T-1195-84
René Baillargeon, Sergent, GRC (requérant)
c.
R. H. Simmonds, Commissaire, GRC, P. M.
Cummins, Inspecteur, GRC et J. F. J. Bossé,
Commissaire adjoint, GRC (intimés)
Division de première instance, juge Rouleau—
Montréal, 18 juin; Ottawa, 24 août 1984.
Droit constitutionnel — Charte des droits — Enquête admi
nistrative sur l'importation présumée de marchandises non
déclarées par un agent de la GRC entreprise avant l'instruction
d'un procès criminel sur les mêmes faits — Les droits conférés
au requérant par les art. 11c), 13 et 15 de la Charte des droits
ont-ils été violés? — La Commission respecte-t-elle la Consti
tution? — Le recours présenté ne permet pas de trancher ces
questions — Charte canadienne des droits et libertés, qui
constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982,
annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.),
art. 11c), 13, 15(1) — Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e
Supp.), chap. 10, art. 18, 28, 50.
Compétence — Division de première instance de la Cour
fédérale — Enquête administrative sur l'importation présumée
de marchandises non déclarées entreprise avant l'instruction
d'un procès criminel sur les mêmes faits — La Cour a compé-
tence pour connaître de l'affaire parce que la décision de
procéder à une enquête était purement administrative et que le
recours à un remède prévu par la loi n'était pas encore possible
— La Cour n'a pas compétence pour suspendre les procédures
d'un autre tribunal — Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970
(2e Supp.), chap. 10, art. 18, 28, 50 — Loi sur la Gendarmerie
royale du Canada, S.R.C. 1970, chap. R-9, art. 21(2), 41,
42, 43.
Contrôle judiciaire — Brefs de prérogative — Prohibition
— Enquête administrative sur l'importation présumée de mar-
chandises non déclarées par un agent de la GRC entreprise
avant l'instruction d'un procès criminel sur les mêmes faits —
Les principes de la présomption d'innocence et de la non-con-
traignabilité d'un accusé ainsi que le droit de ne pas s'incrimi-
ner et le droit à un procès équitable ont-ils été violés? — La
Cour a compétence pour connaître de l'affaire parce que la
décision de procéder à une enquête était purement administra
tive et que le recours à un remède prévu par la loi n'était pas
encore possible — La Cour n'a pas compétence pour suspendre
les procédures d'un autre tribunal — Loi sur la Cour fédérale,
S.R.C. 1970 (2' Supp.), chap. 10, art. 18, 28, 50 — Loi sur la
Gendarmerie royale du Canada, S.R.C. 1970, chap. R-9, art.
21(2), 41, 42, 43 — Charte canadienne des droits et libertés,
qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982,
annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.),
art. 11c), 13, 15(1).
Le requérant a été arrêté et inculpé d'importation de mar-
chandises non déclarées devant une Cour des Sessions. Avant
l'instruction du procès, le Commissaire a demandé à la Com
mission de licenciement et de rétrogradation de la GRC de
tenir une audience relativement à cette même question afin de
déterminer si le requérant devait être licencié. On demande un
bref de prohibition ordonnant la suspension des auditions de la
Commission.
Jugement: la demande est rejetée. Contrairement à ce qu'ont
prétendu les intimés, la Cour a compétence pour entendre cette
affaire car la décision du Commissaire de tenir une enquête est
de nature purement administrative. Vu que ce recours n'existe
que s'il y a eu une déclaration de culpabilité, l'argument selon
lequel la demande est prématurée parce que la procédure
d'appel prévue à la loi n'a pas été épuisée est sans fondement.
Essentiellement, le débat est de nature constitutionnelle: il met
en jeu le principe fondamental de la protection de l'accusé en
matière criminelle. De plus, le fait que la Commission n'excède
pas la compétence qui lui est conférée par la loi n'exclut pas
qu'elle puisse agir de manière inconstitutionnelle. Toutefois, le
bref de prohibition n'est pas le moyen approprié pour soumettre
des questions constitutionnelles. La Cour se serait penchée sur
la question si le recours approprié avait été présenté.
La Cour ne peut accorder un bref de prohibition car elle n'a
pas la compétence pour suspendre les procédures intentées
devant d'autres tribunaux.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration du Canada
c. Rodrigues, [1979] 2 C.F. 197; 98 D.L.R. (3d) 667
(C.A.).
AVOCATS:
Luc Carbonneau pour le requérant.
Normand Lemyre et André Brault pour les
intimés.
PROCUREURS:
Bluteau, Paquin, Carbonneau et Associés,
Montréal, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
les intimés.
Voici les motifs de l'ordonnance rendus en fran-
çais par
LE JUGE ROULEAU: Il s'agit d'une requête de
René Baillargeon afin d'obtenir l'émission d'un
bref de prohibition pour empêcher l'intimé, l'ins-
pecteur P. M. Cummins, de tenir les auditions de
la Commission de licenciement et de rétrograda-
tion lesquelles sont tenues dans le but de recom-
mander le licenciement du requérant au Commis-
saire R. H. Simmonds.
Le sergent René Baillargeon est un membre de
la Gendarmerie royale du Canada depuis 1961. À
la suite d'une enquête conduite par ses confrères
de la Gendarmerie royale, il fut arrêté au port
douanier de Lacolle (Québec). Il a été trouvé en
possession de marchandise apparemment non
déclarée au douanier de faction audit port doua-
nier. Cette arrestation mena éventuellement à des
accusations en Cour des sessions en la ville de
St-Jean, celles-ci étant menées par la Gendarmerie
royale du Canada. Tous les événements portent sur
l'importation de marchandise non déclarée qui ont
eu lieu en mars et avril 1983.
Le requérant a comparu le 9 juin 1983 devant le
tribunal du district d'Iberville et une enquête préli-
minaire fut fixée au 2 août 1983. Il s'ensuivit
quatre comparutions à différentes dates et le 31
janvier 1984, après une dernière comparution, le
sergent Baillargeon enregistre une requête pour
arrêt des procédures au motif d'abus de procédu-
res. L'audition débuta le même jour et se continua
le 25 mars 1984. Elle s'est poursuivie les 27 et 28
mars 1984 et a été ajournée au 24 avril 1984. A
cette dernière date, la continuation de la requête
fut fixée au 7 mai 1984 et à cette date elle fut
remise au 22 mai. Le juge qui présidait à la
requête a remis les procédures jusqu'au 24 septem-
bre, afin de permettre au procureur de soumettre
notes et autorités concernant ladite requête.
Le 8 mai 1984 le requérant a comparu devant
l'inspecteur P. M. Cummins de la Gendarmerie
royale du Canada au quartier général à Montréal
et il fut avisé par le président de la Commission de
licenciement et de rétrogradation, qu'on devait
examiner sa situation relativement à un licencie-
ment de la Gendarmerie royale du Canada, le tout
basé sur une recommandation préparée par le
Commissaire adjoint J. F. J. Bossé. Il fut informé
par le président de la Commission, qu'après la
présentation par le représentant de la poursuite et
possiblement certains témoins, qu'il aurait alors à
présenter des pièces et des témoins qu'on jugerait
nécessaires à sa défense. Après ces avis, le requé-
rant, par l'entremise de son procureur, faisait une
requête pour ajournement sine die au motif que les
pièces et les témoins requis tant pour la poursuite
que pour la défense étaient exactement les mêmes
que pour la requête pendante devant le juge à
St-Jean pour le procès criminel. Le cas échéant,
cette situation lui causerait un tort sérieux et
irréparable. L'audition de cette requête fut ajour-
née au 9 mai. Le président décida d'accorder une
suspension partielle avec solde qui devrait se termi-
ner avec la décision du juge en première instance à
St-Jean; la requête soumise devant la Commission
pour un délai de l'audition lui fut refusée.
La requête en prohibition nous est maintenant
soumise concluant à l'ajournement sine die de
l'audition prévue devant la commission d'enquête
de la Gendarmerie royale laquelle s'appuie sur
l'article 13 et le paragraphe 15(1) de la Charte
canadienne des droits et libertés [qui constitue la
Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982,
annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap.
11 (R.-U.)] qui se lisent comme suit:
13. Chacun a droit à ce qu'aucun témoignage incriminant
qu'il donne ne soit utilisé pour l'incriminer dans d'autres procé-
dures, sauf lors de poursuites pour parjure ou pour témoignages
contradictoires.
15. (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique
également à tous, et tous ont droit à la même protection et au
même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimina
tion, notamment des discriminations fondées sur la race, l'ori-
gine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge
ou les déficiences mentales ou physiques.
Le procureur du requérant soumet que si les
auditions de la Commission de licenciement et de
rétrogradation devaient se poursuivre, son client
aurait à rencontrer un fardeau pour se justifier
devant les prétentions de cette poursuite. Ce fai-
sant, il devrait s'incriminer en regard du procès
criminel, le cas échéant, puisque l'article 13 de la
Charte ne lui offrirait aucune protection lors dudit
procès compte tenu de la nature de la Commission.
Il soumet de plus que c'est un principe universel-
lement reconnu en droit canadien que chacun a
droit à une défense pleine et entière. S'il doit
dévoiler devant la commission d'enquête ses
témoins et sa défense portant sur les faits, et que la
poursuite devant le tribunal criminel étant poursui-
vie par les mêmes officiers enquêteurs se portant
sur les mêmes faits, les mêmes événements, le
requérant subira un préjudice irréparable à toute
fin pratique dans sa défense devant le tribunal
criminel.
Le procureur représentant les intimés soumet
d'abord que cette Cour n'a pas juridiction puisque
la décision de procéder à l'enquête n'est pas une
décision administrative. La demande devrait donc
être faite à la Cour d'appel de la Cour fédérale du
Canada en vertu de l'article 28 de la Loi sur la
Cour fédérale [S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10].
Il soumet de plus que cette Cour n'a pas juridic-
tion d'imposer la suspension des procédures d'un
autre tribunal en vertu de l'article 50 de la Loi sur
la Cour fédérale. De plus, la suspension imposée
au sergent Baillargeon était avec solde, et retarder
l'enquête causerait une dépense excessive à la Gen-
darmerie royale du Canada. Finalement, il plaide
qu'il existe déjà une procédure d'appel à l'intérieur
de la loi et des règlements de la Gendarmerie
royale du Canada sous les articles 41, 42 et 43
[Loi sur la Gendarmerie royale du Canada,
S.R.C. 1970, chap. R-9] et que le requérant doit
épuiser un remède avant de se produire devant la
Cour fédérale.
Je suis d'avis qu'une suspension avec solde est
une décision purement discrétionnaire qui peut
être renversée du jour au lendemain.
Il soumet de plus qu'en ce qui concerne la
décision de refuser l'ajournement à la commission
d'enquête, il y existe d'autres remèdes que de venir
devant cette Cour; que la procédure est établie
sous le Règlement [Règlement de la Gendarmerie
royale du Canada, C.R.C., chap. 1391] en vertu
du paragraphe 21(2) de la Loi sur la Gendarmerie
royale du Canada. Ils ont droit d'appel sous l'arti-
cle 43 de cette même loi. Je rejette cet argument;
les articles 41, 42 et 43 déterminent les appels,
mais un droit d'appel sous l'article 41 et sous les
règlements ne peut être exigé qu'après qu'un
membre ait été déclaré coupable d'une infraction;
donc l'argument ici soumis par la Couronne n'est
pas valable du fait qu'il n'y a pas encore eu de
déclaration de culpabilité, donc il ne peut en appe-
ler de la décision du Commissaire.
Je suis aussi d'avis que la décision prise par le
Commissaire est une décision purement adminis
trative relevant de l'article 18 de la Loi sur la
Cour fédérale. Cette Cour est compétente pour
décider si oui ou non un bref de prohibition doit
être émis.
Je reviens au coeur du débat qui est essentielle-
ment du domaine constitutionnel. En effet, il s'agit
de remettre en question la valeur et l'étendue de
principes tels que la présomption d'innocence au
Canada en matière criminelle, la non-contraigna-
bilité d'un accusé, le droit de ne pas s'incriminer et
le droit à un «fair trial». La Loi sur la preuve au
Canada [S.R.C. 1970, chap. E-10] de même que
les principes de common law ont depuis fort long-
temps accepté ces principes devant les cours de
justice en matière criminelle. Ainsi l'accusé a le
droit de ne pas témoigner à son procès et a égale-
ment le droit de bénéficier de la protection de la loi
lorsqu'il témoigne dans un autre procès au sujet de
matières qui pourraient l'incriminer.
Par ailleurs, dans le cas qui m'est présenté, le
requérant est présentement accusé devant une cour
criminelle mais parallèlement à cela il doit témoi-
gner au sujet de la même infraction lors d'une
audition devant la Commission de licenciement et
de rétrogradation de la Gendarmerie royale du
Canada. Le seul fait d'être impliqué dans la perpé-
tration d'une infraction à une loi édictée par le
Parlement du Canada est un motif d'inaptitude à
exercer ses fonctions à l'intérieur des cadres de la
Gendarmerie royale du Canada et ce, qu'il ait été
accusé ou non du délit criminel constituant le
motif de son inaptitude, qu'il ait été jugé, acquitté
ou condamné par le tribunal à l'égard de ce délit.
Bref, dans de telles circonstances le requérant a le
fardeau de prouver qu'il est apte à occuper ses
fonctions et doit se défendre de cette infraction. Il
doit présenter sa défense et ne bénéficie donc pas
ni de la présomption d'innocence, ni du privilège
de ne pas s'incriminer car il n'est pas devant une
cour de justice criminelle. Il n'est pas obligé de se
défendre, mais s'il ne le fait pas, son dossier sera
acheminé directement au Commissaire, qui vrai-
semblablement n'aurait d'autre choix que de le
licencier.
C'est précisément cette preuve qui sera dévoilée
à ceux qui auront le fardeau de prouver son crime
aux Sessions de paix. Et c'est là que les principes
du «fair trial» peuvent être remis en question.
La Charte pourrait éventuellement beaucoup
plus clairement sous son alinéa 11c) que sous
l'article 13 ou 15 établir la non-contraignabilité
d'un témoin dans le cas où celui-ci est accusé ou
est en voie de l'être.
L'alinéa 11c) se lit comme suit:
11. Tout inculpé a le droit:
c) de ne pas être contraint de témoigner contre lui-même
dans toute poursuite intentée contre lui pour l'infraction
qu'on lui reproche;
Et voici ce qu'en pensent Tarnopolsky et Beaudoin
dans Charte canadienne des droits et libertés (Édi-
tions Wilson & Lafleur/Sorej, 1982), la page
456:
Le problème est le suivant: il est possible pour la poursuite de
priver l'accusé ou le suspect de bon nombre des protections du
processus pénal en l'assignant comme témoin à des procédures
autres que son procès.
Il est vrai qu'un témoin peut empêcher que son témoignage
soit présenté comme preuve contre lui dans un procès criminel
subséquent. Il peut, cependant, subir d'autres préjudices. Il est
possible qu'on utilise la procédure comme une «expédition de
pêche» où l'on interrogera le témoin de façon serrée pour tenter
de découvrir s'il a déjà participé à des infractions. Ou encore,
on tentera de voir s'il a participé à une infraction en particulier.
L'accusé pourrait, par exemple, être obligé de révéler ses
défenses possibles, le nom de personnes qui pourraient être
appelées comme témoin de la défense ainsi que d'autres preuves
Le problème vient de ce que cette première procédure ne
comportera sans doute pas les garanties du procès criminel. Il
n'y aura pas d'accusation précise, pas de présomption d'inno-
cence, pas de protection contre la publicité préjudiciable, les
règles de la preuve ne joueront pas en sa faveur et ainsi de suite.
S'il est aussi facile de contourner les protections du processus
pénal, on peut dire que l'intégrité de ce processus est sérieuse-
ment en danger.
J'aurais été disposé à me pencher sur la question
si les avocats m'avaient présenté le bon recours.
On me demande de suspendre les procédures
d'un autre tribunal. Or, vu l'article 50 de la Loi
sur la Cour fédérale, je n'ai pas le droit de le faire.
Ce fait est établi clairement par la jurisprudence.
C'est ainsi que le juge Pratte dans Le ministre de
l'Emploi et de l'Immigration du Canada c. Rodri-
gues, [1979] 2 C.F. 197; 98 D.L.R. (3d) 667
(C.A.), déclare à la page 668 [C.F., page 199]:
L'article 50 permet à la Cour de suspendre des procédures qui
sont engagées devant la Cour elle-même; elle ne lui permet pas
de suspendre des procédures engagées devant un autre tribunal.
Cette question est, quant à moi, une question
constitutionnelle, et le requérant doit se servir du
véhicule approprié. Si on m'avait demandé par
exemple de déclarer inopérantes certaines disposi
tions statutaires, en donnant aux parties intéres-
sées les avis nécessaires, j'aurais pu me prononcer
sur la constitutionnalité de la question. C'est une
question beaucoup trop importante pour la glisser
de manière incidente, au hasard d'un cas d'espèce.
Il s'agit d'une question qui doit être débattue à
fond dans l'intérêt général des Canadiens.
Il faut distinguer entre les devoirs d'un tribunal
administratif et les devoirs constitutionnels; le tri
bunal administratif doit agir équitablement ou
selon les règles de la justice naturelle, selon le cas,
lesquels sont des devoirs statutaires. Les devoirs
constitutionnels, lesquels se situent au-dessus de
tout cela, fixent les normes des droits de l'individu.
Ainsi, un tribunal administratif peut agir équita-
blement par rapport au statut qui le crée mais peut
ne pas agir en conformité du droit constitutionnel.
Dans le cas présent, le tribunal administratif
agit dans les limites de ses devoirs statutaires. Que
la Commission de licenciement et de rétrograda-
tion ait des failles au niveau constitutionnel ou
non, on ne m'a pas présenté le recours adéquat
pour en discuter.
La requête est rejetée avec frais.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.