T-1009-84
Brian James Dempsey (demandeur)
c.
Procureur général du Canada, solliciteur général
du Canada et commissaire aux services correc-
tionnels (défendeurs)
Division de première instance, juge Rouleau—
Ottawa, 19 décembre 1984; 13 mai 1985.
Justice criminelle et pénale — Emprisonnement — Action
visant à obtenir un jugement déclaratoire portant que tous les
mandats de dépôt non exécutés qui découlent de peines impo
sées en vertu d'infractions à des règlements municipaux soient
reçus par le Service correctionnel du Canada et que les peines
qui découlent du défaut de payer les amendes soient purgées
concurremment avec la peine de pénitencier — L'art. 659(2) du
Code criminel ne mentionne ni n'applique les infractions pro-
vinciales — Code criminel, S.R.C. 1970, chap. C-34, art. 659
(mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 93, art. 79; 1976-77, chap.
53, art. 13) — Loi sur la libération conditionnelle de détenus,
S.R.C. 1970, chap. P-1, art. 7(1),(2), 20(1) (mod. par S.C.
1976-77, chap. 53, art. 31) — Loi d'interprétation, S.R.C.
1970, chap. I-18, art. 27(2).
Pénitenciers — L'art. 659(2) du Code criminel n'exige pas
que le Service correctionnel du Canada reçoive les mandats de
dépôt non exécutés relatifs aux infractions provinciales d'un
détenu fédéral — Code criminel, S.R.C. 1970, chap. C-34, art.
659 (mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 93, art. 79; 1976-77,
chap. 53, art. 13).
Droit constitutionnel — Partage des pouvoirs — Une modi
fication de l'art. 659(2) du Code visant les peines provinciales
constituerait une mesure législative fédérale valide en matière
de droit criminel ou de pénitenciers — Elle aurait un effet
accessoire sur les pouvoirs provinciaux en matière d'imposi-
tion de peine à l'égard d'infractions provinciales et en matière
de prisons — Effet équivalant aux ordonnances de dédomma-
gement aux victimes d'actes criminels bien que les dommages-
intérêts relèvent de la propriété et des droits civils — Le
pouvoir législatif du Parlement repose sur la Loi constitution-
nelle de 1867 et non sur l'étendue de la législation fédérale
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U.)
[S.R.C. 1970, Appendice II, n° 5J (mod. par la Loi de 1982 sur
le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitu-
tionnelle de 1982, n° 1), art. 91(27),(28), 92(6),(15) — Code
criminel, S.R.C. 1970, chap. C-34, art. 653, 659 (mod. par
S.C. 1974-75-76, chap. 93, art. 79; 1976-77, chap.53, art. 13).
La présente action vise à obtenir un jugement déclaratoire
portant que le Service correctionnel du Canada doit recevoir les
mandats de dépôt non exécutés relatifs à des infractions à des
règlements municipaux et que les peines d'emprisonnement qui
en découlent doivent être purgées concurremment avec la peine
de pénitencier actuelle du demandeur. La question est de savoir
si le paragraphe 659(2) du Code criminel s'applique aux infrac
tions provinciales. Le paragraphe 659(2) prévoit que lorsqu'une
personne condamnée à l'emprisonnement dans un pénitencier
est, avant l'expiration de cette sentence, condamnée à un
emprisonnement de moins de deux ans, elle doit purger cette
peine d'emprisonnement dans un pénitencier. Il faut également
se demander si le paragraphe 659(2) est valide du point de vue
constitutionnel et si les peines provinciales devraient être pur
gées de façon consécutive ou concurrente par rapport à la peine
de pénitencier actuelle du demandeur.
Jugement: l'action échoue.
Le paragraphe 659(2) ne s'applique pas aux peines infligées
en vertu de lois provinciales. Malgré l'argument fondé sur la
politique selon lequel des détenus ne devraient pas purger une
peine d'emprisonnement dans des pénitenciers fédéraux sous la
menace d'être arrêtés dès leur mise en liberté, c'est au Parle-
ment qu'il revient de remédier à cette situation.
L'absence de mention des lois ou des peines provinciales au
paragraphe 659(2) indique que le Parlement n'avait pas l'inten-
tion d'étendre l'application de cette mesure législative de
manière à viser les peines provinciales. La décision Bedard c.
Service correctionnel du Canada, [1984] 1 C.F. 193 (1'» inst.)
devrait être suivie. On ne peut être d'accord avec la décision
subséquente Bedard c. Directeur du Centre de Détention de
Montréal (jugement en date du 2 novembre 1983, Cour supé-
rieure du Québec, 500-36-525-835, non publié).
Aucune autre disposition législative ne permet d'interpréter
le paragraphe 659(2) comme le propose le demandeur. Le
paragraphe 7(1) de la Loi sur la libération conditionnelle de
détenus mentionne une peine imposée en vertu des «dispositions
d'une loi de la législature d'une province» qui doit être purgée
«concurremment» ou «immédiatement après» la peine d'empri-
sonnement à l'égard de laquelle la Commission a compétence
exclusive. L'article 7 n'est d'aucune utilité au demandeur parce
que le paragraphe 659(2) ne mentionne nullement les disposi
tions d'une loi de la législature d'une province et parce que le
paragraphe 7(2) exige que le paragraphe 659(2) soit adopté
dans une mesure législative provinciale avant qu'il n'entre en
vigueur dans une province. Bien que l'utilisation des termes
«concurremment» et «immédiatement après l'expiration» au
paragraphe 7(1) sous-entend que les peines provinciales peu-
vent être purgées dans des pénitenciers fédéraux, le paragraphe
659(2) n'arrive pas à un tel résultat. En vertu du paragraphe
20(1) de la Loi sur la libération conditionnelle de détenus et
d'une interprétation claire du paragraphe 659(2) du Code
criminel, le détenu en libération conditionnelle d'un pénitencier
qui est condamné à purger une peine d'emprisonnement dans
une prison provinciale et qui voit ensuite sa libération condi-
tionnelle révoquée, doit alors être transféré au pénitencier. Cela
doit aussi être corrigé par une mesure législative. Le paragra-
phe 659(4) ne mentionne pas les peines provinciales et entraîne
les mêmes difficultés d'interprétation que le paragraphe 659(2).
Une modification du paragraphe 659(2) qui permettrait de
viser les peines provinciales constituerait une mesure législative
fédérale valide en matière de droit criminel ou de pénitenciers
qui n'aurait qu'un effet accessoire sur les pouvoirs provinciaux
en matière d'imposition de peines à l'égard d'infractions provin-
ciales et en matière de prisons. Une telle modification serait
semblable aux ordonnances de dédommagement aux victimes
que prévoit l'article 653 du Code criminel qui a été jugé valide
même si l'octroi de dommages-intérêts est habituellement une
question provinciale relative à la propriété et aux droits civils.
Le paragraphe 27(2) de la Loi d'interprétation permet que
les dispositions du Code criminel s'appliquent aux actes crimi-
nels et aux infractions punissables sur déclaration sommaire de
culpabilité créés par d'autres lois fédérales mais, si on le
rapproche de la définition de «texte législatif» à l'article 2, il ne
s'applique pas aux infractions provinciales. Cela sous-entend
que le Parlement fédéral et les assemblées législatives des
provinces n'ont pas l'intention de légiférer d'une manière qui
déroge au partage constitutionnel de leur compétence.
Le Code criminel, y compris le paragraphe 659(2), traite
seulement du droit criminel et non des infractions provinciales.
L'argument du demandeur qui porte sur les systèmes relatifs
aux infractions fédérales et provinciales qui ont une action
réciproque est sans espoir compte tenu du paragraphe 7(2) de
la Loi sur la libération conditionnelle de détenus. En prescri-
vant un pouvoir additionnel pour la Commission des libérations
conditionnelles le paragraphe 7(1) démontre que les infractions
provinciales sont tout à fait distinctes. Même ce pouvoir addi-
tionnel ne peut être accordé que si une assemblée législative
provinciale le permet. Le Parlement évitait toute indication
d'empiétement sur un pouvoir législatif provincial.
JURISPRUDENCE
DÉCISION SUIVIE:
Bedard c. Service correctionnel du Canada, [1984] 1
C.F. 193 (1"» inst.).
DÉCISION ÉCARTÉE:
Bedard c. Directeur du Centre de Détention de Montréal
(jugement en date du 2 novembre 1983, Cour supérieure
du Québec, 500-36-525-835, non publié).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Re Dinardo and The Queen (1982), 67 C.C.C. (2d) 505
(C.A. Ont.); In re New Brunswick Penitentiary (1880),
[1875-1906] Cout. S.C. 24; Municipalité régionale de
Peel c. MacKenzie et autre, [ 1982] 2 R.C.S. 9.
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Durand c. Forget (1980), 24 C.R. (3d) 119 (C.S. Qué.);
Canadian Pioneer Management Ltd. et autres c. Conseil
des relations du travail de la Saskatchewan et autres,
[1980] 1 R.C.S. 433.
DÉCISIONS CITÉES:
Paul c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 621; R. v. Parisien
(1971), 3 C.C.C. (2d) 433 (C.A.C.-B.); R. v. Garcia and
Silva, [1970] 3 C.C.C. 124 (C.A. Ont.); R. v. Roy
(1978), 45 C.C.C. (2d) 193 (C.A. Ont.); R. v. T.W.; R. v.
S., [1981] 1 W.W.R. 181 (C.A.C.-B.); Marcotte c. Sous-
procureur général du Canada et autre, [1976] 1 R.C.S.
108; Turcotte c. La Reine, [1970] R.C.S. 843; Munro v.
National Capital Commission, [1966] R.C.S. 663; Car
nation Company Limited v. Quebec Agricultural Marke
ting Board et al., [1968] R.C.S. 238; Caloil Inc. c.
Procureur général du Canada, [1971] R.C.S. 543; Pro-
cureur général (Qué.) c. Kellog's Co. of Canada et autre,
[1978] 2 R.C.S. 211; Renvoi relatif à la Upper Churchill
Water Rights Reversion Act, [ 1984] 1 R.C.S. 297; R. c.
Thomas Fuller Construction Co. (1985) Ltd. et autre,
[1980] 1 R.C.S. 695; Fowler c. La Reine, [1980] 2
R.C.S. 213; R. c. Zelensky, [1978] 2 R.C.S. 940; A.G.
for Canada v. A.G. for Nova Scotia, [1951] R.C.S. 31;
Proprietary Articles Trade Association v. Attorney -
General for Canada, [1931 ] A.C. 310 (P.C.).
AVOCATS:
Ronald R. Price, c.r. pour le demandeur.
Susan D. Clarke pour les défendeurs.
PROCUREURS:
Ronald R. Price, c.r., Kingston (Ontario),
pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour
les défendeurs.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE ROULEAU: La présente action vise à
obtenir un jugement déclaratoire portant que tous
les mandats de dépôt non exécutés qui visent le
demandeur et qui découlent de peines imposées en
vertu de lois provinciales et de règlements munici-
paux soient reçus par le Service correctionnel du
Canada et dûment exécutés. En résumé, le deman-
deur désire purger toutes les peines d'emprisonne-
ment qui lui ont été imposées en vertu de lois
provinciales dans un pénitencier fédéral en même
temps que les peines de pénitencier qu'il purge
actuellement. Il demande également un jugement
déclaratoire portant que les peines, qui sont impo
sées en vertu de lois provinciales et qui découlent
du défaut de payer des amendes municipales, tota-
lisant 85 jours, soient purgées concurremment avec
sa peine de pénitencier actuelle à compter du 22
mars 1984, c.-à-d. la date à laquelle les mandats
de dépôt non exécutés ont été présentés au Service
correctionnel du Canada pour être exécutés.
I. LES FAITS
Les parties ont présenté un exposé conjoint des
faits que je reproduis ici en omettant seulement les
deux annexes.
[TRADUCTION] EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS
1. Le demandeur est un détenu du pénitencier de Kingston, un
établissement correctionnel administré par le Service correc-
tionnel du Canada, dans la ville de Kingston, comté de Fronte-
nac, dans la province de l'Ontario.
2. Le défendeur procureur général du Canada est le représen-
tant de la Couronne du chef du Canada, qui agit comme
défendeur dans les actions visant à obtenir un jugement décla-
ratoire intentées en vertu de l'article 18 de la Loi sur la Cour
fédérale, S.R.C. 1970 (2» Supp.), chap. 10 contre un «office,
commission ou autre tribunal» définis à l'article 2 de cette Loi.
3. Le défendeur solliciteur général du Canada est chargé, en
vertu de la Loi sur le ministère du Solliciteur général, S.R.C.
1970, chap. S-12, d'assurer la gestion et la direction du minis-
tère du Solliciteur général et du Service correctionnel du
Canada (auparavant le Service national des libérations condi-
tionnelles et le Service canadien des pénitenciers) et, en vertu
de la Loi, les devoirs, pouvoirs et fonctions du Solliciteur
général du Canada visent et comprennent toutes les questions
relatives aux pénitenciers et aux libérations conditionnelles qui
sont du ressort du Parlement du Canada et que les lois n'attri-
buent pas à quelque autre ministère, département, direction ou
organisme du gouvernement du Canada.
4. Le défendeur commissaire aux services correctionnels est
nommé par le gouverneur en conseil en vertu du pouvoir
conféré par la Loi sur les pénitenciers, S.R.C. 1970, chap. P-6,
et modifications, et conformément à la Loi sur les pénitenciers
et sous la direction du solliciteur général du Canada, est chargé
de la surveillance et de la gestion du Service correctionnel du
Canada et de toutes les questions qui s'y rattachent.
5. Les responsabilités générales du solliciteur général et du
commissaire aux services correctionnels comprennent la gestion
et la surveillance des fonctionnaires qui calculent les peines des
détenus condamnés ou envoyés aux pénitenciers administrés par
le Service correctionnel du Canada. Au pénitencier de Kings-
ton, les décisions relatives aux peines des détenus sont prises
par un fonctionnaire du Service correctionnel du Canada appelé
le préposé à la gestion des peines.
6. Le 31 janvier 1980 le demandeur a été condamné dans la
municipalité du Toronto métropolitain à des peines d'emprison-
nement totalisant douze (12) ans par suite de déclarations de
culpabilité en vertu du Code criminel, S.R.C. 1970, chap. C-34,
peines qu'il purge maintenant au pénitencier de Kingston.
7. Le demandeur a été envoyé au pénitencier en vertu d'un
certificat de la sentence dont une copie est jointe à titre
d'annexe «A», qui a été délivré par un juge de la Cour suprême
de l'Ontario.
8. En plus des peines d'emprisonnement visées au paragraphe 6,
le demandeur fait l'objet de trente-deux (32) mandats de dépôt
relatifs à des infractions provinciales en matière de contraven
tions au règlement municipal sur le stationnement dans la ville
de Toronto, dont des copies sont jointes à l'annexe «B». Ces
mandats portent sur des peines d'emprisonnement totalisant
quatre-vingt-cinq (85) jours. Vingt-quatre de ces peines (totali-
sant 66 jours) ont été infligées par un juge de paix avant la date
de la détermination de la peine en vertu du Code criminel, le 31
janvier 1980; huit peines (totalisant 19 jours) ont été infligées
après cette date.
9. Les mandats de dépôt relatifs aux infractions provinciales
ont été délivrés par un juge de paix et portent sur le défaut de
paiement des amendes.
10. Le 22 mars 1984 ou vers cette date, un agent du Service de
police de Kingston s'est rendu au pénitencier de Kingston avec
les trente-deux (32) mandats de dépôt prévoyant l'emprisonne-
ment du demandeur relativement à ses infractions provinciales
et a cherché à exécuter ces mandats.
11. Les fonctionnaires du Service correctionnel du Canada au
pénitencier de Kingston ont refusé d'accepter les trente-deux
mandats de dépôt qu'on leur a présentés.
II. LES QUESTIONS EN LITIGE
Les questions en litige en l'espèce sont les sui-
vantes: (1) Le paragraphe 659(2) du Code crimi-
nel, S.R.C. 1970, chap. C-34 [mod. par S.C. 1974-
75-76, chap. 93, art. 79], exige-t-il que le Service
correctionnel du Canada accepte et exécute les
mandats de dépôt qui découlent de peines de moins
de deux ans infligées à une personne relativement
à des infractions à des lois provinciales, qui, au
moment où les mandats de dépôt sont présentés,
purge une peine d'emprisonnement dans un péni-
tencier fédéral? En résumé, il s'agit de savoir si le
paragraphe 659(2) s'applique à des infractions
provinciales. (2) Si l'on répond à la question (1)
par l'affirmative, il faut se demander si, du point
de vue constitutionnel, le paragraphe 659(2) cons-
titue un exercice valide des pouvoirs législatifs
fédéraux. (3) Finalement, si l'on répond par l'affir-
mative aux deux questions précédentes, il faut se
demander si les peines relatives aux infractions
provinciales devraient être purgées de façon consé-
cutive ou concurrente par rapport aux peines de
pénitencier actuelles du demandeur relatives à des
déclarations de culpabilité en vertu du Code cri-
minel. Il faut également examiner l'effet sur les
réductions de peines méritées, la libération sous
surveillance obligatoire et sur la libération
conditionnelle.
III. LES TEXTES LÉGISLATIFS
L'action du demandeur est principalement
fondée sur le paragraphe 659(2) du Code criminel.
Je reproduis ici au complet l'article 659 [mod. par
S.C. 1974-75-76, chap. 93, art. 79; 1976-77, chap.
53, art. 13] pour qu'on voit bien le contexte:
659. (1) Sauf lorsqu'il y est autrement pourvu, une personne
qui est condamnée à l'emprisonnement
a) à perpétuité,
b) pour une durée de deux ans ou plus, ou
c) pour deux périodes ou plus de moins de deux ans chacune,
à purger l'une après l'autre et dont la durée totale est de deux
ans ou plus,
doit être condamnée à l'emprisonnement dans un pénitencier.
(2) Lorsqu'une personne condamnée à l'emprisonnement
dans un pénitencier est, avant l'expiration de cette sentence,
condamnée à un emprisonnement de moins de deux ans, elle
doit être condamnée et purger cette dernière sentence dans un
pénitencier, mais si la sentence antérieure d'emprisonnement
dans un pénitencier est annulée elle doit purger l'autre confor-
mément au paragraphe (3).
(3) Lorsqu'une personne est condamnée à l'emprisonnement
et qu'il n'est pas requis de la condamner comme le prévoit le
paragraphe (1) ou (2), elle doit, à moins que la loi ne prescrive
une prison spéciale, être condamnée à l'emprisonnement dans
une prison ou autre lieu de détention de la province où elle est
déclarée coupable, autre qu'un pénitencier, où la sentence
d'emprisonnement peut être légalement exécutée.
(4) Lorsqu'une personne est condamnée à l'emprisonnement
dans un pénitencier pendant qu'elle est légalement emprisonnée
dans un autre endroit qu'un pénitencier, elle doit, sauf lorsqu'il
y est autrement pourvu, être envoyée immédiatement au péni-
tencier et y purger la partie inexpirée de la période d'emprison-
nement qu'elle purgeait lorsqu'elle a été condamnée au péniten-
cier, ainsi que la période d'emprisonnement pour laquelle elle a
été condamnée au pénitencier.
(5) Lorsque, à un moment quelconque, une personne qui est
emprisonnée dans une prison ou un lieu de détention autre
qu'un pénitencier est condamnée à purger, l'une après l'autre,
deux ou plusieurs périodes d'emprisonnement, chacune de
moins de deux ans, et que l'ensemble des parties non expirées
de ces périodes à ce moment est de deux ans ou plus, elle doit
être transférée dans un pénitencier pour purger ces périodes;
mais si l'une ou plusieurs de ces périodes sont annulées et si
l'ensemble des parties non expirées de la ou des périodes qui
restaient le jour où la personne a été transférée en vertu du
présent article était de moins de deux ans, elle doit purger cette
période ou ces périodes en conformité du paragraphe (3).
(6) Aux fins du présent article, lorsqu'une personne est
condamnée à l'emprisonnement pour une période déterminée
suivie d'une période indéterminée, une telle sentence est censée
être pour une période de moins de deux ans et seule la période
déterminée de cette sentence doit être considérée pour détermi-
ner si la personne sera condamnée à l'emprisonnement dans un
pénitencier ou sera envoyée ou transférée dans un pénitencier
en vertu du paragraphe (5).
(6.1) Lorsque, avant ou après l'entrée en vigueur du présent
paragraphe, une personne a été condamnée à l'emprisonnement,
envoyée ou transférée dans un pénitencier, autrement qu'en
vertu d'un accord conclu conformément au paragraphe 15(1)
de la Loi sur les pénitenciers, toute partie indéterminée de sa
sentence est, à toutes fins, censée ne pas avoir été imposée.
(7) Pour l'application du paragraphe (3), le terme (péniten-
cier» ne comprend pas, avant une date à fixer par proclamation
du gouverneur en conseil, le pénitencier mentionné à l'article 82
de la Loi sur les pénitenciers, chapitre 206 des Statuts revisés
du Canada de 1952.
Certaines autres dispositions législatives citées
par les parties dans leur argumentation seront
reproduites au besoin.
IV. LES ARGUMENTS DU DEMANDEUR
L'avocat du demandeur a d'abord admis qu'il y
avait un conflit entre la décision récente du juge
Muldoon, Bedard c. Service correctionnel du
Canada, [1984] 1 C.F. 193 (ire inst.), et Bedard c.
Directeur du Centre de Détention de Montréal,
une décision subséquente de la Cour supérieure du
Québec concernant le même demandeur (jugement
inédit, 500-36-525-835, le 2 novembre 1983). On
m'incite à adopter la position prise par la Cour
supérieure du Québec et également à suivre l'opi-
nion incidente émise dans la décision Durand c.
Forget (1980), 24 C.R. (3d) 119 (C.S. Qué.),
selon laquelle le paragraphe 659(2) permet que des
mandats provinciaux soient reçus dans des péniten-
ciers fédéraux.
L'avocat du demandeur a ensuite longuement
présenté un argument de principe allant dans le
sens de son interprétation du paragraphe 659(2). Il
a déclaré à plusieurs reprises que ces considéra-
tions de principe n'appuient que les arguments du
demandeur fondés sur le droit et ne sont pas
invoquées directement. Le point central de cet
argument de principe est que, lorsque cela peut
être évité, aucun mandat de dépôt ne devrait être
en vigueur contre un prisonnier au moment de sa
mise en liberté. Il dit que la menace d'une nouvelle
arrestation et d'une autre incarcération qui
découle de mandats de dépôt en vigueur provoque
un relâchement de la discipline des prisonniers,
empêche la réinsertion sociale et d'une manière
générale est contraire aux bonnes pratiques carcé-
rales. À l'appui de cette proposition, l'avocat du
demandeur a cité un certain nombre d'arrêts, y
compris: Paul c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 621;
R. v. Parisien (1971), 3 C.C.C. (2d) 433
(C.A.C.-B.); et R. v. Garcia and Silva, [ 1970] 3
C.C.C. 124 (C.A. Ont.).
La décision de la Cour supérieure du Québec
susmentionnée, Bedard c. Directeur du Centre de
Détention de Montréal, constitue le principal fon-
dement juridique des arguments du demandeur.
L'avocat a reconnu que la question avait été atten-
tivement étudiée dans Bedard c. Service correc-
tionnel du Canada, mais soutient que tous les
arguments en faveur de la position de son client
n'ont pas été présentés au juge Muldoon dans cette
affaire.
Le premier argument présenté par l'avocat du
demandeur porte que les infractions fédérales et
provinciales et les peines prévues pour celles-ci ne
constituent pas deux systèmes entièrement diffé-
rents qui ne sont pas reliés entre eux. À l'appui de
cette proposition il cite le paragraphe 7(1) de la
Loi sur la libération conditionnelle de détenus,
S.R.C. 1970, chap. P-2:
7. (1) Lorsque, dans le cas d'une personne condamnée à une
période d'emprisonnement concernant laquelle la Commission
est exclusivement compétente pour accorder, refuser d'octroyer
ou révoquer la libération conditionnelle, cette personne est, au
moment de la sentence ou en tout temps pendant cette période
d'emprisonnement, condamnée à une période d'emprisonne-
ment infligée en vertu des dispositions d'une loi de la législature
d'une province, et que cette dernière période doit être purgée
soit concurremment avec la période d'emprisonnement concer-
nant laquelle la Commission est exclusivement compétente, soit
immédiatement après l'expiration de cette période, la Commis
sion a, sous réserve des exceptions de la présente loi, compé-
tence exclusive et discrétion absolue pour accorder, refuser
d'octroyer ou révoquer la libération conditionnelle en rapport
avec les deux périodes d'emprisonnement.
(2) Le présent article entrera en vigueur en ce qui concerne
une province à une date qui sera fixée par proclamation faite
après l'adoption, par la législature de la province nommée dans
la proclamation, d'une loi autorisant la Commission à exercer
la juridiction supplémentaire visée au paragraphe (1).
L'avocat du demandeur soutient également que
les termes «concurremment» et «immédiatement
après l'expiration» indiquent que le Parlement
envisage la possibilité que les peines d'emprisonne-
ment prévues pour des infractions provinciales
puissent être purgées dans des pénitenciers fédé-
raux. Par déduction, il soutient que le paragraphe
659(2) prévoit également que les peines provincia-
les peuvent être purgées dans les pénitenciers
fédéraux.
Le deuxième argument à l'appui de l'interpréta-
tion selon laquelle le paragraphe 659(2) vise les
peines provinciales est qu'un détenu mis en liberté
conditionnelle d'un pénitencier qui commet par la
suite une infraction provinciale à l'égard de
laquelle il est condamné à une période d'incarcéra-
tion et dont la libération conditionnelle est révo-
quée doit être envoyé dans un pénitencier fédéral.
A l'appui de cette proposition l'avocat du deman-
deur se fonde sur l'article 20 de la Loi sur la
libération conditionnelle de détenus' et sur l'arrêt
' S.R.C. 1970, chap. P-2, mod. par S.C. 1976-77, chap. 53,
art. 31. Le paragraphe pertinent est 20(1) qui prévoit:
20. (1) Sur révocation de leur libération conditionnelle, les
détenus doivent être incarcérés soit au lieu de détention d'où
ils avaient été libérés lorsqu'elle leur avait été accordée, soit
au lieu qui lui correspond dans la division territoriale où ils
sont arrêtés.
de la Cour d'appel de l'Ontario dans Re Dinardo
and The Queen (1982), 67 C.C.C. (2d) 505. Le
demandeur est d'avis que pour éviter qu'un détenu
soit expédié d'une prison à un pénitencier lorsque
sa libération conditionnelle est révoquée, le para-
graphe 659(2) du Code criminel a automatique-
ment l'effet de prévoir que la nouvelle peine pro-
vinciale sera purgée dans la même institution d'où
le détenu a été libéré sous condition. L'avocat
admet que l'affaire Re Dinardo ne portait pas sur
une infraction provinciale, mais plutôt sur une
infraction au Code criminel à l'égard de laquelle
une peine de 18 mois avait été infligée avec un
mandat de dépôt à une institution provinciale. En
outre, la libération conditionnelle n'avait pas été
révoquée dans cette affaire.
De même, l'avocat soutient qu'une personne qui
purge une peine d'emprisonnement dans une prison
provinciale (y compris, dit-il, une peine d'empri-
sonnement prévue pour une infraction provinciale)
qui est condamnée à une peine d'emprisonnement
de deux ans ou plus en vertu du Code criminel
doit, aux termes du paragraphe 659(4), être
envoyée dans un pénitencier fédéral. L'avocat du
demandeur prétend que ce qui reste de la peine
provinciale doit également être purgé au péniten-
cier de façon concurrente ou consécutive. Cette
conséquence serait la seule possible parce que le
Code criminel ne contient aucune disposition pré-
voyant le retour à une prison provinciale à la fin de
la peine d'emprisonnement de deux ans ou plus. En
outre, l'avocat soutient que si les deux peines
d'emprisonnement ne sont pas purgées au péniten-
cier, il y aurait une perte de réduction de peine
méritée et une certaine confusion en matière de
surveillance obligatoire et de libération condition-
nelle. Dans ces circonstances, il affirme que la
conséquence appropriée serait l'application inté-
grale des dispositions de la Loi sur la libération
conditionnelle de détenus aux peines fédérales et
provinciales.
L'avocat a conclu cette partie de son argumen
tation en disant qu'il y a de bons motifs de principe
et un certain nombre d'indices législatifs qui
appuient l'opinion selon laquelle le paragraphe
659(2) comprend les peines prévues pour les
infractions provinciales. Il soutient que le libellé du
paragraphe est suffisamment large pour appuyer
cette opinion et que l'arrêt Paul c. La Reine
(précité) aux pages 662 à 665, appuie la proposi-
tion selon laquelle, en interprétant le Code crimi-
nel, la Cour devrait tenir compte du but global des
dispositions en question.
L'avocat du demandeur, après avoir conclu que
le paragraphe 659(2) vise les peines prévues par les
lois provinciales, a alors brièvement discuté de la
question constitutionnelle. Il adopte la position
selon laquelle le paragraphe 659(2) constitue un
exercice valide des pouvoirs du gouvernement fédé-
ral en matière de droit pénal et de pénitenciers.
À l'appui de cette opinion, il a mentionné l'arrêt
Canadian Pioneer Management Ltd. et autres c.
Conseil des relations du travail de la Saskatche-
wan et autres, [ 1980] 1 R.C.S. 433. Cet arrêt
portait essentiellement sur la question de savoir si
une compagnie fiduciaire et une compagnie d'assu-
rances étaient assujetties au droit provincial en
matière de relations de travail ou relevaient plutôt
de la compétence du gouvernement fédéral à
l'égard des banques. L'avocat du demandeur a
mentionné en particulier une opinion incidente du
juge Beetz (qui a écrit en son nom et pour cinq
autres juges) indiquant que la ligne de démarca-
tion entre la compétence du gouvernement fédéral
et celle des provinces est en partie déterminée par
la législation fédérale sur le sujet. Le passage en
question aux pages 468 et 469 est le suivant:
Il n'y a qu'une seule objection sérieuse à la méthode institu-
tionnelle. Elle est fondée sur l'exclusivité du pouvoir législatif
fédéral sur les «banques» et «l'incorporation des banques» et elle
a été élevée par l'avocat du procureur général du Canada. Il a
prétendu que la compétence législative provinciale de même
que l'étendue et l'applicabilité de la loi provinciale ne pouvaient
dépendre de l'omission du Parlement de légiférer jusqu'à la
limite de son pouvoir exclusif. Il a invoqué les arrêts The Union
Colliery et Commission du Salaire Minimum.
Je ne crois pas que cette objection soit valide en l'espèce.
La compétence législative comporte certains pouvoirs de
définition qui ne sont pas illimités mais, selon la façon particu-
lière dont on les exerce, peuvent toucher à d'autres domaines de
compétence.
Par exemple, le Parlement a une compétence législative
exclusive sur l'établissement, le maintien et l'administration des
pénitenciers en vertu du par. 91.28 de la Constitution et chaque
province a une compétence législative exclusive sur l'établisse-
ment, l'entretien et l'administration des prisons publiques et des
maisons de réforme dans la province, en vertu du par. 92.6.
Jusqu'à présent, la ligne de démarcation entre les deux semble
dépendre en partie de la législation fédérale, tel l'art. 659 du
Code criminel.
Le statut juridique des Esquimaux du Québec fournit un
autre exemple. Ils ne sont pas des Indiens au sens de la Loi sur
les Indiens, S.R.C. 1970, chap. I-6 par. 4(1), mais ils sont des
Indiens dans l'optique du par. 91.24 de la Constitution: Renvoi
sur la question de savoir si le mot «IndiensN au par. 91.24 de
l'A.A.N.B. comprend les Esquimaux de la province de Québec
([1939] R.C.S. 104). Si le Parlement décidait de les assujettir à
la Loi sur les Indiens, les lois provinciales sur les successions et
les testaments cesseraient de leur être applicables et seraient
remplacées par les dispositions de la Loi sur les Indiens à ce
sujet.
Le Parlement ayant choisi d'exercer sa compétence sur les
banques et la constitution des banques d'un point de vue
institutionnel plutôt qu'en termes fonctionnels, comme c'était
peut-être inévitable, n'a pas nécessairement épuisé sa compé-
tence exclusive; mais il a laissé aux provinces le soin de régir les
relations du travail dans le cadre des institutions qu'il n'a pas
qualifiées d'entreprises bancaires.
Il a également mentionné le renvoi constitution-
nel In re New Brunswick Penitentiary (1880),
[1875-1906] Cout. S.C. 24. Cet arrêt portait sur
une prétention du gouvernement provincial selon
laquelle la loi fédérale postérieure à la Confédéra-
tion qui limitait l'incarcération dans les péniten-
ciers fédéraux à ceux qui purgeaient des peines
d'emprisonnement de deux ans ou plus plaçait un
fardeau financier inconstitutionnel sur les institu
tions provinciales. Selon l'avocat du demandeur,
l'arrêt appuie la proposition qu'il est loisible au
Parlement, en vertu des paragraphes 91(27) et
(28) de la Loi constitutionnelle de 1867 [30 & 31
Vict., chap. 3 (R.-U.) [S.R.C. 1970, Appendice II,
n° 5] (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada,
1982, chap. 11 (R.-U.) annexe de la Loi constitu-
tionnelle de 1982, n° 1)], de déterminer qui sera
reçu dans les pénitenciers fédéraux et que ce pou-
voir ne peut être limité par une loi provinciale.
L'avocat du demandeur a conclu ses arguments
relatifs à la question constitutionnelle en mention-
nant les arrêts R. v. Roy (1978), 45 C.C.C. (2d)
193 (C.A. Ont.) et R. v. T.W.; R. v. S., [1981] 1
W.W.R. 181 (C.A.C.-B.). Ces arrêts appuient la
proposition que les lois fédérales et provinciales
dans le domaine de l'incarcération sont nécessaire-
ment complexes et reliées entre elles et qu'il peut
exister une législation complémentaire sans que ne
soient violées les sphères de compétence législative
fédérale et provinciale.
Finalement, on incite la Cour, compte tenu de
l'ambiguïté de la question, à adopter l'interpréta-
tion du paragraphe 659(2) qui est la plus favorable
à la liberté de la personne visée, comme le propo-
sent les arrêts Marcotte c. Sous-procureur général
du Canada et autre, [ 1976] 1 R.C.S. 108, à la
page 115 et Turcotte c. La Reine, [1970] R.C.S.
843.
V. LES ARGUMENTS DES DÉFENDEURS
L'avocate a commencé par répondre aux argu
ments de principe présentés pour le compte du
demandeur. Elle a reconnu que les assemblées
législatives et les tribunaux se préoccupent de la
question afin d'éviter que ne se produisent des
situations dans lesquelles le détenu mis en liberté
d'un pénitencier serait immédiatement arrêté de
nouveau lorsqu'une autre sentence serait suspen-
due au-dessus de sa tête. L'avocate ajoute, en
mentionnant certaines décisions citées dans la
décision Durand c. Forget (précitée) et certaines
observations du juge Lamer dans l'arrêt Paul c. La
Reine (précité), qu'on se préoccupe beaucoup de la
certitude en matière de détermination de la peine
et qu'on accorde beaucoup d'importance à la
période totale d'incarcération.
Essentiellement, l'argument des défendeurs
porte que, compte tenu des termes du paragraphe
659(2) et des principes généraux de droit constitu-
tionnel, l'interprétation correcte du paragraphe n'a
pas pour effet de l'étendre aux peines infligées en
vertu des lois provinciales.
Le premier argument des défendeurs est que le
paragraphe 659(2) ne mentionne pas les infrac
tions provinciales et que le Parlement les aurait
mentionnées spécifiquement si telle avait été son
intention. L'avocate soutient que l'article 7 de la
Loi sur la libération conditionnelle de détenus
constitue un cas différent parce que les infractions
provinciales y sont mentionnées spécifiquement. À
l'appui de son interprétation du paragraphe
659(2), l'avocate cite le paragraphe 27(2) de la
Loi d'interprétation, S.R.C. 1970, chap. I-23.
D'une manière générale, le paragraphe 27(2)
permet que les dispositions du Code criminel s'ap-
pliquent aux actes criminels et aux infractions
punissables sur déclaration sommaire de culpabi-
lité créés par d'autres loi fédérales mais, si on le
rapproche de la définition de «texte législatif» à
l'article 2 de la Loi d'interprétation, il ne s'appli-
que pas aux infractions provinciales.
Le deuxième argument de l'avocate des défen-
deurs porte que le paragraphe 659(2) ne men-
tionne pas les infractions provinciales parce que,
s'il le faisait, il y aurait un risque d'empiétement
sur le pouvoir provincial exclusif en matière d'im-
position des peines pour la violation d'une loi de la
province (Loi constitutionnelle de 1867, paragra-
phe 92(15)). Se fondant sur le principe que les lois
doivent être interprétées de manière qu'elles soient
constitutionnellement valides, elle soutient que le
paragraphe 659(2) doit recevoir une interprétation
qui ne l'étend pas aux infractions provinciales.
Toutefois elle dit qu'il pourrait y avoir collabora
tion fédérale-provinciale qui permettrait que des
peines provinciales soient purgées dans des péni-
tenciers fédéraux.
À l'appui de cette opinion, on incite cette Cour à
suivre la décision du juge Muldoon, Bedard c.
Service correctionnel du Canada (précitée), et à
conclure que ni le paragraphe 659(2) du Code
criminel ni aucun autre texte de loi n'imposent aux
fonctionnaires des pénitenciers fédéraux une obli
gation de recevoir et d'exécuter des mandats de
dépôt relatifs à des infractions provinciales. L'at-
tention de la Cour est particulièrement dirigée sur
les observations aux pages 198 et 199 de cette
décision qui, dit-on, indiquent qu'un certain genre
de collaboration provinciale ou de délégation serait
nécessaire pour permettre que le paragraphe
659(2) s'applique aux infractions provinciales.
Les défendeurs ont terminé leur argumentation
par une analyse de deux décisions qui vont à
l'encontre de leur position. Ils soutiennent que ces
décisions ne sont pas fondées sur un raisonnement
valide et ne devraient pas être suivies.
Traitant d'abord de la décision Durand c. Forget
(précitée), l'avocate des défendeurs a soutenu que
le désir d'éviter un retard à purger une peine
relative à une infraction provinciale a amené la
Cour dans cette affaire à considérer que le para-
graphe 659(2) s'appliquait aux peines provinciales.
Elle souligne qu'on a simplement déclaré que cette
interprétation du paragraphe 659(2) est intra vires
du Parlement, sans s'appuyer sur aucun précédent
ou argument constitutionnel (ibid., à la page 124).
L'argument des défendeurs porte finalement sur
la décision Bedard c. Directeur du Centre de
Détention (précitée). Ils incitent cette Cour à reje-
ter cette décision parce que l'interprétation, à la
page 2, du paragraphe 659(2) qu'on dit «assez
souple pour permettre de purger dans une institu
tion fédérale toutes peines inférieures à 2 ans» n'est
pas motivée ou fondée. On a en outre soutenu que
la crainte exprimée par le juge selon laquelle des
violations mineures de règlements municipaux
pourront prolonger une période d'emprisonnement
dans un pénitencier n'est pas fondée parce que le
paragraphe 659(2), s'il ne s'applique pas aux
infractions provinciales, n'aurait pas pour effet de
prolonger une période d'emprisonnement dans un
pénitencier.
En réponse aux arguments des défendeurs, l'avo-
cat du demandeur a déclaré que le paragraphe
3(3) de la Loi d'interprétation, S.R.C. 1970, chap.
I-23, protège les règles d'interprétation qui ne sont
pas incompatibles. Cette Cour est alors invitée à
adopter l'opinion (Re Dinardo, précité) selon
laquelle le paragraphe 659(2) a le même objet que
certaines dispositions de la Loi sur la libération
conditionnelle de détenus et que le paragraphe
659(4) du Code criminel, et selon laquelle ces
textes législatifs devraient être considérés comme
un ensemble complet exigeant une interprétation
mutuellement compatible. Il soutient qu'une telle
interprétation entraînerait la conclusion que le
paragraphe 659(2) s'applique aux peines provin-
ciales. Toute autre interprétation serait rigide et
inapplicable.
VI. DÉCISION
Après avoir examiné attentivement les argu
ments et la jurisprudence présentés par les deux
parties, je suis arrivé à la conclusion que le para-
graphe 659(2) ne peut être considéré, dans sa
formulation actuelle, comme applicable aux peines
infligées en vertu de lois provinciales. Ce n'est pas
sans un certain regret que je suis parvenu à cette
conclusion, spécialement si l'on considère l'argu-
ment convaincant de principe présenté par l'avocat
du demandeur selon lequel dans la mesure du
possible les détenus ne devraient pas purger une
peine d'emprisonnement dans des pénitenciers
fédéraux sous la menace d'être mis sous garde dès
leur mise en liberté. Toutefois, je n'ai pas été
convaincu que le paragraphe en question pourrait
recevoir l'interprétation que propose le demandeur.
C'est au Parlement qu'il revient de remédier à
cette situation s'il juge à propos de le faire.
Je suis arrivé à cette conclusion principalement
en me fondant sur une simple lecture du paragra-
phe. Le paragraphe 659(2) ne mentionne pas les
lois provinciales ou les peines qui sont infligées en
vertu de celles-ci. Je crois que le Parlement les
aurait mentionnées s'il avait eu l'intention d'éten-
dre l'application de cette mesure législative de
manière à viser les peines provinciales dans certai-
nes circonstances. A cet égard, je souscris à la
décision du juge Muldoon, Bedard c. Service cor-
rectionnel du Canada (précitée). Je ne crois pas
que le fait qu'un mandamus était demandé dans
cette affaire-là, alors qu'en l'espèce le demandeur
cherche seulement à obtenir un jugement déclara-
toire, constitue un fondement suffisant pour établir
une distinction entre les deux affaires.
On ne m'a présenté aucune autre disposition
législative qui appuie l'interprétation que le
demandeur donne au paragraphe 659(2). L'avocat
du demandeur a fait un renvoi savant et appro-
fondi à divers articles du Code criminel et à d'au-
tres lois fédérales. Je ferai de brèves observations à
l'égard de certains des arguments que le deman-
deur tire de ces articles.
L'article 7 de la Loi sur la libération condition-
nelle de détenus n'est, à mon avis, d'aucune utilité
au demandeur. Le paragraphe 7(1) mentionne spé-
cifiquement les «dispositions d'une loi de la législa-
ture d'une province» et ces termes sont manifeste-
ment absents du paragraphe 659(2). En outre, le
paragraphe 7(2) de la Loi sur la libération condi-
tionnelle de détenus, qui n'est pas mentionné par
l'avocat du demandeur, établit une autre distinc
tion entre la disposition de la Loi sur la libération
conditionnelle de détenus et le paragraphe 659(2)
du Code criminel en disposant qu'il n'entrera en
vigueur dans une province donnée qu'après que
celle-ci aura adopté une mesure législative appro-
priée. Je ferai d'autres observations au sujet des
questions constitutionnelles dans cette affaire.
L'avocat du demandeur souligne également les
termes «concurremment» et «immédiatement après
l'expiration» dans le paragraphe 7(1) de la Loi sur
la libération conditionnelle des détenus. Ces
termes semblent en fait sous-entendre que les
peines provinciales peuvent être purgées dans des
pénitenciers fédéraux; toutefois, je ne crois tou-
jours pas que le paragraphe 659(2) du Code cri-
minel ait un tel résultat.
Il est vrai que le paragraphe 20(1) de la Loi sur
la libération conditionnelle de détenus peut entraî-
ner des conséquences étranges si un détenu en
libération conditionnelle d'un pénitencier est con-
damné à purger une peine d'emprisonnement dans
une prison provinciale et voit ensuite sa libération
conditionnelle révoquée. Suivant le paragraphe
659(2), le détenu devrait alors être renvoyé au
pénitencier. Cette mesure peut sembler constituer
une complication nécessaire du système fédéral,
mais on pourrait également y remédier par une
clarification législative appropriée du paragraphe
659(2).
Le dernier aspect important de l'argumentation
du demandeur porte que le paragraphe 659(4) du
Code criminel constitue une indication selon
laquelle le paragraphe 659(2) devrait être inter-
prété de manière à comprendre les peines infligées
en vertu de lois provinciales. Toutefois, je crois que
le paragraphe 659(4), qui ne mentionne pas les
peines provinciales, énonce simplement de nouveau
les difficultés d'interprétation posées par le para-
graphe 659(2) et n'apporte rien de nouveau.
Donc, en résumé, je suis d'avis de suivre la
décision du juge Muldoon dans Bedard c. Service
correctionnel du Canada (précitée), dans la
mesure où elle conclut que le paragraphe 659(2)
du Code criminel n'a pas pour effet d'autoriser ou
d'obliger les fonctionnaires des pénitenciers fédé-
raux à recevoir et à exécuter les mandats de dépôt
en vigueur contre des détenus qui se trouvent déjà
dans des pénitentiers fédéraux. En vertu de cette
conclusion, je suis obligé d'être en désaccord avec
la décision subséquente Bedard c. Directeur du
Centre de Détention de Montréal (précitée).
Compte tenu de la conclusion à laquelle je suis
arrivé, il n'est pas strictement nécessaire que je
traite des deux autres questions soulevées dans
cette affaire. Toutefois, je voudrais faire de brèves
observations sur la question du pouvoir constitu-
tionnel du Parlement de modifier le paragraphe
659(2), s'il le juge à propos, de manière à exiger
que les peines infligées en vertu de lois provinciales
à un détenu qui se trouve dans un pénitencier
fédéral soient purgées dans le système péniten-
tiaire fédéral.
Si je peux me permettre, je crois qu'une mesure
législative qui serait libellée de façon appropriée et
qui aurait l'effet que je viens de décrire serait intra
vires du Parlement sans qu'il soit nécessaire
d'avoir une délégation de pouvoirs des provinces.
Toutefois, les motifs qui fondent ma conclusion ne
coïncident pas entièrement avec l'hypothèse avan-
cée par l'avocat du demandeur.
La Loi constitutionnelle de 1867 a doté les deux
ordres de gouvernement de pouvoirs relatifs à la
création d'infractions ainsi qu'à l'imposition et à
l'exécution de peines relatives à ces infractions. Le
Parlement est compétent en matière de droit crimi-
nel (Loi constitutionnelle de 1867, paragraphe
91(27)) et en matière de pénitenciers (paragraphe
91(28)). De même les provinces sont compétentes
en matière d'imposition de peines, y compris l'em-
prisonnement, en vue de faire exécuter les lois
provinciales (paragraphe 92(15)) et en matière de
prisons provinciales (paragraphe 92(6)). D'une
manière générale ces pouvoirs sont exclusifs
(Hogg, Constitutional Law of Canada (1977), aux
pages 95 et 96). Toutefois, cela ne met pas fin au
débat.
Dans son argumentation, l'avocate des défen-
deurs n'a pratiquement pas traité de la question
constitutionnelle et l'avocat du demandeur m'a
incité à partager son opinion quant à la bonne
conclusion, pour cause de raisonnement constitu-
tionnel douteux. Ce n'est pas parce qu'il y a peu de
jurisprudence à l'égard des pouvoirs en matière de
pénitenciers et de prisons qu'il n'existe aucun prin-
cipe constitutionnel applicable.
Une modification du paragraphe 659(2) qui per-
mettrait de viser les peines provinciales constitue-
rait, à mon avis, une mesure législative fédérale
valide en matière de droit criminel et de péniten-
ciers, ou de l'un des deux, qui n'aurait qu'un effet
accessoire sur les pouvoirs provinciaux en matière
d'imposition de peines à l'égard d'infractions pro-
vinciales et en matière de prisons. (Pour une expli
cation de la doctrine du pouvoir accessoire voir:
Munro v. National Capital Commission, [1966]
R.C.S. 663, à la page 671; Carnation Company
Limited v. Quebec Agricultural Marketing Board
et al., [ 1968] R.C.S. 238, aux pages 252 et 253;
Caloil Inc. c. Procureur général du Canada,
[1971] R.C.S. 543, aux pages 549 à 551; Procu-
reur général (Qué.) c. Kellog's Co. of Canada et
autre, [1978] 2 R.C.S. 211, aux pages 222 à 227;
et Renvoi relatif à la Upper Churchill Water
Rights Reversion Act, [1984] 1 R.C.S. 297, la
page 332.) Tant que cet effet sur les pouvoirs
provinciaux sera vraiment nécessaire pour la créa-
tion d'un système de règles cohérent, juste et effi-
cace régissant les peines purgées dans les péniten-
ciers fédéraux, il constituera une mesure législative
fédérale valide (R. c. Thomas Fuller Construction
Co. (1958) Ltd. et autre, [ 1980] 1 R.C.S. 695, la
page 713; Fowler c. La Reine, [1980] 2 R.C.S.
213, la page 226; et Municipalité régionale de
Peel c. MacKenzie et autre, [1982] 2 R.C.S. 9,
aux pages 17 19).
L'arrêt Municipalité régionale de Peel c. Mac-
Kenzie et autre (précité) mérite certaines observa
tions. Dans cet arrêt, le paragraphe 20(2) de la Loi
sur les jeunes délinquants, S.R.C. 1970, chap. J-3
a été jugé inconstitutionnel parce qu'il imposait
une charge financière à une corporation munici-
pale de la province, parce qu'il n'était pas directe-
ment relié à la répression des infractions criminel-
les et d'une manière générale parce qu'il n'était
pas nécessaire pour assurer l'efficacité de l'ensem-
ble du régime législatif fédéral. Par opposition, le
paragraphe 659(2), s'il était modifié pour s'appli-
quer aux peines provinciales, aurait réellement
pour effet d'alléger le fardeau financier des provin
ces, serait directement relié aux peines d'emprison-
nement et aux libérations conditionnelles relatives
à des infractions fédérales et pourrait être consi-
déré comme nécessaire pour assurer la cohérence,
le bon fonctionnement, l'équité et la justice de
l'ensemble du système de répression en matière de
peines fédérales.
À mon avis, la modification du paragraphe
659(2) de manière qu'il vise les peines provinciales
dans certaines circonstances précises aurait plutôt
un effet équivalant à celui qu'ont les ordonnances
de dédommagement aux victimes rendues en vertu
de l'article 653 du Code criminel. Ce régime a été
jugé valide même si l'octroi de dommages-intérêts
est habituellement une question provinciale rela
tive à la propriété et aux droits civils (R. c.
Zelensky, [1978] 2 R.C.S. 940, aux pages 955 à
961).
J'ai dit que, à mon avis, l'avocat du demandeur
est arrivé à la bonne conclusion en matière consti-
tutionnelle en se fondant sur des motifs erronés. Je
voudrais expliquer cette affirmation. Si le passage
que j'ai cité (aux pages 227 et 228 des présents
motifs) de l'arrêt Canadian Pioneer Management
Ltd. et autres c. Conseil des relations du travail
de la Saskatchewan et autres (précité) signifie que
le pouvoir législatif fédéral sur la manière dont les
peines d'emprisonnement sont purgées à l'égard
des infractions provinciales dépend de l'étendue de
la législation fédérale, je crois qu'il est erroné.
L'étendue du pouvoir législatif du gouvernement
fédéral repose sur la bonne interprétation de la Loi
constitutionnelle de 1867. Toutefois, je préfère
dire que l'ensemble du passage est fondé sur le
double aspect de la doctrine et de la prépondérance
fédérale.
Enfin, je voudrais ajouter que l'arrêt In re New
Brunswick Penitentiary (précité) ne mentionne
nullement les infractions provinciales et ne s'appli-
que qu'aux sentences fédérales de moins de deux
ans.
Le paragraphe 27(2) de la Loi d'interprétation
sous-entend qu'il faut considérer que le Parlement
fédéral et les assemblées législatives des provinces
n'ont pas l'intention de légiférer d'une manière qui
déroge au partage constitutionnel de leur compé-
tence.
Le droit criminel et les infractions provinciales
découlent de rubriques séparées et distinctes de
pouvoirs législatifs: le droit criminel, de l'article 91
rubrique 27, et les infractions provinciales, de l'ar-
ticle 92 rubrique 15 de la Loi constitutionnelle de
1867. Un corps législatif ne peut déléguer ses
pouvoirs à l'autre corps législatif ni recevoir un
pouvoir législatif délégué (A.G. for Canada v. A.G.
for Nova Scotia, [1951] R.C.S. 31).
La portée théorique du droit criminel est très
large (Proprietary Articles Trade Association v.
Attorney -General for Canada, [1931] A.C. 310
(P.C.)), mais sa portée pratique est restreinte aux
dispositions de la mesure législative que le Parle-
ment a adoptée, dans les limites de ses pouvoirs à
titre de droit criminel. Le Code criminel, y com-
pris le paragraphe 659(2), est censé ne traiter que
du droit criminel et non des infractions provincia-
les. L'argument qui porte sur les systèmes qui ont
une action réciproque serait un peu plus convain-
cant sans le paragraphe 7(2) de la Loi sur la
libération conditionnelle de détenus. Tel qu'il est
présenté, c'est sans espoir. L'Ontario a-t-elle
adopté une loi envisagée au paragraphe 7(2)? En
fait le paragraphe 7(1) démontre que dans l'état
actuel des choses les infractions provinciales sont
tout à fait distinctes, sinon il ne serait guère
nécessaire de prescrire un pouvoir additionnel pour
la Commission des libérations conditionnelles.
Toutefois, même ce pouvoir additionnel ne peut
être accordé que si une assemblée législative pro-
vinciale le permet. En l'espèce, le Parlement évite
scrupuleusement toute indication d'empiétement
sur un pouvoir législatif provincial évident que
prévoit distinctement l'article 92, rubrique 15.
Le paragraphe 659(2) du Code criminel ne pré-
voit simplement pas ni ne mentionne les peines
d'emprisonnement infligées en vertu d'une loi pro-
vinciale. Il peut très bien y avoir une certaine
dislocation de la libération conditionnelle si une
peine d'emprisonnement provinciale attend le
détenu qui purge une «peine d'emprisonnement
fédérale» lorsqu'il sera mis en liberté, mais il ne
nous appartient pas de légiférer. Ceux qui font les
lois et leurs conseillers se rencontrent chaque
année, si ce n'est plus souvent, dans des conféren-
ces nationales et régionales de procureurs géné-
raux et de sous-ministres. Je suis certain qu'ils sont
au courant du problème.
Dans quelle institution carcérale les mandats de
dépôt provinciaux ordonnent-ils que la peine d'em-
prisonnement soit purgée? Pas dans un pénitencier
fédéral. Un jugement déclaratoire expose le droit
conformément à la Constitution. En vertu de
quelle obligation juridique le commissaire aux ser
vices correctionnels est-il tenu de prendre des
mesures au sujet des mandats provinciaux? En
fait, plus précisément, en vertu de quelle obligation
ou de quel droit peut-il s'occuper d'une question
purement provinciale? Même si la Cour lui
ordonne de recevoir les mandats et de calculer la
«peine d'emprisonnement provinciale», il n'est pas
possible d'ordonner à l'administration provinciale
d'accepter cette situation.
En définitive, le jugement déclaratoire est refusé
et l'action échoue. Chaque partie sera tenue de
payer ses propres dépens. Compte tenu de l'impor-
tance et de la difficulté des questions qui ont été
soulevées, je ne crois pas qu'il soit approprié en
l'espèce d'adjuger les dépens contre le demandeur
qui n'a pas eu gain de cause.
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