Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

T-1677-78
Robert Douglas Lawrence (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Mahoney— Toronto, le 29 mai; Ottawa, le 5 juin 1978.
Pratique Demande en radiation de déclaration Le demandeur cherche à obtenir un jugement déclarant ultra vires un article du Décret sur les armes à autorisation restreinte La défenderesse fait valoir qu'il n'y a aucune cause raisonna- ble d'action Demande accueillie et déclaration radiée Règle 419 de la Cour fédérale Décret sur les armes à autorisation restreinte, DORS/78-42, art. 2e) Code crimi- nel, S.R.C. 1970, c. C-34, art. 82(1).
DEMANDE. AVOCATS:
K. J. Bialkowski pour le demandeur. G. R. Garton pour la défenderesse.
PROCUREURS:
DuVernet, Carruthers, Toronto, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MAHONEY: La défenderesse invoque la Règle 419 pour demander le rejet avec dépens de l'action et la radiation de la déclaration en faisant valoir que celle-ci ne révèle aucune cause d'action. L'action intentée par le demandeur vise à un juge- ment déclarant ultra vires l'article 2e) du Décret sur les armes à autorisation restreinte'. Les faits allégués figurent aux paragraphes 1 à 4 de la déclaration, comme suit:
[TRADUCTION] 1. Le demandeur Robert Douglas Lawrence, demeurant en la ville de Toronto, province d'Ontario, était le propriétaire d'une carabine «Colt Model AR-15» portant le numéro matricule SP 27410, ci-après dénommée la carabine du demandeur.
2. Le demandeur déclare que l'art. 82(1) du Code criminel, S.R.C. 1970, c. C-34, habilite le gouverneur général en conseil à déclarer, par décret, «arme à autorisation restreinte» n'im- porte quelle arme qui, à son avis, n'est pas d'un genre utilisé habituellement au Canada pour la chasse ou le sport.
' DORS/78-42.
3. Vers le 22 décembre 1977, le gouverneur général en conseil a, par l'art. 2e) du décret C.P. 1977-3667, déclaré arme à autorisation restreinte la carabine semi-automatique connue sous le nom de «Colt Model AR-15», ce décret entrant en vigueur le 1°" janvier 1978.
4. Le demandeur affirme que le «Colt AR-15» est une carabine d'un genre utilisé habituellement au Canada pour la chasse et le sport et qu'en conséquence, le gouverneur en conseil n'était pas habilité à la déclarer «arme à autorisation restreinte» et, subsidiairement, que l'avis du gouverneur en conseil était si déraisonnable que le décret en est devenu ultra vires ou qu'en outre, il a excédé son pouvoir discrétionnaire.
La Loi de 1977 modifiant le droit pénale porte notamment:
82. (1) Dans la présente Partie, «arme à autorisation restreinte» désigne
d) n'importe quelle arme qui n'est ni une arme prohibée, ni un fusil ni une carabine d'un genre qui, de l'avis du gouver- neur en conseil, peut raisonnablement être utilisé au Canada pour la chasse ou le sport et qui est, par décret du gouverneur en conseil, déclarée arme à autorisation restreinte;
«arme prohibée» désigne
e) n'importe quelle arme qui n'est ni une arme à feu histori- que, ni une arme à feu d'un genre utilisé habituellement au Canada pour la chasse ou le sport et qui est, par décret du gouverneur en conseil, déclarée arme prohibée;
Le décret C.P. 1977-3667, DORS/78-42, porte notamment:
Attendu qu'aucune des armes visées au décret ci-après n'est une arme prohibée, ni un fusil, ni une carabine d'un genre qui, de l'avis du Gouverneur en conseil, peut raisonnablement être utilisé au Canada pour la chasse ou le sport.
A ces causes, sur avis conforme du ministre de la Justice et en vertu de l'alinéa d) de la définition de «arme à autorisation restreinte» au paragraphe 82(1) du Code criminel, il plaît à Son Excellence le Gouverneur général en conseil de prendre à compter du 1" janvier 1978, le Décret déclarant armes à autorisation restreinte certaines armes, ci-après.
2. Sont déclarées armes à autorisation restreinte les armes suivantes:
e) la carabine à action semi-automatique «Colt Model AR-15».
Le paragraphe 2 de la déclaration attribue à la définition de «arme à autorisation restreinte» des
z S.C. 1976-77, c. 53, art. 3.
termes qui n'y figurent pas mais qui appartiennent en propre à la définition de «arme prohibée». Ces termes sont repris au paragraphe 4 qui présente l'argument principal du demandeur. En règle générale, la Cour est tenue, dans un cas comme celui-ci, d'accepter la véracité des faits allégués dans la déclaration. Cette règle ne s'applique pas lorsque le fait allégué est en réalité un point de droit. Il n'appartient pas au plaideur, mais à la Cour, de dire le droit. En l'espèce, je dois considé- rer les termes précis de la loi et non ceux que lui attribue la déclaration.
Par cet artifice, la déclaration vise à faire tran- cher par voie de justice une question de fait, à savoir si le Colt Model AR-15 est ou n'est pas «utilisé habituellement au Canada pour la chasse ou le sport». Cependant, la carabine Colt Model AR-15 n'a pas été déclarée arme prohibée et il est inutile de trancher la question de savoir si, dans une action justifiée, ce point de fait serait suscepti ble d'examen judiciaire.
Il appert du décret qu'il satisfait aux conditions prévues par la loi pour déclarer le Colt Model AR-15 arme à autorisation restreinte. Quand bien même on souscrirait à l'allégation selon laquelle le Colt Model AR-15 est «une carabine d'un genre utilisé habituellement au Canada pour la chasse ou le sport», il n'en demeure pas moins que l'avis du gouverneur en conseil selon lequel cette arme ne peut raisonnablement être destinée à un tel usage constitue une appréciation des faits qui n'est pas assujettie à l'examen judiciaire.
ORDONNANCE
La déclaration est irrecevable du fait qu'elle ne révèle aucune cause d'action et l'action est rejetée avec dépens.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.