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T-5176-79
Henry Cival (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge suppléant Smith—Winnipeg, 4 mars et 19 septembre 1981.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Déductions Appel de la décision par laquelle la Commission de révision de l'impôt a rejeté une déduction à titre d'allocation du coût en capital relativement à l'usage de la voiture du demandeur L'employeur du demandeur appliquait un taux de millage uniforme pour dédommager le demandeur de tous les frais de propriété et de fonctionnement relativement à la voiture que ce dernier utilisait dans l'exercice de ses fonctions Les alloca tions de millage étaient inférieures aux frais effectivement engagés par le demandeur Il n'existait entre le demandeur et son employeur aucun contrat formel relativement aux frais de déplacement Il échet d'examiner si le demandeur peut déduire les frais non remboursés pour l'usage de sa voiture en service commandé Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970- 71-72, c. 63, art. 8(1)h),j) Règlements de l'impôt sur le revenu, DORS/54-682, art. 1100(1)a), annexe B, catégorie 10.
Appel est formé contre la décision par laquelle la Commis sion de révision de l'impôt a rejeté une déduction à titre d'allocation du coût en capital relativement à l'usage de la voiture du demandeur. C'est à la demande de son employeur qu'il se servait de sa voiture pour aller visiter les établissements commerciaux dans l'exercice de ses fonctions. Aucun contrat formel n'a été signé relativement à ses frais de déplacement en service commandé. L'employeur appliquait un taux de millage uniforme pour compenser tous les frais de propriété et de fonctionnement. La dépréciation est incluse dans les frais de propriété. Les allocations de millage ne compensaient pas tous les frais de propriété et de fonctionnement. Le demandeur a réclamé le déficit à titre de déduction. L'alinéa 8(1)h) de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit que le contribuable peut déduire les sommes qu'il a dépensées aux fins de déplacements pour exercer les fonctions de son emploi lorsqu'il (i) a été, d'une manière habituelle, tenu d'exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu même de l'entreprise de son employeur, (ii) a été tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais de déplacement engagés pour l'accomplissement des fonctions de son emploi, et (iii) n'a pis reçu d'allocation pour frais de déplacement, qui, en vertu du sous-alinéa 6(1)b)(v),(vi) ou (vii), n'était pas incluse dans le calcul de son revenu, et n'a pas réclamé de déduction pour l'année en vertu de l'alinéa e)j) ou g). Il échet d'examiner si le demandeur peut déduire les frais non remboursés pour l'usage de sa voiture en service commandé.
Arrêt: l'appel est accueilli. Pour démontrer qu'il est en droit de déduire les frais non remboursés pour l'utilisation de sa voiture en service commandé, le demandeur doit prouver qu'il a rempli toutes les trois conditions énoncées à l'alinéa 8(1)h). Il ressort des preuves produites qu'il a rempli la condition prévue au sous-alinéa (i). Pour ce qui est du sous-alinéa (ii), le total des allocations de millage qu'a reçues le demandeur en 1977 était inférieur à la part des frais d'utilisation de son automobile
durant l'année, dépréciation comprise, imputable au gouverne- ment. Le demandeur doit acquitter le déficit. Les conventions qui président à l'utilisation de la voiture en service commandé ne prévoient certes pas pareille obligation, mais selon l'une de ces conventions, le remboursement se limite à l'allocation prévue pour le millage. Puisque cette allocation est insuffisante pour rembourser tous les frais d'automobile auxquels elle est destinée à pourvoir, il est évident que le déficit tient à l'insuffi- sance du taux de millage qui, en l'espèce, ne couvre pas tous les frais. En conséquence, le demandeur doit acquitter, en vertu de son contrat, le déficit, puisque ce déficit tient à l'insuffisance de l'allocation prévue dans la convention. Qu'il ne soit pas tenu d'acquitter tous les frais de l'automobile ne doit pas porter atteinte aux droits du demandeur en ce qui concerne la fraction des frais qu'il doit acquitter. La condition énoncée au sous-ali- néa (ii) a donc été remplie. Aucune des dispositions prévues aux alinéas et sous-alinéas auxquels renvoie le sous-alinéa (iii) ne s'applique. Le demandeur a rempli la condition prévue au sous-alinéa (iii). Le sous-alinéa 8(1)h)(iii) ne s'applique qu'aux allocations qui, en vertu des sous-alinéas (v), (vi) ou (vii), ne sont pas incluses dans le calcul du revenu du contribuable, et aux déductions réclamées en vertu des alinéas e)f) ou g) du paragraphe 8(1).
Distinction faite avec les arrêts: Cekota c. Le ministre du Revenu national 64 DTC 654; Meier c. Le ministre du Revenu national 67 DTC 224; Guay c. Le ministre du Revenu national 70 DTC 1781; Krieger c. Le ministre du Revenu national 79 DTC 269; MacDonald c. Le ministre du Revenu national 80 DTC 1685.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu. AVOCATS:
A. J. Irving pour le demandeur. W. Lefebvre pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Aikins, MacAulay & Thorvaldson, Winnipeg, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT SMITH: La Cour est saisie de l'appel formé par le contribuable contre la décision, en date du 4 juillet 1979, de la Commis sion de révision de l'impôt. Par cette décision, la Commission a rejeté l'appel formé par le contri- buable contre la cotisation de son revenu pour l'année d'imposition 1977.
Le demandeur est vérificateur de la paye au bureau de Winnipeg du ministère du Revenu national. Ses fonctions le tiennent éloigné du
bureau au moins 90 p. 100 de ses heures de travail. Dans son travail, il doit aller voir à Winnipeg plusieurs contribuables dans leurs établissements respectifs, mais la plupart du temps, il doit se rendre dans d'autres villes et agglomérations. Les témoignages établissent que c'est à la demande de son supérieur hiérarchique qu'il se servait de sa propre voiture pour aller visiter les établissements commerciaux dans l'exercice de ses fonctions. Cette utilisation de la voiture a entraîné des frais de déplacement substantiels, en sus des frais occa- sionnés par son usage personnel.
Le demandeur n'a signé aucun contrat formel au sujet de ses frais de déplacement en service commandé, mais une directive du Conseil du Trésor du gouvernement fédéral, en matière de voyages, prévoit en détail les dispositions relatives au remboursement des frais de ce genre. Ce docu ment n'est pas un texte de loi, mais il expose la politique gouvernementale à suivre par les fonc- tionnaires. L'édition révisée de cette directive, en date d'avril 1977, était en vigueur pendant presque toute cette année-là. La troisième partie de cette directive porte sur les procédures relatives au transport et les taux d'indemnisation de l'usage des voitures privées. Le paragraphe 3.03 prescrit les taux de millage; en voici le passage applicable en l'espèce:
3.03 Les taux de millage pour l'utilisation officielle autorisée d'un véhicule privé à l'intérieur ou à l'extérieur de la zone d'affectation sont les suivants:
(a) Lorsque l'employeur le demande et que l'employé accepte d'utiliser l'automobile:
Toutes les provinces sauf T.-N., les T.N.-O. et le Yukon cents par mille
(i) pour chacun des premiers 4,000
milles par année financière 19.5
(ii) pour chaque mille compris entre 4,001 et
8,000 milles par année financière 17.5
(iii) pour chaque mille excédant 8,000
milles par année financière 16.5
(b) Lorsque l'employé demande la permission d'utiliser une automobile et que l'employeur
y consent 9.0
Et le paragraphe 3.061 prévoit:
3.061 Les taux . .. prescrits ci-haut sont payés suivant un système de taux variables:
a) Lorsque l'employeur le demande et que l'employé accepte d'utiliser un véhicule privé, les taux payés sont conçus pour
compenser les frais de «propriété» et les frais de «fonctionne- ment» d'un véhicule privé, c'est-à-dire:
(i) «les frais de propriété» qui consistent dans l'amortisse- ment, la taxe provinciale, les frais financiers, l'assurance et les droits de permis; et
(ii) «les frais de fonctionnement», qui consistent dans l'es- sence, l'huile, le lubrifiant, les pneus, l'entretien et les réparations.
b) Lorsque l'employé demande la permission d'utiliser un véhi- cule privé et que l'employeur y consent, les taux qui sont payés ne couvrent que les «frais de fonctionnement».
L'alinéa 3.03(a) vise indéniablement le cas du demandeur. On le remboursait selon le taux de millage prescrit par cet alinéa. Il est aussi indénia- ble que son cas est également visé par l'alinéa 3.061a) qui précise que les taux prévus à l'alinéa 3.03(a) sont conçus pour compenser à la fois les «frais de propriété» et les «frais de fonctionne- ment», et que les frais de propriété embrassent l'amortissement. A ce que je vois, l'alinéa 3.061a) signifie que les taux visés à l'alinéa 3.03(a) sont conçus pour compenser tous les frais de propriété et de fonctionnement qui sont décrits à l'alinéa 3.061a) ou, plus précisément, tous ceux que le gouvernement consent à payer.
Le demandeur a reçu, conformément à l'alinéa 3.03(a), la somme de $1,270.89 pour l'année d'im- position 1977. Il soutient que les frais qu'il a subis, pour l'utilisation de son automobile en service commandé durant la même année, s'élèvent à $1,782.92, soit 42 p. 100 du total de ses frais, et qu'ils englobent les primes d'assurance, l'essence, l'huile, les réparations et l'allocation du coût en capital (amortissement). Sa demande de rembour- sement portait donc à la fois sur les frais de propriété et les frais de fonctionnement. La défen- deresse ne conteste pas l'exactitude des chiffres avancés par le demandeur. La somme réclamée au titre de l'allocation du coût en capital est de $985.95, soit plus que la moitié de l'ensemble des frais.
En conséquence, les frais subis par le demandeur dépassaient de $512.03 le remboursement qu'il a reçu. Autrement dit, il manquait encore $512.03 au remboursement du millage parcouru au taux de 19.5 cents par mille pour couvrir les frais de propriété et de fonctionnement qu'il devait compenser.
Le demandeur a déduit de son revenu cette somme de $512.03 dans sa déclaration d'impôt
pour l'année 1977. En établissant la cotisation en cause, le Ministre a rejeté cette déduction et sa décision a été confirmée par la Commission de révision de l'impôt.
Les règles qui régissent les déductions du revenu imposable à d'autres égards sont prévues par la loi. Elles ne peuvent être modifiées par des directives du Conseil du Trésor. Les règles qui régissent la déduction des frais de déplacement figurent à l'ali- néa 8(1)h) et au sous-alinéa j)(ii) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, modi- fiés par S.C. 1970-71-72, c. 63, lesquels portent:
8. (1) Lors du calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, peuvent être déduits ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qui peut raisonnablement être considérée comme s'y rapportant:
h) lorsque le contribuable, dans l'année,
(i) a été, d'une manière habituelle, tenu d'exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu même de l'en- treprise de son employeur ou à différents endroits,
(ii) a été tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais de déplacement engagés par lui pour l'accomplis- sement des fonctions de sa charge ou de son emploi, et
(iii) n'a pas reçu d'allocation pour frais de déplacement, qui, en vertu du sous-alinéa 6(1)6)(v), (vi) ou (vii), n'était pas incluse dans le calcul de son revenu, et n'a pas réclamé de déduction pour l'année en vertu de l'alinéa e), f) ou g),
les sommes qu'il a dépensées pendant l'année aux fins de déplacements pour exercer les fonctions de son emploi;
j) lorsqu'une déduction peut s'opérer en vertu de l'alinéa J) ou h) lors du calcul du revenu tiré par un contribuable d'une charge ou d'un emploi pour une année d'imposition,
(ii) toute partie du coût en capital qui aurait été supporté par le contribuable, relativement à une automobile utilisée dans l'exercice des fonctions de sa charge ou de son emploi, qui est allouée par règlement;
Il ressort de ces dispositions que, premièrement, pour pouvoir réclamer la déduction de frais de déplacement en vertu de l'alinéa h), il faut remplir les trois conditions visées aux sous-alinéas (i), (ii) et (iii); et que, deuxièmement, l'allocation du coût en capital (amortissement) n'est pas comprise dans les frais de déplacement de l'alinéa h), mais peut être déduite conformément à l'alinéa j) dans la mesure cette déduction est permise par règle- ment. A mon avis, le mot «règlement» figurant au sous-alinéa (ii) de l'alinéa j) s'entend du [TRADUC-
TION] «règlement adopté par voie de décret confor- mément à un pouvoir prévu par la loi», ce qui exclut les directives du Conseil du Trésor.
La partie XI des Règlements de l'impôt sur le revenu, DORS/54-682, porte sur les allocations du
coût en capital. L'alinéa 1100(1)a) énumère 25 catégories de biens et indique le pourcentage maxi mal du coût en capital des biens de chaque catégo- rie que le contribuable peut déduire pour chaque année d'imposition. L'annexe B des Règlements décrit la nature des biens qui sont compris dans chaque catégorie. La première espèce de biens que mentionne la catégorie 10 est «le matériel automo bile, y compris un autobus à trolley, mais non une voiture de chemin de fer automobile acquise après le 25 mai 1976, une locomotive de chemin de fer, ou un tramway». Il est évident qu'une automobile est comprise dans cette description. Le pourcen- tage maximal de la déduction à l'égard d'un bien de la catégorie 10 est de 30 p. 100.
Si l'on applique ces dispositions à la déduction que prévoit ci-dessus le sous-alinéa 8(1)j)(ii) de la Loi, il est évident que le montant maximal du coût en capital déductible chaque année pour une auto mobile, qui appartient à l'employé et dont il se sert dans l'exercice de ses fonctions, est égal à 30 p. 100 du coût en capital de la fraction que repré- sente l'utilisation de l'automobile en service com mandé par rapport à l'utilisation totale de l'auto- mobile pour la même année d'imposition. Comme le coût en capital initial est diminué du montant déduit chaque année, le montant maximal déducti- ble, conformément à l'alinéa 1100(1)a) des Règle- ments, représente 30 p. 100 de la fraction indiquée:
du montant qui reste ... sur le coût en capital non déprécié, pour lui, des biens de la catégorie [c'est-à-dire de l'automobile], à la fin de l'année d'imposition (avant d'opérer quelque déduc- tion en vertu du présent paragraphe pour l'année d'imposition);
La politique du gouvernement prévoit le paie- ment d'allocations forfaitaires fondées sur des taux de millage pour l'utilisation de véhicules automobi les privés en service commandé. Ces taux ont été relevés au fil des ans en fonction du prix des automobiles et de leur coût de fonctionnement. Pareille méthode de paiement ne permet pas une compensation exacte de la dépréciation calculée selon un taux de millage fixe. Il en est ainsi parce qu'une automobile se déprécie chaque année, quel que soit le nombre de milles parcourus. Supposons,
à titre d'exemple, que la somme de 5 cents par mille soit prévue pour la dépréciation et qu'elle soit payée à titre d'allocation du coût en capital. Sup- posons de plus que l'automobile soit achetée neuve au prix de $10,000 et qu'elle soit conduite en service commandé sur une distance de 5,000 milles durant la première année. La dépréciation, calcu- lée selon le taux admissible de 30 p. 100, serait de $3,000. Si l'employé parcourait encore 5,000 milles pour son usage personnel, ce qui donnerait un total annuel de 10,000 milles, la moitié de la dépréciation totale de $3,000, savoir $1,500, serait imputable à l'utilisation de l'automobile en service commandé, alors qu'il ne recevrait, à titre d'alloca- tion du coût en capital, au taux de cinq cents par mille, que $250, c'est-à-dire un sixième seulement de la dépréciation effective. Si la distance parcou- rue s'élevait à 20,000 milles, dont 10,000 milles en service commandé, il recevrait $500, c'est-à-dire un tiers de la dépréciation effective. Si la fraction du taux de millage qui représente la dépréciation était de 10 cents par mille, l'employé recevrait à titre d'allocation du coût en capital le double dans chaque cas. Si la distance parcourue par le deman- deur en 1977 se situait dans la moyenne, il aurait fallu une compensation bien supérieure à 10 cents par mille pour permettre au contribuable de récu- pérer toute la valeur de la dépréciation admissible. Il en serait ainsi dans tous les cas la voiture est neuve ou n'a qu'un ou deux ans, est d'un prix assez élevé et, pendant l'année dont s'agit, n'a été con- duite en service commandé que sur une faible distance.
Par contre, si l'automobile, qui a coûté $10,000 à l'achat, avait 5 ans au début de l'année, sa valeur dépréciée à ce moment serait de $1,680.70, compte tenu d'une dépréciation annuelle de 30 p. 100 calculée sur la valeur dépréciée au début de l'an- née. La dépréciation de 30 p. 100 pour la sixième année d'utilisation s'élèverait à $504.21. La part qui revient à la moitié des milles parcourus serait de $252.11. L'employé recevrait, à titre d'alloca- tion du coût en capital, la somme de $250, calculée au taux de cinq cents par mille, pour une distance de 5,000 milles, c'est-à-dire à peu près la même somme que la dépréciation admissible. Si le taux était de dix cents par mille, l'employé recevrait $500, c'est-à-dire à peu près le double de la dépré- ciation admissible, alors qu'à dix cents par mille pour une distance de 10,000 milles, il recevrait
$1,000, soit presque quatre fois la dépréciation admissible.
De même, un taux uniforme de millage ne tient pas compte des différences énormes entre les prix des automobiles neuves.
J'en conclus donc que le gouvernement, lorsqu'il a décidé d'adopter un taux de millage à titre de moyen simple et pratique de dédommagement de l'utilisation de voitures privées en service com mandé, a presque certainement essayé de fixer un taux raisonnablement juste pour les cas l'em- ployeur demande à un employé d'utiliser sa propre voiture en service commandé. Ce taux peut donner lieu à un paiement excessif ou insuffisant des frais de la dépréciation, selon le prix et l'âge de la voiture, la distance parcourue en service com mandé et la fraction du remboursement imputable à la dépréciation.
Pour être tout à fait juste dans le cas l'em- ployé utilise sa voiture en service commandé à la demande de l'employeur, c'est-à-dire du gouverne- ment, celui-ci devrait le dédommager intégrale- ment des frais de propriété et d'utilisation de la voiture pour ce qui est de la fraction de son utilisation en service commandé durant l'année, dépréciation comprise, ni plus ni moins. La politi- que suivie par le gouvernement vise ce résultat, de manière plus ou moins approximative. Toutefois, comme nous l'avons vu, le paiement d'une somme fixe de tant de cents par mille signifie que dans certains cas, l'employé reçoit bien plus que le coût intégral de la fraction du total annuel du millage de l'automobile imputable au service commandé, et dans d'autres, comme en l'espèce, qu'une part importante de ses frais n'est pas remboursée. Dans les premiers cas, le montant du trop-payé constitue un revenu net qui est, à bon droit, imposable. Dans les autres cas, on pourrait dédommager l'intéressé de ces frais non remboursés en l'autorisant à les déduire de son revenu pour l'année.
Comme indiqué plus haut, j'estime que la dépré- ciation, même si à proprement parler elle n'est pas comprise dans l'expression «frais de déplacement», est déductible au titre des frais de propriété, en application du sous-alinéa 8(1)j)(ii) de la Loi ainsi que de l'article 1100 et de l'annexe B des Règle- ments. Il se trouve cependant que, par suite de la décision de la Commission de révision de l'impôt,
le demandeur, qui a reçu durant l'année d'imposi- tion 1977 l'intégralité des allocations de millage auxquelles il avait droit, se retrouve avec des frais non remboursés d'un montant de $512.03 pour l'utilisation de son automobile en service com mandé. C'est cette somme de $512.03 qu'il entend déduire de son revenu pour l'année 1977. Pour démontrer qu'il a droit à cette déduction, il lui faut prouver qu'il a rempli les trois conditions énoncées à l'alinéa 8(1)h) précité.
Il ressort des preuves produites qu'il a rempli la condition prévue au sous-alinéa (i). Les deux par ties se contredisent l'une l'autre pour ce qui est de la condition imposée par le sous-alinéa (ii). Je crois qu'il est utile de rappeler encore une fois ce sous- alinéa qui porte:
8. (1) ...
h) lorsque le contribuable, dans l'année,
(ii) a été tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais de déplacement engagés par lui pour l'accomplis- sement des fonctions de sa charge ou de son emploi, et
les sommes qu'il a dépensées pendant l'année aux fins de déplacements pour exercer les fonctions de son emploi;
sont déductibles de son revenu pour cette année.
L'avocat du demandeur soutient que son client était dans l'obligation d'acquitter ses frais de déplacement, ce que nie la défenderesse. Les mots «en vertu de son contrat d'emploi» ont leur impor tance dans le règlement de ce point en litige. Rien n'indique que l'emploi du demandeur est régi par un contrat écrit ou qu'il avait été informé que, selon les conditions de cet emploi, il était tenu lui-même aux frais de déplacement subis en service commandé. Par application cependant de la politi- que suivie par l'administration, exposée aux para- graphes 3.03 et 3.061, précités, de la directive du Conseil du Trésor, le demandeur acquittait habi- tuellement ces frais lui-même pour se faire rem- bourser ensuite lorsqu'il recevait l'allocation de millage prévue à cet effet. Dans la pratique, il tenait la comptabilité de ses frais de déplacement, dont le nombre de milles parcourus, et, toutes les deux semaines, soumettait un état détaillé de ses frais, pour lesquels il recevait un remboursement qui comprenait l'allocation prévue pour le nombre de milles parcourus à bord de sa propre voiture en
service commandé. Il arrivait parfois au deman- deur d'estimer à l'avance ses frais, de demander et de recevoir le montant estimatif, et de faire les redressements nécessaires lorsqu'il soumettait, après son retour à Winnipeg, l'état détaillé de ses frais réels. Dans l'un ou l'autre cas, il est évident qu'en définitive il ne supportait pas ses frais de déplacement autorisés, mais que ceux-ci étaient payés par le gouvernement. Les parties conve- naient en fait que l'employé devait être remboursé par le gouvernement des frais qu'il subissait dans l'exercice de ses fonctions.
Malheureusement, comme nous l'avons vu, le total des allocations de millage qu'a reçues le demandeur en 1977 est inférieur de $512.03 la part des frais d'utilisation de son automobile durant l'année, dépréciation comprise, imputable au gouvernement. A moins que son action ne soit accueillie et qu'il n'ait le droit de transmettre la perte à quelqu'un, le demandeur perdra donc $512.03 et devra subir cette perte parce qu'il était le propriétaire de la voiture et qu'il a engagé ces frais.
L'avocat du demandeur soutient que celui-ci doit acquitter le déficit de $512.03 parce que le gouvernement n'a pas l'obligation de rembourser plus que le montant payable conformément à sa politique. Je pense bien que le demandeur doit acquitter ce déficit. Les conventions qui président à l'utilisation de la voiture en service commandé ne prévoient certes pas pareille obligation, mais selon l'une de ces conventions, le remboursement se limite à l'allocation prévue pour le millage. Puis- que cette allocation est insuffisante pour rembour- ser tous les frais d'automobile auxquels elle est destinée à pourvoir, il est évident que le déficit tient à l'insuffisance du taux de millage qui, en l'espèce, ne couvre pas tous les frais. En consé- quence, on peut conclure que le demandeur doit, au sens large de ce mot, acquitter en vertu de son contrat le déficit de $512.03 puisque ce déficit qu'il doit assumer tient à l'insuffisance de l'alloca- tion prévue dans la convention. Qu'il ne soit pas tenu d'acquitter tous les frais de l'automobile ne doit pas porter atteinte aux droits du demandeur en ce qui concerne la fraction des frais qu'il doit acquitter. Je pense donc que le demandeur a fait la preuve qu'il remplit la condition énoncée au sous- alinéa (ii).
Avant d'aborder la condition énoncée au sous- alinéa (iii), je crois utile de le citer de nouveau, comme suit:
8. (1) ...
h) lorsque le contribuable, dans l'année,
(iii) n'a pas reçu d'allocation pour frais de déplacement, qui, en vertu du sous-alinéa 6(1)b)(v), (vi) ou (vii), n'était pas incluse dans le calcul de son revenu, et n'a pas réclamé de déduction pour l'année en vertu de l'alinéa e), f) ou g),
les sommes qu'il a dépensées pendant l'année aux fins de déplacements pour exercer les fonctions de son emploi;
sont déductibles de son revenu de cette année.
A mon avis, aucune des dispositions prévues aux alinéas et sous-alinéas auxquels renvoie le sous-ali- néa (iii) ci-dessus, ne s'applique aux faits de la cause. On ne peut donc dire que le demandeur, pour l'année 1977, a reçu une allocation pour frais de déplacement qui, en vertu d'une quelconque disposition des sous-alinéas mentionnés de l'alinéa 6(1)b), n'est pas incluse dans le calcul de son revenu. Le demandeur ne réclame pas non plus pour cette année-là les déductions que prévoient les alinéas e), f) ou g) du paragraphe 8(1). Je conclus donc que le demandeur remplit la condition prévue au sous-alinéa 8(1)h)(iii).
Il convient finalement de se reporter à la juris prudence en la matière, qui consiste surtout dans les décisions non entreprises de la Commission d'appel de l'impôt ou de la Commission de révision de l'impôt.
L'avocat de la défenderesse cite cinq décisions, dont trois de la Commission d'appel de l'impôt et, les deux plus récentes, de la Commission de révi- sion de l'impôt. Voici ces cinq décisions:
Cekota c. M.R.N. 64 DTC 654; Meier c. M.R.N. 67 DTC 224; Guay c. M.R.N. 70 DTC 1781; Krieger c. M.R.N. 79 DTC 269; et Mac- Donald c. M.R.N. 80 DTC 1685.
Le sommaire que l'on trouve dans le recueil est publiée la décision Cekota porte:
[TRADUCTION] Les trois conditions de l'article 11(9) [qui correspond à l'actuel article 8(1)h)] doivent être remplies pour que le contribuable puisse bénéficier de la déduction. En l'es- pèce, le contribuable remplit la condition de l'alinéa a) [qui correspond à l'actuel sous-alinéa (i)], mais ne remplit pas la
condition énoncée à l'alinéa b) [qui correspond à l'actuel sous-alinéa (ii)]. L'employeur a convenu de rembourser à l'ap- pelant les frais subis au cours des voyages d'affaires à l'étran- ger, et il n'est pas établi que l'appelant était tenu d'acquitter quelque fraction que ce fût de ses propres frais de déplacement.
Deux points de fait séparent cette affaire de l'affaire en instance. En l'espèce, le gouvernement (l'employeur) n'a pas convenu d'acquitter tous les frais du demandeur. Conformément à sa politique, le gouvernement acquittait l'hébergement, les repas et les appels téléphoniques interurbains qui étaient nécessaires, mais, pour l'utilisation de l'au- tomobile du demandeur, le gouvernement a fixé unilatéralement un taux de millage de tant de cents par mille et lui a payé ce montant. Comme nous l'avons vu, il manquait à ce montant $512.03 pour rembourser tous les frais d'utilisation de l'au- tomobile, imputables au gouvernement en 1977. Nous avons également vu qu'à cause de l'insuffi- sance du remboursement par le gouvernement, le demandeur n'avait d'autre choix que de prendre à sa charge ce montant de $512.03. A mon avis donc, cette décision ne va pas à l'encontre des prétentions du demandeur.
Dans l'affaire Meier, l'employée avait utilisé sa voiture en service commandé pour un seul déplace- ment en 1964, sur une distance de 171 milles, et elle avait été remboursée au taux de 10 cents par mille. Dans sa déclaration d'impôt sur le revenu pour la même année, elle réclamait la déduction des frais d'utilisation de sa voiture pour l'année entière, parce qu'on l'avait informée à tort qu'elle avait le droit de le faire. La Commission a jugé qu'elle ne pouvait réclamer cette déduction. Elle n'avait pas rempli les conditions du paragraphe 11(9), qui correspond maintenant à l'alinéa 8(1)h). Puisqu'elle avait été remboursée pour son déplacement en service commandé, elle n'était pas tenue d'assumer les frais de déplacement subis dans l'exercice de ses fonctions. Cette décision repose manifestement sur le fait qu'elle avait été remboursée.
Dans l'affaire Guay, l'appelant réclamait la déduction d'un montant substantiel de son revenu pour l'année 1968, bien qu'il eût été remboursé par son employeur pour l'utilisation de sa voiture dans l'exercice de ses fonctions. Le Ministre a refusé la déduction et sa décision a été confirmée par la Commission d'appel de l'impôt, qui s'est prononcée en ces termes la page 1781]:
[TRADUCTION] Pour qu'un employé ait le droit de déduire de son revenu (salaire en l'espèce) des frais de voyage, il faut qu'il ne reçoive aucun montant pour tenir lieu de frais de voyage. S'il reçoit un montant quelconque pour couvrir des frais de voyage occasionnés par son travail ou au cours de son travail, la Loi ne lui permet pas d'en réclamer.
La Commission a cité ensuite les trois alinéas du paragraphe 11(9) de la Loi, qui correspondent aux actuels sous-alinéas de l'alinéa 8(1)h), de même que le paragraphe 11(11), qui correspond à l'ac- tuel alinéa 8(1)j), pour conclure:
[TRADUCTION] Comme l'appelant d'une part, n'était pas tenu d'acquitter ses frais de voyage, et d'autre part, comme il touchait une allocation pour frais de voyage, c'est à regret que je dois déclarer que son appel n'est pas justifié.
Je ne saurais partager cette conclusion ni l'ex- posé du droit que contient la première citation ci-dessus. Je n'ai rien trouvé dans la Loi qui puisse légitimement s'interpréter comme signifiant que le paiement d'une somme, si petite ou si insuffisante soit-elle, par un employeur à un employé, sous forme d'allocation ou de remboursement, en dédommagement des frais de déplacement subis par cet employé dans l'exercice de ses fonctions, prive celui-ci du droit de déduire les frais qu'il a légitimement engagés. On conçoit mal que le légis- lateur entendit donner un tel effet à un paiement insuffisant. J'ai indiqué plus haut qu'à mon avis, lorsque l'employeur ne verse à l'employé qu'une fraction des frais subis par ce dernier dans l'utili- sation de sa voiture dans le cadre de ses fonctions, cet employé est tenu du solde.
Je pense que le deuxième motif de la décision rendue dans l'affaire Guay est complètement erroné. Ce ne sont pas toutes les allocations reçues pour frais de déplacement qui privent, en vertu du sous-alinéa 8(1)h)(iii), le contribuable du droit de déduire de son revenu les frais de déplacement pour l'année pendant laquelle ils ont été engagés, mais seulement une allocation qui, en vertu du sous-alinéa (v), (vi) ou (vii) de l'alinéa 6(1)b), n'était pas incluse dans le calcul de son revenu, à moins que le contribuable n'ait réclamé une déduc- tion pour l'année en vertu de l'alinéa e), J) ou g) du paragraphe 8(1). Ni dans l'affaire Guay ni en l'espèce les frais d'automobile en litige ne font l'objet d'aucun des alinéas et sous-alinéas susmen- tionnés. De plus, l'avocat du demandeur fait valoir
en l'espèce que l'allocation ou le remboursement des frais d'automobile réclamé par le demandeur a été inclus, comme il se doit, dans son revenu pour l'année.
Dans l'affaire Krieger, le contribuable effectuait des voyages d'affaires pour son employeur jusqu'à 30 jours par an. Il recevait une indemnité de voyage et réclamait la déduction des frais en excé- dent. La Commission de révision de l'impôt a conclu qu'il n'avait pas droit à la déduction parce qu'il n'était pas, [TRADUCTION] «de manière habi- tuelle», tenu de s'éloigner de l'établissement de son employeur, qu'il n'était pas tenu d'acquitter ses frais de déplacement et qu'il avait en fait reçu une indemnité pour couvrir ces frais. Cette décision ne se distingue des décisions citées plus haut que par le motif que le contribuable n'était pas tenu, «de manière habituelle», de s'éloigner de l'établisse- ment de son employeur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Dans l'affaire MacDonald, la Commission de révision de l'impôt a rejeté l'appel du contribuable par ce motif qu'il n'était pas tenu d'acquitter les frais de déplacement engagés. De plus, il avait reçu à la fois une indemnité de voyage et une allocation de millage. Cette affaire est analogue à celles que nous avons déjà étudiées. Je ne crois pas nécessaire de l'étudier plus à fond.
J'ai consulté plusieurs autres décisions de la Commission d'appel de l'impôt et de la Commis sion de révision de l'impôt, qui aboutissent toutes au même résultat que les décisions citées ci-dessus. J'ai aussi consulté plusieurs arrêts de la Cour fédérale et de la Cour suprême du Canada en matière de déductions du revenu, mais je dois conclure qu'ils ne sont d'aucun secours puisque aucun d'eux ne porte sur les points de fait ni sur les textes de loi qui nous intéressent en l'espèce.
Sauf le respect que je dois à la Commission d'appel de l'impôt et à la Commission de révision de l'impôt pour la constance de leurs vues en la matière, je ne saurais partager leur interprétation de la loi.
Il faut d'abord préciser qu'en l'espèce, ni le décompte ni le montant des frais d'automobile que réclame le demandeur n'est contesté. Le montant reçu par le demandeur en remboursement de ces frais n'est pas contesté non plus. Il est donc avéré
que le montant total que le demandeur réclame a été légitimement déboursé par ce dernier dans l'exercice de ses fonctions. Il est également indé- niable qu'après que le demandeur eut reçu la somme payée par le gouvernement conformément à sa politique de remboursement ou d'allocation, il restait un solde non remboursé de $512.03. Le demandeur n'a droit à aucun autre paiement, selon la politique gouvernementale. Il a toutefois engagé ces frais et, à moins de pouvoir les déduire de son revenu, il devra les subir. Comme indiqué plus haut, «le demandeur doit acquitter ces frais», au sens large de cette expression, par application de la politique de remboursement par le gouvernement, parce que c'est l'insuffisance du remboursement de tous les frais d'automobile prévu par cette politi- que qui l'oblige à prendre à sa charge le solde de ces frais. Je conclus donc que le demandeur satis- fait à la condition du sous-alinéa 8(1)h)(ii) de la Loi de l'impôt sur le revenu.
A mon avis, la Commission d'appel de l'impôt et la Commission de révision de l'impôt se sont four- voyées pour ce qui est de la signification et de la portée du sous-alinéa 8(1)h)(iii) de la Loi. Comme indiqué plus haut, ce sous-alinéa ne s'applique pas systématiquement à toutes les allocations de frais de déplacement. Il ne s'applique même pas, selon ses termes, à toutes les allocations de frais de déplacement qui ne sont pas incluses dans le calcul du revenu d'un contribuable. Il ne s'applique qu'aux allocations qui, en vertu des sous-alinéas (y), (vi) ou (vii), ne sont pas incluses dans le calcul du revenu du contribuable, et aux déductions réclamées en vertu des alinéas e), f) ou g) du paragraphe 8(1). Aucun de ces alinéas ou sous-ali- néas n'a de rapport avec les faits de la cause. Je ne peux conclure que le demandeur ne remplit pas la condition posée par le sous-alinéa 8(1)h)(iii).
En conséquence, j'accueille l'action du deman- deur et lui accorde les frais. L'affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour une nouvelle cotisation du revenu du demandeur pour l'année 1977, par ce motif que celui-ci peut en déduire la somme de $512.03 dont le Ministre a refusé la déduction à titre de solde des frais d'automobile subis par le demandeur dans l'exercice de ses fonctions.
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