A-204-81
Sous-ministre du Revenu national pour les doua-
nes et l'accise (appelant)
c.
Adams Brands Division of Warner-Lambert
Canada Inc. (intimée)
Cour d'appel, juges Heald et Ryan, juge suppléant
Kerr—Ottawa, 11 et 15 avril 1983.
Pratique — Appels de décisions de tribunaux, administra
tions ou autorités autres que la Division de première instance
— Demande de radiation de l'avis d'intention de participer à
un appel — Droit de déposer un tel avis prévu à la Règle 1303
— L'intervenante, Kelso, Division of Merck & Co., n'a pas
signifié au secrétaire de la Commission du tarif qu'elle com-
paraîtrait, comme le veut l'art. 47(2) de la Loi sur les douanes
— L'intimée soutient que seules les parties à un appel à la
Commission du tarif ont le droit d'interjeter appel devant la
Cour fédérale — La Règle 1300(2) prévoit que les Règles du
chapitre C ne s'appliquent que lorsqu'il n'existe pas de dispo
sitions spéciales régissant le sujet en question — L'intimée
prétend que la Règle 1303 ne s'applique pas parce que les art.
47 et 48 constituent les dispositions régissant le sujet en
question — Demande rejetée parce qu'elle est prématurée —
La Règle 1300(2) n'exclut pas l'application des autres Règles
du chapitre C — La Règle 1310 accorde à la Cour le pouvoir
discrétionnaire de décider quelles personnes pourront compa-
raître au débat sur un appel — Les art. 47 et 48 concernent les
parties à l'appel devant la Commission du tarif — Les Règles
1303 et 1310 se rapportent aux personnes qui peuvent compa-
raître au débat sur un appel en plus des parties mentionnées
expressément dans la Loi sur les douanes — La question de
savoir si l'intervenante a dans l'issue de l'appel un intérêt
justifiant qu'elle soit entendue devra être tranchée par la Cour
une fois qu'une demande en vertu de la Règle 1310 aura été
présentée — Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663,
Règles 1300(2), 1303, 1305, 1306, 1307, 1310, 1313 — Loi sur
les douanes, S.R.C. 1970, chap. C-40, art. 47, 48 mod. par
S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10, art. 65, Item 12.
AVOCATS:
I. G. Whitehall, c.r., pour l'appelant.
Paul Kane et James Robertson pour l'inti-
mée.
J. R. Miller pour l'intervenante.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelant.
Perley-Robertson, Panet, Hill & McDougall,
Ottawa, pour l'intimée.
Martineau Walker, Montréal, pour l'interve-
nante.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: La Cour est saisie par l'inti-
mée d'une demande d'ordonnance de radiation de
l'avis d'intention de participer à un appel déposé
en vertu de la Règle 1303 [Règles de la Cour
fédérale, C.R.C., chap. 663] par Kelso, Division of
Merck & Co. (ci-après «Merck»)'.
L'appel en question, fondé sur les dispositions de
l'article 48 de la Loi sur les douanes, S.R.C. 1970,
chap. C-40, modifiée [S.R.C. 1970 (2 e Supp.),
chap. 10, art. 65, item 12], vise une décision de la
Commission du tarif, datée du 26 février 1981.
Voici le texte de l'article 48:
48. (1) N'importe laquelle des parties dans un appel prévu
par l'article 47, savoir:
a) la personne appelante,
b) le sous-ministre, ou
c) toute personne qui a fait acte de comparution en confor-
mité du paragraphe 47(2), si elle a un intérêt important dans
l'appel et si elle a obtenu la permission de la Cour,
peut, dans un délai de soixante jours après l'établissement d'une
ordonnance, d'une conclusion ou d'une déclaration selon le
paragraphe 47(3), en appeler à la Cour fédérale du Canada, sur
toute question de droit.
(2) Un appel selon le présent article, émanant de quelque
personne, doit être intenté par la signification, aux autres
parties dans l'appel, d'un avis d'appel en double exemplaire,
d'après la formule que les règles déterminent, et par la produc
tion d'une copie dudit avis au greffe de la Cour.
(3) La signification visée par le paragraphe (2) à toute partie
dans un appel doit s'effectuer de la manière dont une plainte
émanée de la Cour pourrait lui être signifiée, ou
a) dans le cas du sous-ministre, en lui expédiant l'avis d'appel
par courrier recommandé à l'adresse suivante: «Le sous-
ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise,
Ottawa, Ontario», ou
b) dans le cas de toute autre personne, en lui expédiant l'avis
d'appel, par courrier recommandé, à l'adresse figurant sur les
registres du secrétaire de la Commission du tarif ou, si ledit
' La Règle 1303 dit:
Avis d'intention de participer à un appel
Règle 1303. (1) Toute personne qui désire participer à un
appel doit déposer un avis de son intention d'y participer,
lequel doit indiquer notamment son adresse et, si elle a un
procureur ou solicitor, le nom et l'adresse professionnelle de
celui-ci.
(Voir Règle 2 au sujet de l'«adresse aux fins de signification»)
(2) Une personne qui n'a pas, en vertu de l'alinéa (1),
déposé un avis de son intention de participer à un appel
n'aura pas droit à un avis ou de recevoir d'autres documents
si cet avis est signifié, ou si ces autres documents sont
transmis, plus de 7 jours après avoir reçu signification de
l'avis d'appel.
secrétaire ne peut fournir d'adresse, en affichant l'avis d'ap-
pel dans le bureau de ce secrétaire.
(4) Le plus tôt possible après qu'un appel a été intenté en
vertu du présent article, l'appelant doit produire une copie de
l'avis d'appel au bureau du secrétaire de la Commission du
tarif.
(5) Toute personne qui a fait acte de comparution en confor-
mité du paragraphe 47(2) peut, si elle a un intérêt important
dans l'appel, faire acte de comparution devant la Cour de la
manière que les règles peuvent prescrire, et, si ladite personne a
fait un tel acte de comparution, les paragraphes (9), (10) et
(11) s'appliquent à cette personne comme si elle était un
intimé, et elle peut être entendue sur l'appel.
(6) Lorsque l'appel a été intenté par une personne mention-
née à l'alinéa (1)c), la personne qui a porté l'appel devant la
Commission du tarif ou le sous-ministre peut produire un avis
déclarant qu'elle a l'intention ou qu'il a l'intention d'appuyer
l'appel ou de s'y opposer, et, sur production dudit avis, les
paragraphes (9), (10) et (11) lui sont applicables comme s'il
s'agissait d'un intimé.
(7) Un appel interjeté par une personne autre que le sous-
ministre et toutes procédures en l'espèce sont nuls et sans effet,
à l'expiration de trente jours depuis la date où l'on a intenté
l'appel, sauf si un cautionnement de cent cinquante dollars pour
les frais de l'appel a été déposé au greffe de la Cour, dans ledit
délai. Lorsqu'un appel devient nul et sans effet en vertu du
présent article, aucun autre appel ne peut être intenté à l'égard
de la même décision.
(8) L'appelant doit, dans l'avis d'appel, énoncer un exposé
des faits, les dispositions statutaires et les raisons qu'il a
l'intention de soumettre à l'appui de son appel.
(9) Dans les trente jours à compter de la date où l'intimé
reçoit l'avis d'appel, ou dans tel délai supplémentaire que la
Cour peut accorder soit avant, soit après l'expiration de la
période en question, l'intimé doit signifier à l'appelant et pro-
duire auprès de la Cour une réplique à l'avis d'appel contenant
un exposé de tels faits additionnels et de telles dispositions
statutaires et raisons que l'intimé a l'intention d'invoquer.
(10) Si l'intimé désire appeler de la décision de la Commis
sion du tarif, il peut, au lieu de produire un avis d'appel,
notifier par sa réplique (bien qu'elle soit produite et signifiée
après l'expiration du délai fixé par le paragraphe (1) pour
l'appel), au moyen d'un contre-appel, son intention de préten-
dre que la décision de la Commission du tarif devrait être
modifiée, en y énonçant un exposé de tels faits additionnels et
de telles dispositions statutaires et raisons qu'il a l'intention
d'invoquer à l'appui de ce qu'il prétend.
(11) Lorsqu'un intimé a inclus, dans sa réplique, un avis par
voie de contre-appel, l'appelant peut produire une réplique au
contre-appel, et les dispositions concernant une réplique à l'avis
d'appel s'y appliquent, mutatis mutandis.
(12) La Cour peut, à sa discrétion, rayer tout ou partie d'un
avis d'appel pour inobservation du paragraphe (8) et peut
permettre la modification d'un avis d'appel ou la substitution
d'un nouvel avis d'appel à celui qui a été rayé.
(13) La Cour peut, à sa discrétion,
a) rayer toute partie d'une réplique pour inobservation du
présent article, ou permettre la modification d'une réplique,
et
b) rayer une réplique pour inobservation du présent article et
ordonner la production d'une nouvelle réplique dans le délai
que l'ordonnance doit fixer.
(14) Si un avis d'appel a été rayé pour inobservation du
paragraphe (8) et qu'un nouvel avis d'appel ne soit pas produit
lorsque la Cour l'a permis, la Cour peut, à sa discrétion, statuer
sur l'appel en le rejetant.
(15) Lorsqu'une copie de l'avis d'appel est produite au
bureau du secrétaire de la Commission du tarif, ce dernier doit
transmettre au registraire de la Cour le dossier et les pièces se
rattachant à l'appel.
(16) Sur production de la réplique à l'avis d'appel, l'affaire
est réputée une action devant la Cour et peut être inscrite pour
audition.
(17) La Cour peut statuer sur un appel en rendant telle
ordonnance ou prononçant telle conclusion que la nature du
sujet peut exiger et, sans restreindre la généralité de ce qui
précède, peut
a) déclarer le taux de droit qui est applicable aux marchandi-
ses particulières ou à la catégorie de marchandises concer-
nant lesquelles l'appel à la Commission du tarif a été porté,
ou déclarer qu'aucun taux de droit n'y est applicable,
b) déclarer la valeur imposable des marchandises particuliè-
res ou de la catégorie de marchandises, ou
c) renvoyer l'affaire devant la Commission du tarif pour une
nouvelle audition.
(18) La Cour peut, à sa discrétion, en statuant sur un appel,
rendre telle ordonnance relative aux frais qui semble juste dans
les circonstances.
[(19) et (20) abrogés par S.R.C. 1970 (2° Supp.), chap. 10,
art. 65, Item 12]
(21) Dans le présent article
«Cour» désigne la Cour fédérale du Canada;
«intimé» désigne
a) le sous-ministre, si l'appel est formé par la personne qui a
interjeté appel à la Commission du tarif,
b) la personne qui a interjeté appel à la Commission du tarif,
si l'appel est formé par le sous-ministre, ou
c) en tout autre cas, une personne qui met opposition à
l'appel;
«règles» signifie les règles établies en vertu de la Loi sur la Cour
fédérale.
Merck n'a pas signifié au secrétaire de la Commis
sion du tarif qu'elle comparaîtrait comme le veut
e paragraphe 47(2) de la Loi sur les douanes 2 , et
elle n'a ni comparu ni participé à l'audition tenue
par la Commission.
L'avocat de l'intimée soutient qu'en raison des
articles 47 et 48 précités et de la Règle 1300(2) 3 ,
seules les personnes qui ont participé à un appel à
la Commission du tarif ont le droit de participer à
un appel d'une décision de cette Commission
devant la Cour fédérale. Selon lui, il faut interpré-
ter la Règle 1303, qui autorise une personne à
participer à un appel, comme étant subordonnée
aux dispositions générales de la Règle 1300(2)
précitée; comme en l'espèce, il existe des «disposi-
tions spéciales régissant le sujet en question»,
c'est-à-dire les articles 47 et 48 précités de la Loi
sur les douanes, il prétend que la Règle 1303 n'est
pas applicable.
Je ne partage pas cette manière de voir. Le
chapitre C des Règles de la Cour fédérale régit la
procédure des appels des décisions de tribunaux,
administrations ou autorités autres que la Division
de première instance et, par conséquent, il s'appli-
que aux fins du présent appel. Le chapitre C
commence à la Règle 1300 et comprend la Règle
1303 précitée, de même que la Règle 1310 qui
prévoit:
Parties
Règle 1310. (1) La Cour peut, à sa discrétion, sur demande
faite avant l'audition ou au cours d'une audition, décider
2 Les paragraphes (1) et (2) de l'article 47 de la Loi sur les
douanes sont ainsi libellés:
47. (1) Une personne qui se croit lésée par une décision du
sous-ministre,
a) sur la classification tarifaire ou la valeur imposable,
b) établie selon l'article 45, ou
e) sur la question de savoir si quelque drawback de droits
douaniers est payable ou sur le taux d'un tel drawback,
peut appeler de la décision à la Commission du tarif en
déposant par écrit un avis d'appel entre les mains du secré-
taire de la Commission du tarif dans les soixante jours qui
suivent la date à laquelle la décision a été rendue.
(2) Avis d'audition d'un appel en vertu du paragraphe (1)
doit être publié dans la Gazette du Canada au moins vingt et
un jours avant la date de l'audition, et toute personne qui, à
cette date ou avant cette date, signifie au secrétaire de la
Commission du tarif qu'elle comparaîtra, peut être entendue
sur l'appel.
3 Règle 1300... .
(2) Une règle contenue au présent chapitre ne s'applique que
dans les cas d'absence, dans les lois, de dispositions spéciales,
régissant le sujet en question dans le cas d'un appel déterminé.
quelles sont les personnes qui seront entendues lors du débat sur
un appel.
(2) La permission de se faire entendre ne doit être refusée en
vertu de l'alinéa (1) à aucune personne qui a déposé un avis en
vertu de la Règle 1303 sans qu'on lui ait donné la possibilité de
se faire entendre sur la question de savoir si elle doit être
entendue.
Les Règles 1303 et 1310, considérées en corréla-
tion et dans le contexte de l'ensemble du chapitre
C, montrent clairement que le droit de déposer un
avis d'intention de participer à un appel, en vertu
de la Règle 1303, est un droit absolu en ce sens
que la seule condition imposée par cette Règle est
que la «personne» en question:
a) désire participer à l'appel; et
b) dépose un avis de son intention d'y participer.
En l'espèce, Merck remplit ces conditions. Par
conséquent, il ne reste que la restriction minimale,
mentionnée plus haut, imposée aux personnes qui
peuvent déposer l'avis prévu à la Règle 1303. C'est
cependant la Règle 1310, précitée, qui régit leur
droit à être entendues lors du débat sur un appel.
En vertu de la Règle 1310, la personne désirant se
faire entendre sur un appel doit convaincre la Cour
de son droit à être entendue. Il ressort d'un
examen attentif du chapitre C des Règles que le
dépôt de l'avis prévu à la Règle 1303 confère à la
personne des droits très limités, en réalité seule-
ment le droit d'être avisée des étapes suivantes de
l'appel. En raison de la Règle 1313 4 , elle ne prend
aucune part à ce qui a trait à la constitution du
dossier conjoint de la cause en appel (Règles 1305
et 1306) ni à ce qui concerne le dépôt et la
réception des exposés des points d'argument
(Règle 1307). Ce n'est qu'après avoir demandé, en
vertu de la Règle 1310, de se faire entendre pen
dant l'appel et après avoir obtenu la permission de
la Cour, qu'elle devient une «personne intéressée»
et a droit de participer, au sens vrai de ce mot, à
l'audition de l'appel. Par conséquent, la Règle
4 La Règle 1313 est ainsi rédigée:
Interprétation
Règle 1313. Une «personne intéressée», aux fins du présent
chapitre, est une personne qui a comparu à titre de partie
dans la procédure qui a abouti à l'ordonnance ou à la
décision qui fait l'objet de l'appel ou de la demande d'autori-
sation d'appel, ainsi que toute personne à laquelle la permis
sion de se faire entendre a été accordée par ordonnance
rendue en vertu de la Règle 1310.
1300(2) n'exclut pas, à mon avis, l'application des
autres Règles du chapitre C; en effet, les disposi
tions des articles 47 et 48 précités de la Loi sur les
douanes ne concernent que les parties à l'appel
devant la Commission du tarif tandis que les
Règles 1303 et 1310 se rapportent à un sujet
différent, c'est-à-dire aux personnes qui peuvent
comparaître au débat sur un appel en plus des
parties mentionnées expressément dans la Loi sur
les douanes.
J'estime que la demande de l'intimée est pour le
moins prématurée. Il appartiendra à la Cour de
déterminer, une fois que Merck en aura fait la
demande en vertu de la Règle 1310, si Merck a
dans l'issue de l'appel un intérêt justifiant qu'elle
soit entendue au débat sur l'appel en question.
Même s'il appuie Merck dans cette demande de
radiation de l'avis déposé en vertu de la Règle
1303, l'avocat de l'appelant s'est abstenu de pren-
dre position en ce qui a trait à toute demande
présentée par Merck en vertu de la Règle 1310.
En ce qui concerne la présente demande, j'es-
time, pour les motifs susmentionnés, que Merck
avait le droit de déposer l'avis prévu par la Règle
1303 et que l'intimée n'a pas présenté d'arguments
sur lesquels la Cour pourrait se fonder pour radier
cet avis.
En conséquence, je rejetterais la demande de
l'intimée.
LE JUGE RYAN: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: J'y souscris
également.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.