A-588-79
Leonard Pipeline Contractors Ltd. (Appelante)
c.
La Reine (du chef du ministre du Revenu national
pour les douanes et l'accise) (Intimée)
Cour d'appel, les juges Heald et Le Dain, le juge
suppléant MacKay—Toronto, 13 et 15 mai 1980.
Douanes et accise — Appel formé contre une déclaration de
la Commission du tarif, selon laquelle l'aéronef appartenant à
l'appelante n'est pas utilisé pour offrir un service aérien ayant
trait à l'exploitation des ressources naturelles et est donc
assujetti à la taxe d'accise imposée par l'art. 21(1) et à la taxe
de vente imposée par l'art. 27(1) de la Loi sur la taxe d'accise
— La Commission a conclu que la preuve rapportée n'étayait
pas l'argumentation de l'appelante, selon laquelle la construc
tion d'un pipeline principal justifiait d'un lien direct avec
l'exploitation des ressources naturelles et de ce fait, l'aéronef
utilisé par la compagnie avait droit à l'exonération de la taxe
d'accise et de la taxe de vente — I1 échet d'examiner si la
Commission s'est fourvoyée sur les dépositions — Appel rejeté
— Loi sur la taxe d'accise, S.R.C. 1970, c. E-13, art. 21(1),
27(1) — Règlement portant exemption de la taxe de vente sur
les aéronefs, DORS/75-699, art. 2c) — Règlement portant
exemption de la taxe d'accise sur les aéronefs, DORS/75-697,
art. 2c).
APPEL.
AVOCATS:
W. Dingwall, c.r. pour l'appelante.
P. B. Annis pour l'intimée.
PROCUREURS:
Woolley, Dale & Dingwall, Toronto, pour
l'appelante.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Cet appel a été formé contre
la déclaration en date du 10 août 1979 de la
Commission du tarif, selon laquelle l'aéronef
Rockwell Turbo Commander appartenant à l'ap-
pelante n'est pas utilisé pour offrir un service
aérien ayant trait à l'exploitation des ressources
naturelles au Canada et est donc assujetti à la taxe
d'accise imposée par l'article 21(1) de la Loi sur la
taxe d'accise, S.R.C. 1970, c. E-13, et à la taxe de
vente imposée par l'article 27(1) de la même Loi'.
L'appel, qui porte sur un point de droit, a été
autorisé par la Cour de céans conformément à
l'article 60 de la Loi sur la taxe d'accise.
L'appelante se spécialise dans la construction
des canalisations principales de pipeline au
Canada et ailleurs dans le monde. Elle soutient
que la mise en valeur d'un champ pétrolifère et la
construction d'un pipeline principal justifient d'un
lien direct en raison de l'absence de tout réservoir,
et qu'en conséquence, on se trouve en présence
d'un cas qui n'est pas différent de celui du robinet,
l'exploitation du gisement étant fonction directe de
la capacité du pipeline. Elle fait donc valoir que, la
construction du pipeline étant une étape de la mise
en valeur de ressources naturelles, un aéronef des-
servant les divers besoins de la compagnie a droit à
l'exemption dç la taxe d'accise et de la taxe de
vente dont s'agit.
Les motifs de la décision de la majorité de la
Commission du tarif figurent à la page 26 (vol. 1)
du Dossier d'appel, comme suit:
La Commission note que, selon les deux témoins compétents
appelés au nom de l'intimé et selon les preuves tirées des
dictionnaires techniques, le terme «exploitation» se rapporte au
forage des puits dans un gisement prouvé. La construction du
pipeline, ont-ils affirmé, ne fait pas partie de l'exploitation et
est reliée au transport du produit. La demanderesse n'a pré-
senté aucune preuve du contraire. La Commission est satisfaite
que le terme «exploitation» tel qu'il est utilisé dans l'industrie
signifie le forage des puits dans un gisement ou une zone de
production prouvée. La Commission conclut donc que les servi
ces de l'aéronef ne sont pas utilisés pour l'exploitation d'une
ressource -naturelle au sens où l'entend l'industrie pétrolière et
selon les dispositions exonératoires. Comme l'aéronef n'est pas
utilisé pour l'exploitation d'une ressource naturelle, la Commis
sion n'a pas à déterminer s'il est utilisé exclusivement pour une
classe de service aérien prescrit par les Règlements portant
exemption sur les aéronefs.
En appel, l'avocat de l'appelante soutient que la
majorité de la Commission «s'est fourvoyée sur les
'Pour jouir de l'exemption de ces taxes, il est constant que
l'appelante était tenue d'établir que l'aéronef en cause tombe
dans l'un des cas d'exemption de la taxe de vente et de la taxe
d'accise, prévus a l'article 2c) du Règlement portant exemption
de la taxe de vente sur les aéronefs, DORS/75-699, et à
l'article 2c) du Règlement portant exemption de la taxe d'ac-
cise sur les aéronefs, DORS/75-697, lesquels prévoient respec-
tivement ce qui suit:
c) les services aériens directement liés à l'exploitation et à
l'aménagement des ressources naturelles au Canada.
c) les services aériens directement liés à l'exploration et à
l'aménagement des ressources naturelles au Canada.
dépositions» des deux témoins cités par l'intimée et
que les dépositions de ces témoins, considérées
dans leur contexte, n'établissent pas les faits aux-
quels elle a conclu et tels qu'ils sont rappelés
ci-dessus.
Après avoir analysé tous les témoignages, je
conclus que cet argument n'est nullement fondé.
Ce qu'a dit la majorité de la Commission, c'était
que les dépositions des deux témoins, prises à la
lumière des définitions données par les dictionnai-
res spécialisés, établissaient: a) que le terme
«exploitation» se rapporte au forage des puits dans
un gisement prouvé et b) que la construction du
pipeline ne fait pas partie de l'exploitation et est
reliée au transport du produit. A mon avis, la
Commission a eu à sa disposition une quantité
considérable de dépositions, dont aucune n'a été
réfutée et que la Commission était fondée à consi-
dérer comme justifiant les deux conclusions a) et
b) supra. 2
L'avocat de l'appelante a attiré notre attention
sur certains passages des témoignages qui, à son
avis, s'opposaient à l'interprétation dont la Com
mission en faisait. J'ai pris ces renvois en considé-
ration et j'estime qu'ils ne changent en rien la
signification globale de ces témoignages qu'à mon
avis, la Commission a judicieusement interprétée
dans le passage rappelé ci-dessus.
L'avocat de l'appelante soutient aussi que la
définition donnée par le témoin Lepine du terme
«exploitation» (Dossier d'appel, page 119) s'écarte
de celle donnée du même terme «exploitation» par
les dictionnaires spécialisés dont faisait état la
Commission dans les motifs de sa décision majori-
taire (voir par exemple le vol. 3, Dossier d'appel,
page 409) et que dans ses dépositions, Lepine a
réduit la portée de la définition du dictionnaire.
Sauf le respect que je lui dois, je ne saurais
convenir avec l'avocat de l'appelante que les dépo-
sitions de Lepine, prises dans leur ensemble,
avaient cet effet. Quand bien même ce serait le
cas, c'est un expert en la matière et il était en droit
d'exprimer son avis d'expert sur l'acception géné-
2 Voir les dépositions de Lepine—Dossier d'appel, vol. 1,
pages 118, 119, 133 et 134. Voir également les dépositions de
Rutherford—Dossier d'appel, pages 158, 159.
ralement reconnue du terme «exploitation» dans ce
secteur de l'activité économique, et la Commission
n'a commis aucune erreur en admettant cet avis
d'expert 3 . Vu l'ensemble de la preuve dont elle fut
saisie, la Commission était, à mon avis, manifeste-
ment fondée à établir les faits et à en tirer les
conséquences comme elle l'a fait.
Je conclus donc que la majorité de la Commis
sion était fondée à tirer les conclusions qu'elle a
tirées. Je conclus en outre que dans l'application
aux faits des dispositions de la Loi et des Règle-
ments applicables, elle n'a commis aucune erreur
de droit.
Vu ma conclusion ci-dessus, je ne juge pas utile
de me prononcer sur l'argument subsidiaire de
l'appelante voulant que son aéronef ne servait pas
exclusivement aux services aériens dont s'agit.
Par ces motifs, je rejetterais l'appel. L'intimée
n'ayant pas conclu aux dépens, je ne rendrais pas
une ordonnance à cet égard.
* * *
LE JUGE LE DAIN: Je souscris aux motifs
ci-dessus.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT MACKAY: Je souscris aux
motifs ci-dessus.
3 Pour la même conclusion, voir Denbyware Canada Limited
c. Le sous-ministre du Revenu national Cour d'appel fédérale,
n° A-274-78, arrêt rendu par le juge Urie. Voir également
Unwin c. Hanson [1891] 2 Q.B. 115, à la p. 119, arrêt rendu
par lord Esher, Maître des rôles.
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