81-A-321
Committee for Justice and Liberty Foundation,
Canadian Arctic Resources Committee, la nation
Dene, Metis Association of the Northwest Terri
tories (Requérants)
c.
Interprovincial Pipe Line (NW) Ltd., Alberta
Chamber of Resources, Amoco Canada Petroleum
Company Ltd., Chieftain Development Co. Ltd., la
ville de Yellowknife, Esso Resources Canada
Limited, Foothills Pipe Line (Yukon) Ltd., le
gouvernement des territoires du Nord-Ouest, Hay
River Area Economic Development Corp., Impe
rial Oil Limited, la Chambre de commerce d'Inu-
vik et du district, la bande Dene Tha, NWT Grade
Stamping Agency, Rainbow Pipe Line Company
Ltd., la ville d'Inuvik et l'Office national de l'éner-
gie (Intimés)
Cour d'appel, le juge en chef Thurlow et les juges
Heald et Urie—Ottawa, 27 et 30 juin 1981.
Énergie — Loi sur l'Office national de l'énergie — Demande
d'autorisation de former appel contre la décision par laquelle
l'Office a accordé un certificat de commodité et nécessité
publiques pour la construction d'un pipe-line — Les requé-
rants invoquent l'insuffisance des témoignages devant l'Office,
dans des domaines qui les intéressent particulièrement — Il
échet d'examiner s'il se pose une question de droit ou de
compétence que la Cour serait habilitée à instruire — Loi sur
l'Office national de l'énergie, S.R.C. 1970, c. N-6, art. 18(1),
29, 35, 39, 46.
Les requérants sollicitent l'autorisation de former appel
contre la décision par laquelle l'Office national de l'énergie a
accordé un certificat de commodité et nécessité publiques à
Interprovincial Pipe Line (NW) Ltd. pour la construction et
l'exploitation d'un pipe-line. Les requérants allèguent l'insuffi-
sance des témoignages devant l'Office, surtout dans des domai-
nes qui les intéressent particulièrement, et font valoir que les
témoignages propres à combler cette insuffisance s'imposent
avant que l'Office ne soit en mesure de décerner le certificat.
La question est de savoir s'il se pose une question de droit ou de
compétence que la Cour serait habilitée à instruire.
Arrêt: la demande d'autorisation d'appel est rejetée. La Cour
ne saurait substituer son opinion à celle de l'Office quant à la
question de savoir si les faits justifiaient une conclusion de
commodité et nécessité publiques. Dans un cas comme celui qui
nous intéresse en l'espèce, l'appréciation de la commodité et de
la nécessité publiques n'est pas une question de fait, mais relève
uniquement du jugement de l'Office. De plus, les conditions
prévues au certificat visent uniquement la méthode de construc
tion, mais non le principe même de la construction du pipe-line.
La plupart des conditions relèvent indéniablement du pouvoir
de surveillance permanente que l'Office tient des articles 29, 35
et 39 de la Loi sur l'Office national de l'énergie. Et s'il est
d'autres conditions qui ne sont pas expressément prévues par
ces articles, elles relèvent du pouvoir général que l'Office tient
de l'article 46 de la Loi pour poser des conditions.
Arrêts mentionnés: Memorial Gardens Association
(Canada) Ltd. c. Colwood Cemetery Co. [1958] R.C.S.
353; Union Gas Co. of Canada Ltd. c. Sydenham Gas and
Petroleum Co. Ltd. [1957] R.C.S. 185.
DEMANDE d'autorisation d'appel.
AVOCATS:
P. Y. Atkinson pour les requérants.
J. B. Ballem, c.r., pour l'intimée Interprovin-
cial Pipe Line (NW) Ltd.
J. M. Robertson, c.r., pour les intimées Impe
rial Oil Limited et Esso Resources Canada
Limited.
F. Lamar, c.r., et A. MacDonald pour l'intimé
l'Office national de l'énergie.
E. R. Sojonky pour le procureur général du
Canada.
PROCUREURS:
Aird & Berlis, Toronto, pour les requérants.
Ballem, McDill & Maclnnes, Calgary, pour
l'intimée Interprovincial Pipe Line (NW) Ltd.
Fenerty, Robertson, Fraser & Hatch, Cal-
gary, pour les intimées Imperial Oil Limited
et Esso Resources Canada Limited.
F. Lamar, c.r., Ottawa, pour l'intimé l'Office
national de l'énergie.
Le sous-procureur général du Canada pour le
procureur général du Canada.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Les requérants estiment qu'il
est raisonnablement possible de conclure à une
erreur de droit ou de compétence de la part de
l'Office national de l'énergie qui, par décision
rendue publique le 22 avril 1981, a accordé un
certificat de commodité et nécessité publiques à
l'intimée Interprovincial Pipe Line (NW) Ltd.
(désignée ultérieurement par le sigle I.P.L.) pour
lui permettre de construire et d'exploiter un pipe
line reliant Norman Wells (territoires du Nord-
Ouest) à Zama (Alberta). Ils ont donc demandé à
la Cour l'autorisation de former appel conformé-
ment à l'article 18(1) de la Loi sur l'Office natio
nal de l'énergie, S.R.C. 1970, c. N-6.
A titre d'argument principal, les requérants sou-
tiennent que les auditions publiques de l'Office ont
été caractérisées par l'insuffisance des témoignages
en ce qui concerne notamment les questions écolo-
giques et les questions socio-économiques régiona-
les; que l'Office a reconnu cette insuffisance dont
il a fait état dans les motifs de sa décision; que les
témoignages propres à combler cette insuffisance
s'imposaient avant que l'Office n'ait été en mesure
de décerner le certificat de commodité et nécessité
publiques; et que, vu le caractère fondamental et
indispensable des témoignages en question, il
aurait fallu que les requérants aient pu les mettre à
l'épreuve par contre-interrogatoire en audiences
publiques, et le cas échéant, les faire réfuter par
leurs propres témoins. Dans leur mémoire, les
requérants font valoir ce qui suit:
[TRADUCTION] Un tribunal administratif exerçant une compé-
tence quasi judiciaire doit fonder sa décision sur les témoigna-
ges rendus en audience publique. Il ne doit pas la fonder sur la
suffisance présumée de preuves testimoniales à déposer
ultérieurement.
L'intimée I.P.L., à laquelle se joint l'intimée
Imperial Oil Limited, s'oppose à la demande d'au-
torisation d'appel, laquelle n'est soutenue par
aucun des autres intimés. L'avocat soutient que les
audiences qui ont abouti à la décision de l'Office
ont duré quelque vingt-et-un jours, et que certaines
d'entre elles se poursuivaient tard dans la nuit. Les
requérants étaient représentés aux audiences, aux-
quelles ils participaient pleinement.
A la page 194 des motifs de sa décision, l'Office
a tiré cette conclusion:
L'Office a tenu compte de toutes les données qui lui semblaient
pertinentes en étudiant la requête sollicitant la délivrance d'un
certificat et en prenant la décision qui s'imposait. L'Office est
convaincu que la commodité et la nécessité publiques requiè-
rent présentement et requerront à l'avenir les installations
pipelinières qui font l'objet de la requête présentée par l'IPL
(NW) Ltd.
Il s'est prononcé en ces termes aux pages 200 et
201:
L'Office ayant pris en considération tout ce qui précède, ainsi
que toutes les données qui lui semblent pertinentes, et étant
convaincu que la commodité et la nécessité publiques requiè-
rent présentement et requerront à l'avenir des installations pour
lesquelles l'IPL (NW) Ltd., a déposé une requête, est prêt à
délivrer à l'IPL (NW) Ltd. un certificat de commodité et de
nécessité publiques relatif aux installations pipelinières qui font
l'objet de la présente requête, en vertu des modalités stipulées à
l'annexe I, sous réserve de l'approbation du gouverneur en
conseil.
A mon avis, l'Office avait devant lui suffisamment
de preuves pour en tirer les conclusions dont s'agit.
La Cour ne saurait substituer son opinion à celle
de l'Office quant à la question de savoir si les faits
justifiaient une conclusion de commodité et néces-
sité publiques'. Dans un cas comme celui qui nous
intéresse en l'espèce, l'appréciation de la commo-
dité et de la nécessité publiques n'est pas une
question de fait, mais relève uniquement du juge-
ment de l'Office 2 . Il ne se pose donc, en ce qui
concerne la décision prise par l'Office de décerner
le certificat, aucune question de droit susceptible
de justifier une autorisation d'appel.
Pour ce qui est des conditions imposées par
l'Office à l'égard du certificat (annexe I, pages 1 à
8 inclusivement), elles visent uniquement la
méthode de construction, mais non le principe
même de la construction du pipe-line. La plupart
des conditions prévues à l'annexe I relèvent indé-
niablement du pouvoir de surveillance permanente
que l'Office tient des articles 29, 35 et 39 de la Loi
pour réglementer et contrôler les pipe-lines dans
l'intérêt public, eu égard, notamment, aux préoc-
cupations particulières des requérants, savoir les
questions socio-économiques et écologiques. Et s'il
est d'autres conditions qui ne sont pas expressé-
ment prévues par ces articles, elles relèvent, à mon
avis, du pouvoir général que l'Office tient de l'arti-
cle 46 pour poser des conditions 3 .
Il y a lieu également de noter qu'aux auditions,
l'Office a attaché une importance particulière aux
préoccupations exprimées par les requérants dans
ces deux domaines, comme en témoignent les con
ditions 5, 7 et 8 de l'annexe I. Par ces conditions,
l'I.P.L. est requise, dans les deux mois qui suivent
la délivrance du certificat, de soumettre à l'appro-
' Voir: Memorial Garden Association (Canada) Ltd. c. Col -
wood Cemetery Co. [1958] R.C.S. 353 la p. 358, le juge
Abbott.
2 Voir: Union Gas Company of Canada Limited c. Sydenham
Gas and Petroleum Company Limited [1957] R.C.S. 185 la
p. 190, le juge Rand.
3 46. (1) L'Office peut délivrer un certificat sous réserve de
telles modalités et conditions qu'il estime nécessaires ou oppor-
tunes pour donner effet aux fins et dispositions de la présente
loi.
bation de l'Office, un échéancier pour le dépôt des
[TRADUCTION] «études, programmes, pratiques,
plans et procédures écologiques et socio-économi-
ques qu'elle s'est engagée à entreprendre ou à
formuler, dont ceux prévus par les présentes condi
tions ...». Elle est requise de signifier ces docu
ments aux intervenants, lesquels peuvent faire part
à l'Office de leurs observations à leur sujet. Ces
conditions prévoient par ailleurs la possibilité de
réviser ces documents pour tenir compte des sug
gestions faites par les intervenants, sauf à l'Office
à les approuver ou à les rejeter.
Par ces motifs, je conclus que les questions
tranchées par l'Office sous forme de conditions
imposées sont toutes des questions qu'il est fondé à
résoudre de cette manière; qu'elles sont des ques
tions purement administratives qu'il n'est pas
nécessaire d'instruire de façon quasi judiciaire
dans une audition publique; et que, dans la solu
tion de ces questions administratives, l'Office s'est
acquitté de son obligation d'équité envers les
requérants en prévoyant la participation d'interve-
nants dans l'observation de ces conditions. Les
requérants ont pu participer de façon substantielle
aux auditions pour ce qui est des questions écologi-
ques et socio-économiques qui les intéressent parti-
culièrement; ils ont donc été traités de façon
équitable.
J'en conclus qu'il ne se pose aucune question de
droit ou de compétence que la Cour serait habilitée
à instruire. Par conséquent, je rejette la demande
d'autorisation d'appel.
* * *
LE JUGE EN CHEF THURLOW: Je souscris aux
motifs ci-dessus.
* *
LE JUGE URIE: Je souscris aux motifs ci-dessus.
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