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T-2862-75
Royal American Shows, Inc. (Requérante)
c.
Le ministre du Revenu national (Intimé)
Division de première instance, le juge Gibson— Vancouver, le 15 septembre 1975.
Impôt sur le revenu—Brefs de prérogative—Saisie—Com- pétence de la division de première instance—Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 231(1)d)—Loi sur la Cour fédérale, art. 18.
Une saisie pratiquée en vertu de l'article 231(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu, comporte un élément judiciaire— même si aucune obligation de tenir une audition n'est prescri- te—en ce que l'agent est obligé de trancher des questions de droit ou de fait touchant aux droits d'un particulier. Cet agent est donc dans l'obligation d'agir équitablement; en consé- quence, un acte prétendument accompli en vertu de cet article, est soumis au contrôle de la Division de première instance. L'intimé est, à juste titre, partie en l'espèce; aux fins de cette procédure, il est un office, commission ou autre tribunal fédéral au sens de l'article 18. La Cour d'appel n'est pas compétente en premier lieu, en vertu de l'article 28.
Arrêts appliqués: Le procureur général du Canada c. Cylien [1973] C.F. 1166; Howarth c. La Commission nationale des libérations conditionnelles [1973] C.F. 1018, confirmé (1975) 18 C.C.C. (2') 385.
DEMANDE. AVOCATS:
I. Pitfield pour la requérante. G. O. Eggertson pour l'intimé.
PROCUREURS:
Thorsteinsson, Mitchell, Little, O'Keefe &
Davidson, Vancouver, pour la requérante.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés oralement par
LE JUGE GIBSON: L'intimé sollicite une ordon- nance rejetant la requête présentée le 16 août 1975 par la requérante dans cette affaire, pour les cinq motifs exposés dans l'avis, c'est-à-dire:
1. La saisie en cause dans la requête découle d'un acte administratif d'Edmund Michael Swartzack et ne relève pas de la compétence conférée à cette honorable cour par l'article 18
de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970, (2 e supp.), c. 10 ou par toute autre disposition de ladite loi.
2. Ni l'intimé ni la personne effectuant la saisie en question, savoir Edmund Michael Swartzack, ne sont, aux fins de la présente procédure, un office, une commission ou autre tribunal fédéral au sens de l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale et qu'en conséquence cette honorable cour n'est pas compétente dans cette procédure.
3. Si Edmund Michael Swartzack, en faisant ladite saisie, agissait en qualité d'office, commis sion ou autre tribunal fédéral au sens de l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale, cette honora ble cour n'est pas compétente pour entendre cette procédure en raison de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale.
4. La présente procédure est dirigée à tort contre l'intimé puisqu'il n'a pas effectué lui- même la saisie en question et on ne peut, dans cette procédure, rendre une ordonnance de pro hibition, de certiorari ni un jugement déclara- toire contre l'intimé, par suite de la saisie en question.
5. Toute procédure intentée devant cette hono rable cour contre l'intimé doit l'être par voie d'action, l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale ne s'appliquant pas à l'intimé puisque, dans cette procédure, il a seulement posé un acte administratif en déléguant des pouvoirs à la personne effectuant la Saisie en question, et que cette personne n'est pas partie à la présente procédure.
Dans sa requête en date du 16 août 1975, la requérante sollicitait une ordonnance de prohibi tion contre l'intimé, une ordonnance de certiorari au sujet d'une ou de plusieurs saisies pratiquées par l'intimé, et une ordonnance enjoignant à l'in- timé de restituer à la requérante tous les objets saisis.
L'intimé a saisi certains documents commer- ciaux de la requérante au commissariat de police d'Edmonton le 29 juillet 1975, prétendant agir en vertu de l'article 231(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu. L'enquêteur de l'intimé était Edmund M. Swartzack.
Comme indiqué, l'avocat de l'intimé déclare en premier lieu que cette saisie prétendument prati- quée en vertu de l'article 231(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu était un acte administratif accompli par un préposé de l'intimé conformément à des pouvoirs conférés par la Loi, et qu'un tel acte n'est pas soumis au contrôle de cette cour.
D'une manière générale, l'exercice du pouvoir de «recherches et saisie» a été traditionnellement soumis au contrôle judiciaire. L'acte de priver une personne de ses biens a toujours été soumis à cette restriction salutaire, de sorte que toute personne accomplissant un tel acte doit agir équitablement.
La doctrine et la jurisprudence pertinentes sur la question de savoir si une saisie, en vertu de l'article 231(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu, com- porte ou non un élément «judiciaire», par opposi tion à un acte purement administratif, sont com plexes. Mais, après un examen attentif de la doctrine et de la jurisprudence relatives à ce type de procédure, et à la lumière de l'attitude tradi- tionnelle à l'égard des saisies et des recherches, j'estime que l'acte de saisie accompli en vertu de ce paragraphe comporte un élément judiciaire et qu'il en est ainsi même si le paragraphe ne prescrit pas expressément ou implicitement l'obligation de tenir une audition; il suffit que l'agent qui décide une telle saisie et l'effectue soit obligé, ce faisant, de trancher des questions de droit ou de fait touchant aux «droits» d'un individu et qu'il exerce ainsi un pouvoir discrétionnaire de nature «judi- ciaire» que la personne prétendant exercer un tel pouvoir de saisie se trouve donc dans l'obligation d'agir équitablement («judiciairement») unique- ment dans le cadre des pouvoirs conférés par ce paragraphe; et qu'en conséquence tout acte accom- pli par une personne prétendant agir en vertu de ces pouvoirs est soumis au contrôle de la Division de première instance de cette cour, du moins sur la question de défaut ou d'excès de compétence (ce qui est le vrai point litigieux en l'espèce). (Voir S. A. de Smith, Judicial Review of Administrative Action, 3e édition, aux pages 346-347.)
Deuxièmement, j'estime aussi que l'intimé est à juste titre partie à l'action et qu'aux fins de cette procédure, il est un office, commission ou autre tribunal fédéral au sens de l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale. (Voir la définition donnée à l'article 2g) de la Loi.)
Troisièmement, j'estime aussi que la Cour d'ap- pel fédérale n'est pas compétente en premier lieu en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, à l'égard de la présente procédure. (Voir Le procureur général du Canada c. Cylien [1973] C.F. 1166; et Howarth c. La Commission natio- nale des libérations conditionnelles [1973] C.F. 1018.)
Enfin, j'estime aussi qu'Edmund Swartzack est un préposé de l'intimé et que celui-ci est donc à juste titre partie à l'action en qualité de commet- tant; j'estime en outre que cette procédure intentée à l'intimé est une action selon la définition de ce terme à l'article 2b) des Règles de cette cour.
La requête est donc rejetée avec dépens.
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