s'il est «partie à un contrat
de transport avec un chargeur» 13 . S'il en est ainsi,
leur responsabilité en tant que transporteur devrait
alors reposer sur un autre fondement. Il n'est pas
nécessaire, voire souhaitable, de poursuivre sur ce
point pour les fins du présent appel. Les propriétai-
res du navire ne sont pas représentés en l'espèce,
de sorte que la question de leur responsabilité ne se
pose pas en tant que telle. Au surplus, ils sont en
pratique à l'abri de tout jugement et quant au
navire, il a été perdu en mer.
12 Voici le texte de la règle 2 de l'article III:
Article III ...
2. Le transporteur, sous réserve des dispositions de l'article
IV, procédera de façon appropriée et soigneuse au charge-
ment, à la manutention, à l'arrimage, au transport, à la
garde, aux soins et au déchargement des marchandises
transportées.
13 0n a toutefois fait valoir que l'affréteur et le propriétaire
du navire peuvent devenir tous deux transporteurs si, dans les
faits, ils participent à une coentreprise relativement au trans
port de la cargaison. Voir notamment Tetley, Marine Cargo
Claims, 3` éd. (1988), à la p. 535.
Les moyens de défense fondés sur la règle 2 de
l'article IV
L'affréteur à temps a cherché, dans ses plaidoi-
ries, à invoquer les dispositions des Règles de La
Haye, alléguant que les règles 2a),c) et q) de
l'article IV dégageaient sa responsabilité pour
toute perte qui pourrait lui être imputée en sa
qualité de «transporteur». Ces dispositions sont
ainsi conçues:
Article IV ...
2. Ni le transporteur ni le navire ne seront responsables pour
perte ou dommage résultant ou provenant:
a) des actes, négligence ou défaut du capitaine, marin, pilote
ou des préposés du transporteur dans la navigation ou dans
l'administration du navire;
c) des périls, dangers ou accidents de la mer ou d'autres
eaux navigables;
q) de toute autre cause ne provenant pas du fait ou de la
faute du transporteur ou du fait ou de la faute des agents ou
préposés du transporteur, mais le fardeau de la preuve
incombera à la personne réclamant le bénéfice de cette
exception et il lui appartiendra de montrer que ni la faute
personnelle ni le fait du transporteur ni la faute ou le fait des
agents ou préposés du transporteur n'ont contribué à la perte
ou au dommage.
À mon avis, le juge de première instance a correc-
tement disposé du moyen de défense fondé sur la
règle 2c) lorsqu'il a estimé que, d'après la preuve,
les conditions dans lesquelles s'est déroulée la tra
versée étaient «exactement celles auxquelles il fal-
lait s'attendre». Quant au moyen fondé sur la règle
2q), rien au dossier ne permet de l'étayer.
Je suis également convaincu que le moyen fondé
sur la règle 2a) doit échouer. On a mis ici l'accent
sur les mots «actes, négligence ou défaut ... dans
l'administration du navire» en prétendant que la
négligence dans l'arrimage de la cargaison consti-
tuait une erreur de cette nature. La jurisprudence
établit la distinction qu'il convient de faire entre
une erreur de «navigation» et une erreur
d'«administration» ". L'affréteur à temps n'a pas
réussi à me convaincre du bien-fondé de ce moyen.
Il appert de la décision rendue dans l'affaire The
Ferro, [1893] P. 38 (Div. Ct.), sous l'empire de la
14 La distinction est explicitée dans la décision Falconbridge
Nickel Mines Ltd. et al. v. Chimo Shipping Ltd. et al., [1969]
2 R.C.É. 261 où, aux pages 285 et s., le juge Kerr renvoie à des
décisions sur ce point rendues tant au Canada qu'en Angleterre.
Harter Act, loi américaine de 1893 où était utilisée
une formulation à peu près semblable, que cette
défense ne saurait être invoquée dans un cas de
défaut d'arrimage. Cette décision a été citée par le
président sir Francis Jeune ainsi que par le juge
Gorrell Barnes dans l'arrêt The Glenochil, [1896]
P. 10 (Div. Ct.). A la page 18, le juge Gorrell
Barnes résume ainsi la décision rendue dans l'af-
faire The Ferro:
[TRADUCTION] On prétendait en l'espèce que le propriétaire
du navire devait être exonéré, en raison des mots «dans la
navigation ou dans l'administration du navire«, de la responsa-
bilité pour la faute du manutentionnaire dans l'arrimage; cette
Cour a jugé que la négligence du manutentionnaire à cet égard
n'était pas visée par ces mots ...
Voir également Gosse Millard v. Canadian
Government Merchant Marine, [1928] 1 K.B. 717
(C.A.), lord juge Greer, à la page 744; confirmé à
[1929] A.C. 223 (H.L.). Quoi qu'il en soit, même
si l'on arrivait à démontrer que la méthode d'arri-
mage utilisée constituait une erreur dans l'admi-
nistration du navire, je ne crois pas que cela servi-
rait la cause de l'affréteur à temps car il y avait à
tout le moins en l'espèce, pour reprendre les mots
de sir Francis Jeune dans l'arrêt The Glenochil, à
la page 16, [TRADUCTION] «manque de vigilance à
l'égard de la cargaison» et non [TRADUCTION]
«manque de vigilance à l'égard du navire mettant
indirectement en danger la cargaison».
La limitation par colis
L'affréteur à temps soutient qu'il n'est pas tenu
de la perte des marchandises au-delà de la somme
de 1 500 $, au motif que ce sont les conteneurs et
non les caisses de bière qui doivent être considérés
comme les «colis» visés par la règle 5 de l'article IV
des Règles de La Haye. Cette règle dispose:
Article IV ...
5. Le transporteur comme le navire ne seront tenus en aucun
cas des pertes ou dommages causés aux marchandises ou les
concernant, pour une somme dépassant cinq cents dollars par
colis ou unité, ou l'équivalent de cette somme en une autre
monnaie, à moins que la nature et la valeur de ces marchandi-
ses n'aient été déclarées par le chargeur avant leur embarque-
ment et que cette déclaration ait été insérée au connaissement.
Le juge de première instance a également rejeté
cet argument car il a estimé que le calcul devait
être fondé sur le nombre de caisses de bière arri-
mées dans les trois conteneurs — chaque caisse
constituant un «colis» — plutôt que sur le nombre
de conteneurs en cause. Il s'est appuyé sur une
décision de la Section de première instance, Inter
national Factory Sales Service Ltd. c. Le
«Alexandr Serafimovich», [1976] 1 C.F. 35, où
l'on a jugé, à la page 49, que la question devait
être tranchée en recherchant l'intention des parties
«telle qu'elle ressort des documents de transport,
des déclarations des parties et des négociations».
Je ne puis déceler aucune erreur dans la conclu
sion du juge de première instance à ce sujet, telle
qu'il l'exprime aux pages 120 et 121 de ses motifs
de jugement:
En l'espèce, le connaissement et les feuilles de route de
chaque conteneur constituent les documents de transport. Un
total de quatre mille deux cent quarante (4 240) colis est
indiqué expressément dans la colonne du connaissement réser-
vée au nombre de colis.
Les feuilles de route de chaque conteneur mentionnent le
numéro du conteneur qui est suivi sur chaque feuille de route de
cette autre mention:
[TRADUCTION] Contenant 1 413 c. de bière
ou
Cont. 1 413 c. de bière.
Suivant la règle 3b) de l'article III des Règles, si le transpor-
teur délivre un connaissement, il doit y indiquer soit le nombre
de colis ou de pièces ou la quantité ou le poids, suivant le cas,
tels qu'ils sont fournis par l'expéditeur.
En l'espèce, le connaissement et la lettre de voiture indi-
quaient le nombre de caisses de bière ou de colis acceptés par
CN. Outre cet élément de preuve, on a expliqué à la Cour
comment les parties traitaient entre elles. La demanderesse
avait déjà confié plusieurs chargements de ce genre à CN. Il est
bien connu que la bière est expédiée par caisse. Il ne fait aucun
doute pour moi que CN savait très bien, même si les conteneurs
étaient scellés lorsqu'ils lui ont été livrés, qu'elle avait reçu
environ 4 000 caisses de bière à transporter à Goose Bay.
L'intérêt antérieur au jugement
J'en viens maintenant à l'appel incident. On y
allègue que le juge de première instance a commis
une erreur en limitant le paiement de l'intérêt
antérieur au jugement à une période de deux ans à
compter de la date où l'action a été intentée, au
lieu de l'accorder pour toute la période écoulée
depuis la date de la perte. Il s'agit là d'une ques
tion de détail certes, mais qui a son importance.
Lors du procès, l'avocat de l'affréteur à temps a
soutenu qu'il ne devait être accordé aucun intérêt
avant jugement vu le temps qui s'était écoulé avant
que l'affaire ne soit mise en état. Pour sa part,
l'avocate de l'expéditeur a répliqué que tout ce
temps avait été indispensable. En tranchant ce
point, le juge de première instance s'est exprimé
ainsi, à la page 121 de ses motifs:
J'admets, comme l'a prétendu CN, qu'un délai s'est écoulé
avant que l'action soit intentée, mais je n'ai pas l'intention de
déterminer dans quelle mesure l'une ou l'autre partie est res-
ponsable de ce retard. Si l'avocate de la demanderesse était
résolue à obtenir un procès rapidement, j'estime qu'elle devait
intenter l'action dans un délai de deux ans.
Comme l'attribution d'intérêts antérieurs au
jugement relève de l'exercice d'un pouvoir discré-
tionnaire, il n'y a pas lieu normalement d'interve-
nir à cet égard en appel. Cependant, l'expéditeur
soutient qu'une telle intervention s'impose en l'es-
pèce puisqu' [TRADUCTION] «en admettant simple-
ment qu'il y a eu retard dans la mise en état de
l'affaire tout en refusant de s'enquérir des raisons
ou de l'origine de ces retards», le juge de première
instance n'a pas exercé judicieusement son pouvoir
discrétionnaire. L'avocate de l'expéditeur affirme
que la responsabilité de son client n'a jamais été
alléguée relativement à quelque retard que ce soit.
De plus, soutient-elle, un retard ne peut en soi
dispenser le défendeur du paiement de l'intérêt sur
les dommages-intérêts dont a été privé le deman-
deur ayant gain de cause.
À l'appui de ce dernier argument, l'avocate de
l'expéditeur invoque un aspect de l'évaluation des
dommages-intérêts en matière maritime qui lui
paraît propre au droit de l'amirauté depuis de
nombreuses années. En effet, en vertu de sa com-
pétence en matière d'amirauté, la Cour a le pou-
voir d'accorder des intérêts antérieurs au jugement
à titre de partie intégrante des dommages subis,
que les droits en cause découlent d'un contrat ou
d'un délit. Après avoir pris racine dans le droit
civil, cette règle s'est développée en Angleterre, où
elle est appliquée depuis des temps fort anciens
(voir notamment In re the «Dundee» (1827), 2
Hagg. 137 (Adm.); In re the «Gazelle» (1844), 2
W. Rob. 279 (Adm.); In re the «Hebe» (1847), 2
W. Rob. 530 (Adm.)), puis a été adoptée au
Canada. Elle a été explicitée dans l'affaire Cana-
dian Brine Ltd. v. The Ship Scott Misener and
Her Owners, [1962] R.C.É. 441 où le juge Wells,
après avoir fait référence à des décisions
anglaises 15 , affirme à la page 452:
15 Dans trois de ces décisions, le fondement de la règle est
ainsi expliqué:
Le président, Sir Henry Duke, dans l'affaire The Joannis
Vatis (No. 2), [1922] P. 213 (P.D.A.), à la p. 223:
[TRADUCTION] En l'espèce, deux points doivent être exa-
minés. Dans la présente juridiction, il existe une règle bien
établie et qui mérite d'être prise en considération en
matière d'intérêts alloués sur les dommages. Le registraire
(Suite à la page suivante)
[TRADUCTION] D'après cette jurisprudence, il semble claire-
ment établi qu'une cour d'amirauté peut discrétionnairement
accorder des intérêts, que les droits en cause découlent d'un
contrat ou qu'ils découlent d'un délit. Il est intéressant de noter
que c'est sur le jugement de sir Robert Phillimore dans l'affaire
The Northumbria que le lord juge d'appel Martin s'est appuyé
pour rendre jugement en première instance dans l'affaire Wins-
low Marine Railway and Ship Building Company v. The Ship
Pacifico ([1924] R.C.E. 90), dont j'ai cité précédemment le
jugement d'appel. Le jugement de première instance a, naturel-
lement, été approuvé expressément en appel par le juge
MacLean. Certes, il est vrai qu'en l'espèce aucune demande
spéciale d'intérêts n'a été faite dans la déclaration mais, si j'ai
bien saisi la nature de la compétence en equity dévolue à la
cour d'amirauté, il est très clair que ces intérêts ne sont pas
adjugés indépendamment des dommages mais comme partie
intégrante de ceux-ci.
Ce principe a depuis lors reçu la sanction de la
Cour suprême du Canada: Canadian General
Electric Company Limited c. Pickford & Black
(Suite de la page précédente)
et les commerçants incluent dans leur évaluation de l'ava-
rie résultant d'un abordage un intérêt sur les sommes
demandées à compter du moment de la survenance de
l'avarie et jusqu'à la date de l'évaluation. Cet usage a été
examiné et confirmé dans The Kong Magnus ([1891] p.
223), et est conforme à ce qu'avait déclaré lord Stowell
longtemps auparavant dans l'affaire The Dundee ((1827) 2
Hagg. Adm. 137, la p. 143). La somme ainsi fixée est
allouée non pas à titre d'intérêt sur une dette mais à titre
de partie des dommages.
Sir Robert Phillimore, dans l'affaire The Northumbria
(1869), L.R.A. & E. 6, à la p. 10:
[TRADUCTION] Toutefois, en regard de cette jurispru
dence, il suffit à mon avis de souligner que la cour
d'amirauté, statuant en equity, applique un principe diffé-
rent de celui sur lequel semble se fonder la jurisprudence
de common law. Ce principe est celui du droit civil, savoir
que l'intérêt est toujours dû au créancier lorsque le paie-
ment n'a pas été fait ex mora du débiteur, et ce, que
l'obligation soit d'origine contractuelle ou délictuelle.
Le président lord Merriman, dans l'affaire The Berwickshire,
[1950] P. 204, la p. 208:
[TRADUCTION] Comme je l'ai indiqué précédemment, il ne
fait aucun doute que le pouvoir discrétionnaire du juge
d'inclure dans les dommages résultant d'un abordage un
intérêt sur la totalité ou partie de la somme recouvrée, à un
taux et pour une période relevant également de sa discré-
tion, était solidement ancré dans la juridiction d'amirauté
à une époque où, en common law, le droit d'adjuger des
intérêts à titre de dommages était soumis au Statute 3 &
4, Wm. IV, chap. 42, art. 28 et 29, ou dépendait des
termes exprès du contrat ou des termes importés dans les
contrats commerciaux par les usages du commerce, notam-
ment dans les lettres de change ou les billets à ordre; voir
les notes sur le calcul de l'intérêt dans les actions pour
rupture de contrat, dans Bullen and Leake's Precedents of
Pleadings (3rd ed.), p. 51 et 52.
Limited, [1972] R.C.S. 52; Drew Brown Limited
c. Le navire «Orient Trader» et autres, [1974]
R.C.S. 1286. Il a été de nouveau expliqué et
appliqué par le juge Addy dans la décision Bell
Telephone Co. c. Le «Mar-Tirenno», [1974] 1
C.F. 294 (ire inst.), laquelle a été suivie par cette
Cour dans l'arrêt Davie Shipbuilding Limited c.
La Reine, [1984] 1 C.F. 461 (C.A.).
Dans l'affaire Canadian Brine, le pouvoir discré-
tionnaire avait été exercé en rapport avec la nature
de la négligence du défendeur. Il appert toutefois
aujourd'hui que ce pouvoir peut également viser la
conduite qu'un demandeur adopte en cours d'ins-
tance. Dans l'affaire Bell Telephone, le juge Addy
s'est dit d'avis que la discrétion pouvait s'exercer
largement. Il a énoncé, à la page 312, la règle
générale suivante:
... je suis convaincu qu'il convient d'accorder des intérêts à la
demanderesse à moins que l'on trouve dans sa conduite ou par
ailleurs quelque raison de réduire ou de rejeter sa demande
d'intérêts ... -
Aucune décision n'a été citée à l'appui de l'argu-
ment selon lequel la conduite de l'avocat du
demandeur serait également visée, mais j'estime
que la jurisprudence envisage cette possibilité. Par
ailleurs, étant donné que l'intérêt antérieur au
jugement est considéré comme un élément ou une
partie intégrante des dommages subis, il importe
d'exercer soigneusement le pouvoir discrétionnaire,
de peur qu'un demandeur ayant gain de cause ne
soit privé du droit à l'indemnisation intégrale de
son préjudice.
En l'espèce, le juge de première instance s'est
expressément abstenu de faire porter à «l'une ou
l'autre partie» la responsabilité du retard. Sa déci-
sion de limiter le recouvrement de l'intérêt anté-
rieur au jugement n'a donc pas été motivée par la
conduite de l'expéditeur ou de son avocate. Il
semble plutôt s'être fondé sur l'idée qu'une période
de deux ans suffisait pour mettre l'affaire en état
[à la page 121] «si l'avocate de la demanderesse
était résolue à obtenir un procès rapidement», lais-
sant ainsi entendre que celle-ci n'avait pas fait
preuve de diligence. Certes, il ne fait pour moi
aucun doute que le juge était en droit de considé-
rer le temps écoulé par rapport à une quelconque
norme raisonnable. Il m'apparaît en revanche
incorrect de retenir ce seul élément sans d'abord
examiner les explications susceptibles d'être four-
nies. Au demeurant, certaines actions exigent de
par leur nature même une préparation beaucoup
plus longue que d'autres avant d'être en état pour
l'instruction.
Les plaidoiries qu'ont présentées les avocats sur
ce point figurent dans les notes sténographiques,
mais je ne suis pas convaincu que le juge de
première instance ait pu y puiser l'assistance
nécessaire 16 . L'affréteur à temps s'est opposé à
toute adjudication d'intérêts antérieurs au juge-
ment, plaidant à la rigueur dans le sens d'une
somme réduite. L'expéditeur a quant à lui réclamé
le plein montant et a fait valoir (à la page 244)
qu'aucun «retard inutile» n'avait été créé. Dans les
circonstances, j'estime qu'il incombait au juge
d'exiger une explication en considérant les facteurs
susceptibles de justifier le retard. Il se peut, par
exemple, que le nombre de parties à l'action et le
fait qu'elles habitaient dans différentes régions du
pays aient pu entraîner des délais dans l'échange
des actes de procédure, la communication des
documents et les interrogatoires préalables. Qu'on
pense également aux lieux de résidence des avo-
cats, à leur volonté et à leur capacité de collaborer
pour faire avancer le litige vers l'instruction, ainsi
qu'à tout autre facteur pertinent. S'il avait procédé
à cet examen, le juge de première instance aurait,
à mon avis, été plus en mesure d'exercer son
pouvoir discrétionnaire dans un sens ou dans l'au-
tre. Or rien, dans l'état actuel du dossier, ne
permet à mon sens d'écarter la règle normale en
matière d'allocation d'intérêt antérieur au juge-
ment en cas de perte totale. En conséquence, j'ac-
corderais à l'expéditeur l'intérêt à compter de la
date où la perte est survenue. Accorder moins
n'équivaudrait pas, comme ce doit normalement
être le cas, à la restitutio in integrum en vertu du
principe applicable.
L'argument fondé sur la justice naturelle
Avant de disposer de la présente instance, je me
dois d'examiner un dernier argument à l'encontre
du jugement présenté pour le compte du capitaine.
On a fait valoir qu'en raison des circonstances
16 L'avocat de l'affréteur à temps a attiré l'attention sur sa
plaidoirie en première instance (voir la transcription, vol. 6,
p. 202 204), mais je ne vois rien dans ses arguments ni dans
la réplique de l'avocate de l'expéditeur (p. 244 et 245) qui
puisse démontrer par une preuve positive que tout retard
dans la mise en état de l'action était attribuable à l'expédi-
teur ou à son avocate.
ci-après décrites, le capitaine avait été privé du
droit à la justice naturelle en ce qu'il n'avait pas
eu, lors du procès, la possibilité de présenter une
défense. D'après le dossier, le capitaine a comparu
pour son propre compte à l'ouverture de l'instruc-
tion, mais il s'est vite rendu compte qu'il ne serait
pas financièrement en mesure de payer l'indemnité
susceptible d'être accordée par jugement. L'avo-
cate de l'expéditeur a alors indiqué qu'elle ne
ferait aucune tentative pour recouvrer la somme
pouvant être adjugée contre le capitaine et en
faveur de son client. L'avocat de l'affréteur à
temps s'est ensuite exprimé au sujet de la demande
reconventionnelle de son client contre le capitaine
pour souligner que, dans les circonstances, cette
demande ne serait pas poursuivie et qu'à son avis il
n'y avait donc pas lieu que le capitaine participe
au procès à cette fin. C'est à la suite de ces
interventions que le capitaine s'est retiré de la salle
d'audience, de sorte que l'instruction s'est poursui-
vie en son absence. Dans ses motifs de jugement en
date du 17 novembre 1986, le juge de première
instance a accordé un délai pour permettre aux
parties de faire valoir par écrit leurs observations
sur la question de la responsabilité du capitaine.
La dernière de ces observations a été déposée par
l'avocat du capitaine, au printemps de 1987. Dans
ses motifs supplémentaires de jugement, le juge de
première instance a conclu à la responsabilité du
capitaine et a autorisé l'expéditeur à inscrire juge-
ment contre lui également.
Cette objection m'apparaît dénuée de tout fon-
dement. Il semble en effet très clair que le capi-
taine a quitté la salle d'audience de son propre gré;
il aurait pu y demeurer et participer aux débats s'il
l'avait voulu. Rien de ce qui s'est passé en sa
présence ne pouvait donner à croire qu'il n'y aurait
pas enquête sur sa responsabilité éventuelle et
encore moins que jugement ne serait pas rendu
contre lui. Je dois donc rejeter cette objection.
Dispositif
En conséquence, je suis d'avis de rejeter l'appel
avec dépens en faveur de l'expéditeur intimé
(demanderesse) et d'accueillir l'appel incident,
également avec dépens en faveur de cette partie. Je
modifierais le jugement rendu le 31 août 1987 en
rayant du paragraphe 1 du dispositif de ce juge-
ment les mots «couru depuis deux ans,» et «soit
jugement au total pour la somme de TRENTE SEPT
MILLE NEUF CENT QUATRE-VINGT SEPT DOLLARS
ET SOIXANTE ET ONZE CENTS (37 987,71 $)»,
pour leur substituer les mots
à compter du 15 novembre 1980.
Le paragraphe 1 modifié sera donc ainsi libellé:
1. les défendeurs CN Marine Inc., The Labrador Shipping Co.
Ltd., le navire NEWFOUNDLAND COAST et Roger Sirois, à
payer aux demanderesses Carling O'Keefe Breweries of
Canada Limited et Norlab Ltd., la somme de TRENTE ET UN
MILLE TROIS CENT QUATRE-VINGT-QUATORZE DOLLARS ET
QUATRE-VINGTS CENTS (31 394,80 $) au principal, avec un
intérêt avant jugement de dix pour cent (10 %) à compter du 15
novembre 1980.
À tous autres égards, je suis d'avis de confirmer ce
jugement.
LE JUGE EN CHEF IACOBUCCI: J'y souscris.
LE JUGE HEALD, J.C.A.: J'y souscris.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.