T-4855-80
La Reine, sur plainte du sous-procureur général du
Canada (Demanderesse)
c.
Shaklee Canada Inc. (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Mahoney—
Edmonton, 27 et 28 janvier; Ottawa, 11 février
1981.
Vente pyramidale — Loi relative aux enquêtes sur les
coalitions — D'après la plainte, la défenderesse a incité ou
invité des personnes à participer à ce système, en violation de
l'art. 36.3(2) de la Loi — La Couronne sollicite une ordon-
nance interdisant la continuation de l'infraction alléguée — Il
échet d'examiner si le programme de la défenderesse était un
«système de vente pyramidale» au sens de l'art. 36.3(1) de la
Loi — Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, S.R.C.
1970, c. C-23, modifiée par S.C. 1974-75-76, c. 76, art. 30(2),
36.3, 46(4).
La défenderesse est réputée avoir incité ou invité des per-
sonnes à participer à un système de vente pyramidale, en
violation de l'article 36.3(2) de la Loi relative aux enquêtes sur
les coalitions. La Couronne sollicite, en vertu de l'article 30(2)
de la Loi, une ordonnance interdisant la continuation de l'in-
fraction alléguée. Le point litigieux porte sur la question de
savoir si le programme de la défenderesse était un «système de
vente pyramidale» tel que le définit l'article 36.3(1) de la Loi.
L'entreprise de la défenderesse consiste, au moyen de ventes
directes, à commercialiser ses produits qu'elle vend uniquement
à des superviseurs. Ceux-ci, à leur tour, vendent ces produits à
des distributeurs ou au consommateur. Les distributeurs peu-
vent les vendre à d'autres distributeurs, qui se trouvent dans
une chaîne de patronage, ou au consommateur. Tous les pro-
duits achetés par un distributeur peuvent, dans le cas d'annula-
tion, être retournés. Un superviseur reçoit une prime corres-
pondant à un pourcentage du volume d'achat (VA) mensuel de
son groupe. La question de l'infraction alléguée se pose lors-
qu'une prime spéciale est payée, à titre de compensation, à un
superviseur lors de la nomination, parmi les distributeurs du
groupe de parrainage de ce dernier, d'un autre superviseur.
Cette prime spéciale représente un pourcentage du VA mensuel
du groupe (c.-à-d. le VA personnel d'un distributeur plus celui
de ceux qui se trouvent au-dessous de lui dans la chaîne de
patronage) du superviseur.
Arrêt: la requête est rejetée. Le plan de la défenderesse ne
tombe pas dans la définition de l'article 36.3(1 )a) de la Loi,
puisque aucun droit de participation n'est exigé; il ne s'agit que
de ventes, et non de locations. Toutefois, la vente du produit qui
donne lieu au VA de groupe sur lequel est fondée la prime
spéciale est une vente à un «utilisateur ou consommateur
ultime». Aussi la prime payée à l'égard d'une telle vente
tombe-t-elle sous le coup de l'exclusion visée à l'article
36.3(1)b)(iii). Cette conclusion est fondée sur l'engagement qui
prévoit une base raisonnable de liquidation du stock d'un
distributeur. Ainsi, tout compte fait, le VA personnel d'un
distributeur, pendant la durée de sa participation au plan, est
une somme qui a trait seulement à des produits vendus à
quelqu'un qui est étranger au plan ou retenus pour son usage
personnel.
REQUÊTE.
AVOCATS:
Ingrid Hûtton, c.r. pour la demanderesse.
R. M. Sedgewick, c.r., J. D. Whiteside et J.
R. Sproat pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la
demanderesse.
Miller, Thomson, Sedgewick, Lewis &
Healey, Toronto, pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: D'après la plainte, la
défenderesse a, entre le 20 août 1977 et le 25
septembre 1980, Edmonton en Alberta et ailleurs
au Canada, incité ou invité des personnes à partici-
per à un système de vente pyramidale, en violation
du paragraphe 36.3(2) de la Loi relative aux
enquêtes sur les coalitions'. La Couronne sollicite,
conformément à la procédure visée au paragraphe
30(2) de la Loi, une ordonnance interdisant la
continuation de l'infraction alléguée. La présente
Cour tient du paragraphe 46(4) sa compétence en
la matière.
La preuve est constituée entièrement de faits
admis. Quant aux éléments constitutifs de l'infrac-
tion que la défenderesse aurait commise, le seul
point litigieux porte sur la question de savoir si le
programme de cette dernière était un «système de
vente pyramidale» tel que le définit la Loi. La
défenderesse prétend que même si son programme
tombe dans le champ d'application de la définition
de la Loi, il tombe également sous le coup de
l'exception prévue au paragraphe 36.3(4). Tou-
jours selon elle, le Parlement a outrepassé sa com-
pétence législative puisque l'article 36.3 touche à
la propriété, aux droits civils et à des questions
d'un intérêt purement local ou privé dans une
province. La défenderesse soutient en outre que
même si cet article relève de la compétence législa-
tive du Parlement à titre de loi criminelle, le
sous-procureur général du Canada n'a pas le pou-
' S.R.C. 1970, c. C-23, modifiée.
voir d'intenter les actions. Contrairement à ce que
prétend la défenderesse, la Couronne soutient que
cet article relève de la compétence législative du
Parlement, puisqu'il traite de la réglementation du
trafic et du commerce, de la paix, de l'ordre et du
bon gouvernement du Canada, ainsi que de la loi
criminelle.
L'article 36.3 porte ce qui suit 2 :
36.3 (1) Aux fins du présent article, «système de vente
pyramidale» désigne
a) un système de vente ou de location d'un produit suivant
lequel une personne (la «première» personne) paie un droit de
participation au système et se voit conférer le droit de
toucher un droit, une commission ou de recevoir un autre
avantage
(i) relativement au recrutement d'autres participants au
système par la première personne ou toute autre personne,
ou
(ii) relativement à des ventes ou des locations effectuées,
autrement que par la première personne, à d'autres partici
pants au système recrutés par la première personne ou par
toute autre personne; et
b) un système de vente ou de location d'un produit suivant
lequel une personne vend ou loue un produit à une autre
personne (la «seconde» personne) qui se voit conférer le droit
de recevoir un rabais, une commission ou un autre avantage
relativement à des ventes ou des locations du même produit
ou d'un autre produit, qui ne sont pas
(i) des ventes ou des locations à la seconde personne,
(ii) des ventes ou des locations effectuées par la seconde
personne, ni
(iii) des ventes ou des locations aux consommateurs ou
utilisateurs ultimes du même produit ou de l'autre produit
auxquelles ne s'attache aucun droit actuel ou éventuel de
participation ultérieure au système.
(2) Nul ne doit inciter ou inviter une autre personne à
participer à un système de vente pyramidale.
(3) Quiconque contrevient au paragraphe (2) est coupable
d'une infraction et passible,
a) après déclaration de culpabilité à la suite d'une mise en
accusation, d'une amende à la discrétion du tribunal ou d'un
emprisonnement de cinq ans, ou de l'une et de l'autre peine;
ou
b) après déclaration sommaire de culpabilité, d'une amende
de vingt-cinq mille dollars ou d'un emprisonnement d'un an,
ou de l'une et l'autre peine.
(4) Le présent article ne s'applique pas aux systèmes de vente
pyramidale autorisés, notamment par un permis, conformément
à une loi provinciale.
La défenderesse fait valoir que pour que son plan
de vente tombe dans la définition d'un «système de
vente pyramidale», il doit répondre aux conditions
tant de l'alinéa a) que de l'alinéa b) du paragraphe
2 S.C. 1974-75-76, c. 76, art. 18.
36.3 (1). Je ne suis pas de cet avis. Ce paragraphe
décrit deux systèmes différents. Le plan de la
défenderesse n'est pas un système de vente pyrami-
dale tel qu'il est décrit à l'alinéa 36.3(1)a) puisque
aucun droit de participation n'est exigé. Il ne s'agit
que de ventes, et non de locations.
La défenderesse est constituée en Ontario et
exerce ses activités commerciales dans les dix pro
vinces et dans les territoires du Nord-Ouest. Son
entreprise consiste, au moyen de ventes directes, à
commercialiser ses produits: suppléments alimen-
taires, appareils de nettoyage ménagers et produits
de beauté. La vente de ces produits est assurée
uniquement par des vendeurs indépendants, qui
entrent en contact directement avec les clients
éventuels, d'habitude au domicile de ceux-ci. En
1979, le volume global des ventes canadiennes, par
l'entremise de plus de 44,000 distributeurs, a
dépassé $10,000,000. La défenderesse est une
filiale à cent pour cent d'une société californienne,
qui, elle-même et par l'entremise de filiales, exerce
les mêmes activités commerciales en Amérique du
Nord, en Europe et en Extrême-Orient. En 1977,
le volume global des ventes mondiales, par quelque
400,000 distributeurs, a excédé $240,000,000. Ce
sont souvent des équipes composées du mari et de
la femme qui participent à ce plan.
La défenderesse vend ses produits uniquement à
des [TRADUCTION] «superviseurs». Ceux-ci, à leur
tour, vendent ces produits à des «distributeurs» ou
au consommateur. Les distributeurs peuvent les
vendre à d'autres distributeurs, qui sont directe-
ment ou indirectement sous leur patronage, ou au
consommateur. Ces produits sont vendus avec une
garantie [TRADUCTION] «entière satisfaction ou
argent remboursé». Une personne ou un couple
désireux de devenir distributeurs doivent être par-
rainés par quelqu'un qui a déjà adhéré au plan,
soit un superviseur, soit un distributeur. Dans sa
demande, le distributeur accepte d'acheter un
«Earnings Opportunity Kit» pour $12.50. Une fois
la demande acceptée par la défenderesse, elle peut-
être dénoncée par l'une et l'autre partie au moyen
d'un préavis écrit, à compter de la fin d'un mois. Si
elle est annulée dans les deux premiers mois,
l'Earnings Opportunity Kit peut être retourné en
vue d'un remboursement intégral. Tous les pro-
duits achetés par un distributeur peuvent, dans le
cas d'annulation`, être retournés pour rembourse-
ment, remboursement de 90% si l'annulation est le
fait du distributeur et de 100% si c'est la défende-
resse qui annule la demande.
Un distributeur reste dans la chaîne de patro
nage de son parrain, laquelle relève d'un supervi-
seur. Comme le montre l'organigramme suivant, le
distributeur `N' se trouve dans la chaîne de patro
nage qui conduit, par l'entremise des distributeurs
`L', `H' , `D' et `B', au superviseur `X'.
Supervisor 'X'
Superviseur X'
Distributor 'A' Distributor 'B' Distributor 'C'
Distributeur 'A' Distributeur 'B' Distributeur 'C'
•
Distributor 'D' Distributor `E' Distributor 'F'
Distributeur 'D' Distributeur E' Distributeur 'F'
Distributor 'G' Distributor 'H' Distributor `J'
Distributeur 'G' Distributeur 'H' Distributeur J'
Distributor 'K' Distributor `L' Distributor 'M'
Distributeur 'K' Distributeur `L' Distributeur 'M'
Distributor 'N' Distributor `O' Distributor `P'
Distributeur 'N' Distributeur 'O' Distributeur P'
Cet organigramme représente le groupe du super-
viseur X. Il parraine directement les distributeurs
A, B et C et, indirectement, tous les autres distri-
buteurs. A ne parraine personne; B parraine direc-
tement D et E à la fois; C ne parraine directement
que F, et ainsi de suite le long de chaque chaîne de
patronage.
Le superviseur commande des produits à la
défenderesse pour satisfaire aux besoins de ses
distributeurs et, s'il est détaillant, à ses propres
besoins. Il paie à la défenderesse le même prix que
celui qu'il fait payer à ses distributeurs. Sur la
même base, les marchandises sont vendues de dis-
tributeur en distributeur, dans la chaîne de patro
nage. Il n'y a aucun bénéfice dans la ; vente par un
distributeur à un autre qui se trouve au-dessous de
lui dans la chaîne de patronage. Le prix de vente
au public est fixé par le vendeur, quoiqu'il y ait
une liste des prix de détail suggérés que la défen-
deresse recommande de suivre. Le détaillant reçoit
la marge bénéficiaire.
Un superviseur reçoit de la défenderesse une
prime de 22% du volume d'achat mensuel de son
groupe. Un mode de partage de partie de cette
prime avec les autres personnes de la chaîne est
prévu, mais ce partage reste facultatif. Ce pro
gramme de gratification est fondé sur le volume
d'achat, ou «VA», une somme en dollars attribuée
à chaque produit par la défenderesse. Il semble
que cette somme soit le prix de détail suggéré
moins les frais afférents à l'expédition, à la manu-
tention,
aux impôts et à l'emballage spécial. Le
«VA personnel» est le VA qui se rapporte au
produit que le distributeur utilise personnellement
ou vend à des consommateurs, mais non à des
distributeurs qui se trouvent à un degré inférieur
dans la chaîne de patronage. Son VA personnel
plus celui des distributeurs qui se trouvent au-des-
sous de lui dans la chaîne de patronage constitue le
«VA de son groupe». Il est suggéré de verser au
distributeur dont , le VA personnel a atteint au
moins $150 pendant le mois une prime pour ce qui
est du VA de son groupe pour le mois. Ainsi, pour
en revenir à l'organigramme, si le VA personnel de
C est d'au moins $150, sa prime est calculée sur
son VA personnel plus celui de F et de J et, si le
VA personnel de F est d'au moins $150, sa prime
est calculée aussi sur celui de J.
Quand le VA de groupe d'un distributeur atteint
$1,000 par mois, ce dernier' est en droit d'être
nommé superviseur adjoint. Comme le montre l'or-
ganigramme, le VA du groupe B est la somme de
son VA personnel plus celui de D, E, G, H, K, L,
M, N, O et P. La défenderesse suggère qu'un
superviseur adjoint reçoive une part mensuelle du
VA de son groupe plus élevée que celle d'un
distributeur, soit de 11% à 18% plutôt que de 6% à
8%. Un superviseur adjoint achète toujours des
produits à son superviseur, et non directement à la
défenderesse. B serait nommé superviseur adjoint
si le VA mensuel de son groupe atteignait $1,000.
Si, après avoir été superviseur adjoint pendant au
moins trois mois, le VA de son groupe atteignait
$3,000 par mois, B pourrait être nommé supervi-
seur et passer des commandes directement à la
défenderesse.
C'est à partir de là que le plan de la défende-
resse deviendrait un système de vente pyramidale
au sens de l'alinéa 36.3(1)b). Jusque-là, aucun
distributeur n'a droit à une prime pour la vente
d'un produit qu'il n'a pas lui-même acheté et
revendu ou utilisé. De nouveau, l'organigramme
nous montre que si B devenait superviseur, X
perdrait le VA du groupe B qui sert de base à ses
primes. Le VA de son groupe consisterait seule-
ment dans son VA personnel et ceux de A, de C,
de F et de J. En guise de compensation, des primes
spéciales sont prévues. Elles ne sont pas facultati-
ves: il s'agit là d'une obligation de la défenderesse
à l'égard d'un superviseur lorsqu'il y a nomination,
parmi le groupe de ce dernier, d'un autre
superviseur.
Dans l'exemple de la nomination de B, X aurait
droit à une prime continue de 5% du VA du
groupe B. Si, plus tard, D devait être nommé
superviseur, B aurait droit à 5% du VA du groupe
D, et X à 2% du VA du groupe D, ainsi qu'à 5%
du VA, sans doute réduit, du groupe B. Dans le
même ordre d'idée, si H devait être nommé super-
viseur, D aurait droit à 5%, B à 2% et X à 1% du
VA du groupe H. Voilà le niveau final des primes
spéciales auxquelles a droit X, en vertu du plan, à
titre de superviseur. Dans le langage de ce plan, en
ce qui concerne cet exemple, B est superviseur de
premier degré au sein du groupe parrainé par X. Il
est de même pour D vis-à-vis du groupe B et pour
H vis-à-vis de celui de D. De même, au sein du
groupe parrainé par X, D est appelé superviseur de
second degré, et H superviseur de troisième degré.
Comme il a été indiqué, un superviseur a droit à
des primes spéciales de 5%, de 2% et de 1%,
respectivement, du VA de groupe mensuel du pre
mier, du second, et du troisième superviseur dans
son groupe de parrainage.
Un superviseur avec quatre superviseurs de pre
mier degré au sein de son groupe de parrainage
peut demander à la défenderesse de le nommer
coordinateur. Un coordinateur avec neuf supervi-
seurs de premier degré peut devenir coordinateur
principal, et un coordinateur principal avec quinze
superviseurs de premier degré aura la possibilité
d'être promu au rang de coordinateur en chef. Ces
titres sont honorifiques. Ce que semble donner leur
obtention, c'est le droit de prendre sa retraite et de
continuer à recevoir la moitié des primes de 5%, de
2% et de 1%, et ce, la vie durant.
Il y a, dans tout le Canada, environ 23 coordina-
teurs, deux ou trois coordinateurs principaux et
aucun coordinateur en chef. Jusqu'ici, aucun coor-
dinateur principal ou en chef n'a pris sa retraite. Il
y a approximativement 366 superviseurs et 1,871
superviseurs adjoints. Sur les 44,000 et quelques
distributeurs, environ 6,000 sont actifs (à temps
plein, je veux dire), 12,000 travaillent à temps
partiel, 11,000 achètent des produits essentielle-
ment pour leur propre consommation et 15,000
sont inactifs et ne vendent pas actuellement de .
produits de la défenderesse.
Il n'est pas inutile de rappeler la définition de
l'alinéa 36.3(1)b):
36.3 (1) ... «système de vente pyramidale» désigne
b) un système de vente ou de location d'un produit suivant
lequel une personne vend ou loue un produit à une autre
personne (la «seconde» personne) qui se voit conférer le droit
de recevoir un rabais, une commission ou un autre avantage
relativement à des ventes ou des locations du même produit
ou d'un autre produit, qui ne sont pas
(i) des ventes ou des locations à la seconde personne,
(ii) des ventes ou des locations effectuées par la seconde
personne, ni
(iii) des ventes ou des locations aux consommateurs ou
utilisateurs ultimes du même produit ou de l'autre produit
auxquelles ne s'attache aucun droit actuel ou éventuel de
participation ultérieure au système.
Le scénario le plus simple, le plan de gratifica
tion spéciale appliqué à un superviseur ayant un
superviseur de premier degré dans son groupe de
parrainage, implique la vente d'un produit par une
personne, la défenderesse, à une autre personne (la
«seconde» personne), le superviseur. Il implique
également que la seconde personne, le superviseur,
se voit conférer «le droit de recevoir un ... avan-
tage relativement à des ventes . .. d'un autre pro-
duit, qui ne sont pas (i) des ventes ... à la» ni «(ii)
des ventes .._. effectuées par» le. superviseur. Il
semble toutefois que, indépendamment des ventes
intermédiaires par le superviseur de premier degré
à des distributeurs et par un distributeur à un
autre, la prime est, en dernière analyse, payée
relativement à «des ventes ... aux consommateurs
ou utilisateurs ultimes» de cet autre produit et, en
tant que telle, elle tombe dans l'exception prévue
au sous-alinéa (iii).
J'en arrive à cette conclusion à cause de l'enga-
gement qui lie chaque distributeur à la défende-
resse et qui permet au distributeur de rompre ses
liens avec la défenderesse à la fin de n'importe
quel mois et d'exiger que celle-ci rachète les pro-
duits qui lui restent pour un prix non inférieur à
90% de celui qu'il a payé. Tant qu'un distributeur
participe au programme, il est possible et même
probable qu'il existe, de temps à autre, un élément
de son VA personnel qui se rapporte à son stock et
qui, en même temps, se reflète dans le VA de
groupe. Strictement parlant, un superviseur ayant
droit de recevoir une prime spéciale sur le VA de
groupe de son superviseur de premier degré conte-
nant ces éléments de VA personnel aurait le «droit
de recevoir un ... avantage relativement à des
ventes ... d'un autre produit, qui ne sont pas ...
des ventes . .. aux consommateurs . .. ultimes», au
sens du sous-alinéa 36.3(1)b)(iii). Il ne s'agit là
toutefois que d'une conséquence inévitable de la
nécessité de fixer une période de temps particulière
pour le calcul de la prime. Il reste que le plan
prévoit une base raisonnable de liquidation du
stock du distributeur. Ainsi, tout compte fait, le
VA personnel d'un distributeur, pendant la durée
de sa participation au plan, est une somme qui a
trait seulement à des produits vendus à quelqu'un
qui est étranger au plan ou retenus pour son usage
personnel. Dans les deux cas, la vente du produit
qui donne lieu au VA de groupe sur lequel est
fondée la prime spéciale est une vente à un «utilisa-
teur ou consommateur ultime» au sens du sous-ali-
néa 36.3(1)b)(iii).
Si l'on s'en réfère uniquement au système de
vente pyramidale défini par l'alinéa 36.3(1)b), il
semble que ce que le Parlement a voulu éviter,
c'est que des participants à un tel plan se trouvent,
ayant acheté des produits, privés de la possibilité
d'en disposer. C'est ce que vise le sous-alinéa
36.3(1)b)(iii). Or, le plan de la défenderesse ne
contient rien de tel puisqu'elle s'est engagée à
racheter ces produits à des conditions raisonnables.
Je trouve dès lors inutile de me pencher sur les
autres arguments avancés par les parties.
Pour ce qui est des autres primes spéciales pré-
vues par le plan, ce raisonnement s'applique muta-
tis mutandis et le résultat est le même. La défen-
deresse pourra demander à la Cour de rendre un
jugement sur la base de ces motifs. Si la Couronne
approuve la forme du jugement à prononcer, la
requête pourra être introduite en vertu de la Règle
324. Jugement ne sera pas rendu tant que la Cour
n'en aura pas fixé les termes.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.