A-261-76
Irish Shipping Limited (appelante) (demande-
resse)
c.
La Reine (intimée) (défenderesse)
Cour d'appel, juges Pratte, Hugessen et Stone—
Vancouver, 29 et 30 novembre 1983; Ottawa, 5
janvier 1984.
Droit maritime — Responsabilité de la Couronne — Un
navire ayant à sa barre un pilote inexpérimenté s'est échoué en
empruntant une route recommandée par un ministère fédéral
dans un dispositif de séparation du trafic —1l n'existe pas de
principe général selon lequel la Couronne, lorsqu'elle prend
des mesures pour assurer la sécurité de la navigation d'un
passage, en a «la propriété, l'occupation, la possession ou la
garde» au sens de l'art. 3(1)b) de la Loi sur la responsabilité de
la Couronne — Passage naturel et non artificiel — La preuve
ne permet pas d'établir la négligence dont auraient fait preuve
les préposés de la Couronne au sens de l'art. 3(1)a) — L'appe-
lante soutient que la mise en place du dispositif sans l'instal-
lation d'un phare a créé un danger et que c'est la recomman-
dation d'utiliser le dispositif qui est la cause principale de
l'échouement — Le pilotage d'un navire sur une voie navigable
ne peut être comparé à la conduite d'un véhicule automobile
sur une route — Aucune embûche créée par l'homme — Le
dispositif n'est pas intrinsèquement dangereux — Le pilote a
manqué à la prudence ordinaire — L'absence d'un phare qui
aurait pu être utile n'a pas joué un rôle dans l'échouement —
L'art. 31 de la Loi sur le pilotage rend-elle l'appelante respon-
sable des dommages? — Loi sur la responsabilité de la
Couronne, S.R.C. 1970, chap. C-38, art. 3(1)a),b), 4(2) — Loi
sur le pilotage, S.C. 1970-71-72, chap. 52, art. 31.
Couronne — Responsabilité délictuelle — Echouement d'un
navire alors qu'il empruntait une route recommandée par un
ministère fédéral dans un dispositif de séparation du trafic —
Il n'existe pas de principe général selon lequel la Couronne,
lorsqu'elle prend des mesures pour assurer la sécurité de la
navigation d'un passage, en a «la propriété, l'occupation, la
possession ou la garde» au sens de l'art. 3(1)b) — La preuve ne
permet pas d'établir la négligence dont auraient fait preuve les
préposés de la Couronne au sens de l'art. 3(1)a) — L'appelante
soutient que la mise en place du dispositif sans l'installation
d'un phare a créé un danger et que la recommandation d'utili-
ser le dispositif a été la cause principale de l'échouement —
Aucune embûche créée par l'homme — Le dispositif n'est pas
intrinsèquement dangereux — Le pilote a manqué à la pru
dence ordinaire — L'absence d'un phare qui aurait pu être
utile n'a pas joué un rôle dans l'échouement — La Couronne
a-t-elle fait preuve de négligence en retardant indûment la
mise en œuvre d'une décision de principe? — Loi sur la
responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, chap. C-38, art.
3(l)a),h), 4(2).
Sous les auspices du ministère fédéral des Transports, un
dispositif a été proposé dans le but de séparer les navires se
dirigeant vers l'est des navires se dirigeant vers l'ouest, aux
environs de l'ile Haddington, dans le détroit de Broughton, au
large des côtes de la Colombie-Britannique. En vertu du dispo-
sitif, les navires se dirigeant vers l'est devaient modifier leur
route pour contourner l'île, ce qui comportait une série de
modifications de parcours importantes. Les navires se dirigeant
vers l'ouest devaient continuer d'utiliser la route plus directe
traditionnellement employée par tous les navires.
Préalablement à la mise en place du dispositif, les fonction-
naires du Ministère ont consulté les pilotes locaux. Ceux-ci ont
exprimé des réserves à l'égard du dispositif. L'une de leurs
contre-propositions préconisait l'installation d'un feu sur la rive
de l'île Vancouver à la crique Hyde comme aide à la navigation
vers l'est. En novembre 1970, il a toutefois été convenu lors
d'une réunion à laquelle participaient des pilotes et des repré-
sentants du Ministère, que le dispositif serait adopté pour une
période d'essai d'un an. En avril 1971, le Ministère a accepté la
suggestion relative à la mise en place d'un feu à la crique Hyde.
Toutefois, le feu n'a pas été installé avant mai 1971, date à
laquelle le dispositif a été mis en place comme prévu. Les
navires se dirigeant vers l'est n'étaient pas obligés d'emprunter
la nouvelle route, mais celle-ci était recommandée par le
Ministère.
Le dispositif a été maintenu après l'expiration de la période
d'essai. Il était donc en vigueur la nuit du 24 janvier 1973, mais
ce n'est que plus tard que le feu installé à la crique Hyde est
devenu opérationnel.
Au cours de la nuit susmentionnée, le navire de l'appelante,
qui faisait route vers l'est, se dirigeait vers l'île Haddington. À
la barre se trouvait le capitaine Jones, un pilote inexpérimenté
qui empruntait pour la première fois le détroit de Broughton à
bord d'un navire de haute mer. En partie parce qu'il était pilote
depuis peu de temps, il pensait devoir se conformer aux recom-
mandations du Ministère et il a décidé de suivre la route prévue
dans le dispositif de séparation. Après avoir changé de cap à
quelques occasions, le navire s'est échoué sur la rive de l'île
Haddington.
L'appelante a intenté une action devant la Division de pre-
mière instance afin d'être indemnisée du préjudice qui lui a été
causé. Le juge de première instance a statué que l'échouement
s'était produit parce que le navire avait dévié de sa route et il a
rejeté l'action. Appel a été interjeté de cette décision.
Arrêt: l'appel est rejeté.
Pour avoir gain de cause, l'appelante devait établir la respon-
sabilité délictuelle de la Couronne en démontrant que la cause
tombe sous le coup du paragraphe 3(1) de la Loi sur la
responsabilité de la Couronne.
L'alinéa 3(1)b) n'a aucune application en l'espèce. L'arrêt
Rivard c. La Reine ne pose pas le principe général selon lequel
la Couronne, lorsqu'elle prend des mesures pour assurer la
sécurité de la navigation d'un passage, celui-ci constitue un bien
dont la Couronne a «la propriété, l'occupation, la possession ou
la garde» au sens de l'alinéa 3(1)b). Dans l'arrêt Rivard, les
dommages provenaient de travaux que la Couronne avait effec-
tués sur les rives d'un fleuve alors que le passage adjacent à l'île
Haddington, qui était compris dans le dispositif était un pas
sage naturel. La Couronne n'en avait pas «la propriété, l'occu-
pation, la possession ou la garde».
On a en outre soutenu qu'il y a responsabilité en vertu de
l'alinéa 3(1)a), «à l'égard d'un délit civil commis par un préposé
de la Couronne». L'appelante allègue des omissions ou actes
précis de la part de certains préposés de la Couronne, qui
soutient-elle, constituent de la négligence de leur part. La
preuve soumise ne permet toutefois pas d'établir les faits essen-
tiels relatifs à ces actes ou omissions.
L'appelante a soutenu qu'en raison de l'absence d'un feu à la
crique Hyde, la mise en place du dispositif de séparation du
trafic mettait en danger les navires se dirigeant vers l'est et que
la cause principale de l'échouement est que le Ministère a
recommandé l'utilisation du dispositif en l'absence d'un feu.
Selon l'appelante, ce qu'il faut retenir, c'est que l'échouement
aurait été évité si la mise en place du dispositif et la recomman-
dation de l'utiliser n'avaient pas eu lieu sans l'installation du
feu. Par conséquent, a-t-elle soutenu, même si Jones a été
négligent, elle avait quand même droit à des dommages-inté-
rêts. Elle a invoqué le principe énoncé dans l'arrêt Thompson:
celui qui s'expose volontairement et de façon licite à un danger
résultant d'un acte préjudiciable ou de la négligence d'une
autre personne, peut se faire indemniser du préjudice qui en
découle, à moins qu'en s'exposant au danger, il ait manqué à la
prudence ordinaire. L'appelante s'est aussi fondée sur une série
de décisions inspirées de l'arrêt Rider y Rider, dans lesquelles
une autorité municipale ou la Couronne a été déclarée respon-
sable pour négligence, à la suite de dommages causés par l'état
dangereux d'une route.
La série de décisions rendues à la suite de l'arrêt Rider ne
s'appliquent pas à l'espèce. D'abord, il est difficile d'accepter la
proposition selon laquelle le pilotage d'un navire sur une voie
navigable peut à bon droit être comparé à la conduite d'un
véhicule automobile sur une route. La prudence et l'habilité que
l'on peut raisonnablement exiger dans le premier cas sont
beaucoup plus grandes que celles que l'on peut exiger dans le
second cas, et bien que les principes qui découlent des affaires
relatives à des accidents de la route puissent à l'occasion être
appliqués à des accidents maritimes, il faut le faire avec
beaucoup de prudence. De toute façon, chacune des décisions
inspirées de l'arrêt Rider se distingue du présent cas, puisque
chacune d'elles portait sur l'existence d'un danger créé par
l'homme ainsi que sur des conditions intrinsèquement dange-
reuses. En l'espèce, il n'y avait pas de danger créé par l'homme
et rien dans le dispositif ne le rendait intrinsèquement
dangereux.
Le dossier ne permet pas non plus de conclure que l'intimée
est responsable de l'échouement. Même si la présence d'un feu
à la crique Hyde aurait pu aider le pilote à se rendre compte de
ses propres erreurs plus tôt qu'il ne l'a fait, l'absence du feu n'a
joué aucun rôle dans l'accident. L'échouement résulte de la
manière dont le navire a été conduit. L'échouement a eu lieu
parce que le pilote a manqué à la prudence ordinaire.
L'appelante a aussi tenté de tenir la Couronne responsable
parce qu'elle aurait fait preuve de négligence en retardant
indûment la mise en oeuvre d'une décision de principe, savoir la
décision d'installer un feu à la crique Hyde. Toutefois, il n'est
pas nécessaire d'étudier le fond de cet argument, ni la question
de savoir si l'article 31 de la Loi sur le pilotage rend l'appelante
responsable des dommages causés au navire.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Thompson v. North Eastern Railway Company (1862),
121 E.R. 1012; 2 B & S 106 (Exch. Chamber); Stoom-
vaart Maatschappy Nederland v. Peninsular and Orien
tal Steam Navigation Company (1880), 5 App. Cas. 876
(H.L.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Rivard c. La Reine, [1979] 2 C.F. 345 (l'Y inst.); La
Reine c. Côté, et autres, [1976] 1 R.C.S. 595; Wuerch v.
Hamilton (1980), 8 M.V.R. 262 (C.S.C.-B.); Malat et al.
v. Bjornson et al. (1980), 114 D.L.R. (3d) 612 (C.A.
C.-B.); Rider v Rider, [1973] 1 All E.R. 294 (C.A.).
DÉCISION CITÉE:
We!bridge Holdings Ltd. c. Metropolitan Corporation of
Greater Winnipeg, [1971] R.C.S. 957.
AVOCATS:
David Roberts, c.r., pour l'appelante (deman-
deresse).
Derek H. Aylen, c.r. et G. O. Eggertson pour
l'intimée (défenderesse).
PROCUREURS:
Campney & Murphy, Vancouver, pour l'appe-
lante (demanderesse).
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée (défenderesse).
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE STONE: Le 24 janvier 1973 23 h 30 le
navire Irish Stardust a été endommagé lorsqu'il
s'est échoué près de la côte nord-ouest de l'île
Haddington dans le détroit de Broughton situé
entre l'île Malcolm et l'île Vancouver. Son proprié-
taire, l'appelante, a intenté la présente action afin
de recouvrer ses pertes résultant du coût des répa-
rations du navire et du fait que celui-ci n'a pas été
utilisé au cours de la période où elles ont été
effectuées. Le juge Dubé a entendu l'action à
Vancouver et l'a rejetée le 11 mars 1976'. Le
propriétaire du navire interjette maintenant appel
de cette décision en alléguant un certain nombre
d'erreurs qui seront discutées plus loin dans ces
motifs.
' [1977] 1 C.F. 485 (1" inst.).
Avant de traiter des questions juridiques en
litige, il faut d'abord donner un aperçu du déroule-
ment des faits. L'Irish Stardust est un vraquier
conventionnel de 564 pieds de long et de 85 pieds
de large et d'une jauge brute de 19 191 tonneaux.
Au début de son trajet de Kitimat à Port Mellon, il
avait un tirant d'eau de 23 pieds 9 pouces à l'avant
et de 27 pieds 6 pouces à l'arrière, soit une
moyenne de 25 pieds 7 pouces et demi. La passe-
relle est située à l'arrière. Il était équipé d'une
hélice à pas variable contrôlée à partir de la passe-
relle. Le savant juge de première instance a jugé [à
la page 487] qu'il avait «des bonnes qualités de
contrôle et de manoeuvrabilité».
Comme le détroit de Broughton est une région
de pilotage obligatoire, le navire était conduit au
moment de son échouement par un pilote breveté
de la côte de la Colombie-Britannique, le capitaine
L. A. D. Jones. Un autre pilote breveté de la côte
de la Colombie-Britannique, l'officier en second, le
timonier et un élève officier se trouvaient sur la
passerelle avec lui. Le capitaine était dans ses
quartiers situés immédiatement en-dessous du pont
de passerelle. Bien qu'il fût un marin chevronné, le
capitaine Jones avait peu d'expérience comme
pilote, n'ayant reçu son brevet de pilote stagiaire
qu'en 1972 après avoir fait un stage et passé des
examens de pilotage. Par ailleurs, il avait plus de
trente ans d'expérience en mer et avait obtenu le
certificat de capacité de capitaine du ministère des
Transports en 1956. Lors d'un voyage précédent,
vers le nord, en direction de Kitimat puis de Port
Mellon, le capitaine Jones avait été pilote à bord
du navire. Toutefois, c'était la première fois qu'il
prenait le passage en question par le détroit de
Broughton à bord d'un navire de haute mer. Le
capitaine Jones gardait à jour une série de cartes
côtières à partir desquelles il avait élaboré un
recueil de route qu'il utilisait pour piloter dans ces
eaux.
Les navires qui se dirigent vers l'est entrent dans
le détroit de Broughton à la pointe Pulteney située
à l'extrémité ouest de l'île Malcolm. Pour passer
dans ces eaux, ils doivent prendre une direction
générale vers l'est au large de l'île Haddington et
de l'île Cormorant et continuer tout droit vers le
détroit de Johnstone. Le 1 °T mai 1971, le ministère
des Transports a mis en place un dispositif de
séparation du trafic dans la région de l'île Had-
dington pour une période d'essai d'un an. Il a été
maintenu après l'expiration de la période d'essai et
il était en vigueur le soir de l'échouement. Ce
dispositif n'était pas obligatoire, mais le ministère
des Transports avait recommandé qu'il soit utilisé
par tous les navires. Avant sa mise en place, les
navires se dirigeant dans l'une ou l'autre direction
dans le détroit de Broughton utilisaient le passage
Haddington, un chenal naturel bien indiqué d'envi-
ron 1 500 pieds de largeur, situé entre l'extrémité
nord de l'île Haddington et les récifs Haddington.
En vertu du dispositif de séparation du trafic, un
navire se dirigeant vers l'ouest continuait à utiliser
le passage Haddington, mais un navire se dirigeant
vers l'est devait modifier sa route vers tribord,
dans les environs de l'île Haddington et se diriger
ensuite vers le sud de manière à passer dans un
passage naturel d'environ 1 800 pieds de large se
trouvant entre la côte ouest de cette île et la rive
est de la barre rocheuse Neill. Le navire devait
alors virer à bâbord après avoir passé au large de
l'extrémité sud de l'île Haddington et se diriger
encore une fois vers l'est pour revenir sur la route
traditionnelle du trafic en direction du détroit de
Johnstone.
Le pilote Jones a pris la barre de l'Irish Star-
dust quelque temps avant d'atteindre la pointe
Pulteney. C'était une nuit sombre sans lune mais
la visibilité était bonne. Le navire faisait environ
16 nœuds, sa vitesse maximale. Il y avait un vent
arrière du nord-ouest. Lorsque le navire a passé la
pointe Pulteney par le travers, le pilote a déter-
miné au moyen du radar qu'il se trouvait à environ
une encâblure au sud de la position voulue comme
il l'a inscrit dans son recueil de route. Il avait
l'intention de passer à cinq encâblures et demie au
large de cette pointe. À partir de cette pointe, le
pilote avait projeté de mettre le cap à 100° en
direction est, comme il est inscrit dans son recueil
de route, de manière à faire passer le navire au
large de la roche Neill par tribord à une distance
de deux encâblures. Cette roche se trouve à l'extré-
mité nord de la barre rocheuse Neill à une distance
d'environ 4,4 milles en ligne droite de la pointe
Pulteney. En gardant le cap projeté de 139° du feu
de la roche Neill au feu de la barre rocheuse Neill,
c'est-à-dire sur une distance de 0,8 mille, le navire
se serait trouvé à bâbord au large de ce feu à une
distance d'une encâblure. Afin de prendre le pas
sage entre la barre rocheuse et le rivage ouest de
l'île Haddington, le pilote avait projeté de modifier
son cap au feu de la barre rocheuse Neill à 127°
pour que le navire passe au large à tribord du feu
situé sur le rivage sud de l'île Haddington, à une
distance de deux encâblures.
Lorsque le navire est entré dans le détroit de
Broughton à la pointe Pulteney, le pilote pouvait
voir les feux jusqu'à l'île Haddington, y compris le
feu de la roche Neill, celui de la barre rocheuse
Neill et celui de l'extrémité nord de l'île H adding -
ton. Jugeant que son passage au large de cette
pointe se trouvait à une encablure au sud de la
position prévue, le pilote a modifié son cap à 92,5°
et a continué sa route. Par conséquent, le navire
est passé à tribord au large du feu de la roche
Neill à une distance d'environ quatre encâblures et
demie au lieu de deux encâblures comme il l'avait
prévu. La position du feu situé à l'extrémité sud de
l'île Haddington est telle qu'il ne peut être vu d'un
navire se dirigeant vers l'est après un certain point;
il «s'éteint». Le capitaine Jones savait que cela se
produirait car son navire suivait un cap de 100°
lorsqu'il est arrivé à un point qui indiquait 124° du
feu. A ce point, le navire serait toujours à une
courte distance à l'ouest du feu de la roche Neill.
Au cours de la nuit en question, l'Irish Stardust
se dirigeait vers l'est et il est passé bien au nord du
feu de la roche Neill comme il a déjà été men-
tionné. Comme il suivait sa route, le pilote a
remarqué que le feu de l'île Haddington s'était
«éteint». Il a consulté à l'occasion l'un des deux
radars du navire jusqu'à ce qu'il ait atteint le feu
de la roche Neill mais a cessé de le faire en
arrivant à ce feu car la lueur du radar pouvait
gêner sa «vision nocturne». À partir de ce point, il
s'est fié entièrement sur ses observations visuelles
sans l'aide du radar. Après que le feu sud de l'île
Haddington se fut éteint, le seul objet visible à
l'avant de son navire était le feu à éclats rapides
indiquant le haut-fond de la barre rocheuse Neill
qui se trouve à environ 1 800 pieds à l'ouest de la
partie la plus à l'ouest de l'île Haddington. Il ne
pouvait pas voir l'île elle-même ni la côte de l'île
Vancouver. La région était plongée dans l'obscu-
rité totale, éclairée de façon intermittente seule-
ment par le clignotement du feu indiquant le haut-
fond de la barre rocheuse Neill.
Lorsque le navire est arrivé dans les environs du
feu de la roche Neill, le second lieutenant se tenait
à côté du timonier près des dispositifs de comman-
des des machines, l'élève officier était de veille à
l'extérieur et le capitaine Jones se trouvait à tri-
bord sur l'aileron de la passerelle et surveillait la
bouée de la roche Neill, car il voulait passer le plus
près possible de celle-ci. Immédiatement avant que
le navire arrive par le travers de cette bouée, le
pilote a commandé au timonier [TRADUCTION] «de
virer à 129°». À ce moment, le pilote ne pouvait
voir que le feu de la barre rocheuse Neill. Il a jeté
un coup d'oeil rapide au radar et a remarqué que
sa position était [TRADUCTION] «correcte». À
mi-chemin du feu de la barre rocheuse Neill, le
pilote s'est aperçu que le navire commençait à
dévier à bâbord. Comme le navire ne s'approchait
pas de la bouée, le capitaine Jones a modifié le cap
d'abord à 140° puis à 150°. Sentant que le navire
allait toujours de côté sans s'approcher de la
bouée, il a de nouveau ordonné de changer de cap,
cette fois à 160°. Malgré ces manoeuvres, l'Irish
Stardust a touché le fond par bâbord près du
rivage nord-ouest de l'île Haddington. Le pilote a
pu apercevoir le rivage de l'île à partir de sa
position sur l'aileron bâbord de la passerelle où il
s'était rendu peu de temps avant l'échouement.
Le savant juge de première instance a jugé que
toutes les aides à la navigation indiquées sur les
cartes et publiées dans les livres de feux se trou-
vaient à leur place et fonctionnaient au moment de
l'échouement, comme il a été décrit, à l'exception
du feu sud de l'île Haddington dont on a convenu
de la situation exacte au cours de l'audience. Voici
ce que le savant juge de première instance a dit
dans ses motifs de jugement au sujet de la cause de
l'échouement (à la page 495):
Il n'y avait pas de grands vents, de courants rapides ni de
marées assez fortes pour faire dévier le navire de la route
prévue vers l'île, comme la preuve le révèle très clairement. La
meilleure explication de l'échouement de l'Irish Stardust sur le
rivage de l'île Haddington ... [est donc que] le navire ne se
trouvait pas sur la route que le capitaine pensait qu'il suivait.
Le savant juge de première instance a précisément
jugé (à la page 497) que le pilote «avait dévié de sa
route» au moment de l'échouement.
À l'approche du détroit de Broughton, le soir de
l'échouement, le capitaine Jones aurait préféré
suivre la route habituelle au nord de l'île Hadding-
ton mais a décidé de suivre le dispositif de sépara-
tion du trafic pour deux raisons. En premier lieu,
puisqu'il était pilote depuis peu de temps, il pensait
devoir se conformer aux recommandations du
ministère des Transports et, en second lieu, il avait
été averti par radio de l'approche d'un navire
venant en sens inverse, l'Island Princess, un bac de
la Colombie-Britannique qui se dirigeait vers Alert
Bay. Le ministère des Transports avait inclus cet
avertissement précis dans ses «Avis aux naviga-
teurs»:
Les navigateurs sont prévenus qu'il est dangereux de procé-
der à l'encontre de la direction générale du trafic indiquée sur
les cartes par des flèches. On doit se rappeler que les cours
d'Amirauté ont soutenu que là où des dispositifs de séparation
du trafic ont été établis pour la sécurité des navires et tracés sur
les cartes officielles «c'est naviguer avec négligence que de les
quitter sans raison».
Néanmoins, le savant juge de première instance a
conclu (aux pages 497 et 498) que si le capitaine
Jones redoutait quelque difficulté à utiliser le dis-
positif «il avait encore la faculté de prendre le côté
nord du passage et de signaler son intention à
l'Island Princess qui s'approchait en sens inverse.
L'utilisation du dispositif était simplement recom-
mandée, et non pas obligatoire.»
La traversée du passage Haddington vers l'est
exige un léger changement de cap à tribord aux
environs de l'île Haddington, mais une traversée
du dispositif en direction est à l'ouest et au sud de
l'île Haddington demande un peu plus de manoeu
vre car le navire doit effectuer un important chan-
gement de cap à tribord au feu de la roche Neill,
et de nouveau au feu de la barre rocheuse Neill et
enfin un virage important à bâbord après avoir
passé au large de l'extrémité sud de l'île Hadding-
ton pour reprendre la route habituelle en direction
est vers le détroit de Johnstone.
Comme l'appelante soutient que la principale
cause de l'échouement est la recommandation par
l'intimée que l'Irish Stardust utilise le dispositif de
séparation du trafic alors que ce dispositif avait
créé une situation dangereuse pour les navires se
dirigeant vers l'est, il convient d'examiner briève-
ment les faits qui ont conduit à la mise en place du
dispositif le 1 er mai 1971. Il faut remonter à 1968,
date à laquelle le capitaine Graves, chef de la
Division des services nautiques et du pilotage du
ministère des Transports à Ottawa, a chargé le
capitaine C. E. Burrill, surintendant régional des
services nautiques à Vancouver, d'étudier relative-
ment à l'industrie maritime de la côte ouest, la
séparation du trafic naviguant dans les eaux côtiè-
res, en tenant compte surtout du fait que les
concentrations saisonnières de navires de pêche
avaient des répercussions sur la navigation com-
merciale. Le dispositif de séparation du trafic de
l'île Haddington est un des deux dispositifs qui ont
alors été mis en place par le ministère des Trans
ports sur la côte de la Colombie-Britannique, non
pas pour séparer les navires commerciaux des navi-
res de pêche mais pour séparer à deux endroits les
navires venant en directions opposées. Il est mani-
feste que les fonctionnaires du ministère des
Transports à Ottawa étaient responsables de la
décision de mettre en place le dispositif de sépara-
tion de l'île Haddington et que ni le capitaine
Burrill ni aucun autre membre du personnel du
ministère sur la côte ouest n'avait le pouvoir de le
faire. En fait, c'est le capitaine A. Morrison, surin-
tendant des équipages maritimes et de la sécurité
de la navigation à Ottawa qui a pris la décision de
mettre en place le dispositif conjointement avec le
capitaine Graves. De toute évidence, ils se sont
principalement fondés sur les connaissances parti-
culières des lieux des navigateurs ayant beaucoup
d'expérience sur la côte ouest.
Après avoir reçu ce mandat, le capitaine Burrill
a réuni des personnes intéressées à Vancouver en
juin 1968 et a créé un comité qui comprenait deux
pilotes de la côte ouest. Ce comité, présidé par le
capitaine Burrill, était connu sous le nom de
«comité Burrill». Il s'est réuni le 22 février et le 16
octobre 1969. Les deux pilotes de la côte ouest qui
faisaient partie de ce comité étaient également
membres du «comité des pilotes» qui se réunissait
régulièrement pour étudier des questions intéres-
sant les pilotes chargés de la navigation de navires
de haute mer sur la côte ouest. Ce comité servait
également à communiquer au ministère des Trans
ports les opinions exprimées par les pilotes sur des
questions de navigation. À la réunion du comité
Burrill, le 16 octobre 1969, il a été convenu que la
mise en place d'un dispositif faisant passer le trafic
en direction de l'est au sud de l'île Haddington et
le trafic en direction de l'ouest au nord en suivant
la route habituelle par le passage Haddington,
exigerait quatre modifications aux aides à la navi
gation: (1) l'installation d'une bouée lumineuse sur
la roche Neill, (2) le déplacement au nord-est du
feu de la barre rocheuse Neill, (3) l'installation
d'un feu sur la rive sud de l'île Haddington et (4)
le remplacement d'une bouée cylindrique de la
roche Alert, face à l'extrémité ouest de l'île Cor
morant, par une bouée lumineuse.
En juillet 1970, le bureau du gestionnaire de
district du ministère des Transports à Victoria, M.
L. E. Slaght, avait installé la bouée lumineuse de
la roche Alert. Le capitaine Burrill a préparé une
carte illustrant le dispositif et l'a envoyée au capi-
taine Graves à Ottawa. Il en a également envoyé
une copie avec un projet d'«Avis aux navigateurs»
présentant le dispositif aux pilotes et leur deman-
dant leurs commentaires et leurs suggestions. Il a
averti les pilotes que le dispositif ne serait pas
obligatoire, mais qu'il leur serait recommandé de
le suivre pour leur propre sécurité et celle des
autres marins. Le principal porte-parole des pilotes
était le capitaine R. W. B. Burnett, lui-même
pilote de la côte ouest de la Colombie-Britannique
et membre du comité des pilotes. En octobre 1970,
les observations de l'industrie maritime avaient été
reçues. Elles exprimaient certaines réserves à
l'égard du dispositif et présentaient deux contre-
propositions rédigées par le capitaine Burnett et
communiquées par le capitaine Burrill aux mem-
bres de l'industrie. La première contre-proposition
préconisait la mise en place d'un corridor à deux
voies dans le passage Haddington, dont une voie
serait réservée au trafic se dirigeant vers l'est et
l'autre au trafic se dirigeant vers l'ouest. La
deuxième contre-proposition préconisait, notam-
ment,
[TRADUCTION] La mise en place d'un feu d'alignement à la
position géographique 50 35 00 N. et 127 01 17 0., centré à
161 degrés et 15 minutes, et indiquant des secteurs rouges de
faible dimension de chaque côté du milieu du chenal (si l'on
emploie un feu à secteurs).
Un feu à cet endroit aurait été installé sur la rive
de l'île Vancouver à la crique Hyde. Le savant
juge de première instance a jugé qu'aucune preuve
n'indiquait que cette deuxième contre-proposition
avait été envoyée à Ottawa.
Le 5 novembre 1970, une réunion de l'industrie
maritime, comprenant les pilotes et les représen-
tants du ministère des Transports a été tenue à
Vancouver. Elle était présidée par le capitaine
Burrill. Les pilotes ont soutenu la proposition rela
tive au corridor à deux voies est-ouest dans le
passage Haddington. De plus, il y a eu des «pres-
sions considérables» pour qu'un feu à secteurs soit
installé sur l'escarpement Yellow dans l'île Cormo-
rant comme aide à la navigation vers l'ouest. Fina-
lement, il a été convenu lors de cette réunion que le
dispositif de séparation serait adopté pour une
période d'essai d'un an à la condition qu'un feu à
secteurs soit installé sur l'escarpement Yellow.
Le 23 novembre 1970 un «Avis à la navigation»
annonçant le dispositif projeté a été publié.
Le 26 février 1971, le ministère des Transports a
annoncé la mise en place du dispositif de sépara-
tion du trafic de l'île Haddington dans l'édition
hebdomadaire des «Avis aux navigateurs» qui se lit
en partie de la manière suivante:
1. L'utilisation du dispositif est conseillée à tous les navires. La
séparation du trafic est matérialisée par l'utilisation de l'Île
Haddington pour diviser le trafic se dirigeant vers l'Est de celui
se dirigeant vers l'Ouest et par des zones de séparation à l'Est
et au Nord-Ouest de l'Île Haddington; le trafic se dirigeant vers
l'Est passera au Sud de l'Île Haddington et le trafic se dirigeant
vers l'Ouest passera au Nord de l'Île Haddington en emprun-
tant le passage Haddington. Il n'y a pas de zones à l'intention
du trafic côtier.
2. Direction générale du trafic
Il est conseillé aux navires se dirigeant vers l'Est de passer au
sud des zones de séparation et de l'Île Haddington et aux
navires se dirigeant vers l'Ouest de passer au Nord des zones de
séparation et de l'Île Haddington, en empruntant le passage
Haddington.
Il est aussi conseillé aux navigateurs de se servir du radiotélé-
phone pour signaler leur présence et avertir les autres navires.
AVERTISSEMENT
Dans certains cas il est possible que de gros navires et des
remorqueurs avec de longues remorques faisant route vers l'Est
éprouvent de la difficulté à tourner à tribord pour passer au
Sud de l'Île Haddington. Dans de telles circonstances le capi-
taine peut décider de se diriger à l'encontre de la direction
générale du trafic dans le passage Haddington, mais doit
s'efforcer par tous les moyens d'avertir les autres navires dans
la région.
3. Date d'entrée en vigueur
Le dispositif entrera en vigueur à 1200, heure normale du
Pacifique, le 1" mai 1971.
Toutefois, l'opposition des pilotes à l'égard du
dispositif s'est poursuivie. Le capitaine Burnett a
piloté la nuit un navire de haute mer suivant le
dispositif proposé quelque temps avant novembre
1970, mais la date précise n'a pas été mentionnée
dans la preuve. Le temps était assez clair et il
pouvait voir les aides lumineuses à la navigation
qui étaient alors en place ainsi que l'île Hadding-
ton et le rivage de l'île Vancouver. Le capitaine
Burnett a conclu que le feu de la crique Hyde
devait être installé. En conséquence, une autre
réunion de l'industrie maritime et de représentants
du ministère des Transports a été tenue à Vancou-
ver le 26 avril 1971, quelques jours avant le début
de la période d'essai. Le capitaine Burnett était
présent. Manifestement, on y a discuté de l'instal-
lation d'un feu à la crique Hyde, comme l'indique
le procès verbal de cette réunion:
[TRADUCTION] Les navires ont de la difficulté à effectuer le
virage à l'extrémité sud sans point de repère sur la rive sud. On
suggère l'installation d'un feu d'alignement sur la rive sud.
L'avocat a admis que la mention de l'«extrémité
sud» vise l'extrémité sud de l'île Haddington et que
la «rive sud» est la rive de l'île Vancouver dans les
environs de la crique Hyde. De plus, il est mani-
feste que le ministère des Transports a accepté la
suggestion relative à l'installation d'un feu à la
crique Hyde, car il ressort de la preuve qu'au cours
du mois suivant, le Ministère a fait des démarches
en vue de consulter l'industrie maritime sur le
genre de feu nécessaire. En juillet, l'industrie avait
suggéré l'installation d'un feu d'alignement à trois
couleurs. En novembre, le ministère des Transports
a écrit au propriétaire du terrain sur lequel le feu
devait être installé. Il demeurait à Seattle (Wash-
ington). Le ministère des Transports lui a envoyé
une annexe graphique et lui a fait savoir que le feu
avait été demandé à titre d'[TRADUCTION] «aide à
la navigation pour permettre aux navires de passer
en toute sécurité au large de l'extrémité ouest de
l'île Haddington». En fait, le feu de la crique Hyde
n'est devenu opérationnel qu'en mai 1973, quatre
mois environ après l'échouement et plus de deux
ans après que le ministère des Transports eut
accepté de l'installer. On a installé un feu à sec-
teurs à trois couleurs visible pour les navires se
dirigeant vers l'est ayant passé le feu de la roche
Neill, et comportant un secteur vert à l'ouest, un
secteur blanc au milieu et un secteur rouge à l'est.
C'est dans ces circonstances que l'appelante
cherche à imputer à l'intimée la responsabilité des
dommages subis par l'Irish Stardust à la suite de
l'échouement. L'avocat de l'appelante admet que
pour avoir gain de cause, il doit d'abord se préva-
loir des dispositions du paragraphe 3(1) de la Loi
sur la responsabilité de la Couronne [S.R.C.
1970, chap. C-38]. Il allègue que les alinéas a) et
b) de cette disposition s'appliquent. Voici le texte
de ce paragraphe et du paragraphe 4(2):
3. (1) La Couronne est responsable des dommages dont elle
serait responsable, si elle était un particulier majeur et capable,
a) à l'égard d'un délit civil commis par un préposé de la
Couronne, ou
b) à l'égard d'un manquement au devoir afférent à la pro-
priété, l'occupation, la possession ou la garde d'un bien.
4....
(2) On ne peut exercer de recours contre la Couronne, en
vertu de l'alinéa 3(1)a), à l'égard d'un acte ou d'une omission
d'un préposé de la Couronne, sauf si, indépendamment de la
présente loi, l'acte ou l'omission eût donné ouverture à une
poursuite en responsabilité délictuelle contre ce préposé ou sa
succession.
À l'appui de sa prétention selon laquelle l'inti-
mée est responsable en vertu de l'alinéa 3(1)b),
l'appelante s'est fondée sur l'affaire Rivard c. La
Reine 2 dans laquelle le juge Walsh a jugé que le
fleuve Saint-Laurent en tant que voie navigable
était en «la propriété, l'occupation, la possession ou
la garde» de la Couronne du chef du Canada au
sens de cet article. À la lecture de cette affaire, je
suis convaincu que, à cet égard, le savant juge
traitait des circonstances particulières de l'espèce
qui portaient sur les dommages que la Couronne
aurait causés à la propriété du demandeur en
plaçant des pierres contre les berges de la rivière et
devant sa propriété en vue de prévenir l'érosion. Je
ne crois pas que le savant juge avait l'intention
d'établir un principe général, comme le soutient
maintenant l'appelante, selon lequel lorsque la
Couronne prend des mesures pour assurer la sécu-
rité de la navigation d'un passage navigable, elle a
«la propriété, l'occupation, la possession ou la
garde» de ces eaux au sens de l'alinéa 3(1)b). Le
fleuve Saint-Laurent fait partie de la voie mari
time du Saint-Laurent qui est exploitée par la
Couronne. Les dommages causés à la propriété du
demandeur résultaient de travaux que la Couronne
avait effectués sur la rive du fleuve pour empêcher
l'érosion des terrains situés sur la berge du fleuve.
En l'espèce, le passage entre l'île Haddington et le
haut-fond de la barre rocheuse Neill est un pas
sage naturel et bien qu'il ait été compris dans le
dispositif de séparation du trafic, je ne crois pas
que la Couronne du chef du Canada en avait «la
propriété, l'occupation, la possession ou la garde»
au sens de l'alinéa 3(1)b).
2 [1979] 2 C.F. 345 (ln inst.).
Je vais maintenant étudier les arguments présen-
tés par l'avocat de l'appelante selon lesquels la
Couronne est responsable en vertu de l'alinéa
3(1)a) de la Loi sur la responsabilité de la Cou-
ronne. Essentiellement, il allègue que:
1. La Couronne est responsable à cause de la
négligence du capitaine Burrill qui n'a pas révélé
au capitaine Morrison en novembre 1970 que les
pilotes de la côte de la Colombie-Britannique
étaient fortement opposés à la navigation de navi-
res de haute mer au sud de l'île Haddington et que
selon eux il était nécessaire d'installer un feu à la
crique Hyde avant la mise en place du dispositif de
séparation du trafic.
2. Le capitaine Burrill a été négligent parce qu'il
n'a rien fait après que les pilotes de la côte de la
Colombie-Britannique lui eurent fait savoir le 26
avril 1971 que ceux qui naviguaient au sud de l'île
Haddington avaient certaines difficultés et qu'il
était nécessaire d'installer un feu de gouverne sur
la rive de l'île Vancouver pour régler le problème
et assurer dans ce passage la sécurité de la naviga
tion de navires de haute mer.
3. M. Slaght, gestionnaire de district du minis-
tère des Transports, a été négligent parce qu'il a
omis d'installer, sans excuse ni explication raison-
nable, un feu de gouverne et d'alignement à la
crique Hyde peu après que les pilotes de la côte de
la Colombie-Britannique lui eurent fait savoir,
le 26 avril 1971, qu'un tel feu était nécessaire pour
assurer la sécurité du passage de l'extrémité ouest
de l'île Haddington pour les navires de haute mer.
4. Le capitaine Burrill a été négligent lorsqu'il a
dit au capitaine Morrison que [TRADUCTION]
«aucun problème n'avait été signalé à son bureau»
avant que ce dernier ne décide de maintenir le
dispositif après l'expiration de la période d'essai,
de sorte que le dispositif entré en vigueur le ler mai
1971 pour une période d'essai d'un an et qui ne
prévoit aucun feu de gouverne à la crique Hyde a
été maintenu.
Je traiterai de chacun de ces points individuelle-
ment.
L'étude du dossier ne m'a pas convaincu que le
dispositif est entré en vigueur le 1 er mai 1971
malgré l'opposition catégorique des pilotes. Le
savant juge de première instance a constaté [à la
page 489] que les pilotes s'étaient effectivement
opposés à la mise en place du dispositif au cours de
l'été 1970, mais que leur opposition tenait «au
motif qu'il serait dangereux, surtout parce que les
navires descendant le long du côté sud du passage
se retrouveraient, à l'est de l'île, sur la route des
navires circulant en sens inverse». Il n'a pas conclu
que le dispositif était fondamentalement dange-
reux. De plus, bien qu'on ait discuté de l'installa-
tion d'un feu à la crique Hyde, à la réunion du 5
novembre 1970, rien dans la preuve ne me permet
de conclure que le consentement des pilotes à la
mise en place du dispositif dépendait de l'installa-
tion de ce feu. Il est vrai que les pilotes se préoccu-
paient de l'installation de ce feu et qu'en fait, ils
ont renouvelé leur demande en avril 1971. Toute-
fois, rien dans le dossier ne permet d'établir que les
pilotes avaient modifié leur position antérieure,
quelques jours avant l'entrée en vigueur du disposi-
tif, en exigeant que le feu soit installé avant la
mise en place du dispositif. Il semble qu'à cette
réunion, le ministère des Transports ait accepté
d'installer le feu, car en mai 1971 il a amorcé le
processus qui a finalement conduit à l'installation
du feu en mai 1973. Je ne vois pas en quoi le
capitaine Burrill a été négligent comme on le lui
reproche alors que, en fait, la décision de mettre en
place ce dispositif n'a été prise qu'après son appro
bation en novembre 1970 pour une période d'essai
d'un an par tous les intéressés, y compris les
pilotes,
On allègue ensuite que le capitaine Burrill a été
négligent parce qu'il n'a rien fait après que les
pilotes de la Colombie-Britannique lui aient dit, le
26 avril 1971, que ceux qui naviguaient dans le
dispositif au sud de l'île Haddington avaient des
difficultés et qu'il était nécessaire d'installer un feu
de gouverne pour régler le problème et assurer la
sécurité du passage. En toute déférence, je ne crois
pas que la preuve confirme cette prétention. Rien
dans le procès verbal précité de la réunion, au
cours de laquelle ces «difficultés» ont été discutées
n'indique que les navires avaient des difficultés à
passer entre l'île Haddington et le feu de la barre
rocheuse Neill, car il mentionne «la difficulté à
effectuer le virage à l'extrémité sud» de l'île Had-
dington «sans point de repère sur la rive sud». De
toute évidence, le dossier ne permet pas de préciser
le but recherché par l'installation du feu de la
crique Hyde. En plus du but qui est décrit dans le
procès-verbal de la réunion du 26 avril 1971, l'in-
génieur de district du ministère des Transports a
déclaré en novembre 1971, dans une lettre qui a
été envoyée au propriétaire du terrain sur lequel
l'installation du feu était proposée, que son but
était de [TRADUCTION] «permettre aux navires de
passer en toute sécurité au large de l'extrémité
ouest de l'île Haddington». Par ailleurs, le repré-
sentant de l'industrie maritime s'adressant à M.
Slaght et approuvant l'installation d'un fanal d'ali-
gnement à trois couleurs à la crique Hyde en
juillet 1971 dit que son but est d'assurer [TRADUC-
TION] «un dégagement au-dessus du haut fond qui
s'étend à l'est de la barre rocheuse Neill». D'après
le dossier, je ne suis pas convaincu qu'au départ les
pilotes eux-mêmes considéraient l'installation du
feu de la crique Hyde comme une aide nécessaire
pour permettre aux navires de passer en toute
sécurité entre l'île Haddington et le feu de la barre
rocheuse Neill. Par conséquent, je ne suis pas
d'avis que le dossier appuie cette accusation de
négligence contre le capitaine Burrill.
L'appelante soutient en outre que M. Slaght, en
sa qualité de préposé de la Couronne, a été négli-
gent parce qu'il a omis d'installer dans les plus
brefs délais le feu de la crique Hyde, selon la
décision du ministère des Transports qui a suivi la
réunion du 26 avril 1971. Cet argument allait de
pair avec la prétention selon laquelle le feu était
nécessaire pour assurer «la sécurité du passage de
l'extrémité ouest de l'île Haddington pour les navi-
res de haute mer». J'ai déjà traité de cette dernière
prétention et comme j'ai conclu qu'elle n'est pas
appuyée par le dossier, il n'est pas nécessaire de se
demander si M. Slaght a été négligent en omettant
d'installer ce feu rapidement. J'étudierai plus loin
le point de droit soulevé par l'appelante selon
lequel le ministère des Transports après avoir
décidé d'installer le feu à la crique Hyde, avait le
devoir de le faire dans un délai raisonnable.
Enfin, on allègue que le capitaine Burrill a été
négligent parce qu'il a dit au capitaine Morrison
qu'«aucun problème n'avait été signalé à son
bureau», ce qui a ett pour conséquence de décider
le capitaine Morrison à prolonger la durée du
dispositif de séparation du trafic après l'expiration
de la période d'essai d'un an, en mai 1972. Encore
une fois, le dossier ne contient aucune preuve à
l'appui de cette prétention et, en fait, la preuve qui
s'y trouve appuie la thèse inverse. Je fais allusion
en particulier à une note de service interne rédigée
par le capitaine Morrison le 3 avril 1973, environ
deux mois et demi après l'accident. Voici un
extrait de cette note de service:
[TRADUCTION] Je me souviens d'une conversation téléphonique
que j'ai eue avec le capitaine Burrill au cours de laquelle je lui
ai demandé si des navires naviguant dans le sens inverse du
trafic avaient eu des difficultés. Il m'a dit qu'aucun problème
n'avait été signalé à son bureau. Comme les utilisateurs sem-
blaient satisfaits du dispositif, celui-ci a été maintenu après «la
période d'essai».
Je suis d'accord avec l'interprétation que l'intimée
donne de ce passage selon laquelle les «difficultés»
que mentionne le capitaine Morrison visaient les
«navires naviguant dans le sens inverse du trafic»,
c'est-à-dire les navires se dirigeant vers l'est qui
devaient passer au nord de l'île Haddington par le
passage Haddington plutôt qu'au sud de l'île
comme le recommandait le dispositif.
L'appelante soutient que l'échouement a résulté
de la recommandation par la Couronne que tous
les navires utilisent le dispositif de séparation du
trafic, alors que le feu de la crique Hyde n'avait
pas été installé. Elle allègue que si ce feu avait été
en place, le pilote se serait rendu compte à temps
que son navire avait dérivé dangereusement et
l'échouement aurait été évité. L'appelante n'allè-
gue pas que le capitaine Jones n'a pas commis de
négligence mais que, même s'il y a eu négligence
de sa part, l'appelante a néanmoins le droit de
recouvrer des dommages. Le principe sur lequel
elle se fonde découle de l'affaire Thompson v.
North Eastern Railway Company 3 . Il était ques
tion dans cette affaire de la responsabilité du
propriétaire d'un bassin et d'un bassin de marée
pour les dommages causés à un navire qui s'était
échoué sur un obstacle alors qu'il sortait du bassin
sous la conduite d'un pilote. La Cour a donné gain
de cause au demandeur, bien que le pilote ait fait
sortir un autre navire du bassin quelque temps
auparavant et qu'il ait donc été au courant de
l'existence de l'obstacle. Le principe invoqué y est
énoncé par le juge en chef Cockburn ([à la page
1016 E.R.] aux pages 114 et 115 B. & S.):
[TRADUCTION] L'arrêt Clayards v. Dethwick (12 Q.B. 439) a
établi que si une personne s'expose volontairement, en accom-
plissant un acte licite, à un danger résultant d'un acte préjudi-
ciable ou de la négligence d'une autre personne, elle peut se
3 (1862), 121 E.R. 1012; 2 B. & S. 106 (Exch. Chamber).
faire indemniser des préjudices qui en résultent, à moins que
des circonstances particulières fassent dire au jury qu'en s'expo-
sant au danger, cette personne a manqué à la prudence com
mune ou ordinaire.
L'avocat de l'appelante soutient qu'il importe peu
que le capitaine Jones ait lui-même été négligent
dans sa manière de conduire l'Irish Stardust dans
le passage. Ce qui importe, soutient-il, c'est que
l'échouement aurait pu être évité si l'intimée
n'avait pas créé un danger en mettant en place le
dispositif sans installer un feu à la crique Hyde et
en recommandant son utilisation au navire endom-
magé. À mon avis, pour les motifs qui suivent,
l'échouement a eu lieu parce que le pilote «a
manqué à la prudence commune ou ordinaire».
À cet égard, l'appelante s'est fondée sur une
série de décisions récentes dans lesquelles la res-
ponsabilité a été imputée à des autorités municipa-
les ou à la Couronne pour négligence, dans des cas
de dommages résultant des collisions causées par
l'état dangereux des roules: Rider v Rider 4 , La
Reine c. Côté, et autres', Wuerch v. Hamilton 6 ,
Malat et al. v. Bjornson et al.'. Cet argument
présuppose que la conduite d'un véhicule automo
bile sur une route peut être comparée au pilotage
d'un navire sur une voie navigable. Il me serait
difficile d'accepter une telle proposition. Dans les
deux cas, comme l'a souligné lord Blackburn dans
l'affaire Stoomvaart Maatschappy Nederland v.
Peninsular and Oriental Steam Navigation Com
pany 8 , le conducteur est tenu [TRADUCTION] «de
faire diligence et usage d'une habileté raisonnable
. bien que ... la nature différente des deux
véhicules fasse une grande différence dans l'appli-
cation pratique de la règle». Comme ce savant juge
l'a fait remarquer (à la page 891):
[TRADUCTION] On attend de l'équipage d'un navire, qui doit
scruter l'horizon à des milles de distance, plus de prudence que
du conducteur de voiture qui peut se contenter de regarder à
quelques verges devant lui; on exige beaucoup plus d'habileté
de celui qui prend le commandement d'un vapeur que de celui
qui conduit une voiture.
Les changements technologiques survenus au cours
de ce siècle ont eu des conséquences très importan-
tes sur la conception et la construction des navires
° [1973] 1 All E.R. 294 (C.A.).
5 [1976] 1 R.C.S. 595.
6 (1980), 8 M.V.R. 262 (C.S.C.-B.).
' (1980), 114 D.L.R. (3d) 612 (C.A.C.-B.).
8 (1880), 5 App. Cas. 876 (H.L.), aux pp. 890 et 891.
et des véhicules automobiles. Toutefois, les deux
moyens de transport demeurent de «nature diffé-
rente»; l'un est conçu pour être utilisé sur terre et
l'autre est conçu, équipé et armé pour être utilisé
sur l'eau et, faut-il aussi ajouter, dans des condi
tions très différentes des transports terrestres. Je
ne dis pas que les principes qui découlent d'affaires
relatives à des accidents de la route ne peuvent
jamais être appliqués à des accidents maritimes,
mais je crois que les différences qui existent entre
les véhicules automobiles et les navires, et entre
leurs conditions d'utilisation, sont telles qu'il faut
les appliquer avec beaucoup de prudence.
De toute façon, je crois qu'on peut faire une
distinction avec chaque décision invoquée. Cha-
cune portait sur l'existence d'une embûche créée
par l'homme ainsi que sur des conditions qui
étaient fondamentalement dangereuses pour les
utilisateurs de la route. Dans l'affaire Rider, le
problème tenait à l'état exceptionnellement mau-
vais d'une route de campagne étroite et sinueuse
et, en particulier, au fait que ses bas-côtés acciden
tés ont joué un rôle important dans la collision.
Dans l'affaire Côté, il s'agissait d'une plaque de
glace que devaient traverser tous les automobilistes
utilisant la route. Dans l'affaire Wuerch, il s'agis-
sait d'une ligne médiane pointillée qui pouvait être
utilisée par la circulation se déplaçant dans l'une
ou l'autre direction pour effectuer des dépasse-
ments. Dans l'affaire Malat, il s'agissait de la
présence d'un mur médian dont la forme permet-
tait que des véhicules conduits de façon négligente
passent sur l'autre voie et se retrouvent face à des
véhicules venant en sens inverse. Le savant juge de
première instance a spécifiquement conclu (à la
page 501) qu'il n'y avait pas en l'espèce d'«embû-
ches créées par l'homme». En toute déférence, je
souscris à cette opinion. Rien dans la nature du
dispositif de séparation du trafic ne me permet de
conclure qu'il était intrinsèquement dangereux. La
preuve révèle clairement que le dispositif avait été
utilisé auparavant et sans incident. Le passage
entre la rive ouest de l'île Haddington et le haut
fond était large. Les feux sur la bouée de la barre
rocheuse Neill et à l'extrémité sud de l'île Had-
dington, s'ils étaient utilisés correctement, don-
naient des indications suffisantes pour guider en
toute sécurité un navire piloté avec prudence dans
le passage. À mon avis, l'échouement résulte de la
manière dont l'Irish Stardust a été conduit, plutôt
que de la nature du dispositif dont l'utilisation
était recommandée par la Couronne.
Le dossier ne me permet pas non plus de con-
clure que l'intimée est responsable de quelque
façon que ce soit de l'accident. Le passage ne
présentait pas de danger pour un navire correcte-
ment conduit. Je ne suis pas d'avis que l'absence
d'un feu à la crique Hyde a joué un rôle dans
l'échouement, même si sa présence aurait pu aider
le pilote à se rendre compte de ses propres erreurs
plus tôt qu'il ne l'a fait. Après avoir fait dévier
l'Irish Stardust de sa route prévue à la pointe
Pulteney, la mesure corrective prise par le pilote
l'a fait dévier de plus de 1 500 pieds au nord du
feu de la roche Neill qu'il ne l'avait prévu. Il a
aggravé cette erreur en passant trop loin à l'est du
feu de la roche Neill et en décidant trop tard de
changer de cap à tribord pour rapprocher l'Irish
Stardust du feu de la barre rocheuse Neill comme
il avait projeté de le faire. Il est particulièrement
difficile d'expliquer cette manoeuvre, puisque le
feu installé à l'extrémité sud de l'île Haddington
avait disparu de son champ de vision alors qu'il
était encore à l'ouest du feu de la roche Neill. De
plus, après avoir passé au large de ce feu, il n'a
plus utilisé l'équipement radar du navire. À mon
avis, si cet équipement avait été utilisé correcte-
ment par l'équipage, il aurait donné au pilote des
renseignements extrêmement précieux sur la posi
tion de son navire par rapport au feu et à la côte
ouest de l'île Haddington.
L'appelante soutient que la Couronne a engagé
sa responsabilité en retardant indûment l'installa-
tion du feu de la crique Hyde après avoir pris une
décision de principe sur ce point. Cette décision a
été prise au printemps 1971, mais ce n'est qu'en
mai 1973, environ deux ans plus tard, et quatre
mois après l'échouement, que le feu est devenu
opérationnel. L'intimée a cherché à expliquer le
retard et a allégué que dans les circonstances
celui-ci n'avait pas été indû. À l'appui de sa pré-
tention, l'appelante s'est fondée sur la décision de
la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans
l'affaire Malat où il a été déclaré (page 619):
[TRADUCTION] À mon avis, lorsque la décision de principe a
été prise d'entreprendre l'installation de la barrière de 30
pouces dans les districts, une obligation était née et il fallait que
les ingénieurs de districts appliquent cette décision de principe
avec un soin raisonnable et dans un délai raisonnable. L'ingé-
nieur de district, en le faisant ou en omettant de le faire,
fonctionnait au «niveau des opérations».
Comme j'ai conclu que l'absence de feu à la crique
Hyde n'a joué aucun rôle dans l'échouement de
l'Irish Stardust, il n'est pas nécessaire d'étudier le
fond de cet argument. De prime abord, il cherche à
imputer la responsabilité à la Couronne en raison
de sa négligence qui aurait consisté à avoir retardé
indûment la mise en oeuvre d'une décision de
principe par opposition à la responsabilité qui
découle de la manière dont le travail autorisé par
une telle décision est exécuté: Welbridge Holdings
Ltd. c. Metropolitan Corporation of Greater
Winnipeg'.
Enfin, le savant juge de première instance a
discuté de la pertinence de l'article 31 de la Loi
sur le pilotage 10 dans cette affaire et était d'avis
qu'il rendait l'appelante responsable des domma-
ges subis par le navire comme conséquence de la
négligence du pilote. Comme j'ai conclu que l'inti-
mée n'est pas responsable de l'échouement, il n'est
pas nécessaire d'examiner ce point. Le savant juge
de première instance a fondé son opinion sur la
jurisprudence anglaise qui interprète les disposi
tions de la loi anglaise sur le pilotage, dont le texte
bien que semblable, n'est pas identique à celui de
la Loi canadienne.
Par conséquent, je rejetterais cet appel avec
dépens.
LE JUGE PRATTE: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE HUGESSEN: Je souscris à ces motifs.
9 [1971] R.C.S. 957.
10 S.C. 1970-71-72, chap. 52.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.