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A-275-79
Charles R. McCambridge (Requérant)
c.
La Reine du chef du Canada (Intimée)
Cour d'appel, les juges Heald et Ryan et le juge suppléant Kerr—Ottawa, 2 et 6 novembre 1979.
Examen judiciaire Impôt sur le revenu Pratique Désistement de l'appel porté devant la Commission de révision de l'impôt, cette décision ayant pour seule confirmation une lettre signée du registraire principal de la Cour Dépôt subséquent d'un avis de requête en vue d'une nouvelle date pour l'audition Demande d'examen et d'annulation de la décision de la Commission de révision de l'impôt portant rejet de cette requête Loi sur la Commission de révision de l'impôt, S.C. 1970-71-72, c. 11, art. 7, 8(2), 9(2),(3) Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 171(1) Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 28.
Demande, fondée sur l'article 28, d'examen et d'annulation d'une décision de la Commission de révision de l'impôt qui a rejeté un avis de requête en vue d'une nouvelle date pour l'audition de l'appel. Un avis d'appel contre une cotisation d'impôt sur le revenu avait été déposé auprès de la Commission pour le compte du requérant, qui s'était désisté par la suite par lettre adressée à la Commission. Cette décision avait pour seule confirmation une lettre signée du registraire principal de la Cour. L'appel n'a jamais été entendu. La Commission a été saisie subséquemment de l'avis de requête.
Arrêt: la demande est accueillie. L'article 7 de la Loi sur la Commission de révision de l'impôt oblige la Commission à entendre et à juger les appels portés devant elle, tandis que l'article 9(3) de la Loi précise que tous ces appels ainsi que toutes les questions incidentes doivent être entendus, détermi- nés et jugés par un seul et même membre de la Commission. La seule mesure que la Commission ait prise en l'espèce, à la suite de la lettre de désistement, a été de répondre par la lettre signée par le registraire principal de la Cour et non par un membre de la Commission. L'article 7, lu en corrélation avec l'article 9, indique clairement que seul un membre de la Commission peut décider d'un appel et que celui-ci ne saurait être réglé par voie administrative, c'est-à-dire par un employé de la Commission appliquant quelque directive de cette dernière. Selon la Loi, le membre de la Commission est tenu de décider de l'appel de façon directe, en rendant une ordonnance ou un jugement. Si le Parlement avait voulu prévoir qu'un appel puisse être réglé par voie d'avis de désistement, il l'aurait indiqué dans le texte de loi. On ne peut se fonder sur l'article 8(2) pour attribuer une plus grande compétence que celle conférée à la Commission par les articles 7 et 9; il ne confère à la Commission que les pouvoirs accessoires d'une cour supérieure en vue du bon exercice de la compétence que lui attribuent les articles 7 et 9.
DEMANDE d'examen judiciaire. AVOCATS:
W. G. D. McCarthy pour le requérant. C. G. Pearson pour l'intimée.
PROCUREURS:
McCarthy & Barnes, Ottawa, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: La présente demande, déposée en vertu de l'article 28, vise l'examen et l'annula- tion d'une décision de la Commission de révision de l'impôt (ci-après appelée la Commission) rendue le 6 avril 1979 par le président adjoint F. J. Dubrule, c.r. Voici un résumé des faits pertinents: le requérant a déposé en temps utile, soit en décembre 1977, un avis d'appel à la Commission contre une nouvelle cotisation d'impôt pour l'année d'imposition 1974. Les avocats du requérant signè- rent l'avis d'appel en son nom. Le 27 avril 1978, un avis fixant l'audition au 5 juin 1978 fut envoyé au cabinet d'avocats représentant le requérant ainsi qu'au ministère du Revenu national, Impôt. Dans une lettre datée du 12 mai 1978, ces avocats informèrent la Commission, au nom du requérant, que l'appel interjeté par lui était [TRADUCTION] «retiré par les présentes». Il y est en outre dit que: [TRADUCTION] «Nous savons qu'il n'est pas néces- saire de prendre d'autres mesures pour clore cette affaire, mais nous vous saurions gré néanmoins de nous en donner la confirmation.» Une copie de cette lettre fut envoyée au requérant. Le 17 mai 1978, la Commission y répondit par une lettre dans laquelle elle déclare, entre autres, ce qui suit:
[TRADUCTION] Pour votre gouverne, la Commission a aban- donné sa politique de rendre un jugement lorsqu'un appel a été retiré, interrompu ou abandonné. Par conséquent, en ce qui concerne la Commission, l'affaire est close.
L'appel n'a donc jamais été entendu. Toutefois, au début de 1979, le requérant a donné instructions à son actuel avocat de prendre les mesures nécessai- res pour que l'appel soit entendu par la Commis sion. Cet avocat a donc présenté un avis de requête à la Commission pour qu'elle fixe, par voie d'or- donnance, une nouvelle date pour l'audition de l'appel.
Dans son étude de la requête, le président adjoint de la Commission a exposé le litige en ces termes (Dossier conjoint, p. 34):
Le véritable problème se ramène donc à la question suivante: une lettre de désistement valide et autorisée annule-t-elle un avis d'appel valide et existant ou est-ce la lettre de désistement valide qui est, en fait, nulle jusqu'à ce que la Commission ait rendu un jugement en bonne et due forme?
Voici maintenant en quels termes il s'est prononcé sur la requête (Dossier conjoint, p. 35):
Il s'agit donc de déterminer si la Commission est actuelle- ment saisie d'un avis d'appel qui n'a pas été inscrit au rôle pour fins d'audition, mais qui aurait l'être. Si la Commission est actuellement saisie d'un tel avis d'appel, celui-ci devrait être inscrit au rôle pour fins d'audition dans un délai raisonnable. En l'espèce, la Commission a reçu une lettre de désistement valide qui indiquait clairement qu'on avait mis fin à la procé- dure d'appel. A quoi cela servirait-il de rendre un jugement en bonne et due forme? Que pourrait-on en espérer? Selon moi, le paragraphe 9(3) de la Loi sur la Commission de révision de l'impôt vise une affaire qui est encore un litige et qui est entendue par un membre. Ce paragraphe ne concerne nulle- ment le cas une lettre de désistement valide a été déposée. Ainsi que l'a laissé entendre l'avocat de l'appelant, un jugement rejetant l'appel ne ferait qu'apprendre à l'appelant ce qu'il savait déjà à partir du moment son avocat a déposé pour lui la lettre de désistement dans laquelle ce dernier a déclaré qu'il n'était pas nécessaire d'engager aucune autre procédure pour clore la présente affaire. Il n'y a pas d'appel en l'espèce et, par conséquent, je ne peux donner instruction au greffier de la Commission de l'inscrire au rôle pour fins d'audition.
Une ordonnance sera rendue rejetant la demande.
A mon avis, le président adjoint a commis une erreur en décidant en ce sens. L'article 7 de la Loi sur la Commission de révision de l'impôt, S.C. 1970-71-72, c. 11, énonce en ces termes les fonc- tions de la Commission:
7. La Commission a pour fonctions d'entendre, pour en décider, les appels portés devant elle sur des questions naissant de l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu, du Régime de pensions du Canada, de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès et de toute autre loi du Parlement du Canada pour lesquelles un appel devant la Commission est prévu en vertu d'une telle loi.
En outre, l'article 9(3) de cette Loi prévoit que:
9....
(3) Tout appel devant la Commission et toutes questions incidentes à l'appel doivent être entendus, déterminés et jugés par un seul et même membre et lorsqu'un membre a été délégué par le président pour présider une audience relative- ment à un appel, il constitue à lui seul la Commission en ce qui concerne cet appel et toutes les questions qui lui sont incidentes, à moins que cette délégation ne soit annulée et qu'un autre membre ne soit délégué pour connaître de l'appel.
L'article 171(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui est applicable en l'espèce, prévoit ce qui suit:
171. (1) La Commission peut statuer sur un appel a) en le rejetant, ou
b) en l'admettant et
(i) annulant la cotisation,
(ii) modifiant la cotisation, ou
(iii) déférant la cotisation au Ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation.
A mon avis, l'article 7 de la Loi oblige la Commission à entendre, pour en décider, les appels portés devant elle, tandis que le paragraphe (3) de l'article 9 de la Loi précise que tous ces appels ainsi que toutes les questions qui lui sont incidentes doivent être entendus, déterminés et jugés par un seul et même membre de la Commission. La seule mesure que la Commission ait prise en l'espèce, par suite de la lettre de désistement d'appel éma- nant de l'avocat du requérant, a été de répondre par la lettre susmentionnée du 17 mai 1978, lettre qui n'était pas signée par un membre de la Com mission mais par Michael L. Artelle, registraire principal de la Cour. L'avocat de l'intimée a admis que rien dans le dossier ne révèle que quelque mesure ait été prise par un membre de la Commis sion à l'égard de cet appel. A mon avis, l'article 7, lu en corrélation avec l'article 9, indique claire- ment que seul un membre de la Commission peut décider d'un appel et que celui-ci ne saurait être réglé par voie administrative, c'est-à-dire par un employé de la Commission appliquant quelque directive de cette dernière. Aux termes de la Loi, le membre de la Commission est tenu de décider de l'appel de façon directe, en rendant une ordon- nance ou un jugement.
L'avocat de l'intimée fait valoir que la lettre du 12 mai 1978 a eu l'effet d'annuler ou d'interrom- pre l'avis d'appel, de sorte qu'à compter de cette date, ledit avis était sans valeur. A mon avis, les dispositions législatives susmentionnées ne permet- tent pas d'en arriver à cette conclusion. Si le Parlement avait voulu prévoir qu'un appel puisse être réglé par voie d'avis de désistement, il lui aurait été facile de l'indiquer dans le texte de loi. La Loi en vigueur prévoit deux façons pour la Commission de régler les appels dont elle est saisie. La première, dont les modalités ont déja fait l'objet de commentaires, ressort aux articles 7 et 9 de la Loi sur la Commission de révision de l'im- pôt. La deuxième, qui prévoit le rejet des appels, est énoncée à l'article 171(1)a) de la Loi de l'im- pôt sur le revenu (précité). Toutefois, dans ces deux cas, la Loi prévoit que la décision ne peut venir que de la Commission elle-même.
L'intimée fait aussi valoir que la Commission possède, en ce qui concerne les matières nécessai- res ou convenant au bon exercice de sa compé- tence, tous les pouvoirs, droits et privilèges confé- rés à une cour supérieure d'archives et ce, conformément à l'article 8(2) de la Loi sur la Commission de révision de l'impôt'. Elle se reporte ensuite aux Règles de la Cour fédérale ainsi qu'aux Rules of Practice de l'Ontario, comme étant deux exemples de règles de procédure qui prévoient le désistement ou l'abandon des actions dans les cours supérieures. On peut répon- dre à cet argument en disant que les pouvoirs accordés par le paragraphe (2) de l'article 8 ont trait au bon exercice de la compétence conférée à la Commission. Cette compétence est décrite aux articles 7 et 9 susmentionnés. En conséquence, on ne peut se fonder sur l'article 8(2) pour attribuer une plus grande compétence que celle conférée à la Commission par les articles 7 et 9. L'article 8(2), selon mon interprétation, ne confère à la Commis sion que les pouvoirs accessoires d'une cour supé- rieure et ce, en vue du bon exercice de la compé- tence que lui attribuent les articles 7 et 9. Il ne peut avoir pour effet d'élargir cette compétence.
Pour ces motifs, je conclus, que le président adjoint a commis une erreur en rejetant la demande déposée par le requérant en vue d'obtenir l'audition de son appel.
Par conséquent, je suis d'avis d'accueillir la demande présentée en vertu de l'article 28, d'annu- ler la décision rendue par la Commission le 6 avril 1979 et de lui renvoyer l'affaire pour qu'elle la réexamine à la lumière des présents motifs.
* * *
LE JUGE RYAN: Je souscris.
* * *
I L'article 8(2) se lit comme suit: 8....
(2) La Commission a, en ce qui concerne la présence, l'assermentation et l'interrogatoire des témoins, la production et l'inspection des documents et autres matières nécessaires ou convenant au bon exercice de sa compétence, tous les pouvoirs, droits et privilèges conférés à une cour supérieure d'archives.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: Comme On l'a déjà souligné dans les motifs du jugement prononcés par le juge Heald, un avis d'appel d'une nouvelle cotisation a été déposé pour le requérant auprès de la Commission de révision de l'impôt. Par la suite, la Commission recevait, au nom du requérant, une lettre de désistement d'appel. Peu après, une lettre datée du 17 mai 1978 et signée par Michael L. Artelle, registraire principal de la Cour, avisait le requérant de la décision prise à l'égard de cette affaire. Toutefois, il n'est pas clair si la suite donnée à la lettre de désistement constituait une dérogation à la politique établie de la Commission de rendre un jugement dans les cas de désistement, ou si cette politique elle-même avait été abandon- née.
Quelle que soit la politique de la Commission, je crois savoir qu'elle n'a pas établi de «règle» traitant tout particulièrement des désistements d'appel.
La nouvelle cotisation d'impôt sur le revenu du requérant constitue la principale question litigieuse qui se pose à l'égard des parties. La Commission n'a pas examiné le fond de cette question à laquelle se rapporte le point étroit soumis à l'exa- men de cette Cour.
L'article 9(2) de la Loi sur la Commission de révision de l'impôt ordonne à la Commission d'examiner les appels «avec aussi peu de forma- lisme et d'une manière aussi expéditive que le permettent les circonstances et les considérations d'équité».
Dans ces circonstances, je souscris à la décision rendue en l'espèce par le juge Heald.
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