A-553-80
La Compagnie des chemins de fer nationaux du
Canada (Appelante)
c.
La Commission canadienne des transports et la
British Columbia Forest Products Ltd. (Intimées)
Cour d'appel, les juges Urie et Ryan et le juge
suppléant MacKay—Toronto, 18 mars; Ottawa,
24 mars 1981.
Transport — Appel d'une décision rendue par le Comité des
transports par chemin de fer, ordonnant de divulguer à la
British Columbia Forest Products Ltd. des renseignements
relatifs à l'état des frais et revenus que l'appelante a déposé à
l'appui de sa demande d'abandon d'exploitation d'un embran-
chement — Il échet d'examiner si la décision du Comité peut
faire l'objet d'un appel en vertu de l'art. 64(2) de la Loi
nationale sur les transports — Il échet d'examiner si l'art.
329(3) de la Loi sur les chemins de fer interdit la contestation
à une audience publique d'une conclusion relative à la perte
réelle — Il échet d'examiner si l'art. 253(4) de la Loi sur les
chemins de fer a pour effet de restreindre l'étendue du pouvoir
discrétionnaire général visé à l'art. 331, lequel autorise la
Commission à permettre la publication de renseignements
relatifs au coût d'exploitation d'un chemin de fer, si l'intérêt
public l'exige — Appel rejeté — Loi nationale sur les trans
ports, S.R.C. 1970, c. N-17, telle que modifiée, art. 45, 64(2)
— Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1970, c. R-2, art.
253(2),(3),(4), 254(1), (3), 329(3), 331.
Appel d'une décision du Comité des transports par chemin de
fer, interjeté conformément à une autorisation qui a été accor-
dée sous réserve de la détermination du droit d'en appeler de la
décision. Le Comité a ordonné la divulgation à la British
Columbia Forest Products Ltd. de renseignements relatifs à
l'état des frais et revenus déposé à l'appui d'une demande
d'abandon d'exploitation d'un embranchement si celle-ci pou-
vait prouver que certaines de ces données étaient pertinentes et
indispensables à l'étude de son cas et si l'appelante était
incapable de prouver un préjudice réel et important. Le para-
graphe 64(2) de la Loi nationale sur les transports donne le
droit de former appel sur une question de droit ou de compé-
tence quand une autorisation à cet effet a été obtenue dans le
délai d'un mois après que l'ordonnance, l'arrêt ou le règlement
entrepris a été rendu. Les articles 253 et 254 de la Loi sur les
chemins de fer prévoient que la compagnie de chemin de fer
doit soumettre un état des frais et revenus de la compagnie
relatifs à la ligne qu'elle désire abandonner. L'article 331 de la
Loi sur les chemins de fer interdit la publication de renseigne-
ments de nature confidentielle, sauf si de l'avis de la Commis
sion, cette publication est nécessaire dans l'intérêt public. Le
paragraphe 329(3) de la Loi sur les chemins de fer dispose que
la décision de la Commission sur les frais est définitive et lie
toutes les parties. La Cour doit trancher les questions de savoir
si la décision du Comité peut faire l'objet d'un appel en vertu
du paragraphe 64(2) de la Loi nationale sur les transports, si le
paragraphe 329(3) de la Loi sur les chemins de fer empêche la
contestation, lors d'une audition publique, de la conclusion
concernant la perte réelle tirée par la Commission en vertu du
paragraphe 253(4) de cette Loi, et si l'obligation qu'a la
Commission en vertu du paragraphe 253(4) de donner avis
public de ses principales conclusions concernant la perte réelle
restreint l'étendue de son pouvoir discrétionnaire général visé à
l'article 331, lequel l'autorise à permettre la publication de
renseignements relatifs au coût d'exploitation d'une compagnie
de chemin de fer.
Arrêt: l'appel est rejeté. La décision rendue est bien un
«arrêt» aux termes du paragraphe 64(2) de la Loi nationale sur
les transports car elle était de la compétence que l'article 331
de la Loi sur les chemins de fer attribue à la Commission,
indépendamment du fait que jusqu'à maintenant personne ne
s'est fait ordonner de faire quoi que ce soit et que rien n'a été
fait en application de cette décision. Quant au deuxième point
en litige, le paragraphe 329(3) dispose que la décision de la
Commission sur les frais est définitive, mais ce fait ne porte
nullement atteinte au pouvoir discrétionnaire attribué à la
Commission de décider, le cas échéant, quelle participation du
public il pourrait y avoir dans la décision. Pour ce qui est du
troisième point, le paragraphe 253(4) décrit l'information mini
mum que la Commission doit rendre publique au sujet de son
rapport. Ce minimum ne limite en rien le pouvoir discrétion-
naire, prépondérant, attribué à la Commission d'ordonner une
publication plus extensive si, à son avis, il y va de l'intérêt
public. Puisqu'il s'agit d'une opinion, la Cour ne substituera pas
la sienne à celle de la Commission.
Arrêts mentionnés: Le procureur général du Canada c.
Cylien [1973] C.F. 1166; In re la Loi antidumping et in re
Danmor Shoe Co. Ltd. [1974] 1 C.F. 22; British
Columbia Packers Ltd. c. Le Conseil canadien des rela
tions du travail [1973] C.F. 1194.
APPEL.
AVOCATS:
S. Cantin et F. C. Hume pour l'appelante.
G. W. Nadeau, c.r., pour l'intimée la Commis
sion canadienne des transports.
J. E. Foran et M. M. Monnin pour l'intimée
la British Columbia Forest Products Ltd.
PROCUREURS:
Service du contentieux de la Compagnie des
chemins de fer nationaux du Canada, Mont-
réal, pour l'appelante.
G. W. Nadeau, c.r., Ottawa, pour l'intimée la
Commission canadienne des transports.
Aikins, MacAulay & Thorvaldson, Winni-
peg, pour l'intimée la British Columbia Forest
Products Ltd.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Appel est formé d'une décision
du Comité des transports par chemin de fer (ci-
après le Comité) de la Commission canadienne des
transports (ci-après la Commission) sur autorisa-
tion de la Cour. L'autorisation réserve à la Cour
qui connaîtra de l'appel notamment [TRADUC-
TION] «la question de savoir si la demande [d'auto-
risation de former appel, présumément] n'est pas
tardive et si on peut former appel de ladite déci-
sion sur le fondement du paragraphe 64(2) ...» de
la Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c.
N-17, modifiée.
Au début de l'appel le débat, entre les avocats
des parties et de la Commission canadienne des
transports, a porté sur la question de savoir si la
décision entreprise pouvait faire l'objet d'un appel
sur le fondement du paragraphe 64(2). Ce para-
graphe autorise de former appel à la Cour sur une
question de droit ou une question de compétence
quand une autorisation à cet effet a été obtenue
dans le délai d'un mois après que l'ordonnance,
l'arrêt ou le règlement entrepris a été rendu. En
l'espèce, l'autorisation de former appel ayant déjà
été accordée, la Cour n'a qu'à décider si la décision
entreprise pouvait faire l'objet d'un appel. Si c'est
le cas, il appartient de décider si la demande est
tardive.
L'intimée, British Columbia Forest Products
Ltd., soutient que, par analogie avec la jurispru
dence constante de la Cour relative au contrôle
judiciaire selon l'article 28, depuis l'arrêt Le pro-
cureur général du Canada c. Cylien', la décision
de la Commission en l'espèce ne visait que la
manière dont devait se dérouler l'audience pu-
blique et ne constituait pas une décision au fond
tranchant le litige dont elle était saisie, à savoir si
la demande de l'appelante d'abandon d'un
embranchement devait être accueillie. En d'autres
mots, elle n'a exercé qu'une compétence incidente
organisant l'instruction de la demande dont elle est
saisie. Ce n'était donc pas une décision définitive
du tribunal dont on pouvait interjeter appel à la
1 [1973] C.F. 1166. Voir aussi: In re la Loi antidumping et in
re Danmor Shoe Co. Ltd. [1974] 1 C.F. 22; British Columbia
Packers Ltd. c. Le Conseil canadien des relations du travail
[1973] C.F. 1194.
Cour.
Je ne pense pas qu'il soit nécessaire en l'espèce
de décider si le raisonnement suivi dans la juris
prudence relative au contrôle judiciaire s'applique
lorsqu'il s'agit de décider si la décision entreprise
selon le paragraphe 64(2) de la Loi peut faire
l'objet d'un appel. Je crois plutôt qu'il faut établir
que la Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1970, c.
R-2, attribue à la Commission la compétence
légale de rendre une décision du genre de celle en
l'espèce. Il faut donc étudier la décision.
Voici brièvement les faits: l'appelante, sur le
fondement des articles 253 à 258 de la Loi sur les
chemins de fer, a demandé l'autorisation de cesser
de garder en service certains embranchements en
Colombie-Britannique. Les paragraphes 253(2),
(3) et (4) et 254(1) et (3) prévoient la façon dont
le Comité des transports par chemin de fer de la
Commission doit connaître des demandes d'aban-
don. Ils se lisent ainsi:
253....
(2) Si une compagnie désire abandonner l'exploitation d'un
embranchement, elle doit déposer à la Commission une
demande d'abandon de l'exploitation de cette ligne en confor-
mité des règles que ila Commission peut avoir établies aux
termes du paragraphe (1); et la Commission doit, dans la
région desservie par l'embranchement, donner l'avis public
qu'elle juge raisonnable.
(3) En même temps qu'elle produit sa demande d'abandon de
l'exploitation d'un embranchement, la compagnie doit égale-
ment soumettre à la Commission un état des frais et revenus de
la compagnie afférents à la ligne pour chacune d'un certain
nombre d'années financières consécutives de la compagnie que
prescrit la Commission (ci-après appelées au présent article et à
l'article 254 les «années de comptabilité prescrites»); et la
compagnie doit, aussitôt après, afficher dans chaque gare de la
ligne, en conformité de tout règlement de la Commission à ce
sujet, un avis de la demande d'abandon d'exploitation de la
ligne.
(4) Si la Commission est convaincue que la demande d'aban-
don d'exploitation d'un embranchement a été produite en con-
formité des règles et règlements de la Commission, cette der-
nière doit, après enquête, et qu'elle ait ou non donné à la
compagnie la possibilité de faire d'autres soumissions, examiner
l'état des frais et revenus mentionné au paragraphe (3), avec
tous les autres documents, faits et chiffres qu'elle estime perti-
nents, et elle doit rédiger un rapport indiquant, le cas échéant,
les montants qui, à son avis, constituent la perte réelle de
l'embranchement au cours de chacune des années de comptabi-
lité prescrites, et la Commission doit faire donner avis public
des principales conclusions du rapport dans la région desservie
par l'embranchement comme elle l'estime raisonnable.
254. (1) Si la Commission conclut qu'à son avis la compagnie
a subi, du fait de l'exploitation de l'embranchement relative-
ment auquel elle a fait une demande d'abandon d'exploitation,
une perte réelle dans une ou plusieurs des années de comptabi-
lité prescrites dont, notamment, la dernière de ces années, la
Commission doit, après avoir tenu les auditions que, le cas
échéant, elle estime nécessaires pour permettre, à toutes les
personnes qui désirent le faire, de présenter leur point de vue
sur l'abandon de l'embranchement, et en tenant compte de tous
facteurs qui lui semblent pertinents, décider si l'embranche-
ment n'est pas rentable et continuera vraisemblablement de ne
pas l'être et si la ligne doit ou non être abandonnée; mais si la
Commission conclut qu'à son avis la compagnie n'a pas subi de
perte réelle dans l'exploitation de cet embranchement au cours
de la dernière des années de comptabilité prescrites, elle doit
rejeter la demande d'abandon de l'exploitation de la ligne sans
préjudice de toute demande qui peut subséquemment être faite
pour l'abandon de l'exploitation de cette ligne.
(3) Lorsqu'elle décide si un embranchement non rentable ou
tout segment de celui-ci doit ou non être abandonné, la Com
mission doit examiner tous les facteurs qui, à son avis, concer-
nent l'intérêt public et, notamment, sans limiter la généralité de
ce qui précède,
a) les pertes réelles subies du fait de l'exploitation de
l'embranchement;
On voit donc que, au moment où il dépose sa
demande d'abandon, le chemin de fer doit aussi
soumettre à la Commission un état des frais et
revenus de la compagnie relatifs à la ligne pour les
années de comptabilité prescrites. L'intimée, Bri-
tish Columbia Forest Products Ltd., un important
usager de la ligne, cherche à obtenir et de l'appe-
lante et du Comité, par dépôt d'une requête selon
l'article 45 de la Loi nationale sur les transports,
des informations au sujet de ces frais et revenus de
l'appelante qui soient plus exhaustives que ce qui
apparaît dans les conclusions principales de la
Commission, que le paragraphe 253(4) de la Loi
sur les chemins de fer exige de publier. L'appe-
lante soutient que c'était à la Commission qu'il
appartenait de déterminer l'étendue de la perte
réelle et que les chiffres qu'elle a fournis à la
Commission pour lui permettre de ce faire étaient
confidentiels, une affaire entre elle et la Commis
sion.
Après l'instruction du 5 novembre 1979, la
Commission statua que:.
... la question des frais et profits pouvait et devait être
débattue à la prochaine audience et que, dans cette perspective,
la BCFP avait droit à une certaine divulgation des données sur
les frais. La détermination des données à divulguer devrait être
débattue dans les audiences par rapport à chaque poste de
dépenses, avec le souci de sauvegarder l'équilibre entre, d'une
part la pertinence et la nécessité de l'information et, d'autre
part, le préjudice que la divulgation de cette information risque
de porter.
Par après, la Commission donna les motifs écrits
de sa décision; voici ceux qui en soutiennent le
dispositif:
En résumé, la question des revenus et frais n'est pas une
question futile ou secondaire dans le contexte de la présente
demande d'abandon. Elle constitue un sujet de débat particuliè-
rement important dans le cadre de l'audience publique. Si la
BCFP qui est indubitablement une partie intéressée dans cette
affaire peut prouver que certaines données relatives aux frais
sont pertinentes et indispensables à l'étude de son cas et si C.N.
est incapable de prouver que la divulgation des frais lui porte
un préjudice réel et important, le Comité ordonnera la divulga-
tion de ces données.
Sur la demande des deux parties, nous n'avons pas envisagé
quelles données seraient divulguées et nous nous sommes con
tentés de limiter nos observations sur les principes généraux
régissant la divulgation dans cette affaire. Si les parties ne
peuvent pas s'entendre sur les détails, nous entendrons leurs
plaidoiries et déciderons quelles données seront divulguées.
Une lecture appliquée de ces motifs montre
clairement que la Commission s'est référée, pour
fonder sa décision, soigneusement circonscrite, à
l'article 331 de la Loi sur les chemins de fer, que
voici:
331. Lorsque la Commission obtient d'une compagnie de
chemin de fer, au cours d'une enquête faite en vertu de la
présente loi, des renseignements relatifs aux frais de cette
compagnie ou d'autres renseignements de nature confidentielle,
ces renseignements ne doivent pas être publiés ni révélés d'une
manière qui les rende utilisables par quelqu'un d'autre, sauf si,
de l'avis de la Commission, cette publication est nécessaire dans
l'intérêt public. [C'est moi qui souligne.]
Je n'ignore pas que le paragraphe 64(2) de la
Loi nationale sur les transports donne le droit de
former appel, si autorisé, d'ordonnances, d'arrêts
ou de règlements uniquement, mais j'estime,
compte tenu des faits de l'espèce, que la décision
rendue est bien un «arrêt» aux termes de l'article
car elle était de la compétence que l'article 331 de
la Loi sur les chemins de fer attribue à la Com
mission. Je dis cela indépendamment du fait que
jusqu'à maintenant, personne ne s'est fait ordonner
de faire quoi que ce soit; d'ailleurs, rien n'a été
fait, apparemment, en application de la décision.
J'en viens à cet avis parce que l'article 331 attri-
buait à la Commission la compétence de prononcer
la décision rendue. En tant que telle, il s'agit d'une
décision dont on peut former appel selon le para-
graphe 64(2) de la Loi nationale sur les trans-
ports. Ainsi, puisque l'autorisation a déjà été
accordée, sous réserve de la décision relative à la
possibilité de former appel de la décision, l'appel
peut être entendu au fond.
Ce qui ne veut pas dire que la Cour, dans une
autre espèce, ne pourrait décider que l'autorisation
d'en appeler ne devrait pas être donnée en dépit du
fait que la décision entreprise peut faire l'objet
d'un appel. Dans toute espèce, c'est au juge saisi
qu'il appartient de décider s'il doit accorder ou non
l'autorisation.
Quant à savoir si la demande d'autorisation de
former appel est tardive, comme le retard à dépo-
ser la demande résulte apparemment du fait que
l'appelante a saisi le Comité de révision de la
décision de la Commission, comme c'était son
droit, et comme l'appel soulève une question fort
défendable, le délai devrait être prorogé, si néces-
saire nunc pro tunc.
J'en viens maintenant au fond de l'affaire. L'ar-
gument de l'appelante, si je le comprends bien, est
le suivant: le paragraphe 253(4) de la Loi sur les
chemins de fer, précité, impose à la Commission,
notamment, le devoir de préparer un rapport indi-
quant, le cas échéant, les montants qui, à son avis,
constituent la perte réelle de l'embranchement au
cours de chacune des années de comptabilité pres-
crites. Les conclusions principales du rapport doi-
vent apparaître dans un avis public placé dans la
région que dessert l'embranchement. La constata-
tion d'une perte réelle, a-t-on dit, devrait être faite
avant qu'on en vienne à décider si l'embranche-
ment n'est pas rentable, et continuera vraisembla-
blement de ne pas l'être, et devrait être abandonné,
conformément à ce que prévoit le paragraphe
254(1) précité. L'argument de l'avocat est que la
constatation d'une perte réelle est la condition
préalable à la tenue d'une audience publique et
que cette constatation ne peut être contestée lors
de cette audience. Il s'agit, a-t-on dit, d'une déci-
sion de la Commission portant sur les frais et, en
vertu du paragraphe 329(3), elle est définitive et
lie les parties intéressées ou touchées 2 . A son avis,
2 329....
(3) Toute détermination des frais faite par la Commission
à l'une quelconque des fins de la présente loi est définitive et
lie toutes les parties intéressées ou concernées par cette
détermination.
tout ce que les personnes intéressées peuvent faire
à l'audince publique, c'est «de présenter leur point
de vue sur l'abandon». Ce qui ne comprend pas,
dit-il, le droit d'exprimer leur point de vue sur la
rentabilité actuelle ou éventuelle de la ligne, cette
question ayant été résolue par la Commission,
lorsqu'elle a constaté la perte réelle, condition
préalable à la tenue de l'audience.
Je n'interprète pas ainsi les articles 253 et 254.
Le paragraphe 254(1) dispose que, lors d'une audi
tion sur l'abandon:
toutes les personnes ... [peuvent] . présenter leur point de
vue sur l'abandon de l'embranchement ...
Ces termes ne restreignent en rien la portée des
interventions. La Commission en a jugé ainsi dans
le passage suivant de ses motifs:
Il est évident qu'en vertu de l'article 254(1) toutes les parties
intéressées sont habilitées à formuler leurs opinions sur la
non-rentabilité de l'embranchement. L'existence des pertes
réelles et l'importance de ces pertes doivent être prises en
considération dans l'étude de la rentabilité. Selon l'article
254(3), c'est également une question que le Comité doit exami
ner avant de décider si un embranchement doit être abandonné.
C'est donc plus qu'une simple condition préalable à satisfaire
pour passer à l'étape suivante de l'examen de la demande
d'abandon; c'est une affaire dont l'importance est évidente à
toutes les étapes de cet examen.
Les articles 253 ou 254 ne comportent aucune disposition qui
oblige la Commission à ne recevoir des soumissions en matière
de pertes réelles que de la compagnie de chemin de fer. Avant
que le Comité n'envisage l'autorisation de l'abandon, il doit y
avoir des pertes réelles dans au moins une des années de
comptabilité prescrites. Néanmoins, le facteur des pertes réelles
demeure un élément important pour déterminer, d'abord si la
ligne n'est pas rentable et continuera vraisemblablement de ne
pas l'être et, ensuite, si l'exploitation de la ligne devrait être
abandonnée. Considéré comme tel, ce facteur peut être l'objet
des commentaires et soumissions des autres parties.
Je souscris à cette interprétation des paragra-
phes en litige et ne saurais rien y ajouter d'utile.
En outre, à mon avis, le paragraphe 329(3) n'in-
firme en rien cette interprétation. Ce paragraphe
dispose que la décision de la Commission sur les
frais est définitive mais ce fait ne porte nullement
atteinte au pouvoir discrétionnaire attribué à la
Commission de décider, le cas échéant, quelle par
ticipation du public il pourrait y avoir dans la
décision.
L'avocat de l'appelante soutient en outre que le
paragraphe 253(4), in fine, «... et la Commission
doit faire donner avis public des principales con
clusions du rapport dans la région desservie par
l'embranchement comme elle l'estime raisonnable»
a pour effet de restreindre le pouvoir discrétion-
naire général, que l'article 331 attribue à la Com
mission, de permettre la publication de renseigne-
ments relatifs aux frais d'une compagnie
ferroviaire si elle est d'avis que l'intérêt public
l'exige. Pour répondre brièvement à cet argument,
il suffit de dire que le paragraphe 253(4), in fine,
décrit, il me semble, l'information minimum que la
Commission doit rendre publique au sujet de son
rapport. Ce minimum ne limite en rien le pouvoir
discrétionnaire, prépondérant, attribué à la Com
mission, d'ordonner une publicité plus extensive si,
à son avis, il y va de l'intérêt public. A cet égard,
on observera, puisqu'il s'agit d'une opinion, que la
Cour ne substituera pas la sienne à celle de la
Commission, ni ne lui a-t-on, en cet appel,
demandé de le faire.
En conséquence, par les motifs qui précèdent, je
rejetterais l'appel et certifierais à la Commission
que, de l'avis de la Cour, la décision du Comité des
transports par chemin de fer, en date du 4 février
1980, dont appel, a été rendue à bon droit.
* * *
LE JUGE RYAN: Je souscris à ces motifs.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT MACKAY: J'y souscris.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.