A-112-71
Les Moulins Maple Leaf Limitée (Appelante)
c.
La Reine (Intimée)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, le juge
Ryan et le juge suppléant Hyde—Montréal, les
8 et 10 octobre 1974.
Tarif des douanes—Droit antidumping—Marchandises
américaines achetées par une filiale américaine—Vente à un
prix supérieur par la filiale à la compagnie mère située au
Canada—Les marchandises sont-elles «d'une classe ou
d'une espèce fabriquée au Canada,,—Le prix de vente à
l'importateur est-il inférieur à la juste valeur marchande ou à
la «valeur imposable»—Fardeau de la preuve—Tarif des
douanes, S.R.C. 1952, c. 60, art. 6(I)—Loi sur les douanes,
S.R.C. 1952, c. 58, art. 36(1).
L'appelante interjette appel du rejet d'une pétition de
droit. En 1964, l'appelante acheta de sa filiale américaine
des marchandises d'une classe ou d'une espèce non fabri-
quée au Canada à un prix supérieur à celui que cette filiale
payait au fabricant en Floride. On préleva un droit antidum-
ping en vertu de l'article 6 du Tarif des douanes, au motif
que le prix de vente réel des marchandises vendues à
l'appelante était inférieur à la juste valeur marchande. On a
établi la cotisation en présumant que la filiale de l'appelante
agissait à titre de mandataire de cette dernière lors de l'achat
des marchandises.
Arrêt: l'appel est rejeté. Il semble, selon toutes probabili-
tés, que les termes «marchandises ... d'une classe ou d'une
espèce fabriquée ou produite au Canada» utilisés à l'article 6
du Tarif des douanes s'appliquent aux produits importés et
la preuve montre clairement que les marchandises ont été
expédiées «directement» de la Floride au Canada. Par con-
séquent, le prix de vente était inférieur à la «valeur imposa-
ble» des marchandises établie par l'article 36(1) de la Loi
sur les douanes.
APPEL.
AVOCATS:
Julian Chipman, c.r., pour l'appelante.
R. Cousineau pour l'intimée.
PROCUREURS:
Ogilvy, Cope, Porteous, Hansard, Marier,
Montgomery et Renault, Montréal, pour
l'appelante.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement prononcés par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: Appel est inter-
jeté d'une décision de la Division de première
instance [[19711 C.F. 137] qui avait rejeté avec
dépens une pétition de droit dans laquelle on
réclamait, à titre principal, le remboursement
d'un montant de $18,529.29. Suite à une
demande déposée au nom de l'intimée, ce mon-
tant avait été payé au titre du droit spécial ou
antidumping prévu à l'article 6 du Tarif des
douanes pour des importations effectuées
durant l'année 1964; ce droit, selon l'appelante,
n'était pas exigible compte tenu des faits relatifs
aux importations en question.
Les parties ont plaidé en appel compte tenu
du fait que, si l'on établissait qu'un droit anti-
dumping ne pouvait être perçu pour les importa
tions en question, l'appelante devait obtenir par
jugement le remboursement du droit payé et
nous n'avons donc pas à énoncer les principes
de droit applicables aux sommes payées par
erreur.
Le savant juge de première instance a appli-
qué l'article 248 de la Loi sur les douanes, pour
imposer à l'appelante le fardeau de prouver les
faits pertinents. Au cours du débat, nous avons
indiqué qu'à notre avis à tous, l'article 248 ne
s'applique pas aux circonstances de l'espèce. Je
suis néanmoins d'avis qu'il incombait à l'appe-
lante, à titre de «demanderesse», de prouver les
faits à l'appui de sa demande.
Voici l'extrait de l'article 6(1) du Tarif des
douanes (S.R.C. 1952, c. 60) dans la mesure où
il s'applique aux faits de la présente espèce à
l'époque en cause:
6. (1) Dans le cas de marchandises exportées au Canada
d'une classe ou d'une espèce fabriquée ou produite au
Canada, si le prix d'exportation ou le prix réel de vente à un
importateur au Canada est inférieur à la juste valeur mar-
chande ou à la valeur imposable des marchandises établie
sous ... la Loi sur les douanes, il doit ... être prélevé,
perçu et payé sur lesdites marchandises à leur importation
au Canada, un droit spécial ou anti-dumping égal à la diffé-
rence entre ledit prix de vente des marchandises pour l'ex-
portation et leur dite valeur imposable; .. .
Il faut lire cette disposition en corrélation avec
l'article 36(1) de la Loi sur les douanes, tel qu'il
était formulé à l'époque en cause; cet article
prévoyait qu'en général, la «valeur imposable»
était la juste valeur marchande «à l'époque où
[les effets] ont été exportés directement au
Canada et à l'endroit d'où ils ont été ainsi expor
tés» d'«effets pareils» lorsqu'ils sont vendus
dans certaines circonstances.
L'appelante a attaqué de deux façons la vali-
dité de la demande de droit antidumping présen-
tée par l'intimée, savoir:
a) les marchandises importées n'étaient pas
«d'une classe ou d'une espèce fabriquée ou
produite au Canada» et
b) le «prix de vente» des marchandises pour
l'exportation n'était pas inférieur à leur valeur
imposable établie par la Loi sur les douanes.
Sur la question de la «classe ou espèce»,
aucune des parties n'a déposé une preuve rece-
vable, mais la partie défenderesse a admis en
tout ou en partie certaines allégations de la
pétition de droit. Le savant juge de première
instance les a résumées dans les motifs de son
jugement. Vu les faits admis, il me semble,
selon toutes probabilités, que les termes «mar-
chandises ... d'une classe ou d'une espèce
fabriquée ou produite au Canada» utilisés à
l'article 6 du Tarif des douanes s'appliquent aux
produits importés. Par conséquent, ce moyen
invoqué par l'appelante est, à mon avis,
irrecevable.
Il reste à examiner si l'autre moyen déjà men-
tionné que l'appelante a fait valoir en appel est
recevable. En d'autres termes: ressort-il de la
preuve déposée devant la ,Division de première
instance que le «prix de vente des marchandises
pour l'exportation» n'excédait pas la «valeur
imposable»?
A l'égard de ce second point, les parties
reconnaissent que si «l'endroit d'où les effets
ont été directement expédiés vers le Canada»
est Coronet (Floride), l'issue est défavorable à
l'appelante, mais si cet «endroit» est Philadel-
phie, il joue en sa faveur.
A mon avis, un examen approfondi de la
preuve montre clairement que les marchandises
en question ont été expédiées «directement» de
Coronet (Floride) au Canada. Il s'ensuit que
l'appelante ne peut non plus avoir gain de cause
sur ce second point.
[Il faut remarquer que ni l'une ni l'autre des
parties ne s'est fondée sur l'article 43 de la Loi
sur les douanes, tel qu'il existait à l'époque en
cause, pour appuyer son point de vue sur l'une
quelconque des questions en litige. Il n'est, par
conséquent, pas nécessaire de se prononcer sur
la question de savoir si cet article est applicable
aux faits du présent appel.]
Pour les motifs susmentionnés, l'appel doit, à
mon avis, être rejeté avec dépens.
* * *
LE JUGE RYAN: Je souscris aux motifs.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT HYDE: Je souscris aux
motifs.
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