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T-1112-80
Lusita Holdings Limited (demanderesse)
c.
La Reine (défenderesse)
Division de première instance, juge Mahoney— Toronto, 21 septembre; Ottawa, 27 septembre 1982.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Compagnies associées Acte de constitution créant diverses fiducies, chacune étant composée d'actions de la société demanderesse et chacune ayant Gustav Schickedanz comme l'un des deux cofiduciaires Les pouvoirs des fiduciaires comprennent le droit de vote afférent aux actions que détiennent les fiducies L'acte constitutif de fiducie confere à Schickedanz le pouvoir de relever les fiduciaires de leurs fonctions et de les remplacer Durant la même période, Schickedanz, son épouse Ann et la demanderesse étaient détenteurs de toutes les actions d'Ann-Gus Holdings Ltd. Il échet d'examiner si le pouvoir de relever les fiduciaires de leurs fonctions et de les remplacer fait que Schickedanz a le droit de contrôler les droits de vote afférents aux actions de la demanderesse Le droit de contrôler les actions que confere l'acte constitutif de
fiducie est-il un »droit» au sens de l'art. 251(5)b)? Il faut déterminer si la nature du contrôle exercé par Schickedanz sur les actions de la demanderesse détenues en fiducie et la propriété d'actions dans Ann-Gus font que la demanderesse et Ann-Gus sont des sociétés associées entre elles au sens de l'art. 256(1)d) L'action est accueillie et la cotisation annulée Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, art.
251(5)b), 256(1)d) Trustee Act, S.R.O. 1980, chap. 512, art. 3(1), 6.
Pendant les années d'imposition 1974 1977, un certain
nombre de fiducies composées d'actions de la société demande- resse étaient chacune détenues par Gustav Schickedanz et une autre personne en leur qualité de cofiduciaires. En vertu de l'acte constitutif de fiducie, les fiduciaires jouissaient du droit de vote afférent aux valeurs que détenaient les fiducies. L'arti- cle VIII g) de ce document conférait à Gustav Schickedanz le droit de relever de ses fonctions tout cofiduciaire et de nommer un successeur. Le Ministre a conclu qu'en conférant à Gustav Schickedanz un tel pouvoir, l'article VIII g) lui donnait le droit contractuel de contrôler les droits de vote afférents aux actions de la demanderesse et que, par conséquent, il était, en vertu de l'alinéa 251(5)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu, réputé contrôler la demanderesse ou en être le propriétaire. Le Minis- tre a conclu en outre que pendant ces mêmes années d'imposi- tion, Gustav Schickedanz, son épouse Ann et la demanderesse étaient les actionnaires d'Ann-Gus Holdings Limited, et que la demanderesse et Ann-Gus étaient associées entre elles au sens des alinéas 251(5)b) et 256(1)d) de la Loi.
Jugement: l'action est accueillie. Le membre de phrase «en equity ou autrement» de l'alinéa 251(5)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu se rapporte au mot «droit» et non au mot «contrat». Cet alinéa doit donc être interprété comme visant une personne qui a un droit ou bien en vertu d'un contrat, ou bien en equity, ou bien autrement, de contrôler les droits de vote
afférents aux actions. Interpréter l'alinéa 251 (5)b) comme si le législateur avait voulu qu'il s'applique uniquement à une per- sonne qui a un droit en vertu d'un contrat rendrait superflu ce membre de phrase. De plus, les membres de phrases qui suivent le membre de phrase en question, soit «immédiat ou éventuel» et «avec ou sans réserve», n'ont de sens que s'ils se rapportent au mot «droit». Ainsi, le fait que les droits de Gustav Schickedanz afférents aux actions de la demanderesse découlent de l'acte constitutif de fiducie ne le soustrait pas, en soi, à l'application de l'alinéa 251 (5)b). Toutefois, le mot «contrôle», tel qu'il a été employé dans ce contexte, a été interprété dans l'affaire Buc- kerfield's Limited, et al. v. The Minister of National Revenue, [1965] 1 R.C.E. 299, comme signifiant contrôle de droit et non contrôle de fait. Cette interprétation a été approuvée par la Cour suprême du Canada. Le paragraphe 3(1) et l'article 6 du Trustee Act de l'Ontario prévoient que la démission d'un cofiduciaire ne prend pas, en droit, effet avant la nomination de son remplaçant. Aussi doit-il toujours y avoir deux fiduciaires pour chaque fiducie. Compte tenu de ceci et du fait que l'article VIII k) de l'acte constitutif de fiducie exige que les deux fiduciaires s'entendent sur la façon d'exercer les droits de vote, il est clair que bien que le pouvoir d'exiger la démission d'un cofiduciaire permette à Gustav Schickedanz d'exercer un con- trôle de fait sur les droits de vote afférents aux actions détenues en fiducie de la demanderesse, il ne lui confère pas le contrôle de droit nécessaire pour qu'il relève de l'alinéa 251(1)b) de la Loi. En conséquence, la demanderesse et Ann-Gus Holdings Limited ne sont pas des sociétés associées au sens de l'alinéa 256(1)d) de la Loi.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Buckerfield's Limited, et al. v. The Minister of National Revenue, [1965] 1 R.C.E. 299; The Minister of National Revenue v. Dworkin Furs (Pembroke) Limited, et al., [1967] R.C.S. 223; Vina -Rug (Canada) Limited v. The Minister of National Revenue, [ 1968] R.C.S. 193.
AVOCATS:
John M. Roland, c.r. et V. Dyer pour la
demanderesse.
J. A. Van Iperen pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Osier, Hoskin & Harcourt, Toronto, pour la demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: Cette action a été jugée, sur preuve commune, avec l'action intentée par Ann-Gus Holdings Limited, de greffe T-1114-80, et est née du fait que le Ministre a
décidé que les sociétés étaient associées entre elles en vertu des alinéas 251(5)b) et 256(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, chap. 148, mod. par. S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 1. Les questions se posent de savoir si une personne qui avait le droit de contrôler les droits de vote affé- rents aux actions d'une société en vertu d'un acte constitutif de fiducie est une personne au sens de l'alinéa 251(5)b) et, dans l'affirmative, si Gustav Schickedanz avait ce droit en vertu de certains actes de fiducie à l'égard des actions de la demanderesse.
La première question peut, sans inconvénient, être tranchée avant d'arriver au long exposé con joint des faits pertinent à la seconde. L'alinéa 256(1)d) n'entre en jeu que si Gustav Schickedanz est une personne au sens de l'alinéa 251(5)b), qui est ainsi rédigé:
251... .
(5) Aux fins du paragraphe (2) et de l'article 256,
b) une personne qui avait, en vertu d'un contrat, en equity ou autrement, un droit, immédiat ou éventuel et avec ou sans réserve, à des actions d'une corporation, ou un droit de les acquérir de la sorte, ou d'en contrôler les droits de vote, est réputée, sauf lorsque le contrat stipule que le droit ne peut être exercé qu'au décès d'un particulier y désigné, avoir occupé la même position relativement au contrôle de la corporation que si les actions lui appartenaient; et [C'est moi qui souligne.]
En l'espèce, les actes constitutifs de fiducie ne sont pas, à l'évidence, des contrats. Il est de droit constant qu'une fiducie n'est pas un contrat. Il n'est pas nécessaire de sortir du cadre des manuels, qui énumèrent la multitude des distinctions, pour vérifier le bien-fondé de ce principe'.
On a insisté sur les parties importantes de l'ali- néa 251(5)b). A supposer que Gustav Schickedanz eût ce droit de contrôler les droits de vote afférents aux actions de la société demanderesse, ce serait en vertu des actes constitutifs de fiducie, et non en vertu d'un contrat. L'alinéa 251 (5)b) exige-t-il que ce droit soit d'un contrat? Quelle est la fonction du membre de phrase «en equity ou autrement»? Est-ce qu'il se rapporte au mot «contrat» qu'il suit immédiatement, ou au mot «droit»? A mon avis, il découle d'une interprétation impartiale de l'alinéa tout entier que ce membre de phrase se rapporte à
1 Underhill, Law relating to Trusts and Trustees (13e éd. 1979) 4. Waters, Law of Trusts in Canada (1974) 46 et 47.
«droit>, et que cet alinéa doit être interprété comme visant une personne qui avait, en vertu d'un contrat, un droit de contrôler les droits de vote, une personne qui avait un tel droit en equity ou une personne qui avait un tel droit autrement qu'en vertu d'un contrat ou de l'equity. En premier lieu, si le législateur avait voulu qu'il se rapporte uniquement à une personne qui avait un droit en vertu d'un contrat, alors le membre de phrase «en equity ou autrement» serait inutile. En second lieu, même si ce membre de phrase peut, d'une façon quelque peu significative, se rapporter à «contrat», les membres de phrase suivants «immédiat ou éventuel» et «avec ou sans réserve» ne le peuvent pas. Ils n'ont de sens que s'ils se rapportent au mot «droit» et non au mot «contrat».
Si, effectivement, Gustav Schickedanz avait, en vertu des actes constitutifs de fiducie, un droit de contrôler les droits de vote afférents aux actions de la demanderesse, il était une personne au sens de l'alinéa 251 (5)b).
Avant l'ouverture de l'instruction, les avocats m'ont informé qu'un autre juge de cette Cour allait trancher ce même point dans un jugement dont il avait remis le prononcé à plus tard. J'ai fait savoir qu'à mon avis, de quelque manière que la question soit tranchée en l'espèce, le droit d'appel de la partie perdante devrait être préservé jusqu'à l'expiration du délai d'appel dudit jugement. Je présume que les avocats s'arrangeront pour pren- dre promptement connaissance de l'autre juge- ment.
Voici le texte intégral de l'exposé conjoint des faits *:
[TRADUCTION] 1. A toutes les époques en cause, au cours des années d'imposition 1975, 1976 et 1977, il y avait douze actions émises et en circulation de Lusita Holdings Limited qui étaient détenues de la façon suivante:
Edward Smith en sa qualité de fiduciaire de La
fiducie Susie Schickedanz, de La fiducie
Lisa Schickedanz, de La fiducie Tina Schicke-
danz et de La fiducie Heidi Schickedanz 4
Edward Smith en sa qualité de fiduciaire
de La fiducie Susie Schickedanz 2
* Aucun témoin n'a été appelé à témoigner à l'audience. Après m'être renseigné auprès du greffe, j'ai appris que l'omis- sion de a1974» dans les paragraphes 1 et 2 de l'exposé conjoint des faits dans l'action T-1114-80 a été faite par mégarde, et qu'une confirmation écrite à ce sujet serait faite en temps utile.
Bruno Schickedanz en sa qualité de fiduciaire
de La fiducie Lisa Schickedanz 2
Rex Knight en sa qualité de fiduciaire de
La fiducie Tina Schickedanz 2
Arnold Brenner en sa qualité de fiduciaire
de La fiducie Heidi Schickedanz 2
2. A toutes les époques en cause, au cours de ses années d'imposition 1975, 1976 et 1977, les actionnaires d'Ann-Gus Holdings Limited étaient:
Gustav Schickedanz 33.3%
Ann Schickedanz (épouse de Gustav) 33.3%
Lusita Holdings Limited 33.3%
3. La fiducie Susie Schickedanz a été créée par un acte constitutif de fiducie en date du 14 avril 1969, Gustav Schicke- danz et Edward Smith y étant nommés fiduciaires.
4. La fiducie Lisa Schickedanz a été créée par un acte constitutif de fiducie en date du 14 avril 1969, Gustav Schicke- danz et Bruno Schickedanz y étant nommés fiduciaires.
5. La fiducie Tina Schickedanz a été créée par un acte constitutif de fiducie en date du 14 avril 1969, Gustav Schicke- danz et Rex Knight y étant nommés fiduciaires.
6. La fiducie Heidi Schickedanz a été créée par un acte constitutif de fiducie en date du 14 avril 1969, Gustav Schicke- danz et Arnold Brenner y étant nommés fiduciaires.
7. A toutes les époques en cause, les fiduciaires de chacune des fiducies mentionnées aux paragraphes 3, 4, 5, et 6 étaient les fiduciaires originellement nommés, et le cofiduciaire de Gustav Schickedanz dans chaque cas était un particulier qui n'était pas lié à celui-ci selon les règles énoncées aux paragra- phes 2 et 6 de l'article 251 de la Loi de l'impôt sur le revenu.
8. L'article VIII de l'acte constitutif de fiducie susmentionné pour chaque cas prévoit notamment ce qui suit:
g) Au cas GUSTAV SCHICKEDANZ, qui réside actuelle- ment au 37, chemin Steele Valley, Thornhill (Ontario), jugerait souhaitable que l'un quelconque des fiduciaires soit relevé de ses fonctions de fiduciaire, ledit GUSTAV SCHICKE- DANZ peut, en tout temps, demander, par préavis écrit, que le(s) fiduciaire(s) démissionne de son poste de fiduciaire (ou démissionnent de leur poste de fiduciaire), et, sur réception de cet avis, ils donneront sur-le-champ leur démission. Au cas un ou plusieurs des fiduciaires mourraient avant la dévo- lution complète du patrimoine de la fiducie, ou refuseraient ou seraient dans l'incapacité d'agir ou de continuer à agir à titre de fiduciaire, ou auraient reçu un avis de démission comme il a précédemment été mentionné, ledit GUSTAV SCHICKEDANZ, par acte, testament ou avis écrit, nommera immédiatement un fiduciaire remplaçant pour remplir tout poste laissé vacant pour cause de décès, de refus, d'incapacité ou par suite d'un avis écrit comme il est dit plus haut, ÉTANT ENTENDU QUE au cas ledit GUSTAV SCHICKEDANZ omet- trait ou négligerait de nommer un fiduciaire pour remplir tout poste laissé vacant de la façon susmentionnée et dans les trente (30) jours à compter de la date cette vacance est survenue, le fiduciaire restant nomme, par acte ou par avis écrit, n'importe qui à l'exception de lui-même, pour remplir le poste vacant, l'intention du constituant étant qu'il doit toujours y avoir, autant que possible, deux (2) fiduciaires pour administrer LA FIDUCIE [NOM] SCHICKEDANZ, ÉTANT ENTENDU QUE ledit GUSTAV SCHICKEDANZ aura le pouvoir,
par acte, testament ou avis écrit, de nommer une personne ou une succession de personnes, pour exercer les pouvoirs de révocation, de nomination ou de nouvelle nomination de fiduciaires qu'il tient, comme il est dit plus haut, de cet alinéa g) de l'ARTICLE VIII.
IL EST ENTENDU EN OUTRE que, au cas ledit GUSTAV SCHICKEDANZ mourrait (ou serait frappé d'incapacité) sans avoir fait une telle nomination, alors, les personnes suivantes, dans l'ordre indiqué, exerceront les pouvoirs de révocation et de nomination du fiduciaire ci-devant conférés audit GUSTAV SCHICKEDANZ.
a) ANN SCHICKEDANZ, épouse dudit GUSTAV SCHICKE- DANZ,
b) GERHART SCHICKEDANZ, frère dudit GUSTAV SCHICKE- DANZ,
e) KURT SCHICKEDANZ, frère dudit GUSTAV SCHICKE- DANZ, et
d) DANIEL SCHICKEDANZ, cousin dudit GUSTAV SCHICKE- DANZ...
k) L'approbation des deux fiduciaires est nécessaire pour toute décision prise à l'égard de LA FIDUCIE [NOM] SCHIC- KEDANZ, ÉTANT ENTENDU QUE, au cas les fiduciaires ne pourraient s'entendre sur toute question relative à la disposi tion, en tout ou en partie, du patrimoine de la fiducie, cette question sera renvoyée à l'arbitrage conformément à la Loi sur l'arbitrage de la province d'Ontario.
9. La seule hypothèse pertinente énoncée par le Ministre dans la cotisation des deux sociétés Ann-Gus Holdings Limited et Lusita Holdings Limited était que, en vertu de l'article VIII g) et k) des actes constitutifs de fiducie, Gustav Schickedanz avait un droit, en vertu d'un contrat, de contrôler les droits de vote afférents aux actions de Lusita, et que, par conséquent, en vertu de l'article 251(5)b), il est réputé contrôler Lusita ou est réputé être le propriétaire des actions de Lusita.
La demanderesse a bien fait, selon moi, de ne pas s'appuyer sur le fait que ses actions étaient, dans tous les cas, enregistrées sous le nom du cofidu- ciaire, et non de Gustav Schickedanz.
Parmi les pouvoirs que les fiduciaires tiennent des actes constitutifs de fiducie figure, à l'article VI, alinéa h), [TRADUCTION] «l'exercice du droit de vote, directement ou par procuration, relatif aux valeurs qu'ils détiennent». La décision quant à la façon d'exercer le droit de vote afférent aux valeurs, et notamment aux actions de la demande- resse, est une décision exigeant l'approbation de Gustav Schickedanz et de l'autre fiduciaire, comme l'exige l'article VIII, alinéa k). A défaut d'accord de ces derniers, cette disposition de l'acte constitutif de fiducie prévoit alors un règlement par voie d'arbitrage. Jusqu'ici, Gustav Schicke- danz ne contrôle ni de facto ni de jure les droits de vote. Toutefois, il a effectivement le pouvoir, en vertu de l'article VIII, alinéa g), de demander à
son cofiduciaire de donner sa démission et de le remplacer. Je suis certain que Gustav Schickedanz contrôle de facto les droits de vote afférents aux actions de la demanderesse que détiennent les fiducies.
Le Trustee Acte de l'Ontario prévoit:
[TRADUCTION] 3.—(1) Lorsqu'un fiduciaire ... désire obte- nir sa libération relativement à toutes les fiducies ou à l'une quelconque de celles-ci, ou relativement aux pouvoirs à lui conférés ... la personne nommée par l'acte, si acte il y a, de constitution de la fiducie pour désigner de nouveaux fiduciaires ... peut, par écrit, nommer une autre personne ... comme fiduciaire en remplacement du fiduciaire ... qui désire être libéré ...
6. A la nomination d'un nouveau fiduciaire pour la totalité ou une partie du patrimoine de la fiducie,
c) il n'est pas obligatoire de nommer plus d'un nouveau fiduciaire lorsque seulement un fiduciaire a originellement été nommé, ni de compléter le nombre initial de fiduciaires lorsque plus de deux fiduciaires ont originellement été nommés; mais, sauf lorsque seulement un fiduciaire a origi- nellement été nommé, un fiduciaire ne doit pas être libéré, en vertu de l'article 3, de sa fiducie, à moins qu'il n'y ait une société fiduciaire ou, au moins, deux particuliers agissant à titre de fiduciaires pour exécuter la fiducie; ...
A mon avis, l'alinéa 6c) a pour effet que, pour ce qui est des fiducies en litige, la démission d'un cofiduciaire demandée par Gustav Schickedanz ne saurait, en droit, prendre effet avant la nomination de son remplaçant. Aussi doit-il toujours y avoir pour chaque fiducie deux fiduciaires qui doivent s'entendre sur la façon d'exercer les droits de vote afférents aux obligations, le tout comme il est prévu à l'article VIII, alinéa k). De jure, Gustav Schickedanz n'a pas, en raison de son pouvoir d'exiger la démission de son cofiduciaire dans chaque fiducie, le pouvoir de contrôler les droits de vote afférents aux actions fiduciaires de la demanderesse.
L'interprétation, qui fait foi, du mot «contrôle» utilisé dans le contexte de la Loi de l'impôt sur le revenu est celle qu'a donnée le président Jackett dans l'affaire Buckerfield's Limited, et al. v. The Minister of National Revenue':
[TRADUCTION] Il est concevable qu'il puisse exister plusieurs façons de comprendre le mot «contrôle» dans un texte législatif tel que la Loi de l'impôt sur le revenu, quand on applique ce mot à une corporation. Il peut, par exemple, se rapporter au
2 S.R.O. 1980, chap. 152.
3 [1965] 1 R.C.É. 299, la page 302 et suiv.
contrôle par les «membres de la direction», lorsque la direction et le conseil d'administration sont distincts, ou il peut se rapporter au contrôle par le conseil d'administration. Le genre de contrôle qu'exercent les membres de la direction ou le conseil d'administration n'est évidemment pas celui que vise l'article 39 en parlant du contrôle d'une corporation par une autre de même que du contrôle d'une corporation par des particuliers (voir le paragraphe (6) de l'article 39). On conçoit très bien que le mot «contrôle» puisse se rapporter à un contrôle de fait par un actionnaire ou plus détenant ou non une majorité des actions. Je crois cependant qu'à l'article 39 de la Loi de l'impôt sur le revenu, le mot «contrôlé» recouvre le droit de contrôle qui découle de la propriété d'un certain nombre d'ac- tions, donnant droit à la majorité des voix à l'élection du conseil d'administration. Voir British American Tobacco Co. v. I.R.C. ([1943] 1 A.E.R. 13) le lord Chancelier, le vicomte Simon, a déclaré à la page 15:
Les détenteurs de la majorité des voix dans une compagnie sont ceux qui ont le contrôle réel sur ses affaires et ses destinées.
Cette décision, selon laquelle le mot «contrôle» signifie contrôle de droit et non contrôle de fait, a été expressément approuvée par la Cour suprême du Canada 4 .
L'action de la demanderesse sera accueillie. La cotisation litigieuse sera annulée, et les déclara- tions d'impôt sur le revenu de la demanderesse pour les années 1975, 1976 et 1977 seront ren- voyées au Ministre pour nouvelle cotisation en partant du principe que la demanderesse et Ann- Gus Holdings Limited n'étaient pas des corpora tions associées au sens de l'alinéa 256(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu. La demanderesse aura droit aux dépens. Le délai d'appel est prorogé jusqu'à l'expiration du délai d'appel du jugement qui sera rendu dans l'affaire Rostal Sales Agency Ltd. c. La Reine, [1983], 1 C.F. 447 (Ire inst.). Une copie des présents motifs de jugement sera déposée et formera partie du dossier de l'affaire Ann-Gus Holdings Limited c. La Reine, de greffe T-1114-80.
4 The Minister of National Revenue v. Dworkin Furs (Pem- broke) Limited, et al., [1967] R.C.S. 223. Vina -Rug (Canada) Limited v. The Minister of National Revenue, [1968] R.C.S. 193.
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