T-1452-87
Yvonne Leaf, Lloyd Benedict, Angela Barnes,
Alexander Roundpoint et le conseil des Mohawks
d'Akwesasne (requérants)
c.
L'Honorable Jeanne Sauvé en Conseil représentée
par le procureur général (intimée)
RÉPERTORIÉ: LEAF C. CANADA (GOUVERNEUR GÉNÉRAL EN
CONSEIL)
Division de première instance, juge en chef adjoint
Jerome—Toronto, 27 août; Ottawa, 25 septembre
1987.
Peuples autochtones — Élections — Demande visant l'an-
nulation du décret invalidant l'élection — La présidente
d'élection a décidé qu'un candidat qui s'était présenté aux
postes de chef et de conseiller ne pouvaient le faire qu'au poste
de chef — Demande rejetée — La présidente d'élection a
outrepassé les pouvoirs qui lui étaient conférés par le Règle-
ment sur les élections au sein des bandes d'Indiens — Le
Parlement a délégué au gouverneur en conseil le pouvoir de
faire en sorte que les élections soient tenues conformément à la
Loi — L'omission de se conformer au Règlement signifie que
l'élection ne s'est pas déroulée conformément à la Loi et aux
exigences prévues par l'art. 74 de la Loi sur les Indiens —
L'art. 5(6) du Règlement (régissant le retrait des candidats)
visait à faire en sorte qu'un candidat ne puisse être écarté du
scrutin qu'a sa propre demande — On ne précise pas qu'il doit
y avoir une seule élection pour les deux postes — L'art. 4(3),
relatif aux mises en candidature pour les postes de chef et de
conseiller, régit le déroulement des assemblées de présentation,
il ne limite pas le droit fondamental de se porter candidat —
Compte tenu des articles 12, 13 et 14 du Règlement, l'art. 79b)
de la Loi ne limite pas le pouvoir du ministre d'enquêter sur
les violations de la Loi seulement — Lorsqu'il existe une
raison sérieuse de croire que l'élection est entachée d'irrégula-
rité, il est préférable que le ministre en recommande
l'annulation.
Contrôle judiciaire — Brefs de prérogative — Certiorari —
Demande visant à faire annuler le décret invalidant l'élection
sur une réserve indienne — Les requérants ont été avisés par
écrit qu'un appel de l'élection avait été interjeté — Ils n'ont
pas répondu à l'offre de faire parvenir leurs commentaires —
Un fonctionnaire du Ministère s'est entretenu avec la prési-
dente d'élection et trois des candidats défaits — Demande
rejetée — Il n'y a pas eu de traitement inéquitable qui
constituerait une violation des principes de justice naturelle —
Les deux parties ont été entendues — Les requérants ont choisi
de ne pas participer â la procédure d'appel — Un certiorari
n'est pas accordé lorsque l'on n'a pas épuisé les recours prévus
par la loi.
Il s'agit d'une requête en certiorari visant à faire annuler un
décret qui est censé annuler une élection tenue sur la réserve de
la bande indienne d'Akwesasne. Les requérants avaient été élus
conseillers lors de l'élection contestée. Selon le décret, le chef
est élu par l'ensemble de la collectivité en même temps que
l'élection des conseillers. La collectivité a décidé que les candi-
dats ne pourraient se présenter à la fois à titre de chef et de
conseiller et dans l'éventualité où ils seraient présentés aux
deux postes, ils auraient à renoncer à l'un d'eux. Neuf des dix
candidats présentés pour occuper les deux postes se sont désis-
tés de l'une des candidatures ou des deux. L'un des candidats,
M. Lawrence Francis, a répondu qu'il maintenait sa candida-
ture pour les deux postes. La présidente d'élection l'a écarté à
titre de candidat pour les deux postes mais a décidé, par la
suite, d'accepter sa candidature à titre de chef. M. Francis a
perdu l'élection. Un appel a été interjeté. Bien que tous les
candidats aient été avisés par écrit de l'appel, seul le chef élu a
répondu. Un fonctionnaire du Ministère s'est entretenu avec la
présidente d'élection et trois des candidats défaits. L'élection a
été annulée par décret. Les requérants s'appuient sur l'alinéa
79b) de la Loi sur les Indiens pour prétendre que puisqu'il n'y
pas eu d'infraction à la Loi, il s'ensuit que le décret n'est pas
justifié. Ils allèguent également que les représentants du minis-
tre n'ont pas tenu compte des principes de justice naturelle
parce qu'ils n'ont pas rencontré tous les candidats qui se sont
présentés à l'élection qui a été annulée.
Jugement: La requête doit être rejetée.
Le retrait d'un candidat mis en présentation est régi par le
paragraphe 5(6) du Règlement. Les dispositions de ce paragra-
phe visent à faire en sorte qu'un candidat présenté en bonne et
due forme ne puisse être écarté du scrutin qu'à sa propre
demande. En l'espèce, un candidat a été écarté contre son gré
sur l'ordre de la présidente d'élection. Cela constitue une
violation du paragraphe 5(6).
Contrairement aux prétentions des requérants selon lesquel-
les l'intention du législateur est de faire en sorte qu'il n'y ait
qu'une seule élection pour les postes de chef et de conseiller, ni
la Loi ni le Règlement n'exigent expressément qu'il y ait une
seule élection et le paragraphe 74(1) emploie le mot «élections»
au pluriel pour décrire le mode de formation du conseil.
Les requérants prétendent que le paragraphe 4(3) du Règle-
ment, lequel prévoit qu'un candidat ne peut poser sa candida-
ture que pour le poste de chef ou de conseiller, ne permet pas
qu'un candidat se présente aux deux postes. Cependant, cette
interprétation n'empêche pas nécessairement la double candida-
ture puisqu'on pourrait toujours affirmer que le candidat se
présentait à titre de «chef ou de conseiller». Mais chose beau-
coup plus importante, un règlement conçu pour régir le déroule-
ment des assemblées de présentation ne devrait pas être appli-
qué pour limiter le droit fondamental d'une personne éligible de
se présenter à un poste.
Quoi qu'il en soit, la présidente d'élection a outrepassé ses
pouvoirs en retirant le nom de M. Francis du bulletin de vote.
Le Règlement ne permet pas à un président d'élection d'établir
le nombre de postes pour lesquels un candidat peut se présenter.
Par conséquent, il y a eu violation du Règlement sur les
élections au sein des bandes d'Indiens.
L'omission de se conformer au Règlement régissant le dérou-
lement des élections signifie que l'élection ne s'est pas déroulée
selon la présente Loi. Selon l'article 74 de la Loi, les élections
doivent être tenues «selon la présente loi». En vertu de l'article
76, lequel prévoit que des décrets peuvent être pris concernant
les assemblées pour la présentation des candidats, la nomina
tion et les fonctions des présidents d'élections et la manière
dont la votation doit avoir lieu, le Parlement a délégué au
gouverneur en conseil le pouvoir de faire en sorte que les
élections se déroulent «selon la présente loi». Le Règlement pris
aux termes de cet article répond à cette exigence.
Les articles 12, 13 et 14 du Règlement obligent le ministre à
enquêter sur une violation de la Loi ou du Règlement et à faire
rapport. Il serait contradictoire de restreindre le pouvoir prévu
à l'alinéa 79b) aux violations de la Loi seulement. Le ministre
était autorisé à faire une recommandation et le gouverneur en
conseil pouvait exercer les pouvoirs que lui confère l'alinéa
79b).
La procédure suivie par les représentants du ministre n'était
pas inéquitable. Toutes les parties intéressées ont eu la possibi-
lité d'intervenir dans les procédures d'appel, mais les requérants
ont choisi de ne pas répondre par écrit lorsqu'ils ont été avisés
que l'élection était portée en appel. S'ils avaient répondu, ils
auraient certainement été convoqués à une entrevue.
De plus, les tribunaux ont déjà décidé qu'il était inopportun
d'accorder un redressement discrétionnaire par voie de certio-
rari lorsque la loi fournit un moyen adéquat pour régler le
différend. Les requérants auraient dû répondre à l'invitation du
ministre de défendre leur cause.
Enfin, lorsqu'il existe une raison sérieuse de croire qu'une
élection est entachée d'irrégularité, il vaut mieux pour toutes
les parties que le ministre en recommande l'annulation.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, chap. I-6, art. 74(1), 75,
76, 77, 79.
Règlement sur les élections au sein des bandes. d'Indiens,
C.R.C., chap. 952, art. 4(3), 5(6) (mod. par DORS/85-
409, art. 2), 12, 13, 14.
JURISPRUDENCE
DECISIONS CITÉES:
Procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of
Canada et autre, [1980] 2 R.C.S. 735; 115 D.L.R. (3d)
1; Chambre de commerce de Jasper Park c. Gouverneur
général en conseil, [1983] 2 C.F. 98; (1982), 141 D.L.R.
(3d) 54 (C.A.); Thorne's Hardware Ltd. et autres c. La
Reine et autre, [1983] 1 R.C.S. 106; 143 D.L.R. (3d)
577; Harelkin c. Université de Regina, [1979] 2 R.C.S.
561; 96 D.L.R. (3d) 14.
AVOCATS:
Andrew J. Roman pour les requérants.
Roslyn J. Levine pour l'intimée.
PROCUREURS:
The Public Interest Advocacy Centre,
Toronto, pour les requérants.
Le sous-procureur général du Canada, pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT JEROME: Les requé-
rants sont les demandeurs dans une action visant à
faire déclarer nul le décret 1987-858 daté du 30
avril 1987 (No du greffe de la Cour fédérale
T-1453-87). Ils ont également déposé des requêtes
visant à obtenir un bref de certiorari, la suspension
des procédures d'exécution, une décision prélimi-
naire sur un point de droit et des directives. Les
requêtes devaient être entendues à Toronto (Onta-
rio) le 27 août 1987, mais à la demande des
parties, j'ai examiné la requête en certiorari et
ajourné les autres requêtes en attendant l'issue de
cette dernière.
Le décret contesté vise l'annulation d'une élec-
tion qui a eu lieu au mois de juin 1986, sur la
réserve de la bande indienne d'Akwesasne. A cette
époque, tous les requérants avaient été élus au sein
du conseil Mohawk d'Akwesasne qui est le corps
dirigeant de la bande, aux fins de représenter le
district de Cornwall Island de la réserve. L'affida-
vit soumis en preuve précise que jusqu'en 1986, le
conseil était composé de quatre conseillers élus
dans chacun des trois districts d'Akwesasne et d'un
chef qu'élisaient alors parmi eux, les douze conseil-
lers en question. À la fin de l'année 1985, le conseil
a adopté une résolution visant à modifier ce sys-
tème de façon à ce que le chef soit élu par l'ensem-
ble de la collectivité, au moment même de l'élec-
tion des conseillers de chaque district. On a adopté
un décret autorisant ce changement.
Le 2 mai 1986, Cecilia Square, qui exerçait la
fonction de juge de paix pour le district d'Akwe-
sasne, a été désignée par le conseil comme prési-
dente d'élection. Le 31 mai 1986, lors d'une assem
blée publique, la collectivité a, d'un commun
accord, décidé qu'il ne serait pas permis aux candi-
dats de se présenter, à la fois, pour les postes de
conseiller et de chef et, dans l'éventualité où ils
seraient présentés pour les deux postes, ils auraient
à renoncer à l'un d'eux. Puisque la présidente
d'élection considérait qu'il s'agissait-là d'une inter-
prétation raisonnable du paragraphe 4(3) du
Règlement sur les élections au sein des bandes
d'Indiens [C.R.C., chap. 952], elle y a souscrit.
On a procédé à la présentation des candidats à
l'élection qui devait avoir lieu le 21 juin 1986.
Lorsque la présidente d'élection a reçu toutes les
mises en candidature, elle a constaté que dix per-
sonnes avaient été présentées à la fois pour le poste
de chef et celui de conseiller. Elle a donc écrit à
chacun de ces candidats, en date du 9 juin 1986,
pour les informer qu'ils devaient fixer leur choix
sur le poste qu'ils convoitaient. Neuf des dix candi-
dats se sont désistés de l'une des candidatures
qu'ils avaient posées ou des deux. L'un des candi-
dats, Lawrence Francis, a demandé conseil à un
fonctionnaire de la direction des dispositions statu-
taires du ministère des Affaires indiennes. Lors-
qu'on l'a informé qu'il lui était permis de se pré-
senter pour les deux postes et que le conseil n'avait
pas le pouvoir de changer les lois électorales, il a
répondu dans une lettre adressée à la présidente
d'élection qu'il entendait maintenir sa candidature
pour les deux postes convoités. M. Francis a été
temporairement écarté à titre de candidat aux
deux postes mais la présidente d'élection a, par la
suite, décidé d'accepter sa candidature au poste de
chef, puisqu'il avait déjà occupé cette charge.
La présidente d'élection et l'un des autres candi-
dats ont par la suite demandé un avis juridique au
sujet de cette décision. Les réponses qu'ils ont
reçues indiquaient que la décision en question était
susceptible de soulever des problèmes mais elles ne
permettaient pas d'interpréter plus clairement les
exigences prévues par la loi.
M. Francis a perdu l'élection tenue le 21 juin
1986 pour le poste de chef. Étant donné les cir-
constances entourant sa candidature, y compris un
certain nombre d'autres sujets de préoccupation
concernant l'élection, un groupe désigné sous le
nom de comité ad hoc visant à assurer la tenue
d'élections équitables a été formé et il a interjeté
appel de l'élection. Un avis d'appel a été transmis
au ministère des Affaires indiennes qui, par lettre
datée du 18 juillet 1986, a avisé la présidente
d'élection et tous les candidats, y compris les
requérants, qu'un appel avait été interjeté. Une
copie de l'avis d'appel était jointe à la lettre qui
encourageait les intéressés à faire parvenir leurs
commentaires par écrit. La seule réponse que le
Ministère a reçue provenait du chef élu, Michael
Mitchell, qui écrivait au nom du conseil.
Au mois d'octobre 1986, un fonctionnaire du
Ministère s'est rendu dans le district d'Akwasasne
pour enquêter sur l'élection. Il signale qu'il s'est
entretenu avec la présidente d'élection et trois des
candidats défaits, mais il n'a pas rencontré les
requérants.
Le décret C.P. 1987-858 qui a été pris le 30 avril
1987 annulait l'élection de chacun des requérants.
En voici les dispositions:
Attendu que le ministre des Affaires indiennes et du Nord
canadien est convaincu qu'il y a eu violation à la Loi sur les
Indiens et que cette violation pourrait avoir influé sur les
résultats des élections de Lloyd Benedict, Yvonne Leaf, Angela
Barnes et Alex Roundpoint aux postes de conseillers de la
bande indienne des Mohawks d'Akwesasne pour le district de
Cornwall Island, en ce sens que la candidature de Lawrence
Francis au poste de conseiller dudit district a été improprement
retirée;
Et attendu qu'un rapport circonstantiel de l'élection du chef
et des conseillers de la bande indienne des Mohawks d'Akwe-
sasne est exposé à l'annexe ci-jointe;
À ces causes, sur avis conforme du ministre des Affaires
indiennes et du Nord canadien et en vertu de l'alinéa 79b) de la
Loi sur les Indiens, il plaît à Son Excellence le Gouverneur
général en conseil de rejeter l'élection, tenue le 21 juin 1986, de
Lloyd Benedict, Yvonne Leaf, Angela Barnes, et Alex Round-
point aux postes de conseillers de la bande indienne des
Mohawks d'Akwesasne, pour le district de Cornwall Island,
dans la province de l'Ontario.
Au mois de mai 1987, les candidats, la présidente
d'élection et le conseil, ont tous été avisés de la
teneur de ce décret qui fait l'objet de la présente
demande de certiorari.
Les dispositions législatives pertinentes en l'es-
pèce sont l'article 79 de la Loi sur les Indiens,
S.R.C. 1970, chap. I-6, de même que les articles
12, 13 et 14 du Règlement sur les élections au sein
des bandes d'Indiens, C.R.C., chap. 952:
79. Le gouverneur en conseil peut rejeter l'élection d'un chef
ou d'un conseiller sur le rapport du Ministre où ce dernier se dit
convaincu
a) qu'il y a eu des faits de corruption à l'égard de cette
élection;
b) qu'il s'est produit une infraction à la présente loi pouvant
influer sur le résultat de l'élection; ou
c) qu'une personne présentée comme candidat à l'élection ne
possédait pas les qualités requises en l'espèce.
12. (1) Si, dans le délai de 30 jours après une élection, un
candidat à l'élection ou un électeur ayant voté ou s'étant
présenté pour voter à l'élection a des motifs raisonnables de
croire
a) qu'il y a eu manoeuvre corruptrice en rapport avec une
élection,
b) qu'il y a eu violation de la Loi ou du présent règlement
qui puisse porter atteinte au résultat d'une élection, ou
c) qu'une personne présentée comme candidat à une élection
était inéligible,
il peut interjeter appel en faisant parvenir au sous-ministre
adjoint, par courrier recommandé, les détails de ces motifs au
moyen d'un affidavit en bonne et due forme.
(2) Lorsqu'un appel est interjeté, conformément au paragra-
phe (1), auprès du sous-ministre adjoint, ce dernier doit, dans
les 7 jours qui suivent la réception de cet appel, faire parvenir,
par courrier recommandé, au président d'élection et à chacun
des candidats de la section électorale une copie de cet appel
accompagnée de toutes les pièces à l'appui.
(3) Tout candidat peut, dans un délai de 14 jours après
réception de la copie de l'appel, envoyer au sous-ministre
adjoint, par courrier recommandé, une réponse par écrit aux
détails spécifiés dans l'appel, et toutes les pièces s'y rapportant
dûment certifiées sous serment.
(4) Tous les détails et toutes les pièces déposés conformé-
ment au présent article constitueront et formeront le dossier.
13. (1) Le Ministre peut, si les faits allégués ne lui parais-
sent pas suffisants pour décider de la validité de l'élection
faisant l'objet de la plainte, conduire une enquête aussi appro-
fondie qu'il le juge nécessaire et de la manière qu'il juge
convenable.
(2) Cette enquête peut être tenue par le Ministre ou par
toute personne qu'il désigne à cette fin.
(3) Lorsque le Ministre désigne une personne pour tenir une
telle enquête, cette personne doit présenter un rapport détaillé
de l'enquête à l'examen du Ministre.
14. Lorsqu'il y a lieu de croire
a) qu'il y a eu manoeuvre corruptrice à l'égard d'une
élection,
b) qu'il y a eu violation de la Loi ou du présent règlement
qui puisse porter atteinte au résultat d'une élection, ou
c) qu'une personne présentée comme candidat à une élection
était inadmissible à la candidature,
le Ministre doit alors faire rapport au gouverneur en conseil.
Les requérants contestent la validité du décret
en se fondant sur deux arguments principaux. Le
premier découle du libellé de l'alinéa 79b). Ils
prétendent que ce qui s'est produit en l'espèce
constitue une infraction au Règlement. (Je prends
également note de leur prétention selon laquelle il
n'y a eu aucune infraction de ce genre.) Puisqu'il
n'y a pas eu d'infraction à la Loi, il s'ensuit que le
rapport du ministre et le décret ne sont aucune-
ment justifiés. Ils allèguent en second lieu que les
représentants du ministre n'ont pas, au cours du
déroulement de l'enquête, tenu compte des princi-
pes de justice naturelle puisqu'ils n'ont pas rencon-
tré tous les candidats qui se sont présentés pour
l'élection qui a été annulée.
La présente demande soulève trois autres points
litigieux. Premièrement, il semble maintenant bien
établi que dans des circonstances appropriées, un
décret peut, par voie de certiorari, faire l'objet
d'un examen devant la présente cour. (Voir, à titre
d'exemples, Procureur général du Canada c. Inuit
Tapirisat of Canada et autre, [1980] 2 R.C.S.
735; 115 D.L.R. (3d) 1; Chambre de commerce de
Jasper Park c. Gouverneur général en conseil,
[1983] 2 C.F. 98; (1982), 141 D.L.R. (3d) 54
(C.A.); et Thorne's Hardware Ltd. et autres c. La
Reine et autre, [1983] 1 R.C.S. 106; 143 D.L.R.
(3d) 577.) En l'espèce, l'avocat de l'intimé n'a en
fait soulevé aucune objection quant à la compé-
tence.
Deuxièmement, l'action ainsi que les requêtes
qui ont été ajournées et dont j'ai fait mention dans
le paragraphe introductif soulèvent sans aucun
doute des questions concernant la validité de l'en-
quête du ministre et de ses recommandations au
gouverneur en conseil. Toutefois, la présente
demande porte uniquement sur la validité du
décret pris en vertu de l'article 79.
Cette situation soulève une troisième question.
Devrais-je étendre la portée des termes de l'article
79 et examiner les éléments d'information sur
lesquels le décret était fondé ou devrais-je conclure
que l'article en question donne tous les pouvoirs
nécessaires permettant de prendre le décret en
question, une fois que le gouverneur en conseil a
reçu les recommandations du ministre? Je suis
porté à adopter cette dernière conclusion mais je
suis heureusement libéré du fardeau de statuer à
ce sujet puisque je conclus que la thèse des requé-
rants n'est pas fondée.
Le Règlement sur les élections au sein des'
bandes d'Indiens a-t-il été enfreint? Le retrait d'un
candidat mis en présentation est régi par le para-
graphe 5(6) [mod. par DORS/85-409, art. 2] du
Règlement en question qui prévoit:
5....
(6) Tout candidat mis en présentation peut se retirer en tout
temps après sa présentation, sauf dans les 48 heures qui précè-
dent l'ouverture du scrutin, en déposant chez le président
d'élection une déclaration écrite à cet effet, signée de sa main
en présence du président d'élection, d'un juge de paix, d'un
notaire ou d'un commissaire aux serments, et tous les votes
déposés en faveur d'un tel candidat sont nuls et non avenus.
Les dispositions de ce paragraphe visent manifeste-
ment à faire en sorte qu'un candidat présenté en
bonne et due forme ne puisse être écarté du scrutin
qu'à sa propre demande. En l'espèce, un candidat
a été écarté contre son gré sur l'ordre de la prési-
dente d'élection. Cela constitue une violation du
paragraphe 5(6) et un abus de pouvoir de la part
de la présidente d'élection, ce qui est également
prévu au Règlement.
Les requérants contestent cette conclusion. Ils
prétendent que les mesures prises par la présidente
d'élection n'étaient en réalité que l'application de
la politique sous-jacente audit Règlement. Ils
avancent tout d'abord l'hypothèse selon laquelle
l'intention du législateur, qui se dégage de la Loi et
du Règlement, est de faire en sorte qu'il n'y ait
qu'une seule élection pour les deux postes de chef
et de conseiller. Il s'ensuit donc qu'un candidat ne
devrait pas être autorisé à se présenter à ces deux
postes. Si le candidat en question était élu, il ne
serait pas en mesure d'occuper les deux charges et
il faudrait procéder à une deuxième élection pour
combler le poste vacant.
Les requérants invoquent également le paragra-
phe 4(3) du Règlement pour appuyer la thèse selon
laquelle un candidat ne peut être présenté pour
deux postes. L'article 4 du Règlement traite des
assemblées de présentation. Le paragraphe (3)
prévoit:
4....
(3) Aux jour, heure et lieu fixés dans l'avis, le président
d'élection doit déclarer que l'assemblée est ouverte aux fins de
recevoir les présentations, et tout électeur peut proposer ou
appuyer la mise en candidature de toute personne validement
habile à occuper le poste de chef ou de conseiller; l'assemblée
doit rester ouverte durant au moins 2 heures après son ouver-
ture, et alors, si le nombre des personnes mises en candidature
pour occuper un poste au conseil de la bande ne dépasse pas le
nombre requis, le président d'élection doit déclarer les person-
nes ainsi présentées validement élues. [C'est moi qui souligne.]
Les requérants déclarent que la partie soulignée du
paragraphe précité signifie qu'un candidat ne peut
poser sa candidature que pour le poste de chef ou
de conseiller et non pour les deux. C'est en raison
de l'objectif primordial d'une élection seule que
cette interprétation plutôt forcée paraît être
nécessaire.
J'éprouve beaucoup de difficultés à accepter cet
argument. Premièrement, je ne suis pas du tout
convaincu que le législateur ait eu l'intention de ne
prévoir qu'une seule élection. Cette intention ne
figure ni dans la Loi, ni dans le Règlement sus-
mentionnés et le paragraphe 74(1) de la Loi sur
les Indiens emploie le mot «élections» au pluriel
pour décrire le mode de formation du conseil. Il est
évident qu'une seule élection est nécessaire lorsque
le chef de la bande est élu par les conseillers. Par
contre, lorsque le chef et les conseillers sont élus
directement, la Loi ne précise pas qu'il ne peut pas
y avoir deux élections, une pour chaque poste. Il
me semble que la tenue de deux élections serait la
solution la plus logique à envisager dans le cas qui
nous occupe et que cela réglerait certainement le
problème qui s'est posé en l'espèce. Il pourrait y
avoir deux modes distincts de présentation des
candidats, ou encore, les candidats pourraient
poser leur candidature pour les postes de chef et de
conseiller pour ensuite décider s'ils se présenteront
ou non pour la deuxième élection après avoir pris
connaissance des résultats de la première. Je ne
vois rien dans la Loi ni dans le Règlement qui
indique expressément le contraire.
Je ne suis pas non plus disposé à annuler le
décret contesté en l'espèce en me fondant sur
l'interprétation des requérants concernant le para-
graphe 4(3) du Règlement. Ceux-ci prétendent
qu'une personne ne peut être présentée que pour le
poste de «chef ou de conseiller» et non pour ceux de
«chef et de conseiller». Je ne suis pas convaincu
qu'une telle interprétation aurait à coup sûr, empê-
ché la double candidature de M. Francis puisque,
en permettant que son nom soit inscrit pour les
deux postes, on pouvait affirmer qu'il se présentait
à titre de «chef ou de conseiller». Mais, chose
beaucoup plus importante, je ne pense pas qu'un
règlement conçu pour régir le déroulement des
assemblées de présentation devrait être appliqué
pour limiter le droit fondamental d'une personne
admissible de se présenter pour un poste. Je ne suis
pas prêt à présumer, en l'absence d'un texte plus
précis, que le législateur avait l'intention de traiter
une question aussi importante d'une façon indi-
recte. En conséquence, je ne suis pas d'accord pour
dire que le paragraphe 4(3) du Règlement exige
d'un candidat qu'il ne se présente que pour un seul
poste.
Les avis contradictoires fournis par le ministère
des Affaires indiennes illustrent bien l'incertitude
entourant cette question. On a apparemment dit à
M. Francis qu'il pouvait concourir pour les deux
postes. D'autres parties ont reçu des avis encore
plus vagues et on leur a laissé croire que la bande
d'Indiens en question pouvait d'elle-même régler
cette question. Les requérants ont également pro-
duit une lettre du bureau régional de la Colombie-
Britannique dans laquelle on déclarait qu'aucun
candidat ne pouvait se présenter pour deux postes
en même temps. Il y a enfin l'avis donné par le
ministre au gouverneur en conseil selon lequel le
retrait de l'une des candidatures de M. Francis
contre son gré était illégal.
Dans toute cette controverse, il faut se deman-
der si la présidente d'élection a agi dans les limites
de ses droits en décidant d'accéder aux désirs de la
bande et en écartant tous ceux qui s'étaient présen-
tés pour les deux postes? Je ne le crois pas. Les
devoirs de la présidente d'élection sont clairement
établis dans le Règlement. À la suite de l'assem-
blée de présentation, elle doit compter les mises en
candidature correspondant à chaque poste, attester
l'élection des candidats élus par acclamation,
déclarer qu'un scrutin doit être tenu le cas échéant
et préparer des bulletins de vote sur lesquels figu-
rent les noms des candidats. Elle doit également
attester et accepter les retraits de candidature
effectués en bonne et due forme. On ne trouve
nulle part une disposition qui lui permettrait d'éta-
blir le nombre de postes pour lesquels un candidat
peut se présenter ou de retirer du bulletin de vote
le nom des candidats dûment présentés. Bien que
je reconnaisse que la première de ces questions
n'est pas encore réglée, cette incertitude n'a pas eu
pour effet de conférer des pouvoirs supplémentai-
res à la présidente d'élection. Il était loisible au
ministre de conclure que cette dernière avait outre-
passé les pouvoirs qui lui étaient attribués par la
Loi en retirant le nom de M. Francis du bulletin de
vote.
En conséquence, contrairement aux prétentions
des requérants je conclus qu'il y a eu violation du
Règlement sur les élections au sein des bandes
d'Indiens.
Je n'admets pas non plus l'argument selon lequel
l'irrégularité commise se limite au Règlement en
question. Le pouvoir d'élire les conseils de bandes
et les chefs relève du paragraphe 74(1) de la Loi
sur les Indiens qui prévoit:
74. (1) Lorsqu'il le juge utile à la bonne administration
d'une bande, le Ministre peut déclarer par arrêté qu'à compter
d'un jour y désigné le conseil d'une bande, comprenant un chef
et des conseillers, sera formé au moyen d'élections tenues selon
la présente loi.
Afin de satisfaire aux exigences du paragraphe
susmentionné, les élections doivent être tenues
«selon la présente loi». Plusieurs autres articles
donnent plus d'ampleur à cette exigence. Le para-
graphe 74(3) permet au gouverneur en conseil de
décider si le chef doit être élu directement ou par
des conseillers et décréter que la majorité des votes
est le critère applicable pour déterminer les candi-
dats élus. Les articles 75 et 77 indiquent les per-
sonnes qui ont les qualités requises pour être can-
didat ou électeur respectivement. L'article 76
prévoit que des décrets peuvent être pris concer-
nant notamment les assemblées pour la présenta-
tion des candidats, la nomination et les fonctions
des présidents d'élections et la manière dont la
votation doit avoir lieu. En vertu de cet article, le
Parlement a délégué au gouverneur en conseil le
pouvoir d'établir, par voie de règlement, les procé-
dures permettant le déroulement des élections
«selon la présente loi». Le Règlement pris aux
termes de l'article en question répond à cette
exigence. En l'espèce, l'omission de se conformer
au Règlement signifie que l'élection en cause ne
s'est pas déroulée «selon la présente loi» et cela
constitue donc une violation du paragraphe 74(1).
Il est utile aussi d'examiner les dispositions du
Règlement régissant les appels en matière d'élec-
tions. Les articles 12, 13 et 14 précités obligent
expressément le ministre à enquêter sur «une viola
tion de la Loi ou du présent règlement» et à faire
rapport. Étant donné que le rapport du ministre au
gouverneur en conseil doit indiquer toute violation
de la Loi ou du présent Règlement, il serait tout à
fait contradictoire de restreindre le pouvoir que
ledit gouverneur possède en vertu de l'alinéa 79b)
soit à la Loi soit au Règlement.
En conséquence, je conclus que cette violation
du Règlement sur les élections au sein des bandes
d'Indiens permet au ministre de faire une recom-
mandation et au gouverneur en conseil d'exercer
les pouvoirs que lui confère l'alinéa 79b) de la Loi.
Les requérants font valoir en deuxième lieu que
le décret est nul parce que le rapport du ministre
sur lequel il était fondé a été rédigé en violation
des principes de justice naturelle. À cet égard, ils
dénoncent surtout le fait que l'enquêteur désigné
par le ministre a négligé de rencontrer les requé-
rants à titre de candidats élus lors de l'élection. Ils
soutiennent par conséquent que le rapport soumis
par l'enquêteur au ministre [TRADUCTION] «était
incomplet et inéquitable et en outre, qu'il était
partial ou qu'il donnait lieu à une crainte raisonna-
ble de partialité». Selon eux, le rapport du ministre
était également teinté de partialité.
La procédure que le ministre doit suivre lors-
qu'une élection fait l'objet d'un appel est prévue
aux articles 12 14 du Règlement cité précédem-
ment. Lorsqu'un appel est interjeté auprès du
ministère conformément aux paragraphes 12(2) et
12(3) dudit Règlement, il s'agit tout d'abord de
faire parvenir une copie de cet appel par courrier
au président d'élection et à chacun des candidats
de la section électorale. Tout candidat peut, dans
un délai de 14 jours de la réception de sa copie,
répondre par écrit aux allégations énoncées dans
l'appel. Si le ministre estime qu'il n'a pas assez de
renseignements à la suite de cet échange pour
statuer sur la validité de l'élection, il peut «con-
duire une enquête aussi approfondie qu'il le juge
nécessaire et de la manière qu'il juge convenable»
(Paragraphe 13(1) du Règlement). Enfin, s'il y a
lieu de croire qu'il y a eu une manoeuvre corrup-
trice, violation de la Loi ou du présent Règlement
des présentations irrégulières, le ministre doit alors
en faire rapport au gouverneur en conseil.
Il ressort de ces dispositions que le ministre a un
pouvoir discrétionnaire considérable pour établir la
façon dont une enquête doit être effectuée et si un
rapport doit être dressé. Les requérants font valoir
à juste titre que ce pouvoir discrétionnaire doit être
exercé équitablement. Pour établir si le ministre et
les personnes qu'il délègue ont agi équitablement,
il faut examiner toute la procédure d'enquête.
Immédiatement après le dépôt de l'appel, une
lettre a été envoyée à chacun des candidats ainsi
qu'à la présidente d'élection pour les informer des
motifs de l'appel et pour les inviter à y répondre
par écrit. Tous les requérants ont choisi de ne pas
répondre à cette lettre. Par la suite, au cours du
mois d'octobre 1986, un fonctionnaire du ministère
a procédé à une enquête en vertu de l'article 13. Il
a visité la réserve et s'est entretenu avec chacune
des deux «parties adverses» dans ce différend,
c'est-à-dire la présidente d'élection et les candidats
défaits. À l'aide des renseignements qu'il a recueil-
lis, des rapports ont été dressés d'abord à l'inten-
tion du ministre et ensuite à celle du gouverneur en
conseil.
La question litigieuse qu'on me soumet est de
savoir si les requérants ont été traités de façon
équitable. J'estime que oui. Ils ont eu l'occasion de
répondre aux motifs particuliers invoqués dans
l'appel et ils n'en ont pas profité. Le fonctionnaire
qui a procédé à l'enquête a discuté avec la prési-
dente d'élection qui était la personne la mieux
placée pour défendre la validité de l'élection. Il est
évident que les requérants auraient eux aussi été
convoqués à une entrevue s'ils avaient répondu par
écrit qu'ils détenaient des renseignements relatifs à
l'appel. On n'a jamais fait valoir que les renseigne-
ments recueillis étaient faux ou incomplets. Je suis
donc convaincu que toutes les parties intéressées
ont eu une possibilité raisonnable d'intervenir dans
les procédures d'appel.
Ma décision sur cette question est également
influencée par le fait que le certiorari est un
redressement discrétionnaire. Les tribunaux sont
généralement peu enclins à l'accorder dans les
procédures de révision lorsque la loi prévoit un
moyen d'appel (Voir l'arrêt Harelkin c. Université
de Regina, [1979] 2 R.C.S. 561; 96 D.L.R. (3d)
14). En l'espèce, la procédure d'appel prévue par
la Loi fournit un moyen tout à fait adéquat pour
régler le différend. Lorsque le ministre est inter-
venu, les requérants en question auraient dû accep-
ter l'offre qu'il leur faisait de défendre leur cause
mais ils ont refusé. Il serait inopportun de leur
accorder un redressement discrétionnaire par voie
de certiorari pour contester le décret qui est
l'aboutissement de cette procédure.
Il existe un autre élément qui m'incite à ne pas
annuler le présent décret. Lorsqu'il existe une
raison sérieuse de croire qu'une élection est enta-
chée d'irrégularité, il vaut mieux pour toutes les
parties que le ministre en recommande l'annula-
tion. Sinon, on risque de faire durer une situation
qui empêcherait une section de la bande d'être
représentée sur le conseil ou de créer de la confu
sion quant au droit des candidats élus d'occuper
leur charge.
Je devrais ajouter, en guise d'observation, qu'il
serait utile si cette demande devait donner lieu à
une interprétation juridique définitive des lois élec-
torales de manière à fournir des directives précises
pour les futures élections des bandes d'Indiens. Il
n'en sera rien. Je tiens toutefois à répéter que la
Loi de même que le Règlement indiquent l'inten-
tion du législateur de donner à chaque bande deux
possibilités quant au déroulement des élections. La
première consiste à élire les conseillers qui, à leur
tour, élisent le chef. La deuxième, qui a été choisie
en l'espèce, consiste à tenir des élections directes
pour les deux postes en même temps. Dans ce
dernier cas, la voie la plus sûre serait de tenir des
élections séparées. Cela permettrait aux candidats
et aux électeurs de connaître les résultats d'une
élection avant de procéder aux présentations et de
voter à la deuxième élection. À mon avis, rien dans
la Loi ou le Règlement n'empêche de procéder
ainsi.
La présente requête en certiorari doit donc être
rejetée et aucuns dépens ne seront adjugés.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.