T-1233-79
Disney Shops Limited (Appelante)
c.
Le registraire des marques de commerce (Intimé)
Division de première instance, le juge Cattanach—
Toronto, 24 et 26 octobre 1979.
Marques de commerce — Appel contre la décision du
registraire des marques de commerce qui a refusé à l'appelante
sa demande d'enregistrement du mot «polo» comme marque de
commerce devant être employée en liaison avec des pantalons,
des ceintures, des robes de chambre, des coiffures, des mou-
choirs, des chaussettes et des caleçons, au motif que la marque
en cause était soit une description claire, soit une description
fausse et trompeuse — Le registraire a conclu que «polo»
désignait un genre particulier de tissu relevant du domaine
public — Les définitions données par les dictionnaires du
terme «polo cloth» soulignent qu'il s'agit d'une marque de
commerce et ne justifient pas la conclusion que le mot «polo»
désigne un tissu relevant du domaine public — Le registre ne
révèle aucun enregistrement de la marque mentionnée dans les
définitions — Appel accueilli — Loi sur les marques de
commerce, S.R.C. 1970, c. T-10, art. 12(1)b), 60.
APPEL.
AVOCATS:
W. T. Howell pour l'appelante.
B. Segal pour l'intimé.
PROCUREURS:
W. T. Howell, Toronto, pour l'appelante.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE CATTANACH: Appel est interjeté d'une
décision du registraire des marques de commerce
datée du 12 janvier 1979 refusant à l'appelante sa
demande d'enregistrement du mot «polo» comme
marque de commerce devant être employée en
liaison avec des pantalons, des ceintures, des robes
de chambre, des coiffures, des mouchoirs, des
chaussettes et des caleçons. Cette décision pro-
nonce la marque non enregistrable en application
de l'article 12(1)b) de la Loi sur les marques de
commerce, S.R.C. 1970, c. T-10, parce qu'elle
constitue soit une description claire, soit une des
cription fausse et trompeuse de la nature ou de la
qualité des marchandises en liaison avec lesquelles
elle doit être employée.
Dans sa décision, le registraire conclut en ces
termes:
[TRADUCTION] L'examinateur a démontré que le mot «polo»
désigne un genre particulier de tissu; pour cette seule raison,
aucune partie ne peut se voir accorder seule le droit, prévu à
l'art. 19 de la Loi sur les marques de commerce, d'en monopoli-
ser l'emploi.
Si j'acceptais la proposition du registraire selon
laquelle le mot «polo» désigne un genre particulier
de tissu, donc relevant du domaine public, je serais
d'accord avec sa conclusion.
La conclusion qui veut que le mot «polo» désigne
un genre particulier de tissu (comme le mot
«serge») est tirée de la définition du terme «polo
cloth» (tissu polo) dans le Fairchild's Dictionary
of Textiles et le Modern Textile Dictionary. Je
n'ai pas eu l'occasion d'examiner ces dictionnaires
puisqu'on ne m'en a fourni que des extraits.
D'après leur titre, je présume que ce sont là des
dictionnaires de termes d'usage courant dans l'in-
dustrie textile et que les extraits qui m'ont été
soumis proviennent de la dernière édition. L'avocat
de l'intimé a admis que tel était bien le cas.
Le Modern Textile Dictionary définit le terme
«polo cloth» (tissu polo) comme suit:
[TRADUCTION] Marque de commerce déposée par Worumbo
Mills, Inc., Lisbon Falls, Maine, d'un tissu en vogue utilisé pour
la fabrication de manteaux pour hommes et pour dames et de
manteaux polo. Fait d'une chaîne et d'une trame, le tissu est
composé de poils de chameau de choix et de laine fine. Ce tissu,
à l'endroit apprêté et pesant 21 onces la verge, présente une
surface à grande pilosité latente. Cet élégant tissu d'armure
sergé existe en couleur poil de chameau et en brun, bleu et gris.
Le tissu polo se reconnaît à l'emploi d'une rayure de soie à
l'envers du tissu. Il y a dans la texture du tissu une rayure tous
les trois pouces, rayure qui fait partie intégrante de la chaîne.
Dans le Fairchild's Dictionary 9f Textiles, le
terme «polo cloths (tissu polo) est défini comme
suit:
[TRADUCTION] Marque de commerce d'un tissu lourd employé
pour la fabrication de manteaux, apprêté à l'envers et à l'en-
droit de façon à lui donner une dense pilosité latente qui couvre
l'armure. Il est fait de filés souples et est généralement de
couleur ocre. Il peut être fait entièrement de laine ou de poils
de chameau ou d'un mélange des deux.
Dans les deux définitions, on souligne que le
terme «polo cloth» (tissu polo) est une marque de
commerce. Ce terme est donc employé par le
propriétaire de la marque pour établir une distinc
tion entre le tissu qu'il fabrique et le tissu fabriqué
par d'autres fabricants.
C'est en se basant sur les deux définitions préci-
tées que le registraire a conclu que le mot «polo»
désigne un tissu particulier et partant que nul ne
peut monopoliser l'usage de ce mot. Ces définitions
ne justifient pas la conclusion que le mot «polo»
désigne un tissu relevant du domaine public.
D'après ces définitions, il faut conclure que ce mot
désigne le tissu d'un fabricant précis, et non qu'il
s'agit d'un tissu relevant du domaine public ou que
le terme «polo cloth» (tissu polo) est un terme
générique au même titre que «serge» et autres mots
semblables qui désignent un genre particulier de
tissu.
Ces définitions commandent bien au contraire
une conclusion tout à fait opposée à celle du
registraire.
Le compte rendu de l'examen du registre effec-
tué par l'examinateur et que nous a transmis le
registraire en conformité avec l'article 60 de la
Loi, ne révèle aucun enregistrement de la marque
mentionnée dans les définitions. La marque doit
donc être enregistrée ailleurs et aucune preuve n'a
été soumise pour établir dans quelle mesure elle est
connue au Canada.
Pour les motifs qui précèdent, la conclusion du
registraire, que le terme «polo cloth» (tissu polo)
est un terme générique et partant constitue une
description claire, n'est pas justifiée; j'ai donc
annoncé à la fin de l'audience que l'appel était
accueilli et que l'appelante n'avait pas droit aux
dépens.
Je m'engageais alors à mettre par écrit les
motifs prononcés à l'audience.
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