A-955-88
Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (appe-
lant)
c.
Resham Kaur Taggar (intimée)
RÉPERTORIÉ: CANADA (MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE L'IM-
MIGRATION) c. TAGGAR (CA.)
Cour d'appel, juges Pratte, Stone et Desjardins,
J.C.A.—Vancouver, 11 mai 1989; Ottawa, 5 juin
1989.
Immigration — Appel de la décision par laquelle la Com
mission d'appel de l'immigration a accordé un visa d'immi-
grant, infirmant ainsi le refus par un agent des visas d'en
accorder un — Art. 8(2) de la Loi sur l'immigration — Il
appartient au requérant de prouver son admissibilité — Vali-
dité du mariage fait avec la répondante — Absence de preuve
quant à la coutume permettant le mariage — La Commission
n'a pas compétence.
Il s'agit d'un appel interjeté par le ministre de la décision par
laquelle la Commission d'appel de l'immigration a accueilli un
appel formé contre le refus d'accorder un visa.
L'intimée avait parrainé la demande de droit d'établissement
de Ranjit Singh Taggar qui, prétendait-elle, était son mari.
Lorsque celui-ci a demandé un visa d'immigrant, l'agent des
visas a conclu que, malgré qu'une cérémonie de mariage avait
eu lieu, la validité du mariage était contestée. Le prétendu mari
était le frère de l'ancien mari de l'intimée et, en vertu de la
Hindu Marriage Act, 1955, un tel mariage était nul sauf si la
coutume ou l'usage régissant les deux parties permettait un tel
mariage. L'agent des visas a refusé, à deux reprises, d'accorder
un visa étant donné l'absence de preuve quant à l'existence
d'une telle coutume. Malgré les éléments de preuve ultérieurs
soumis tout d'abord dans une requête en réexamen de son rejet,
puis dans une nouvelle demande, l'élément de preuve produit
dans ce dernier cas étant un jugement déclaratoire prononcé
par une cour indienne, l'agent a conclu que la preuve n'établis-
sait pas l'existence d'une coutume permettant un tel mariage.
L'intimée s'est fondée sur le paragraphe 79(2) de la Loi sur
l'immigration de 1976 pour interjeter appel devant la Commis
sion d'appel de l'immigration, et celle-ci s'est appuyée sur
l'arrêt Uppal c. Canada (Min. de l'Emploi et de l'Immigration)
pour statuer que l'agent des visas avait eu tort d'exiger la
preuve de l'existence d'une coutume permettant le mariage. La
Commission a conclu qu'en l'absence d'une preuve réfutant
l'existence d'une telle coutume, le mariage, ayant eu lieu, était
valide. Elle a également conclu que, de toute manière, on avait
prouvé l'existence d'une coutume permettant un mariage de ce
genre.
Il y a lieu pour la Cour d'appel de trancher les deux
questions suivantes: 1) La Commission d'appel de l'immigra-
tion avait-elle compétence pour connaître de l'appel?; (2) La
preuve établissait-elle la validité du mariage?
Arrêt: l'appel devrait être accueilli.
La Commission a été saisie d'un appel en vertu du paragra-
phe 79(2) de la Loi sur l'immigration de 1976, qui accorde au
répondant un droit d'appel dans une demande de droit d'éta-
blissement. Lorsqu'on lit le paragraphe 79(2) en corrélation
avec le paragraphe 79(1), il ressort clairement que les seuls
appels permis dans le cas d'une demande de droit d'établisse-
ment sont ceux interjetés par une personne appartenant à la
catégorie de la famille du répondant. En conséquence, la Com
mission aurait dû tout d'abord aborder la question de sa
compétence en se prononçant sur la validité du mariage, dont la
preuve aux fins de compétence serait la même que pour d'au-
tres fins. L'arrêt Uppal, sur lequel reposait la décision de la
Commission, a une application limitée puisque, dans cette
affaire-là, l'avocat du ministre avait admis qu'il lui incombait
de prouver la nullité du mariage. Il ressort du droit applicable
que l'existence de coutumes doit être prouvée de manière
irréfutable et que le fardeau de la preuve incombe à ceux qui
l'invoquent. C'est à tort que la Commission a conclu que le
jugement déclaratoire de la cour indienne constituait la preuve
de l'existence d'une coutume permettant un tel mariage. Le
mariage est nul, et l'appel ne portait donc pas sur le rejet d'une
demande de droit d'établissement faite par une personne appar-
tenant à la catégorie de la famille du répondant. Cela étant, la
Commission a agi ultra vires.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Hindu Marriage Act, 1955, 1955, Loi n° 25 (Inde), art.
3a),g),(iii), 5(iv), 11.
Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52,
art. 2(1), 8(1), 9(1),(2),(3),(4), 79(1)a),b),(2)a),b)
(mod. par S.C. 1986, chap. 13, art. 6).
Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172,
art. 4(1) (mod. par DORS/84-140, art. 1).
JURISPRUDENCE
DISTINCTION FAITE AVEC:
Uppal c. Canada (Min. de l'Emploi et de l'Immigration)
(1986), 1 Imm. L.R. (2d) 226 (C.A.F.).
DOCTRINE
Halsbury's Laws of England, vol. 12, 4c éd. Londres:
Butterworths, 1975, «Custom», para. 426.
AVOCATS:
Paul F. Partridge pour l'appelant.
William J. Macintosh pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelant.
Macintosh, Mair, Riecken & Sherman, Van-
couver, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE PRATTE, J.C.A.: Le présent appel vise
une décision de la Commission d'appel de l'immi-
gration en date du 21 avril 1988, qui avait accueilli
un appel formé par l'intimée, à la suite du refus
d'un agent des visas d'accorder un visa d'immi-
grant au dénommé Ranjit Singh Taggar, citoyen
de l'Inde, que l'intimée avait parrainé en tant que
conjoint.
Afin de bien comprendre le problème en l'es-
pèce, il importe de tenir compte de certaines dispo
sitions de la Loi sur l'immigration de 1976 [S.C.
1976-77, chap. 52] et du Règlement stir l'immi-
gration de 1978 [DORS/78-172]. Je les cite telles
qu'elles étaient formulées au moment pertinent:
La Loi sur l'immigration de 1976:
2. (1) Dans la présente loi:
«personnes appartenant à la catégorie de la famille» désigne les
personnes à qui les règlements reconnaissent le droit de faire
parrainer la demande de droit d'établissement par un citoyen
canadien ou un résident permanent, appelé le répondant;
8. (1) Il appartient à la personne désireuse d'entrer au
Canada de prouver qu'elle a le droit d'y entrer ou que son
admission ne contreviendrait ni à la présente loi ni aux
règlements.
9. (1) Sous réserve des dispositions réglementaires, tout
immigrant et tout visiteur doivent demander et obtenir un visa
avant de se présenter à un point d'entrée.
(2) Toute personne qui fait une demande de visa doit être
examinée par un agent des visas qui détermine si elle semble
être une personne qui peut obtenir le droit d'établissement ou
l'autorisation de séjour.
(3) Toute personne doit répondre sincèrement aux questions
de l'agent des visas et produire toutes les pièces qu'il réclame
pour établir que son admission ne contreviendrait ni à la
présente loi ni aux règlements.
(4) L'agent des visas, qui constate que l'établissement ou le
séjour au Canada d'une personne visée au paragraphe (1) ne
contreviendrait ni à la présente loi ni aux règlements, peut lui
délivrer un visa attestant qu'à son avis, le titulaire est un
immigrant ou un visiteur qui satisfait aux exigences de la
présente loi et des règlements.
79. (1) Un agent d'immigration ou agent des visas peut
rejeter une demande parrainée de droit d'établissement présen-
tée par une personne appartenant à la catégorie de la famille,
au motif que
a) le répondant ne satisfait pas aux exigences des règlements
relatifs aux répondants, ou
b) la personne appartenant à la catégorie de la famille ne
satisfait pas aux exigences de la présente loi ou des
règlements.
Le répondant doit alors être informé des motifs du rejet.
(2) Au cas de rejet, en vertu du paragraphe (1), d'une
demande de droit d'établissement, le citoyen canadien ou le
résident permanent qui l'a parrainée, peut interjeter appel
auprès de la Commission en invoquant l'un ou les deux motifs
suivants:
a) un moyen d'appel comportant une question de droit ou de
fait ou une question mixte de droit et de fait;
b) le fait que des considérations humanitaires ou de compas
sion justifient l'octroi d'une mesure spéciale.
Le Règlement sur l'immigration de 1978 [mod.
par DORS/84-140, art. 1]:
4. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), tout citoyen
canadien ou résident permanent• âgé d'au moins 18 ans et
résidant au Canada, peut parrainer une demande de droit
d'établissement présentée par
a) son conjoint;
L'intimée avait parrainé la demande de droit
d'établissement de M. Ranjit Singh Taggar, qui,
prétendait-elle, était son mari. Au moment de sa
demande de visa d'immigrant, celui-ci devait donc
soumettre à l'agent des visas une attestation de
mariage acceptable. Il a pu prouver facilement
qu'une cérémonie de mariage avait eu lieu entre
les deux conjoints le 6 avril 1983, en Inde où il
était alors domicilié. La validité de ce mariage a
cependant été contestée pour le motif que l'intimée
avait épousé M. Ranjit Singh Taggar quelques
mois après avoir divorcé avec un frère de ce der-
nier. En vertu de la Hindu Marriage Act, 1955
[1955, Loi n° 25, (Inde) art. 3a)(iii), 5(iv), 111,
un mariage est nul si l'un des conjoints [TRADUC-
TION] «était l'épouse du frère ... de l'autre» sauf si
[TRADUCTION] «la coutume ou l'usage régissant
* Note de l'arrêtiste: À l'exception de l'alinéa 3a) qui est
reproduit au renvoi 1, page 580, les alinéas 3g)(iii) et 5(iv) et
l'article 11 sont ainsi rédigés:
[TRADUCTION] 3. ...
g) «degrés de parenté prohibés»—deux personnes sont
visées par les «degrés de parenté prohibés»—
(Suite à la page suivante)
chacune [des deux parties] leur permet de se
marier»'. Il semble donc que le mariage entre le
requérant et l'intimée était nul à moins qu'il ne fût
validé par une coutume. Étant donné qu'il ne
possédait aucune preuve de l'existence d'une telle
coutume, l'agent des visas a décidé, le 31 octobre
1983, de rejeter la demande de visa. Le requérant
a demandé une révision de cette décision et, à
l'appui de sa demande, il a soumis une lettre d'un
avocat de l'Inde qui se fondait sur certains extraits
d'un livre intitulé Digest of Customary Law pour
affirmer que le mariage entre son client et l'inti-
mée était valide et [TRADUCTION] «conforme au
droit coutumier». Cette lettre a incité l'agent des
visas à consulter un avocat qu'il a décrit comme
une personne ayant une longue expérience de la
pratique du droit de la famille de l'Inde. Selon cet
avocat, le droit indien exige que quiconque invoque
une coutume doit se munir de preuves claires et
non équivoques puisqu'une telle coutume constitue
une dérogation au droit commun. Il a affirmé que
le matériel que lui avait soumis le prétendu con
joint de l'intimée ne lui fournissait aucune preuve
de l'existence d'une coutume autorisant M. Taggar
à épouser l'ex-épouse de son frère; il en a conclu
que le mariage était «nul ab initio en application
(iii) si l'une était l'épouse du frère ou l'épouse du frère
du père ou de la mère ou du grand-père ou de la grand-
mère de l'autre; ou
5. Un marriage peut être célébré entre deux Hindous si les
conditions suivantes sont remplies, à savoir:
(iv) les parties ne sont visées par les degrés de parenté
prohibés que si la coutume ou l'usage régissant chacune
d'entre elles leur permet de se marier;
11. Tout mariage célébré après l'entrée en vigueur de cette
loi est nul et, sur requête introduite par l'une ou l'autre partie
au mariage, un jugement peut déclarer sa nullité s'il contre-
vient à l'une quelconque des conditions précisées aux sous-
alinéas (i), (iv) et (y) de l'article 5.
' L'alinéa 3(a) de la Hindu Marriage Act, 1955 définit les
mots «coutume» et «usage» de la manière suivante:
[TRADUCTION] 3. ...
(a) les expressions «coutume» et «usage» désignent toute
règle qui, ayant été observée de manière continue et uniforme
pendant longtemps, a acquis force de loi parmi les Hindous
d'une région, d'une tribu, d'une collectivité, d'un groupe ou
d'une famille:
Pourvu que la règle soit sûre, raisonnable et conforme à
l'intérêt public;
Pourvu qu'elle ne soit pas tombée en désuétude dans le cas
où elle ne s'applique qu'au sein d'une famille;
de l'article 11 de la Hindu Marriage Act, 1955».
Se fondant sur l'opinion de cet avocat, l'agent des
visas a écrit à M. Ranjit Singh Taggar le 25
janvier 1984 pour réitérer son refus quant à l'oc-
troi d'un visa.
En décembre 1984, M. Ranjit Singh Taggar a
soumis une nouvelle demande de visa. Sa demande
de droit d'établissement a une fois de plus été
parrainée par l'intimée. Cette fois-ci, il a soumis à
l'agent des visas un nouvel élément de preuve, soit,
un exemplaire d'un jugement prononcé par une
cour indienne à la suite d'une action en déclaration
qu'il avait intentée contre l'intimée. L'action a été
introduite le 7 mars 1984, peu de temps après le
refus définitif de la première demande de visa. Le
jugement, en date du 8 août 1984, constatait que
[TRADUCTION] «la défenderesse est l'épouse légi-
time du demandeur en vertu des coutumes». Selon
l'agent des visas, ce jugement n'établissait pas la
validité du mariage et il a refusé, à nouveau,
d'octroyer un visa.
L'intimée a interjeté appel de cette décision
auprès de la Commission d'appel de l'immigration
en vertu du paragraphe 79(2) de la Loi sur l'im-
migration de 1976 [mod. par S.C. 1986, chap. 13,
art. 6]. La Commission a accueilli l'appel, un seul
membre étant dissident. Elle a d'abord statué, à la
majorité, que l'agent des visas avait eu tort d'exi-
ger la preuve de l'existence d'une coutume permet-
tant le mariage. À son avis, puisque le mariage des
parties était reconnu, il incombait à ceux qui con-
testaient sa validité d'en prouver la nullité péremp-
toirement. Elle a, par conséquent, décidé qu'en
l'absence d'une preuve réfutant l'existence d'une
coutume permettant le mariage, celui-ci devait
être considéré comme valide. Elle a également
conclu que de toute manière, on avait prouvé
l'existence d'une coutume permettant le mariage.
Avant de passer à l'examen de ces conclusions, il
serait utile de souligner que la question soumise à
la Commission était différente de celle soumise à
l'agent des visas. La Commission a été saisie d'un
appel en vertu du paragraphe 79(2) qui accorde à
la personne qui a parrainé une demande de droit
d'établissement le droit d'interjeter un tel appel en
cas de rejet de la demande. Cependant, lorsqu'on
lit ce paragraphe en corrélation avec le paragraphe
79(1), il ressort clairement que les seuls appels
permis par le paragraphe sont ceux qui portent sur
le refus d'une demande de droit d'établissement
soumise par une personne appartenant à la catégo-
rie de la famille du répondant. En l'espèce, la
Commission avait donc à se prononcer sur la vali-
dité du mariage de la répondante avec M. Ranjit
Singh Taggar afin de déterminer si elle avait
compétence pour entendre l'appel.
En premier lieu, la Commission a conclu à la
majorité que l'agent des visas ne pouvait pas déci-
der que le mariage de l'intimée était nul en l'ab-
sence d'une preuve concluante niant l'existence
d'une coutume qui autorise ce mariage. Elle a
fondé sa conclusion sur la décision prononcée par
cette Cour dans l'arrêt Uppal c. Canada (Min. de
l'Emploi et de l'Immigration) 2 . Dans cet arrêt où
les circonstances étaient semblables à celles de
l'espèce, la Cour a décidé qu'un mariage entre
cousins germains qui, en droit indien, est nul sauf
s'il existe une coutume permettant ce mariage, ne
pouvait être considéré nul en l'absence d'une
preuve concluante niant l'existence d'une coutume
autorisant un tel mariage. À mon avis, cette déci-
sion (à laquelle j'ai participé) n'a qu'un poids
limité car, à tort ou à raison, elle reposait en partie
sur le fait que l'avocat du ministre a admis qu'il lui
incombait de prouver la nullité du mariage. Or, la
situation en l'espèce est différente.
Si l'on examine la question telle qu'elle a été
soumise à l'agent des visas, il faut se rappeler qu'il
devait décider si, en vertu de la Loi et du Règle-
ment, M. Ranjit Singh Taggar pouvait obtenir le
statut de résident permanent. Il est évident que
pour être admissible, M. Taggar devait être le
mari de l'intimée et qu'il lui incombait de prouver
son admissibilité en application du paragraphe
8(1). Il devait, par conséquent, prouver qu'il était
vraiment le mari de l'intimée. L'agent des visas,
lui, devait déterminer si M. Taggar avait prouvé ce
fait. Or, à son avis, les preuves qui lui ont été
soumises montraient seulement que le mariage de
M. Ranjit Singh Taggar avec l'intimée était nul
selon les dispositions générales du droit indien sauf
s'il était validé par une coutume dont le requérant
n'a pu prouver l'existence. Vu ces circonstances,
l'agent des visas était-il en mesure de décider que
le requérant avait prouvé son admissibilité? Je ne
le crois pas. À mon avis, la seule conclusion logi-
que qui pouvait être tirée des preuves présentées
est qu'il était fort probable que le mariage en
2 (1986), I Imm. L.R. (2d) 226 (C.A.F.).
question était nul. Par conséquent, j'estime que la
majorité des membres de la Commission a eu tort
de décider autrement et que sur ce point, le
membre dissident avait raison.
Cependant, la première question que la Com
mission avait à trancher, ne portait pas sur l'ad-
missibilité de l'époux de l'intimée, mais plutôt sur
sa compétence pour entendre l'appel. Pour répon-
dre à cette question, la Commission ne pouvait
évidemment pas se fonder sur le paragraphe 8(1)
de la Loi. Cela signifie-t-il que la Commission
aurait dû exiger la preuve de la validité du
mariage pour décider de sa compétence, mais non
pour d'autres fins? Pas du tout. Selon le droit
indien', l'existence de coutumes doit être prouvée
de manière irréfutable et le fardeau de la preuve
incombe à ceux qui l'invoque. Par conséquent, une
coutume dont l'existence n'est pas prouvée est
réputée inexistante. Il s'ensuit que la seule conclu
sion qui peut être tirée de la preuve présentée à la
Commission, si l'on estime que cette preuve n'éta-
blit pas l'existence d'une coutume, est que le
mariage de l'intimée est nul et que, par consé-
quent, son appel ne porte pas sur le refus d'une
demande de droit d'établissement faite par une
personne appartenant à la catégorie de la famille.
Cela règle la première conclusion de la
Commission.
La Commission a également conclu à la majo-
rité que la preuve établissait l'existence d'une cou-
tume permettant le mariage de l'intimée avec le
frère de son ex-mari. À ma connaissance, elle a
fondé cette décision sur le jugement déclaratoire
que M. Ranjit Singh Taggar a obtenu d'une cour
indienne peu de temps avant la présentation de sa
dernière demande de visa. Il s'agissait là, l'intimée
le reconnaît, d'un jugement «in personam» qui ne
liait que les deux parties à l'action. Si ce jugement
avait porté sur l'existence d'une coutume permet-
tant le mariage en question, il aurait pu servir à
établir l'existence d'une telle coutume. Mais après
examen du jugement, il ressort que la question de
l'existence d'une coutume n'a pas été soulevée et
qu'aucune preuve n'a été fournie à ce sujet. Par
conséquent, le jugement ne prouvait pas l'existence
3 Halsbury's Laws of England, vol. 12, 4° éd., vbo «custom»,
para. 426.
d'une coutume. La deuxième conclusion de la
Commission est donc également erronée.
Je suis d'avis que la Commission, en rendant sa
décision, a agi ultra vires et pour cette raison,
j'annulerais sa décision.
LE JUGE STONE, J.C.A.: Je souscris à ces
motifs.
LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.: Je souscris à ces
motifs.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.