A-232-73
Le révérend Joseph K. Wipf (Appelant)
c.
La Reine (Intimée)
et
Jacob K. Wipf (Appelant)
c.
La Reine (Intimée)
et
Le révérend Peter S. Tschetter (Appelant)
c.
La Reine (Intimée)
et
Le révérend John K. Hofer (Appelant)
c.
La Reine (Intimée)
et
Le révérend John K. Wurz (Appelant)
c.
La Reine (Intimée)
Cour d'appel, les juges Thurlow et Ryan, le juge
suppléant Smith—Edmonton, les 30 et 31 janvier
1975.
Impôt sur le revenu—Communautés huttérites—Revenu
aux mains des administrateurs et utilisé à des fins commu-
nes—Moyens de subsistance alloués à chacun des membres—
Les membres ne sont pas assujettis à l'impôt sur leur part
aliquote des bénéfices—Les moyens de subsistance accordés
sont leur seul revenu imposable—Loi de l'impôt sur le revenu,
art. 2, 3 et 4—The Companies Act, S.R.A. 1970, c. 60, art. 29.
Les appelants, tenants de la doctrine huttérite, vivent en
communautés où d'importantes activités agricoles sont gérées
par des administrateurs nommés par les compagnies constituées
en vertu de The Companies Act de l'Alberta, ou, dans le cas des
communautés non constituées en corporations, par des adminis-
trateurs nommés aux termes d'un contrat régissant l'adminis-
tration des biens. Les travaux sont effectués par les appelants,
les autres membres de la communauté ou leurs familles. Les
appelants s'étaient engagés à fournir leurs services «sans aucune
rémunération ou récompense», excepté ce que leur accordaient
les administrateurs auxquels était dévolu le revenu de ces
activités à des fins utiles et profitables communes à tous les
membres. On leur fournissait la nourriture, l'habillement, le
logement, les soins médicaux et dentaires, ainsi que l'éducation
des enfants et on subvenait aux besoins des malades et des
personnes âgées. Les cotisations des appelants pour les années
1961 1966 furent confirmées par la Commission de révision
de l'impôt. Pour les motifs publiés sous la cote [1973] C.F.
1382, la Division de première instance confirma cette décision
et décida que les appelants recevaient un revenu provenant
d'une entreprise ou de biens au sens de l'article 3 de la Loi de
l'impôt sur le revenu et étaient donc assujettis à l'impôt sur
leur part aliquote des profits en vertu de l'article 4. Les
appelants ont porté le litige devant la Cour d'appel fédérale.
Arrêt: l'appel est accueilli. Dans le cas du groupe non
constitué en corporation, les appelants, pris individuellement, et
les membres de la communauté prise dans son ensemble n'ont
pas droit à une part des bénéfices de l'exploitation agricole.
Lorsque les affaires de la communauté sont gérées par une
corporation, les membres individuels n'ont droit à aucun divi-
dende. Les activités agricoles relèvent des administrateurs et
sont entreprises pour leur compte. Les bénéfices de ces activités
leur reviennent pour être utilisés aux fins pour lesquels ils
avaient été nommés. Les membres n'ont pas droit à ces bénéfi-
ces, individuellement ou collectivement, ils n'ont droit qu'à
leurs moyens de subsistance dont la valeur représente le mon-
tant total du revenu imposable de chacun desdits membres. Les
cotisations doivent donc être renvoyées au Ministre pour qu'il
établisse une nouvelle cotisation sur cette base.
Arrêt suivi: Hofer c. Hofer [1970] R.C.S. 958.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
J. A. Matheson pour les appelants.
N. A. Chalmers, c.r., et R. Pyne pour
l'intimée.
PROCUREURS:
J. A. Matheson, Edmonton, pour les
appelants.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement prononcés oralement par
LE JUGE THURLOW: Appel est interjeté des
jugements de la Division de première instance
rejetant les appels des décisions de la Commission
de révision de l'impôt, qui avait elle-même rejeté
les appels des cotisations établies à l'égard de
l'impôt sur le revenu pour les années 1961 1966
inclusivement. Les faits sont énoncés en détail
dans les motifs du savant juge de première ins
tance et les motifs que prononcera le juge Ryan.
Les appelants sont tous Huttérites et membres
d'une colonie ou communauté huttérite. Deux
d'entre eux sont membres d'une communauté non
constituée en corporation, gérée par un groupe
d'administrateurs en leur qualité d'administrateurs
des biens de la communauté. Les trois autres
appelants sont membres de trois autres commu-
nautés dont les affaires sont gérées, dans chaque
cas, par une corporation de type particulier. Il
s'agit dans tous les cas d'opérations agricoles et les
profits qui en découlent appartiennent aux admi-
nistrateurs en leur qualité d'administrateurs des
biens de la communauté ou à la corporation, selon
le cas. Chaque appelant consacre tout son temps et
ses efforts aux travaux agricoles de la communauté
dont il est membre, mais aux termes des ententes
conclues, il ne possède rien, ne gagne rien, n'a
droit à rien et ne reçoit rien d'autre que les moyens
de subsistance accordés par les administrateurs ou
la corporation, soit la nourriture, l'habillement, le
logement, les soins médicaux et dentaires; en outre
on subvient à ses besoins lorsque la maladie ou
l'âge ne lui permet plus de travailler; ces condi
tions s'appliquent à chaque membre et à sa
famille, et comprennent en outre l'éducation des
enfants.
Dans le cas du groupe non constitué en corpora
tion, ni les appelants pris individuellement, ni les
autres membres de la communauté pris ensemble
ne sont les bénéficiaires exclusifs des biens de la
communauté et ils n'ont en outre aucun droit à
participer aux bénéfices de l'exploitation agricole.
Voir à cet égard l'affaire Hofer c. Hofer', dans
laquelle le juge Ritchie, au nom de la majorité de
la Cour, affirmait aux pages 968-969:
Il s'ensuit, à mon avis, que nonobstant le fait que la colonie
d'Interlake soit une exploitation agricole florissante on ne peut
pas dire qu'il s'agit d'une entreprise commerciale au sens
qu'aucun de ses membres aurait un droit de participer aux
bénéfices. La colonie n'est que le prolongement de l'Église et la
considération primordiale qui préside à la détermination des
droits de tous les membres est la réalisation de leur conception
du christianisme. Pour les Huttérites, les activités de leur
association sont le signe de l'Église temporelle. Dans ce con-
texte, il m'est impossible de considérer en droit la colonie
d'Interlake comme une espèce de société.
De même, dans les cas où les affaires de la com-
munauté sont gérées par une corporation, les mem-
bres individuels n'ont aucun droit à recevoir des
dividendes.
' [1970] R.C.S. 958.
Dans chaque cotisation en cause, on a considéré
que l'appelant avait droit à une part des bénéfices
de l'exploitation agricole; elles ont été confirmées
au motif que, pris individuellement, les membres
des communautés, y compris les appelants en l'es-
pèce, pouvaient être considérés comme engagés
dans une entreprise agricole et comme ayant droit
à une part aliquote des bénéfices tirés de cette
exploitation qui, en conformité d'une cession préa-
lable de leurs droits à cet égard, lors de leur
admission comme membres, ont été dévolus aux
administrateurs ou à la corporation.
En toute déférence je ne peux partager cette
opinion.
A mon avis, les opérations agricoles et les profits
en résultant n'appartiennent en aucune manière
aux membres des communautés pris individuelle-
ment. Les opérations agricoles de chaque commu-
nauté relèvent des administrateurs ou de la corpo
ration, selon le cas, et sont entreprises pour leur
compte. De même, les bénéfices provenant de ces
opérations leur reviennent pour être utilisés aux
fins pour lesquelles ils ont été établis. A aucun
moment, les membres n'ont droit à ces bénéfices,
que ce soit individuellement ou collectivement.
Lorsqu'ils deviennent membres, ils s'engagent à
consacrer leur temps et leurs travaux à ces opéra-
tions, sans aucune rémunération ou récompense et
sans avoir droit à aucune forme de paiement,
excepté les moyens de subsistance qui leur seront
fournis, ainsi qu'à leur famille, par les administra-
teurs ou la corporation. A mon sens, ces moyens de
subsistance représentent tout ce qu'aux termes des
ententes, les membres individuels sont en droit de
recevoir et, à mon avis, leur valeur représente le
montant total du revenu de chaque membre aux
fins de la Loi de l'impôt sur le revenu.
J'accueillerais donc l'appel et renverrais les coti-
sations au Ministre pour qu'il établisse une nou-
velle cotisation sur cette base. Les appelants ont
droit à leurs dépens de l'appel ainsi que des procé-
dures en Division de première instance.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement prononcés oralement par
LE JUGE RYAN: Il est interjeté appel par les
présentes des jugements de la Division de première
instance rejetant les appels des décisions de la
Commission de révision de l'impôt qui confir-
maient les cotisations établies à l'encontre des
appelants à l'égard d'un revenu qu'ils auraient
gagné au cours des années d'imposition 1961 à
1966 inclusivement.
Les appelants sont des Huttérites, membres de
colonies huttérites de l'Alberta. Trois des appe-
lants sont membres de corporations de type parti-
culier constituées en vertu de The Companies Act
de l'Alberta'. Les autres sont membres d'une com-
munauté non constituée en corporation.
Les objets de l'une de ces compagnies, la «Hut-
terian Brethren of Mixburn», sont énoncés à la
clause 3 du mémoire des conventions. Il existe un
certain nombre de différences mineures entre ce
mémoire et celui des deux autres compagnies, mais
ces différences n'ont à mon avis aucune impor
tance en l'espèce. La clause 3 stipule que:
[TRADUCTION] 3. La compagnie a pour objet de:
a) promouvoir, pratiquer et observer la religion chrétienne et
ses enseignements, et en relation et à l'intérieur de celle-ci, la
religion et les enseignements de l'Église huttérite, à laquelle
appartiennent les membres de ladite compagnie; pratiquer
l'agriculture et la meunerie, fabriquer de la farine et d'autres
articles dérivés de produits agricoles, utiliser les techniques
de la mécanique nécessaires à ces activités, acheter, vendre et
faire le commerce desdits produits agricoles ou produits
fabriqués à partir de ceux-ci, et autres articles, matériel,
outillage, instruments ou autres, propres ou nécessaires à
l'agriculture, la meunerie, la fabrication, la mécanique et aux
techniques nécessaires à celles-ci, comme partie de, et en
relation avec, la religion et les enseignements de ladite
compagnie et de ses membres.
b) Tous les biens meubles et immeubles de ladite compagnie,
quel que soit leur mode d'acquisition, appartiendront à per-
pétuité à la compagnie qui en aura la jouissance, les utilisera
et les gérera à des fins utiles et profitables communes à tous
ses membres, selon les objets de ladite compagnie aussi
longtemps qu'ils en seront membres.
c) Tous les biens meubles et immeubles que chaque membre
de ladite compagnie a, ou peut avoir, ou posséder, ou aux-
quels il peut avoir droit au moment où il se joint à cette
compagnie, ou en devient membre, ainsi que tous les biens
meubles et immeubles que chaque membre de la compagnie
peut avoir, acquérir, recevoir par succession, ou posséder, ou
auxquels il peut avoir droit, après être devenu membre de la
compagnie, appartiendront à ladite compagnie qui en aura la
jouissance, les utilisera, et les. gérera à des fins utiles et
x S.R.A. 1970, c. 60 et ses modifications.
profitables communes à tous ses membres, selon les termes
indiqués ci-dessus.
d) Personne n'aura le droit d'avoir, posséder ni détenir les
biens meubles et immeubles de ladite compagnie, non plus
que de les enlever ni les soustraire à celle-ci, ni de les donner,
vendre ou céder ou aliéner; et si quelqu'un vient à être
expulsé de ladite compagnie, ou cesse d'en être membre, il
(ou elle) ne pourra avoir, prendre, retirer, donner, vendre,
transporter ni céder aucun desdits biens de la compagnie ni
aucun droit dans ces dits biens, ni avoir aucun titre quelcon-
que à ces dits biens; si l'un des membres de ladite compagnie
décède, en est expulsé ou cesse d'en faire partie, ni ses
successeurs, héritiers, légataires ou créanciers ni aucune
autre personne n'aura de droit ou de titre quelconque aux
biens de ladite compagnie, que ce membre ait ou non été
propriétaire ou en possession d'un bien ou d'un droit quelcon-
que de la compagnie au moment d'en devenir membre ou par
la suite, qu'il ait ou non donné, abandonné, cédé ou trans
porté un bien ou un droit quelconque à ladite compagnie
depuis son admission.
e) Tout membre de ladite compagnie consacrera tout son
temps, son travail, ses gains et ses forces à cette compagnie et
aux buts pour lesquels elle est constituée, librement, volontai-
rement et sans aucune rémunération ou récompense autre
que ce qui est ci-après mentionné.
f) Les conjoints et les enfants des membres de la compagnie
qui ne sont pas eux-mêmes membres auront droit de résider
avec les membres et de recevoir de la compagnie la subsis-
tance, l'enseignement et l'éducation selon les règles, les pres
criptions, les exigences et les règlements de la compagnie, de
la religion chrétienne, de la foi et des enseignements religieux
préconisés et pratiqués par la compagnie tant et aussi long-
temps qu'ils obéiront et se soumettront aux règles, prescrip
tions, exigences et règlements de ladite compagnie, et en
aucune autre manière.
g) Advenant le décès de l'un des membres de la compagnie,
son conjoint et ses enfants qui ne sont pas eux-mêmes mem-
bres auront droit de demeurer dans la compagnie et de
recevoir de cette dernière la subsistance, l'enseignement et
l'éducation tant et aussi longtemps qu'ils continueront de
consacrer leur temps, leur travail, leurs soins, leurs gains et
leurs forces à ladite compagnie et aux buts qu'elle poursuit,
et de se soumettre et d'obéir aux règles, prescriptions, exigen-
ces et règlements de ladite compagnie, comme si ce membre
avait survécu, et en aucune autre manière.
h) Les conjoints et les enfants des membres de ladite compa-
gnie, qui ne sont pas eux-mêmes membres, consacreront tout
leur temps, leur travail, leurs services, leurs gains et leurs
forces à ladite compagnie et aux buts pour lesquels elle est
constituée, librement, volontairement et sans aucune rémuné-
ration ou récompense autre que ce qui est ci-après men-
tionné, et obéiront et se soumettront aux règles, prescriptions,
exigences et règlements de ladite compagnie tant et aussi
longtemps qu'ils resteront dans ladite compagnie.
i) Ladite compagnie ne sera pas dissoute sans le consente-
ment des trois-quarts de tous ses membres, consultés par
vote; TOUTEFOIS, rien dans le présent mémoire ne doit être
considéré comme accordant à ladite compagnie des pouvoirs
hors de la compétence de la Législature de la province de
l'Alberta, et en particulier, rien ne doit être considéré comme
accordant le droit d'émettre des billets à ordre sous la forme
de billets de banque; tous les pouvoirs conférés par ledit
mémoire des conventions peuvent être exercés sous réserve
des dispositions des lois en vigueur en Alberta et de leurs
règlements d'application à l'égard des domaines y mention-
nés et en particulier à l'égard de la construction et de
l'exploitation de chemins de fer, de lignes de télégraphe et de
téléphone, des compagnies d'assurance et de toute autre
entreprise qui fait ou fera l'objet d'une loi spéciale ou de
règlements.
Ce mémoire stipule aussi à la clause 4:
[TRADUCTION] Cette compagnie a été constituée dans le seul
but de promouvoir ses objets, et tous ses bénéfices, le cas
échéant, ou tout autre revenu, ou recettes, seront utilisés à la
promotion de ses objets, et aucun dividende ne sera versé à
aucun de ses membres.
La clause 7 des statuts d'association confère aux
administrateurs le pouvoir de gérer l'entreprise et
les biens de la compagnie. Cette clause se lit de la
manière suivante:
[TRADUCTION] 7. Tous les pouvoirs, privilèges, entreprises et
biens de ladite compagnie seront exercés, transférés, gérés et
contrôlés par les trois administrateurs ci-après désignés sous les
noms de Kirche Altester, Kirche Gehulfe Altester et de «chef
de la communauté» choisis parmi les membres masculins de la
compagnie, les autres administrateurs agissant simplement à
titre de conseillers nonobstant toute disposition contraire conte-
nue dans les présents statuts d'association.
La clause 9 desdits statuts stipule que:
[TRADUCTION] 9. Les trois administrateurs de la compagnie
mentionnés au paragraphe 7 des présentes administreront, gére-
ront et contrôleront les affaires, biens, entreprises et transac
tions de la compagnie et exerceront tout pouvoir relatif à leur
conduite et à leur gestion selon les modalités prévues ci-après.
La clause 16 des statuts prévoit que:
[TRADUCTION] 16. Les dirigeants de la compagnie seront les
administrateurs déjà mentionnés.
Le mémoire des conventions et les statuts d'asso-
ciation constituent un contrat entre la compagnie
et chacun de ses membres.'
Dans chacune des colonies d'importantes opéra-
tions agricoles ont été entreprises pendant les
années d'imposition en cause. Ce sont les appelants
et les autres membres des compagnies, ainsi que
les membres de leurs familles, qui ont effectué les
travaux. A mon avis cependant, les travaux agrico-
les ont été effectués par les compagnies agissant en
conformité du pouvoir que leur confère la clause 3
3 The Companies Act, S.R.A. 1970, c. 60, art. 29. Voir
l'ouvrage de L.C.B. Gower, Principles of Modern Company
Law (3° éd. 1969) aux pp. 261 à 265.
du mémoire des conventions, de se consacrer à
l'agriculture et à des entreprises connexes. Les
services rendus par les appelants l'ont été en vertu
de leurs engagements envers les compagnies tels
que décrits au mémoire des conventions.
Deux des appelants, Joseph Wipf et Jacob Wipf,
sont membres de la «Hutterian Brethren of Lake-
side», qui n'est pas constituée en corporation. Les
objets de cette communauté sont énoncés à la
clause 2 d'un acte signé en juillet 1948. Ces objets,
bien que décrits de manière légèrement différente,
sont les mêmes que ceux de l'alinéa 3a) du
mémoire des conventions que nous avons déjà
cités. Tous ces alinéas, excepté l'alinéa 3i), extrait
de la clause 3 du mémoire des conventions, sont
repris dans l'acte établissant la communauté de
Lakeside. Les biens de la communauté de Lakeside
sont dévolus aux administrateurs nommés aux
termes ou en conformité du contrat régissant l'ad-
ministration des biens de la communauté. La ges-
tion des activités agricoles, dans le cas des commu-
nautés constituées en corporation relevait des
compagnies et de même, dans le cas des commu-
nautés non constituées en corporation elle relevait
des administrateurs.
Les conditions en vertu desquelles ces services
étaient fournis aux compagnies et aux communau-
tés non constituées en corporation sont clairement
définies en termes identiques à la clause 3e) du
mémoire des conventions et à la clause 6 du con-
trat régissant l'administration des biens. Les appe-
lants s'engageaient à fournir et à consacrer leurs
«temps, travaux, services, gains et forces» aux com-
pagnies ou à la communauté «librement, volontai-
rement et sans aucune rémunération ou récom-
pense autres que celles prévues ci-après». Les
appelants et leurs familles devaient recevoir en
contrepartie leur subsistance, l'entretien et d'au-
tres avantages spécifiés. Les revenus des appelants
pour les services fournis aux compagnies ou à la
communauté correspondaient à la valeur des frais
de subsistance, d'entretien et des autres bénéfices
que leur fournissaient, ainsi qu'à leurs familles, les
compagnies ou les administrateurs de la commu-
nauté non constituée en corporation.
Le savant juge de première instance semble
avoir interprété de manière différente les condi
tions stipulées dans le mémoire des conventions et
le contrat régissant l'administration des biens. Si
j'ai bien lu les motifs de son jugement [1973] F.C.
1382, il a interprété ces conditions comme impli-
quant, de la part des membres des compagnies ou
de la communauté, une cession ou aliénation de
leur droit sur leurs gains futurs provenant de ce
que le juge considérait comme leurs propres activi-
tés agricoles, aux compagnies et aux administra-
teurs à titre de dépositaires de ces gains pour
l'usage et l'avantage communs de tous les mem-
bres. En conséquence il a conclu que ces gains
appartenaient aux membres et avaient été inclus à
juste titre dans leur revenu, selon leur part ali-
quote. En toute déférence je ne peux souscrire à
cette interprétation. Les conditions selon lesquelles
ces services ont été fournis étaient énoncées dans le
mémoire des conventions et le contrat régissant
l'administration des biens. A l'exclusion de leur
subsistance, entretien et autres bénéfices qu'ils
devaient recevoir en vertu des clauses pertinentes
du mémoire et du contrat, les appelants s'étaient
engagés à ne pas demander de rémunération pour
leurs services; en d'autres temps, ils ne devaient
recevoir en contrepartie de ces services que les
avantages stipulés dans ces actes et rien d'autre. Je
ne vois donc pas ce qu'ils pouvaient céder aux
compagnies ou à la communauté.
J'accueillerais donc l'appel et renverrais les coti-
sations au Ministre pour qu'il établisse une nou-
velle cotisation selon les instructions de mon collè-
gue le juge Thurlow.
J'estime aussi que les appelants ont droit à leurs
dépens de l'appel et des procédures en Division de
première instance.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT SMITH a souscrit à l'avis.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.