A-217-80
Robert Dale Gressman (Requérant)
c.
Le ministère de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra-
tion (Intimé)
Cour d'appel, les juges Heald et Urie et le juge
suppléant Kelly—Winnipeg, 16 septembre;
Ottawa, 22 septembre 1980.
Examen judiciaire — Immigration — Demande d'annula-
tion d'un avis d'interdiction de séjour — Le père du requérant
a demandé et obtenu le droit d'établissement pour lui-même et
les autres membres de sa famille, sauf le requérant — La
demande du requérant a été rejetée pour cause de condamna-
tion pénale avant l'instruction — Le requérant comparaissait
devant l'arbitre, dans le cadre d'une enquête résultant d'un
rapport fait en application de l'art. 27(2) — Il échet d'exami-
ner si l'arbitre a commis une erreur en se déclarant incompé-
tent pour revoir la décision rejetant la demande du statut
d'immigrant du requérant — Il échet d'examiner si l'avis
d'interdiction de séjour attaqué est invalide parce que le
requérant aurait déjà acquis domicile au Canada, en common
law — Demande rejetée — Loi sur la Cour fédérale, S.R.C.
1970 (2' Supp.), c. 10, art. 28 — Loi sur l'immigration, S.R.C.
1952 (Supp.), c. 325, art. 5d) — Loi sur l'immigration de 1976,
S.C. 1976-77, c. 52, art. 27(1),(2).
DEMANDE d'examen judiciaire.
AVOCATS:
M. Corne, c.r. pour le requérant.
B. Meronek pour l'intimé.
PROCUREURS:
Corne & Corne, Winnipeg, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Cette demande fondée sur l'arti-
cle 28 tend à faire annuler un avis d'interdiction de
séjour délivré le 19 mars 1980, au motif que le
requérant n'était pas un citoyen canadien ni un
résident permanent et avait été déclaré coupable
d'une infraction visée par le Code criminel, S.R.C.
1970, c. C-34.
En résumé, la décision ayant amené l'avis d'in-
terdiction de séjour n'a été attaquée qu'à deux
égards, et, à mon avis, aucun des deux moyens
invoqués n'est pertinent en ce qui concerne la
présente demande et n'était pertinent pour ce qui
est de l'enquête qui a abouti à cet avis.
Tout d'abord, on a soutenu que l'arbitre avait
commis l'erreur de ne pas conclure que le requé-
rant était un résident permanent du fait qu'il avait
obtenu le droit d'établissement ou qu'il avait le
droit d'être considéré comme tel, et dès lors, le
droit au statut de résident permanent. Il a été
allégué qu'on aurait dû, en conséquence, invoquer,
à son égard, l'article 27(1) de la Loi sur l'immi-
gration de 1976, S.C. 1976-77, c. 52, avec tous les
avantages qui en découlent, et non l'article 27(2).
Ces prétentions sont fondées sur une demande qu'a
faite en 1973 le père du requérant, pour son propre
compte et celui des autres membres de sa famille,
y compris le requérant, en vue d'obtenir le statut
d'immigrant reçu en vertu des dispositions relati
ves à la rectification du statut d'immigrant de la
Loi modifiant la Loi sur la Commission d'appel
de l'immigration, S.C. 1973-74, c. 27 et du Règle-
ment y afférent. En 1975, finalement, tous les
membres de la famille du requérant ont obtenu le
droit d'établissement, sauf le requérant lui-même.
La preuve produite à l'enquête établit clairement
que la demande d'octroi du droit d'établissement
faite par ce dernier a été rejetée parce que, subsé-
quemment à l'introduction de la demande, mais
avant que l'examen de celle-ci eût été complété, le
requérant avait été déclaré coupable de quelque
vingt-quatre infractions et condamné à l'emprison-
nement. En conséquence, en vertu de l'article 5d)'
de la Loi sur l'immigration, S.R.C. 1952 (Supp.),
c. 325, qui était alors en vigueur, les services
d'immigration ont décidé que le requérant n'était
pas admissible au Canada.
I 5. Nulle personne, autre qu'une personne mentionnée au
paragraphe (2) de l'article 7, ne doit être admise au Canada si
elle est membre de l'une des catégories suivantes:
d) les personnes qui ont été déclarées coupables de quelque
crime impliquant turpitude morale, ou qui admettent avoir
commis un tel crime, excepté les personnes dont l'admis-
sion au Canada est autorisée par le gouverneur en conseil
sur preuve, par lui jugée satisfaisante,
(i) qu'au moins cinq années, dans le cas d'une personne
déclarée coupable d'un tel crime alors qu'elle était âgée
de vingt et un ans ou plus, ou au moins deux années,
dans le cas d'une personne déclarée coupable d'un tel
crime alors qu'elle avait moins de vingt et un ans, se
sont écoulées depuis l'expiration de sa période d'empri-
sonnement ou l'achèvement de sa sentence et que, dans
l'un ou l'autre cas, elle s'est réhabilitée avec succès, ou
A mon avis, il s'agit d'une décision administra
tive qui n'était pas en cause devant l'arbitre.
Celui-ci a pertinemment décidé qu'elle ne relevait
pas de sa compétence et qu'il n'était pas compétent
pour décider si les fonctionnaires avaient fait
erreur en concluant de la sorte.
Le requérant comparaissait devant l'arbitre dans
le cadre d'une enquête résultant d'un rapport fait
en septembre 1978 en application de l'article 27(2)
de la Loi de 1976. Dès lors, l'arbitre devait tout
d'abord décider si le requérant était un citoyen
canadien ou un résident permanent. Comme il a, à
mon avis, correctement conclu que le requérant
n'était ni l'un ni l'autre puisqu'il n'avait jamais
obtenu le droit d'établissement, il lui incombait de
décider s'il s'agissait d'une personne déclarée cou-
pable d'une infraction visée par le Code criminel.
Comme la preuve établissait que le requérant avait
été déclaré coupable d'une telle infraction en mai
1978, il restait seulement à l'arbitre à décider s'il
devait délivrer une ordonnance d'expulsion ou un
avis d'interdiction de séjour. Après examen, il a
décidé de délivrer un avis d'interdiction de séjour,
objet de la présente demande.
En résumé, le premier moyen du requérant n'est
pas recevable parce qu'il n'est pas pertinent en ce
qui concerne le litige dont l'arbitre était saisi. En
vérité, le requérant n'a jamais obtenu le droit
d'établissement et dès lors, suivant la Loi de 1976,
il ne peut être un résident permanent. C'est donc à
bon droit qu'un rapport a été fait à son sujet en
application de l'article 27(2) de cette Loi.
D'après le second moyen invoqué contre la déci-
sion de l'arbitre, l'avis d'interdiction de séjour
attaqué ne serait pas valide parce qu'au moment
de l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la
rectification du statut d'immigrant, en 1973, le
requérant aurait déjà acquis domicile au Canada,
en common law. A mon avis, cet argument est sans
(ii) que, s'il s'agit d'une personne qui admet avoir commis
un tel crime dont elle n'a pas été déclarée coupable, au
moins cinq années, dans le cas où elle a commis ce
crime alors qu'elle était âgée de vingt et un ans ou
plus, ou au moins deux années, dans le cas où elle a
commis ce crime alors qu'elle avait moins de vingt et
un ans, se sont écoulées depuis la date à laquelle le
crime a été commis, et, dans l'un ou l'autre cas, qu'elle
s'est réhabilitée avec succès;
fondement. En 1973, la Loi sur l'immigration de
1952 régissait le statut d'immigrant sous tous ses
aspects. L'article 4 de cette Loi, qui définissait les
conditions d'acquisition du domicile canadien,
avait donc, de ce fait, préséance sur la common
law en ce qui concerne le domicile des personnes
cherchant à entrer au Canada. Aux termes de cet
article, la personne qui prétendait avoir acquis un
domicile canadien devait en premier lieu avoir été
un immigrant reçu avant que le délai de cinq ans
fixé pour l'acquisition du domicile eût commencé à
courir. Le requérant n'a jamais obtenu le droit
d'établissement en 1973 ni après, suivant la Loi de
1952 ou celle de 1976. Il n'a donc pu acquérir ni le
domicile canadien sous le régime de la Loi de 1952
ni le statut de résident permanent sous celui de la
Loi de 1976. Le second moyen est donc aussi
irrecevable.
En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande
faite en vertu de l'article 28.
* * *
LE JUGE HEALD: J'y souscris.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT KELLY: Je souscris aux
motifs du jugement prononcés par le juge d'appel
Urie.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.