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A-432-81
La Reine (appelante)
c.
B & J Music Limited (intimée)
Cour d'appel, juge en chef Thurlow, juge Le Dain et juge suppléant Clement—Toronto, 20 et 21 janvier 1983.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Déductions L'intimée est devenue une corporation privée dont le contrôle
est canadien (.CPCC) au mois de juin 1974 Le revenu imposable de l'intimée pour les années d'imposition 1972 à 1974 doit être inclus dans le calcul de son compte des déduc- tions cumulatives aux fins d'établir la déduction accordée aux petites entreprises en vertu de l'art. /25(1) pour les années subséquentes L'art. 125 vise à accorder aux CPCC un traitement fiscal.rpécial Ce but ne doit être réalisé que dans
la mesure permise par les termes de cet article La Cour ne peut étendre ce traitement spécial en se fondant sur une intention non prévue de façon expresse La décision est la même, même si «corporation» se rapporte uniquement aux CPCC Appel à l'encontre de la décision de la Division de
première instance accueilli Cotisations rétablies Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. /970-7/-72, chap. 63, art. 125(1),(6)b1.
AVOCATS:
W. Lefebvre et M. T. Boris pour l'appelante. S. D. Paton pour l'intimée.
PROCUREURS: -
Le sous-procureur général du Canada pour l'appelante.
Rosenberg, Smith, Paton, Hyman & Matlow, Toronto, pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF THURLOW: Il s'agit de déci- der en l'espèce si le revenu imposable de l'intimée pour les années d'imposition 1972, 1973 et 1974, au cours desquelles l'intimée n'était pas admissible à la déduction d'impôt accordée aux «corporations privées dont le contrôle est canadien,, doit entrer dans le calcul de son «compte des déductions cumulatives» aux fins du paragraphe 125(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, chap. 148, mod. par S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 1, pour les années d'imposition 1975, 1976 et 1977, au cours desquelles l'intimée était admissible en tant que corporation privée dont le contrôle est canadien.
L'article 125 établit un mécanisme qui donne droit aux corporations privées dont le contrôle est canadien, sous réserve des limites qu'il prévoit, à certaines déductions d'impôt. Cet article comporte six paragraphes dont le dernier définit, entre autres, le sens de «compte des déductions cumulati- ves». La partie pertinente de cette définition se lit:
125... .
(6) Dans le présent article,
b) «compte des déductions cumulatives» d'une corporation à la fin d'une année d'imposition donnée, signifie la fraction, si fraction il y a, du total
(i) des revenus imposables de la corporation pour des années d'imposition commençant après 1971 et se termi- nant au plus tard à la fin de l'année donnée, et
Le savant juge de première instance [B. & J. Music Limited c. La Reine, Cour fédérale, T-586-71, jugement en date du 25 juin 1981] a conclu que les revenus imposables de l'intimée pour les années 1972, 1973 et 1974 ne doivent pas entrer dans le calcul du compte des déductions cumulatives de l'intimée. C'est ce qu'il a dit dans le paragraphe suivant extrait de ses motifs la page 6]:
À mon avis, l'article 125 de la Loi de l'impôt sur le revenu est une disposition spéciale qui accorde aux «corporations pri- vées dont le contrôle est canadien» un traitement fiscal spécial; aucune de ces dispositions ne vise d'autres corporations. Le législateur n'a pas voulu par cet article refuser la déduction dite des petites entreprises aux compagnies, comme la B. & J. Music Limited, qui n'étaient pas en 1971 des «corporations privées dont le contrôle est canadien».
J'accepte l'opinion que l'article 125 accorde aux corporations privées dont le contrôle est canadien un traitement fiscal spécial. J'estime que c'est le but visé par cet article mais, à mon avis, ce but ne doit être réalisé que dans la mesure permise par les termes de cet article. La Cour ne peut étendre l'application des dispositions de cet article en se fondant sur une intention présumée qui ne s'y trouve pas de façon expresse.
Même si le mot «corporation», qu'il figure dans cet article et dans la définition de «compte des déductions cumulatives», est interprété de manière à se rapporter uniquement à une corpora tion privée dont le contrôle est canadien, lorsque ce mot est employé et appliqué en ce sens quant à la fin de chacune des années d'imposition 1975, 1976 et 1977, la définition me paraît exiger que les revenus imposables de cette corporation pour les
années 1972, 1973 et 1974 entrent dans le calcul. Pour exclure ces revenus du calcul, il serait à mon avis nécessaire de modifier la définition pour ajou- ter, après les mots «revenus imposables de la cor poration», des mots comme «alors qu'elle était une corporation privée dont le contrôle est canadien». A mon avis, la Cour ne peut le faire.
Je suis d'avis d'accueillir l'appel avec dépens en cette Cour et en la Division de première instance, d'infirmer le jugement de la Division de première instance et de rétablir les cotisations.
LE JUGE LE DAIN: Je suis d'accord.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT CLEMENT (dissident): Avec égards, je souscris à l'interprétation que le juge Gibson donne à l'article 125 de la Loi de l'impôt sur le revenu et je suis d'avis de rejeter le présent appel.
L'article 125 vise uniquement les corporations qui s'inscrivent dans la définition de «corporation privée dont le contrôle est canadien». L'intimée, qui fait affaires au Canada depuis plusieurs années, est devenue au mois de juin 1974 une corporation privée dont le contrôle est canadien du fait de la vente des actions de son capital-actions à des propriétaires canadiens. Avant cette date, l'ar- ticle 125 ne s'appliquait pas à son égard.
Le litige porte sur le montant, s'il en est, qui reste au crédit du «compte des déductions cumula- tives» de l'intimée pour son année d'imposition 1975 (soit l'année civile). Cette expression est définie à l'alinéa (6)b) dont les termes pertinents sont:
125.(6)...
b) «compte des déductions cumulatives» d'une corporation à la fin d'une année d'imposition donnée, signifie la fraction, si fraction il y a, du total
(i) des revenus imposables de la corporation pour des années d'imposition commençant après 1971 et se termi- nant au plus tard à la fin de l'année donnée ...
La question est de savoir si les termes de cette disposition permettent d'inclure dans le compte des déductions cumulatives de l'intimée son revenu imposable gagné en 1974 et pendant les années antérieures.
L'intimée ne pouvait se prévaloir des déductions que lui accorde l'article 125 avant son année d'im- position 1975 en raison des premiers mots du paragraphe (1):
125. (1) Une corporation, qui a été pendant toute l'année une corporation privée dont le contrôle est canadien, peut déduire de l'impôt payable par ailleurs pour une année d'imposition, en vertu de la présente Partie, une somme ...
Néanmoins, le Ministre a imposé, à l'ouverture du compte pour l'année d'imposition 1975 et subsé- quemment, l'accumulation du revenu imposable antérieur alors que la Loi ne prévoyait pas l'éta- blissement de ce compte pendant ces années anté- rieures, de sorte que l'intimée ne pouvait en retirer aucun avantage. On fait valoir que le terme «cor- poration» employé à l'alinéa (6)b) signifie «toute corporation» et s'applique à tout revenu imposable d'une corporation après 1971, de sorte qu'il fau- drait tenir compte du revenu imposable de l'inti- mée gagné avant qu'elle devienne une corporation visée à l'article 125. Je ne suis pas d'accord. Le sens du mot «corporation» doit être déterminé selon le contexte de l'ensemble de l'article dans lequel il est employé et, à mon avis, rien ne justifie l'exten- sion de son application à une période pour laquelle l'article lui-même ne s'appliquait pas à l'intimée. Les premiers mots de cet alinéa ne peuvent signi- fier qu'une corporation privée dont le contrôle est canadien. Le sous-alinéa (6)b)(i) vise «la corpora tion», c'est-à-dire la corporation dont il est ques tion dans les premiers mots de l'alinéa. En vertu de cette disposition, la première «année donnée» de l'intimée était 1975 puisqu'en vertu des premiers mots du paragraphe (1), elle n'était pas admissible à la déduction pour les années antérieures.
Je suis d'avis qu'on peut donner à cet article tout son effet en appliquant ses termes à une corpora tion pour la période pendant laquelle elle possède le statut requis, et que les termes en question ne doivent pas s'étendre rétroactivement aux opéra- tions passées de façon à modifier l'application des dispositions de cet article et à réduire, pour le présent, les avantages qu'ils visent à procurer.
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