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A-191-78
David W. Menear (Requérant) c.
Le Comité d'appel de la Commission de la Fonc- tion publique (Intimé)
Cour d'appel, les juges Urie et Ryan et le juge suppléant Kerr—Ottawa, les 23 et 26 juin 1978.
Examen judiciaire Fonction publique Poste temporai- rement comblé par une personne nommée à titre intérimaire Antérieurement à la nomination au poste de la personne agissant à titre intérimaire, le droit d'en appeler de la sélection fut porté à l'attention de toutes les personnes dont les chances d'avancement avaient pu être amoindries Requérant non considéré comme un employé de la Fonction publique au moment de la sélection Le Comité d'appel de la Commis sion de la Fonction publique a conclu que le requérant n'avait pas le droit d'interjeter appel de la décision La Cour doit-elle annuler cette décision? Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, art. 21 Règlement sur l'emploi dans la Fonction publique, DORS/67-129, art. 27, 41 Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 28.
Un poste au sein de la Fonction publique est devenu tempo- rairement vacant en août 1977. Une personne qualifiée fut choisie pour le combler à titre intérimaire à compter du l'' septembre de la même année. Lorsqu'en janvier 1978 il est devenu clair que le titulaire ne reprendrait pas ses fonctions pendant une nouvelle période indéterminée, le Ministère a décidé de porter à l'attention de chaque personne dont les chances d'avancement avaient pu être amoindries son droit de faire appel de la sélection. Le requérant, qui fut nommé à un poste dans la Fonction publique le 21 septembre, soit postérieu- rement à la sélection, a interjeté appel de cette dernière confor- mément à l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique. Le Comité d'appel a conclu que le candidat n'était pas admissible à poser sa candidature parce qu'il n'était pas un employé de la Fonction publique au moment de la sélection et ne pouvait être considéré comme une personne dont les chances d'avancement avaient été amoindries. La présente demande introduite en vertu de l'article 28 vise l'examen et l'annulation de cette décision.
Arrêt: la demande est accueillie. En lisant l'article 21 de la Loi de concert avec les articles 27 et 41 du Règlement, il apparaît clair qu'un employé est «choisi» pour combler un poste temporairement vacant et qu'une «nomination» est censée avoir été effectuée lorsque ce poste est pourvu à titre permanent. Le but de ces dispositions est de permettre à la direction de pourvoir aux vacances temporaires sans que le choix de l'em- ployé appelé à combler un tel poste soit contesté par les autres employés qui voudraient recourir aux articles du Règlement relatifs au droit d'appel lesquels sont normalement invoqués lorsque des postes permanents sont comblés au sein de la Fonction publique sans concours. L'article 27 du Règlement prescrit, de fait, les limites de durée d'occupation de ces postes temporaires et prévoit, d'une part, la nomination de l'employé après l'expiration du délai si le titulaire permanent du poste en
cause n'a pas repris ses fonctions et, d'autre part, les droits d'appel concomitants de cette nomination. Puisque le requérant était employé de la Fonction publique au moment la nomi nation a pris effet, il a le droit, conformément à l'article 21b) de la Loi, d'interjeter appel de la nomination en démontrant que ses chances d'avancement en avaient été amoindries.
DEMANDE d'examen judiciaire. AVOCATS:
Maurice W. Wright, c.r. et Andrew Raven
pour le requérant.
Walter L. Nisbet, c.r. pour l'intimé.
PROCUREURS:
Soloway, Wright, Houston, Greenberg, O'Grady, Morin, Ottawa, pour le requérant. Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Il s'agit d'une demande intro- duite en vertu de l'article 28 visant l'examen et l'annulation d'une décision d'un comité d'appel institué conformément à l'article 5d) de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32.
L'avocat de l'intimé a reconnu l'exactitude de l'énoncé des faits contenu dans l'exposé des faits et du droit du requérant. Par souci de commodité, je vais donc reproduire cet énoncé en entier:
[TRADUCTION] 1. Le poste de principal, ministère des Affaires indiennes et du Nord, Fort George (Québec), est devenu tem- porairement vacant en août 1977. Comme le poste devait être comblé pour le 1°" septembre 1977, début de l'année scolaire, et comme il était difficile de savoir à quelle date le titulaire reviendrait occuper son poste, le Ministère a évalué un nommé Michael Sidon, l'a considéré comme qualifié et l'a nommé à titre intérimaire.
2. M. Sidon devait occuper ce poste «supérieur» à compter du 1°" septembre 1977.
3. Le requérant, David W. Menear, est entré au service du Ministère à titre de vice-principal à Fort George (Québec), le 21 septembre 1977.
4. En janvier 1978, le Ministère s'est rendu compte que le titulaire ne reprendrait pas ses fonctions pendant une nouvelle période indéterminée; par conséquent, il a décidé de porter à l'attention de chaque personne dont les chances d'avancement avaient pu être amoindries, leur droit de faire appel de la sélection de M. Sidon.
5. Le 7 février 1978, le requérant interjetait appel, par lettre, de la nomination à titre intérimaire de M. Michael Sidon, conformément à l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique.
6. Un comité d'appel a été institué et l'affaire a été entendue à Québec, le 21 mars 1978, devant Marcel Bénard, président du Comité. Ce dernier a rendu sa décision le 29 mars 1978.
7. Le Comité a conclu au rejet de l'appel du requérant. Le président a notamment déclaré dans ses motifs:
«En conclusion, le Comité d'appel est d'avis que l'appelant n'était pas admissible à poser sa candidature, parce qu'il n'était pas un employé de la Fonction publique au moment de la sélection et ne pouvait être considéré comme une personne dont les chances d'avancement avaient été amoin- dries. En conséquence, l'appel de M. David W. Menear est rejeté.»
Le requérant sollicite donc, en l'espèce, l'annula- tion de cette décision.
Toutes les parties s'entendent pour dire que la seule question en litige a été correctement formu- lée par le Comité d'appel comme suit:
La question à résoudre, en l'espèce, est de savoir si l'appelant était admissible à poser sa candidature et, par conséquent, la date d'entrée en vigueur de la nomination intérimaire de M. Sidon.
Pour avoir gain de cause, le requérant doit répondre aux deux questions suivantes:
1. A quelle date Michael Sidon a-t-il été nommé au poste de principal à Fort George (Québec)?
2. David W. Menear était-il un employé du ministère des Affaires indiennes et du Nord au moment de la nomination de M. Sidon?
L'article 21b) de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique' prévoit que lorsqu'une per
21. Lorsque, en vertu de la présente loi, une personne est nommée ou est sur le point de l'être et qu'elle est choisie à cette fin au sein de la Fonction publique
a) à la suite d'un concours restreint, chaque candidat non reçu, ou
b) sans concours, chaque personne dont les chances d'avance- ment, de l'avis de la Commission, sont ainsi amoindries,
peut, dans le délai que fixe la Commission, en appeler de la nomination à un comité établi par la Commission pour faire une enquête au cours de laquelle il est donné à l'appelant et au sous-chef en cause, ou à leurs représentants, l'occasion de se faire entendre. La Commission doit, après avoir été informée de la décision du comité par suite de l'enquête,
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sonne est nommée ou est sur le point de l'être conformément à la Loi, et qu'elle est choisie à cette fin au sein de la Fonction publique, sans concours, chaque personne dont les chances d'avancement, de l'avis de la Commission, sont ainsi amoindries, peut, dans le délai que fixe la Commission, en appeler de la nomination à un comité établi par la Commission pour faire une enquête. Ainsi, une personne mécontente d'une nomination doit prouver que ses chances d'avance- ment ont été amoindries par suite de cette nomination.
Les articles 27 et 41(1) du Règlement sur l'em- ploi dans la Fonction publique, DORS/67-129, se lisent comme suit:
27. (1) Sous réserve du paragraphe (2), lorsque le sous-chef demande à un employé de remplir, pendant une période tempo- raire, les devoirs d'un poste (ci-après appelé le «poste supé- rieur») qui comporte un traitement maximum supérieur au traitement maximum du poste qu'il occupe, l'employé doit être considéré comme nommé au poste supérieur à titre intérimaire, et
a) si le poste supérieur est classifié dans la catégorie d'occu- pations appelée catégorie de l'exploitation dans la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, et si la période temporaire est de quatre mois ou plus,
b) si le poste supérieur est classifié dans la catégorie d'occu- pations appelée catégorie du soutien administratif dans ladite loi, et si la période temporaire est de trois mois ou plus, ou
c) si le poste supérieur est classifié dans une catégorie d'oc- cupations autre qu'une catégorie d'occupations mentionnée aux alinéas a) et b), et si la période temporaire est de deux mois ou plus,
l'employé est estimé, aux fins des articles 12 et 41, avoir été nommé au poste supérieur sans concours à compter du dernier jour
d) de la période de quatre mois, dans le cas mentionné à l'alinéa a),
e) de la période de trois mois, dans le cas mentionné à l'alinéa b), et
f) de la période de deux mois, dans le cas mentionné à l'alinéa c),
ladite période commençant, dans chaque cas, le jour l'em- ployé a commencé à remplir les devoirs du poste supérieur.
(2) Une nomination à un poste à titre intérimaire ne doit pas être faite pour une période de plus de douze mois sans l'autori- sation de la Commission dans tout cas ou toute classe de cas.
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c) si la nomination a été faite, la confirmer ou la révoquer, ou
d) si la nomination n'a pas été faite, la faire ou ne pas la
faire,
selon ce que requiert la décision du comité.
41. (1) Lorsque le choix d'une personne, pour une nomina tion, est fait sans concours parmi les personnes qui sont déjà membres de la Fonction publique, chaque personne qui aurait été admissible à concourir si un concours restreint avait été tenu pour combler le poste, comme le détermine l'article 12, est, aux fins de l'article 21 de la Loi, réputée être une personne dont les chances d'avancement ont été amoindries.
L'intimé fait valoir, à l'appui de la décision du Comité, que les personnes dont les chances d'avan- cement ont été amoindries du fait de la nomination de M. Sidon sont celles qui étaient des employés de la Fonction publique à la date de la sélection de la personne appelée à combler le poste temporaire- ment vacant soit, en l'espèce, le 1°" septembre 1977. Les personnes ainsi identifiées n'auraient pas le droit d'interjeter appel du «choix» tant que la «nomination» ne serait pas confirmée, soit, en vertu de l'article 27(1)c) et f), le 1" novembre 1977. De fait, elles n'auraient peut-être jamais l'occasion d'exercer ce droit d'appel si la période pendant laquelle le poste vacant est temporairement comblé n'excédait pas deux mois. En conséquence, le requérant n'a pas le droit d'interjeter appel puis- que la date de son entrée en fonction est posté- rieure à la date a été choisi Michael Sidon.
En toute déférence, je ne peux souscrire à ce point de vue. En lisant l'article 21 de la Loi de concert avec les articles 27 et 41 du Règlement, il m'apparaît clair qu'un employé est «choisi» pour combler un poste temporairement vacant et qu'une «nomination» est censée avoir été effectuée lorsque ce poste est pourvu à titre permanent. J'estime que le but de ces dispositions est de permettre à la direction de pourvoir aux vacances temporaires (qui peuvent se produire dans toute organisation pour de multiples raisons), sans que le choix de l'employé appelé à combler un tel poste soit con testé par les autres employés qui voudraient recou- rir aux articles du Règlement relatifs au droit d'appel (articles 12 et 41) lesquels sont normale- ment invoqués lorsque des postes permanents sont comblés au sein de la Fonction publique sans concours. L'article 27 du Règlement prescrit, de fait, les limites de durée d'occupation de ces postes temporaires et prévoit, d'une part, la nomination de l'employé après l'expiration du délai si le titu- laire permanent du poste en cause n'a pas repris ses fonctions et, d'autre part, les droits d'appel concomitants de cette nomination. A mon avis, prétendre le contraire serait pratiquement priver de toute signification l'article 27.
Si cette thèse est bien fondée, la nomination de Michael Sidon en vertu de l'article 27 aurait pris effet le 1" novembre 1977. Puisqu'à cette date le requérant était employé de la Fonction publique, il avait le droit, conformément à l'article 21b) de la Loi, d'interjeter appel de la nomination en démon- trant que ses chances d'avancement en avaient été amoindries. Par conséquent, j'estime que la demande doit être accueillie.
Je sais pertinemment que cette conclusion peut entraîner des situations quelque peu inusitées; par exemple, une personne entrée au service de la Fonction publique un ou deux jours avant qu'un employé ne soit réputé nommé à un poste pourrait interjeter appel de cette nomination. Toutefois, pour ce qui est de l'appel lui-même, les mérites de chacun des candidats doivent être jugés en tout cas, de sorte que ces situations inusitées, assez rares, n'auront pour effet que d'augmenter légère- ment le nombre des appelants.
En conséquence, la demande introduite en vertu de l'article 28 doit être accueillie et l'affaire ren- voyée à l'intimé afin que ce dernier rende une décision qui confirme le droit du requérant d'en appeler de la nomination de Michael Sidon au poste en cause.
* * *
LE JUGE RYAN: J'y souscris.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: Je suis d'accord.
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