A-670-86
Procureur général du Canada (requérant)
c.
Bibi Alli (intimée)
RÉPERTORIÉ: CANADA (PROCUREUR GÉNÉRAL) c. ALLI
Cour d'appel, juges Pratte, Urie et Stone—
Toronto, 22 avril; Ottawa, 9 mai 1988.
Contrôle judiciaire — Demandes d'examen — Un comité ad
hoc établi en vertu de la Loi de 1973 sur les allocations
familiales a accueilli un appel interjeté à l'encontre du rejet de
la demande de prestations d'allocations familiales de l'intimée
— L'intimée ne possédait aucun statut sous le régime de la Loi
sur l'immigration de 1976 puisque sa revendication du statut
de réfugié n'avait pas été jugée — Le comité a conclu que l'art.
3(1) de la Loi sur les allocations familiales est inconstitution-
nel parce qu'il établit une discrimination à l'égard des rési-
dents ne possédant pas de statut pour les fins de l'immigration
— La décision est annulée — Ce comité n'était pas habilité à
statuer sur la question de la constitutionnalité.
Droit constitutionnel — Charte des droits — Recours — Un
comité de révision établi sous le régime de la Loi de 1973 sur
les allocations familiales n'est pas un «tribunal compétent» au
sens de l'art. 24 — La Cour d'appel fédérale, n'étant pas un
tribunal de première instance, n'est pas habilitée à accorder un
redressement sur le fondement de l'art. 24.
Il s'agit d'une demande visant l'annulation d'une décision
d'un comité de révision établi sous le régime de la Loi de 1973
sur les allocations familiales. L'intimée est arrivée au Canada
en 1980 et a réclamé le statut de réfugié. Elle a présenté une
demande d'allocations familiales en 1983, demande qui a été
rejetée au motif que, aucune décision n'ayant été rendue sous le
régime de la Loi sur l'immigration de 1976, elle ne satisfaisait
pas aux exigences énoncées aux alinéas 3(1)a) ou b) de la Loi
de 1973 sur les allocations familiales. Le comité de révision a
statué en sa faveur au motif que le paragraphe 3(1) violait
l'article 15 de la Charte en établissant une discrimination à
l'égard des résidents tout en accordant des prestations aux
personnes admises comme visiteurs.
Arrêt: la demande devrait être accueillie.
Il n'est pas nécessaire de trancher la question relative au
principe de l'égalité puisque le comité de révision ne pouvait ni
faire une déclaration sur la constitutionnalité du paragraphe
3(1) ni accueillir l'appel sur le fondement de l'inconstitutionna-
lité de cette disposition. Ce raisonnement, énoncé dans l'arrêt
Canada (Procureur général) c. Viner, est difficilement conci-
liable avec celui qui a été tenu dans l'affaire Zwarich c. Canada
(Procureur général), dans laquelle la Cour a décidé qu'un
juge-arbitre agissant sous le régime de la Loi de 1971 sur
l'assurance-chômage doit, lorsqu'il révise une décision d'un
conseil arbitral, tout d'abord décider de la constitutionnalité des
dispositions légales applicables. Il n'est toutefois pas nécessaire
de choisir entre ces deux décisions en apparence contradictoi-
res. La conclusion prise dans l'arrêt Zwarich, selon laquelle un
tribunal peut ignorer les dispositions de la loi qu'il croit contre-
venir à la Charte, ne s'applique pas en l'espèce puisque, même
si le sous-alinéa 3(1)b)(ii) est inopérant, le comité de révision
n'est pas habilité à incorporer au sein des dispositions législati-
ves des modifications qui les rendraient constitutionnelles.
La Cour ne peut, elle-même, accorder à l'intimée le redresse-
ment qu'elle sollicite, puisqu'elle n'est qu'une cour d'appel et de
révision et qu'elle ne constitue pas une cour de première
instance. Elle ne peut, en statuant sur la question de savoir si
une décision a été rendue régulièrement, exercer le pouvoir que
lui confère l'art. 24.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la
Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B,
Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.),
art. 15, 24.
Loi de 1973 sur les allocations familiales, S.C. 1973-74,
chap. 44, art. 3(1) (mod. par 1976-77, chap. 52, art.
128).
Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2 ° Supp.), chap.
10, art. 28.
Règlements sur les allocations familiales, C.R.C., chap.
642, art. 2(3) (ajouté par DORS/78-505, art. 1(2)).
JURISPRUDENCE
DÉCISION SUIVIE:
Canada (Procureur général) c. Vincer, [1988] 1 C.F. 714
(C.A.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Zwarich c. Canada (Procureur général), [1987] 3 C.F.
253 (C.A.).
AVOCATS:
Debra M. McAllister pour le requérant.
Michael A. Bossin pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le
requérant.
Michael A. Bossin, Willowdale Community
Legal Services, Willowdale (Ontario), pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE PRATTE: La demande fondée sur
l'article 28 [Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970
(2e Supp.), chap. 10] en l'espèce attaque une déci-
sion rendue par un comité de révision établi con-
formément à la Loi de 1973 sur les allocations
familiales'. Par cette décision, rendue le 29 octo-
bre 1986, ce comité a accueilli un appel formé à
l'encontre du rejet de la demande par laquelle
l'intimée réclamait des prestations d'allocations
familiales.
L'intimée, citoyenne de Guyane, est venue au
Canada le 3 août 1980. Son mari, également un
citoyen de Guyane, l'a rejointe environ un mois
plus tard. Ni l'un ni l'autre n'a été admis au
Canada. Bien que cela ne ressorte pas du dossier,
on peut tenir pour acquis que lors de leur arrivée,
l'intimée et son mari ont fait l'objet d'enquêtes de
l'immigration au cours desquelles'ils ont prétendu
être des réfugiés au sens de la Convention, de sorte
que les conclusions de ces enquêtes ont été ajour-
nées conformément au paragraphe 45(1) de la Loi
sur l'immigration de 1976 [S.C. 1976-77, chap.
52] jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leurs revendi-
cations. Les parties reconnaissent que, jusqu'à une
date aussi récente que le 3 juin 1984, l'intimée et
son mari demeuraient au Canada sans avoir
obtenu de statut pour les fins de l'immigration et
attendaient que leurs revendications soient jugées.
En 1981, toutefois, ils avaient obtenu l'autorisation
de travailler au Canada et, depuis lors, ils avaient
travaillé et reçu un revenu d'emploi assujetti à
l'impôt sur le revenu.
L'intimée et son mari ont trois enfants: deux
filles nées en Guyane (Salima, le 21 août 1972, et
Sheleeza, le 6 septembre 1973) qui sont venues au
Canada en juillet 1981, ainsi qu'un garçon, Kazim,
qui est né à Toronto le 23 janvier 1983.
Le 4 juin 1982, l'intimée a présenté une
demande d'allocations familiales concernant ses
deux filles. Toutefois, comme elle a omis de dépo-
ser les documents requis à cet égard, aucune déci-
sion définitive n'a été rendue relativement à cette
demande. Le 15 février 1983, elle a déposé une
nouvelle demande concernant, cette fois, ses trois
enfants. Cette demande a été rejetée au motif que,
ne détenant aucun statut au Canada sous le régime
de la Loi sur l'immigration de 1976, ni l'intimée ni
1 S.C. 1973-74, chap. 44.
son mari ne satisfaisait aux exigences des alinéas
3(1)a) ou b) de la Loi de 1973 sur les allocations
familiales 2 .
L'intimée a interjeté appel de cette décision
devant un comité créé en vertu de l'article 15 de la
Loi de 1973 sur les allocations familiales. Dans
une décision en date du 29 octobre 1986, la majo-
2 Le paragraphe 3(1) de la Loi de 1973 sur les allocations
familiales, S.C. 1973-74, chap. 44 [mod. par S.C. 1976-77,
chap. 52, art. 128], est ainsi libellé:
3. (1) Sous réserve de la présente loi, il doit être versé,
pour chaque mois, sur le Fonds du revenu consolidé, une
allocation familiale de vingt dollars ou tel montant plus élevé
qui peut être fixé à l'occasion en application de l'article 13, à
l'égard de chaque enfant dont les parents résident au Canada
ou sont réputés y résider dans des circonstances prescrites et
dont au moins un des parents
a) est un citoyen canadien; ou
b) est une personne qui
(i) est un résident permanent au sens de la Loi sur
l'immigration de 1976, ou
(ii) dans les cas prévus par les règlements, est un visiteur
au Canada ou le titulaire au Canada d'un permis au sens
de la Loi sur l'immigration de 1976.
Il doit être observé qu'aucun règlement n'a jamais été adopté
pour prescrire les circonstances dans lesquelles les parents sont
censés résider au Canada pour les fins du paragraphe 3(1).
Toutefois, le paragraphe 2(3) du Règlement adopté en vertu de
la Loi décrit dans les termes suivants les cas dont il est question
au sous-alinéa 3(1)b)(ii) de la Loi:
2....
(3) Aux fins du sous-alinéa 3(1)b)(ii) de la Loi, les cas
suivants sont prescrits
a) lorsque la période pour laquelle
(i) le parent a été admis au Canada comme visiteur et,
s'il y a lieu, a été autorisé à y demeurer au Canada
comme tel, ou
(ii) le permis a été émis en faveur du parent et, s'il y a
lieu, prorogé
est d'au moins douze mois;
b) lorsque le revenu du parent est assujetti à l'impôt sur le
revenu en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu; et
c) lorsque le parent n'est pas
(i) un militaire présent au Canada pour des fins de
formation ou autre ayant trait à la défense ou à la
sécurité nationale du Canada ou en vertu d'un traité ou
d'un accord intervenu entre le Canada et un autre pays,
(ii) présent au Canada pour exécuter ses fonctions offi-
cielles d'agent diplomatique, de fonctionnaire consulaire,
de représentant ou de fonctionnaire dûment accrédité
(A) d'un pays étranger,
(B) des Nations-Unies ou de l'un de ses organismes,
ou
(C) de tout autre organisme intergouvernemental
auquel participe le Canada,
(iii) le conjoint d'une personne visée aux sous-alinéas (i)
ou (ii), ou
(iv) un membre du personnel d'une personne visée aux
sous-alinéas (i), (ii) ou (iii). ,
rité de ce comité a accuelli l'appel de l'intimée. Sa
décision est en partie rédigée de la façon suivante:
[TRADUCTION] 1. La majorité du comité conclut que Mme Alli
a le droit de recevoir des allocations familiales à l'égard de ses
deux premiers enfants à compter de mars 1982 et à l'égard de
ses trois enfants à compter de mars 1983 ... la majorité du
comité décide qu'il ressort à la lecture de l'art. 2(3) de la Loi
sur les allocations familiales que l'intention du législateur était
d'accorder des prestations d'allocations familiales aux parents
qui résident au Canada.
La majorité du comité décide que le paragraphe 3(1) de la Loi
sur les allocations familiales peut être interprété de deux
façons, selon qu'on considère ses dispositions comme conjoncti-
ves ou disjonctives. La majorité du comité opte pour une
interprétation disjonctive de l'art. 3(1) et conclut que les pres-
tations en question doivent être payées «à l'égard de chaque
enfant dont les parents résident au Canada» (l'expression «rési-
der au Canada» se trouvant définie par l'art. 2(3) de la Loi sur
les allocations familiales).
2. Même si nous étions parvenus à une conclusion contraire en
appliquant les principes d'interpr$tation des lois, nous aurions
considéré que l'art. 3(1) est inconstitutionnel parce qu'il viole
l'art. 15 de la Charte des droits et libertés. Nous concluons que
la discrimination envers les résidents ne pourrait aucunement se
justifier sous le régime de l'art. 1 de la Charte alors que les
visiteurs, qui entretiennent un lien beaucoup plus ténu avec ce
pays, se voient accorder des prestations d'allocations familiales.
En d'autres termes, le comité a décidé que l'inti-
mée avait le droit de recevoir des allocations fami-
liales pour deux motifs. Premièrement, parce que
ses membres ont interprété le paragraphe 3(1) de
la Loi comme n'exigeant pas qu'un enfant dont les
parents résident au Canada ait, comme condition
d'admissibilité aux allocations familiales, un de ses
parents qui satisfasse à l'une ou à l'autre des
conditions énoncées aux alinéas 3(1)a) et b). Et,
deuxièmement, parce que le comité était d'avis que
le paragraphe 3(1) est inconstitutionnel en ce qu'il
viole le principe de l'égalité devant la loi figurant à
l'article 15 de la Charte canadienne des droits et
libertés. C'est cette décision qui fait l'objet de la
présente demande fondée sur l'article 28.
L'avocate du requérant a soutenu
1. que l'interprétation du paragraphe 3(1) adop-
tée par le comité est erronée;
2. que le paragraphe 3(1) ne viole pas
l'article 15 de la Charte;
3. que, dans l'hypothèse où le paragraphe 3(1)
violerait l'article 15, il constituerait néanmoins
une disposition législative valide parce que sa
justification pourrait se démontrer dans le cadre
d'une société libre et démocratique aux termes
de l'article 1 de la Charte; et
4. que, en tout état de cause, le comité en
question n'était pas habilité à statuer sur la
constitutionnalité de la loi qu'il devait appliquer.
L'avocat de l'intimée a très franchement
reconnu qu'il ne pouvait trouver d'argument qui
appuierait l'interprétation donnée par le comité au
paragraphe 3(1), qui dit clairement que, pour
qu'un enfant ait la qualité requise à l'égard des
allocations familiales, non seulement ses parents
doivent-ils résider au Canada mais, en plus, l'un de
ceux-ci doit satisfaire aux exigences décrites aux
alinéas 3(1)a) et b). La décision du comité est
donc entachée d'une erreur de droit dans la mesure
où elle est fondée sur une interprétation erronée du
paragraphe 3(1).
L'avocat de l'intimée a toutefois soutenu de
façon convaincante que la demande fondée sur
l'article 28 en l'espèce devrait néanmoins être reje-
tée au motif que la conclusion d'inconstitutionna-
lité du comité était valide. Le paragraphe 3(1) est
discriminatoire et viole l'article 15 de la Charte,
a-t-il dit, parce qu'il établit une distinction que ne
justifient point les fins des allocations familiales
entre les enfants des personnes qui ont été admises
au pays simplement comme visiteurs et les enfants
des personnes qui, comme l'intimée, ont prétendu
être des réfugiés au sens de la Convention et qui,
parfois pendant de nombreuses années, sont autori-
sées à demeurer et à travailler au pays jusqu'à ce
que leur revendication soit jugée. L'avocat de l'in-
timée a dit qu'il est à la fois injuste et déraisonna-
ble de prévoir, comme le fait le paragraphe 3(1),
que les enfants appartenant à la première catégorie
satisfont aux conditions d'admissibilité aux alloca
tions familiales alors que ce n'est pas le cas pour
les enfants appartenant à la seconde catégorie.
Il n'est pas nécessaire de discuter du bien-fondé
de cette prétention et de statuer à cet égard pour
décider de la présente demande puisque, en tout
état de cause, le comité ne pouvait ni faire une
déclaration sur la constitutionnalité du paragraphe
3(1) ni accueillir l'appel de l'intimée sur le fonde-
ment de l'inconstitutionnalité de cette disposition.
La compétence conférée au comité par l'article
15 de la Loi lui permet seulement de juger si la
décision contestée en appel a été régulièrement
rendue. De façon évidente, le comité n'est pas
habilité à faire des déclarations sur la constitution-
nalité de la Loi de 1973 sur les allocations
familiales.
Dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Vin-
cer 3 , mes collègues Marceau et Stone ont tous
deux exprimé le point de vue qu'un tribunal établi
conformément à l'article 15 de la Loi de 1973 sur
les allocations familiales n'a ni le pouvoir d'accor-
der un redressement fondé sur le paragraphe 24(1)
de la Charte ni l'autorité voulue pour statuer sur
un appel en tenant pour acquis que des dispositions
de la loi qu'il a pour rôle d'appliquer sont inconsti-
tutionnelles. Si ce point de vue est celui qu'il
convient d'adopter, il ne fait aucun doute que la
décision attaquée en l'espèce était ultra vires de la
compétence du comité.
Afin d'écarter cette conclusion, l'avocat de l'inti-
mée a fait valoir deux arguments. Premièrement, il
a invoqué la décision rendue par cette Cour dans
l'affaire Zwarich c. Canada (Procureur général)°,
où il a été conclu qu'un juge-arbitre agissant en
vertu de la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage
[S.C. 1970-71-72, chap. 48], pour juger si la déci-
sion d'un conseil arbitral est conforme au droit,
doit tout d'abord décider de la constitutionnalité
des dispositions légales applicables. Le deuxième
argument de l'intimée voulait que, dans l'hypo-
thèse où le comité d'appel n'ait pas eu le pouvoir
d'accorder des redressements en vertu de
l'article 24 de la Charte, cette Cour possède claire-
ment ce pouvoir et devrait l'exercer en rejetant la
demande fondée sur l'article 28 présentée par le
requérant.
Il est certainement difficile de concilier les opi
nions émises dans les affaires Zwarich et Vincer. Il
n'est toutefois pas nécessaire de choisir entre ces
deux décisions en apparence contradictoires pour
les fins de la présente espèce puisque rien de ce qui
a été dit dans l'arrêt Zwarich ne peut aider l'inti-
mée. Clairement, pour les motifs prononcés par le
juge Marceau et le juge Stone dans l'arrêt Vincer,
un comité d'appel créé conformément à l'article 15
de la Loi de 1973 sur les allocations familiales
n'est pas un «tribunal compétent» au sens de l'arti-
cle 24 de la Charte. Rien n'a été dit à ce sujet dans
l'arrêt Zwarich. Il y a été conclu qu'un tribunal
qui rend une décision qu'il est habilité à rendre
3 [1988] 1 C.F. 714 (C.A.).
4 [1987] 3 C.F. 253 (C.A.).
peut ignorer les dispositions de la loi qui, selon lui,
contreviennent à la Constitution et sont, pour ce
motif, «inopérantes». Cette proposition ne s'appli-
que pas à la présente espèce. L'avocat de l'intimée
a reconnu que l'alinéa 3(1)a) et le sous-alinéa
3(1)b)(i) ne sont pas discriminatoires. Il a seule-
ment prétendu à cet égard que le sous-alinéa
3(1)b)(ii) était libellé de façon trop limitative et
aurait dû, pour éviter d'être discriminatoire, viser
les personnes se trouvant dans la situation de
l'intimée. Si cette prétention était bien fondée, le
sous-alinéa 3(1)b)(ii) enfreindrait l'article 15 de la
Charte et serait par conséquent «inopérant». Ceci
n'aiderait évidemment pas l'intimée, qui ne peut
avoir gain de cause à moins que le comité d'appel
ait eu le droit, en statuant sur son pourvoi, d'appli-
quer une nouvelle version du sous-alinéa 3(1)b)(ii)
comportant les modifications nécessaires pour le
rendre constitutionnel. De toute évidence, le
comité n'avait pas un tel droit.
L'avocat de l'intimée a également soutenu que,
quoi qu'il en soit, cette Cour, constituant un tribu
nal compétent au sens de l'article 24 de la Charte,
pouvait accorder à l'intimée le redressement
qu'elle sollicite en rejetant la demande du requé-
rant fondée sur l'article 28. Cette prétention n'est
pas fondée. L'article 24 ne transcende pas toutes
les règles de procédure. Cette Cour est une cour
d'appel et de révision. Elle n'est pas un tribunal de
première instance. Lorsqu'elle révise la décision
d'un tribunal non habilité à accorder des redresse-
ments sous le régime de l'article 24, cette Cour
peut seulement statuer sur la question de savoir si
cette décision a été rendue régulièrement. En
répondant à une telle question, cette Cour ne peut
exercer le pouvoir que lui confère l'article 24.
Pour ces motifs, j'accuellerais la demande, j'an-
nulerais la décision attaquée et je renverrais la
question devant le comité pour qu'il la tranche en
tenant pour acquis que l'intimée n'avait pas droit
aux allocations qu'elle réclamait.
LE JUGE URIE: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE STONE: Je souscris à ces motifs
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