T-2669-74
Le procureur général du Manitoba, The Alberta
Gas Ethylene Company Ltd., The Alberta Gas
Trunk Line Company Limited, le gouvernement
de la province de Saskatchewan, Alberta and
Southern Gas Co. Ltd., Greater Winnipeg Gas
Company et le procureur général de la Colombie-
Britannique (Requérants)
c.
L'Office national de l'énergie, Dow Chemical of
Canada Ltd., Dome Petroleum Ltd. et Cochin
Pipe Lines Ltd. (Intimés)
Division de première instance, le juge Catta-
nach—Ottawa, les 18, 19, 22, 23, 24, 25 et 26
juillet et 9 août 1974.
Recours extraordinaires—Droit administratif—Demande
de licence adressée à l'Office national de l'énergie—Audition
orale réservée aux requérants—Les intervenants sont limités
à des représentations écrites—Interdiction pour l'Office de
rendre une décision—Loi sur l'Office national de l'énergie,
S.R.C. 1970, c. N-6, art. 7, 10, 15, 20, 83—Règlements
(Partie VI) art. 16, 16.1, 24(2)—Art. 3, 6, 7, 15 à 19 des
Règles—Loi sur la Cour fédérale, art. 18 et 28.
Le 30 mai 1974, la Dow Chemical of Canada, Ltd.,
intimée dans la présente demande, a déposé auprès de
l'Office national de l'énergie une demande en vue d'exporter
de l'éthylène du Canada, d'en importer au Canada et d'en
réexporter. L'Office décida d'entendre la demande de la
Dow en audience publique et de n'accepter des autres
parties que des représentations écrites et il en donna avis
aux parties intéressées. Au début de l'audience, les parties
en question se sont plaintes de cette façon de procéder, mais
l'Office a maintenu sa décision. Les requérants en l'espèce
cherchent ainsi à obtenir une ordonnance de certiorari en
vue de faire annuler la décision, une ordonnance de prohibi
tion en vue d'empêcher la reprise de l'audition de la
demande de la Dow pour le même motif et une ordonnance
de mandamus enjoignant l'Office de fixer une date en vue
d'une audience publique véritable. Le 25 juin, au début de
l'audience, la Dow demanda que l'on considère la demande
visant l'octroi d'une licence d'exportation d'éthylène comme
une demande d'ordonnance l'autorisant à exporter de l'éthy-
lène conformément à la Partie VI des Règlements, modifiée
le 20 juin 1974 et entrée en vigueur le 24 juin 1974. Aux
termes de l'article 16.1 qui découle de cette modification,
toute personne peut, sans licence, importer de l'éthylène et
l'Office peut, par voie d'ordonnance, autoriser une personne
à exporter de l'éthylène selon les modalités et aux condi
tions qu'il peut prescrire.
Arrêt: puisque l'Office a omis d'adopter une ligne de
conduite conforme aux Règlements modifiés, on doit consi-
dérer qu'il a examiné la demande de la Dow en conformité
de la Loi sur l'Office national de l'énergie et des règlements
tels qu'ils existaient avant les modifications. Sans aucun
doute, la disposition de l'article 20 de la Loi relative aux
auditions publiques signifie que quiconque peut démontrer
avoir un intérêt supérieur à celui du public en général dans
l'affaire soumise à l'Office doit avoir le droit de participer
aux auditions. Étant donné que les articles 10 et 15 de la Loi
confèrent à l'Office les attributs d'un tribunal et que la Loi,
lue en corrélation avec les règles afférentes aux auditions,
établies par l'Office en vertu de l'article 7 de ladite Loi,
prévoit la panoplie des auditions à caractère contradictoire,
il s'ensuit qu'à l'article 20, le mot «audition» doit avoir le
sens qu'il a pour une cour de justice. Il faut traiter sur le
même pied ceux qui font la demande d'une licence et ceux
qui s'y opposent. En permettant à la requérante Dow de
présenter une preuve et une argumentation orales, alors qu'il
a limité les intervenants à des plaidoiries écrites, l'Office a
traité la requérante et les intervenants différemment et d'une
manière non conforme à l'audition prévue à l'article 20 de la
Loi; on doit lui interdire de rendre une décision à l'égard de
la demande de la Dow, suite à l'audition du 25 juin 1974 et
des jours suivants. Une ordonnance de prohibition, ainsi
libellée, constituait un recours plus approprié qu'une ordon-
nance de certiorari. Compte tenu des modifications appor-
tées aux Règlements sur l'Office national de l'énergie (préci-
tés), j'ai refusé d'accorder le bref de mandamus enjoignant
l'Office de tenir une audition publique véritable.
Arrêt appliqué: Local Government Board c. Arlidge
[1915] A.C. 120.
DEMANDE.
AVOCATS:
J. F. Sherwood pour le procureur général du
Canada.
John Hopwood pour Alberta Gas Ethylene
Co. Ltd. et Alberta Gas Trunk Line Com
pany Limited.
J. A. Griffin, c.r., pour le gouvernement de
la province de Saskatchewan.
F. G. Homer pour Alberta and Southern
Gas Co. Ltd.
A. L. Campbell, c.r., pour Greater Win-
nipeg Gas Company.
J. E. Smith pour le procureur général de la
Colombie-Britannique.
F. H. Lamar, c.r., et I. Blue pour l'Office
national de l'énergie.
W. B. Williston, c.r., R. J. Rolls, c.r., D. A.
McDermott et R. W. Cosman pour Dow
Chemical of Canada Ltd., Dome Petroleum
Ltd. et Cochin Pipe Lines Ltd.
PROCUREURS:
Gordon E. Piley, c.r., sous-procureur géné-
ral, pour le procureur général du Manitoba.
Howard, Dixon, Mackie et Forsyth, Cal-
gary, pour Alberta Gas Ethylene Co. Ltd. &
Alberta Gas Trunk Line Company Limited.
Griffin, Beke, Gilbert et Olive, Regina, pour
le gouvernement de la province de
Saskatchewan.
Alberta and Southern Gas Co. Ltd., Cal-
gary, pour elle-même.
Aikins, MacAulay et Thorvaldson, Winni-
peg, pour Greater Winnipeg Gas Company.
Burke-Robertson, Chadwick et Ritchie,
Ottawa, pour le procureur général de la
Colombie-Britannique.
Fasken et Calvin, Toronto, pour Dow
Chemical of Canada Ltd. et Dome
Petroleum Ltd.
Fenerty, McGillivray, Robertson, Brennan,
Prowse, Fraser, Bell et Hatch, Calgary,
pour Cochin Pipe Lines Ltd.
Contentieux, Office national de l'énergie,
pour l'Office.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement prononcés par
LE JUGE CATTANACH: La présente affaire fut
introduite par un avis de requête déposé par le
procureur général du Manitoba en tant que
requérant, désignant comme intimé l'Office
national de l'énergie (ci-après appelé à toutes
fins utiles l'Office).
Par la suite, les six autres parties dont le nom
apparaît ci-dessus dans l'intitulé de la cause
demandèrent de se joindre au procureur général
du Manitoba à titre de requérants et je fis droit
à leur demande; de même, les trois autres par
ties dont le nom apparaît comme intimées dans
l'intitulé de la cause firent une demande sembla-
ble à laquelle j'accédai.
L'avis de requête, dans sa forme initiale,
demandait:
[TRADUCTION] a) une ordonnance de certiorari annulant la
décision rendue par l'Office national de l'énergie («l'Of-
fice») le 26 juin 1974, en vertu de laquelle l'Office décidait
de ne pas modifier sa décision de tenir une audience ex parte
pour examiner la demande de licences présentée par la Dow
Chemical of Canada Limited en vue de l'exportation de
quelque dix milliards de livres d'éthylène, sur une période de
dix ans, commençant en juillet 1977 ou vers cette époque;
b) une ordonnance de prohibition interdisant à l'Office de
reprendre l'audition ex parte de la demande de la Dow; et
c) une ordonnance de mandamus enjoignant l'Office de
fixer une date pour la tenue d'une véritable audition publi-
que afin de permettre une préparation adéquate, de donner
un avis approprié de cette audition aux parties intéressées
connues et au public en général, et d'autoriser tous les
intervenants à présenter des plaidoiries, à contre-interroger,
à présenter des témoignages et des arguments et, par ail-
leurs, à participer pleinement à cette audition comme ils le
jugent à propos.
Puisqu'au cours de l'audition de cette requête,
il devint manifeste qu'on avait complété l'audi-
tion mentionnée au paragraphe a) précité et que
l'ordonnance visée au paragraphe b) serait inu-
tile, j'autorisai le procureur général du Manitoba
à modifier le paragraphe b) en le supprimant et
en le remplaçant par ce qui suit:
[TRADUCTION] b) une ordonnance de prohibition interdisant
à l'Office de conclure l'audition de la demande de la Dow
selon une procédure ex parte, de rendre toute décision ou
ordonnance ou de délivrer toute licence s'y rapportant sans
d'abord tenir une audition publique.
Il devint également manifeste au cours de
l'argumentation que le paragraphe a) de la
requête, dans sa forme initiale, ne s'appliquait
pas explicitement au litige qui se déroulait entre
les parties et que visait l'argumentation. La
question véritable et essentielle consistait à
déterminer si, par l'adoption de cette procédure,
la décision finale de l'Office serait entachée
d'un vice parce que la procédure portait atteinte
aux principes de justice naturelle de façon à
empêcher la tenue d'une audition équitable.
Par conséquent, à la demande des requérants,
j'autorisai qu'on modifie le paragraphe a) en le
supprimant et en le remplaçant par ce qui suit:
[TRADUCTION] a) une ordonnance de certiorari annulant les
décisions suivantes de l'Office national de l'énergie:
(i) la décision rendue le 11 juin 1974, ou vers cette date,
de tenir une audition ex parte pour examiner la demande
de licences présentée par la Dow Chemical of Canada
Limited, en vue de l'exportation de quelque dix milliards
de livres d'éthylène sur une période de dix ans commen-
çant en juillet 1977 ou vers cette époque;
(ii) la décision rendue le 26 juin 1974, en vertu de laquelle
l'Office décidait de ne pas modifier sa décision de tenir
une audition ex parte pour examiner la demande de licen
ces présentée par la Dow Chemical of Canada Limited en
vue de l'exportation de quelque dix milliards de livres
d'éthylène sur une période de dix ans commençant en
juillet 1977 ou vers cette époque;
Pour bien comprendre le problème et les
questions qu'il faut trancher, il convient d'en
tracer l'historique.
Fondamentalement, l'Office national de
l'énergie fut créé par la Loi sur l'Office national
de l'énergie, S.C. 1959, c. 46 et ses modifica
tions, en vue d'exercer un pouvoir de réglemen-
tation de licences et un contrôle d'ordre consul-
tatif sur des questions ressortissant au
Parlement du Canada en ce qui concerne la
fabrication, la transformation, la transmission,
le transport, la distribution, la vente, l'achat,
l'échange et la disposition de l'énergie et des
sources d'énergie à l'intérieur et à l'extérieur du
Canada. Dans l'exercice de sa compétence, l'Of-
fice doit avant tout tenir compte de l'intérêt
public et, plus particulièrement, s'assurer que
l'exportation d'énergie ou de ses sources n'épui-
sera pas les approvisionnements sans d'abord
satisfaire aux besoins de la consommation cana-
dienne et que le prix devant être exigé pour
l'énergie est juste et raisonnable. (Voir l'article
83 de la Loi sur l'Office national de l'énergie).
En 1971, la Dome Petroleum Limited (ci-
après appelée la «Dome») conclut avec une
compagnie de l'Ohio (E.-U.) un contrat relatif à
la vente d'éthane, de propane et de condensats;
du point de vue de la Dome, ce contrat ferait de
l'approvisionnement d'éthane provenant de l'Al-
berta par pipe-line un projet économiquement
réalisable. En conséquence, la Dome demanda à
l'Office de modifier ses licences existantes en
vue d'augmenter son volume d'exportation sur
une période de dix ans et simultanément la
Cochin Pipe Lines Limited (ci-après appelée la
«Cochin») fit une demande de certificat de com-
modité et nécessité publiques pour la construc
tion d'un pipe-line. A cause des changements
rapides dans le domaine de l'énergie au Canada
en 1971 et 1972, l'Office ne trancha que la
question du propane. Cette affaire fut entendue
en janvier 1972.
Aux termes de sa décision rendue en mai
1973, résultant de l'audience tenue en janvier
1972, l'Office autorisa l'exportation d'un
volume additionnel de propane, mais réduisit à
cinq ans la période de dix ans demandée.
A cette époque, c'est-à-dire en mai 1973, l'Of-
fice ordonna à la Dome et aux autres parties qui
avaient pris part à l'audience de janvier 1972 de
déposer une preuve additionnelle et mise à jour.
Cette audience subséquente eut lieu en juillet,
août et septembre 1973.
A la lumière de la preuve additionnelle, l'Of-
fice constata d'emblée que la nature du projet
dans son ensemble, avait changé.
La Dow Chemical of Canada, Limited (ci-
après appelée la «Dow») s'était engagée dans la
construction d'une importante usine de fabrica
tion d'éthylène à Fort Saskatchewan (Alberta).
Elle était devenue co-actionnaire de la Cochin à
parts égales avec la Dome.
La Cochin demandait alors à l'Office l'autori-
sation de construire des pipe-lines jumelés dont
l'un, comme dans le projet initial transporterait
des hydrocarbures légers à Sarnia (Ontario) et
l'autre, de l'éthylène.
L'Office rendit sa décision en janvier 1974. Il
approuva l'exportation d'éthane demandée, mais
limita la durée de la licence à six ans, de façon à
coïncider avec les modifications apportées aux
licences accordées à la Dome pour l'exportation
de propane, et l'Office autorisa la construction
du réseau de pipe-lines jumelés.
Lors des audiences de juillet, août et septem-
bre de 1973, on souleva et discuta devant l'Of-
fice la question de savoir si l'éthylène relevait
de la compétence de l'Office à titre de gaz ou de
pétrole au sens de la Partie VI de la Loi sur
l'Office national de l'énergie.
La preuve déposée devant l'Office démontra
cependant que le réseau de pipe-lines ne trans-
porterait pas d'éthylène avant 1977 et par con-
séquent, l'Office ne jugea pas nécessaire de
trancher cette question à ce moment-là.
Bien que l'Office n'ait pas tranché explicite-
ment cette question, il en connaissait l'impor-
tance. Ceci se manifeste dans son .rapport de
janvier 1974 dans lequel, pour déterminer s'il y
aurait un excédent de gaz naturel et d'éthylène
pour les besoins canadiens, il prit en considéra-
tion la quantité d'éthane nécessaire à la produc
tion d'éthylène.
En avril 1974, l'Office conclut qu'il avait
compétence sur l'exportation d'éthylène en
vertu de la Partie VI de la Loi et fit connaître sa
conclusion à cet égard aux parties intéressées.
Sur ce, la Dow présenta à l'Office une
demande de licence pour l'exportation de dix
milliards de livres d'éthylène répartie sur une
période de dix ans à partir de juillet 1977 ou
vers cette époque, soit un milliard de livres par
année.
Les parties en l'espèce acceptent, semble-t-il,
la conclusion de l'Office selon laquelle il a com-
pétence en vertu de la Partie VI de la Loi pour
connaître d'une demande d'exportation d'éthy-
lène. Quoi qu'il en soit, je ne fus pas saisi de la
question de savoir si l'Office avait conclu à des
faits contraires à la réalité, s'accordant de ce
fait compétence à lui-même, et je n'ai pas, par
conséquent, à me prononcer sur ce sujet
particulier.
Compte tenu de la décision de l'Office rendue
en janvier 1974 concernant la demande d'expor-
tation de propane présentée par la Dome et la
demande de construction de pipe-lines jumelés
présentée par la Cochin, l'une portant sur des
hydrocarbures légers et l'autre sur de l'éthylène,
lesquelles demandes, conformément à la direc
tive émise par l'Office lorsqu'il a rendu sa déci-
sion en mai 1973 sur la demande d'exportation
de propane présentée par la Dome, devaient être
entendues sur la base de renseignements addi-
tionnels portant sur tous les aspects du projet
dans son ensemble, ce qui fut fait en juillet, août
et septembre 1973, il est manifeste que l'Office
était particulièrement conscient de l'intérêt
public comme c'est son devoir de l'être.
Ceci se dégage clairement des motifs de la
décision de l'Office rendue en janvier 1974,
lorsqu'il déclara à la page 7-1:
[TRADUCTION] La demande Dome pour les licences d'ex-
portation d'éthane et de propane et la demande Cochin pour
un certificat de commodité et de nécessité publique pour un
pipe-line pour le transport d'hydrocarbures légers et un
pipe-line pour le transport d'éthylène ne peuvent être consi-
dérées, de l'avis de l'Office, que du point de vue du projet
pris dans son ensemble. Dans ce sens, les demandes doivent
être considérées dans un contexte encore plus large, c'est-à
dire dans la mesure dans laquelle elles sont des éléments
clés de la création d'un complexe d'éthylène en Alberta avec
l'intention de transformer l'éthylène, en Alberta et en Onta-
rio, en produits d'une valeur plus élevée.
Du passage qui précède, il est tout aussi clair
que l'Office a examiné les deux demandes dis-
tinctes comme faisant partie d'un seul projet
d'ensemble. Il est logique de conclure que l'Of-
fice considéra que l'ensemble du projet compor-
tait trois étapes, (1) la demande déposée par la
Dome en janvier 1972 visant l'exportation de
propane dont l'Office a disposé par sa décision
de mai 1973, (2) les demandes simultanées et
distinctes déposées par la Dome et la Cochin
visant l'exportation d'éthane et la construction
de pipe-lines jumelés, l'un destiné à transporter
des hydrocarbures légers et l'autre de l'éthylène,
demandes qui ont fait l'objet de la décision
rendue en janvier 1974, et (3) la présente
demande déposée par la Dow visant l'exporta-
tion d'éthylène. Il serait naïf de penser _ que
l'Office ne savait pas que la demande déposée
par la Dow en dernier lieu en vue de l'exporta-
tion d'éthylène faisait partie du projet dans son
ensemble.
Sur ce point, on soumit à l'Office une preuve
abondante. Lors des audiences de 1973, on
déposa devant celui-ci à titre de pièce à convic
tion une entente intervenue entre la Dow et la
Cochin au sujet de l'éthylène. Des dirigeants de
la Dow ont longuement témoigné sur tous les
aspects du projet de production d'éthylène de la
Dow et furent contre-interrogés par l'avocat de
chacun des intervenants qui choisirent de le
faire. La preuve montrait clairement que le
pipe-line visant le transport d'éthylène et le
projet de la Dow concernant l'éthylène étaient
interdépendants, que l'un était essentiel à l'autre
et que si les deux pipe-lines visant le transport
d'éthane et d'éthylène n'étaient pas autorisés, le
pipe-line simple ne serait pas construit. C'était
tout ou rien.
Ceci étant, je suis convaincu que l'Office
traita chacune des demandes individuelles et
distinctes comme faisant parties intégrantes
d'un projet d'ensemble colossal visant (1) la
fabrication d'éthylène par la Dow en Alberta,
(2) le transport de ce produit en vue de satis-
faire les besoins du marché canadien et (3)
l'exportation de l'excédent d'éthylène et d'au-
tres hydrocarbures. L'Office différa l'examen
qu'il devait faire de l'exportation d'éthylène (1)
jusqu'au moment où il conclut qu'il avait com-
pétence pour ce faire et (2) parce qu'il n'était
pas nécessaire de le faire étant donné qu'il n'y
aurait pas d'exportation d'éthylène avant 1977.
Je pense, comme on l'a prétendu, que la façon
fragmentaire dont l'Office a traité les trois
demandes, c'est-à-dire tout d'abord en limitant à
l'exportation de propane, la demande déposée
par la Dome visant l'exportation d'éthane, de
propane et de condensats puis en autorisant la
demande de cette dernière portant sur l'exporta-
tion d'éthane et la demande de la Cochin visant
la construction de pipe-lines jumelés et finale-
ment en examinant la demande présentée par la
Dow en vue de l'exportation d'éthylène, me
porte à croire que l'Office ne fut saisi que d'une
seule et même demande examinée en trois
étapes.
A mon avis, l'Office adopta cette interpréta-
tion et ce fut l'élément sousjacent qui l'incita à
agir de la sorte, mais ce disant, je ne fais pas
abstraction du fait que l'Office a tenu trois
audiences distinctes et séparées.
En avril 1974, comme on l'a mentionné, l'Of-
fice conclut qu'il avait compétence en matière
d'exportation d'éthylène et fit connaître sa
conclusion.
La Dow fit alors une demande de licence en
vue de l'exportation d'éthylène.
Sur ce, le 11 juin 1974, le secrétaire de l'Of-
fice expédia un message telex aux parties indi-
quées dans le corps du texte dont voici le
contenu:
[TRADUCTION] En qualité de partie inscrite aux audiences
tenues par l'Office national de l'énergie en 1972 et 1973, au
sujet des demandes déposées par la Dome Petroleum Limi
ted, la Cochin Pipe Lines Limited, et autres, sachez que:
Le mardi 25 juin 1974 à 14h00, l'Office tiendra une
audience publique au sujet de la demande ex parte de
licences déposée par la Dow Chemical of Canada, Limited
visant:
1. L'exportation d'Elmore en Saskatchewan de 15 milliards
de livres d'éthylène pendant une période de 10 ans, à partir
du début des opérations de l'usine de Fort Saskatchewan ou
le le' juillet 1977, selon la première éventualité;
2. L'importation à Windsor (Ontario) desdits 15 milliards de
livres d'éthylène pendant ladite période de 10 ans;
3. L'exportation de Sarnia (Ontario) de 10 milliards de
livres d'éthylène pendant ladite période de 10 ans; et
4. Le déchargement d'une partie de l'éthylène à Joliet (Illi-
nois), lieu de livraison subsidiaire à Marysville (Michigan).
Et sachez qu'avant de trancher ladite demande, l'Office
ne prendra en considération que les plaidoiries écrites se
rapportant à ladite demande sous réserve des conditions
suivantes:
(I) que les plaidoiries contiennent des faits suffisants
démontrant que leur auteur est directement intéressé ou
touché par ladite demande:
(II) que lesdites plaidoiries soient signifiées à la requé-
rante et reçues par l'Office au plus tard le 21 juin 1974.
Et sachez de plus que l'on peut prendre connaissance des
copies de ladite demande et des plaidoiries écrites au bureau
du secrétaire de l'Office à:
Office National de L'Énergie
Immeuble Trebla
473 rue Albert
Ottawa (Ontario).
ou au bureau de la requérante à:
Dow Chemical of Canada, Limited
Modeland Road
Sarnia (Ontario).
La partie importante de ce message était que
l'Office entendrait «publiquement» la demande
ex parte de la Dow et qu'il ne «prendrait en
considération que les plaidoiries écrites» sous
réserve des conditions que celles-ci démontrent
que leur auteur était «directement intéressé» ou
«touché» par la demande et qu'elles soient signi
fiées à la requérante et reçues par l'Office au
plus tard le 21 juin 1974.
Lors de l'audience du 25 juin 1974, il fut
avancé devant l'Office que celui-ci devrait
modifier sa décision «de tenir une audience
publique ex parte» suivant la forme énoncée
dans l'avis expédié par telex et de convoquer
plutôt une audience publique signifiant par là
que toutes les parties intéressées aurait la possi-
bilité de contre-interroger les témoins cités par
la requérante à l'appui de sa demande et de
présenter une preuve orale contradictoire, après
quoi la requérante serait autorisée à présenter
une argumentation orale tout comme les avocats
des parties intéressées qui se sont opposées à la
demande.
L'Office avait annoncé qu'il entendrait la
preuve orale présentée au nom de la requérante
et que celle-ci pourrait faire un exposé oral à
l'appui de sa demande, mais que les parties
s'opposant à la demande seraient limitées à des
plaidoiries écrites et ne seraient pas autorisées à
contre-interroger les témoins cités par la
requérante.
Le 26 juin 1974, après avoir entendu les
arguments sur la requête visant à modifier de
cette façon la forme de l'audition de la
demande, l'Office annonça qu'il ne modifierait
pas sa décision antérieure de tenir une
«audience publique ex parte».
En bref, l'Office rejeta la requête qui lui était
soumise au motif que «la procédure qu'il a
choisie pour trancher la demande Dow est con-
forme aux exigences de la Loi sur l'Office natio
nal de l'énergie et à celles des règles de la justice
naturelle».
Cependant, à cause du souci exprimé par
quelques-unes des parties intéressées quant au
temps alloué pour soumettre des plaidoiries
écrites, l'Office annonca qu'il accorderait aux
personnes impliquées dans l'audience la possibi-
lité de présenter d'autres plaidoiries et que la
requérante aurait une chance égale d'y répondre
par écrit.
L'Office annonca également qu'il examinerait
la demande suivant une procédure ex parte dans
le cadre des calculs d'excédents que comporte
la décision de l'Office rendue en janvier 1974
relativement aux demandes présentées par la
Cochin et la Dome, que les calculs d'excédents
de gaz naturel établis par l'Office prévoyaient
une usine de production d'éthylène de la Dow
d'une capacité de 1.2 milliard de livres alimen-
tée à l'éthane et que le rapport de l'Office
reconnaissait cette intention de la Dow d'agran-
dir l'usine alimentée au propane et au butane,
ces deux hydrocarbures n'ayant pas à satisfaire
aux critères d'excédents de gaz naturel établis
par l'Office.
L'Office annonca en outre qu'avant d'exami-
ner la question des quantités d'éthylène dépas-
sant celles que l'Office avait établies aupara-
vant, il traiterait de ce qui fut désigné comme
les «audiences publiques véritables» portant sur
des renseignements relatifs à la demande, l'ap-
provisionnement, la possibilité de livraison et
l'excédent de gaz naturel au sujet desquels on
avait expédié des avis à toutes les parties inté-
ressées en les invitant à soumettre leurs plaidoi-
ries avant le 3 septembre 1974, permettant à ces
parties d'être entendues et de participer active-
ment à l'audience qui, je crois, doit avoir lieu en
septembre 1974.
Au sujet de la demande de la Dow, il arriva en
fait qu'au début de l'audience, la Dow cita trois
témoins qui avaient tous comparu et témoigné
lors des demandes de la Dome et de la Cochin.
On exhiba à chacun des témoins une transcrip
tion de la déposition qu'il avait faite dans les
procédures antérieures et qui constituait une
pièce à conviction dans les présentes procédu-
res, et chacun les reconnut. On demanda à
chacun des témoins s'il faisait sienne la déposi-
tion qu'il avait faite dans les procédures anté-
rieures et chacun répondit par l'affirmative.
L'interrogatoire oral principal comportait deux
questions adressées à chacun des trois témoins
et n'était rien de plus que l'adoption par chaque
témoin de la déposition qu'il avait faite antérieu-
rement. Par voie de référence, il incorporait
dans les procédures de la Dow la preuve présen-
tée lors des demandes de la Dome et de la
Cochin.
Les avocats de l'Office et ses membres inter-
rogèrent les témoins sur des questions importan-
tes soulevées dans les plaidoiries écrites présen-
tées par l'Alberta Gas Trunk Line, la Dupont of
Canada, l'Esso Chemical of Canada, la province
de l'Ontario et la Polymer et ils le firent de
façon générale dans le but de vérifier les déposi-
tions et de confronter les témoins avec les ques
tions soulevées par les intervenants.
Lors de l'argumentation, on me fit remarquer
comme fait important que les avocats des requé-
rants en l'espèce qui avaient été présents à
l'audience tenue devant l'Office n'ont pas mani
festé le désir de contre-interroger les témoins,
qu'ils ont suggéré aux avocats de l'Office ou à
ses membres toutes questions qui, selon eux,
devraient être posées à ces témoins en contre-
interrogatoire, qu'ils pouvaient assigner des
témoins en riposte, que leur position &était pas
parfaitement comprise et qu'ils ne s'étaient pas
opposés à l'admission d'arguments écrits plutôt
que de plaidoiries orales.
De façon générale, lorsqu'il s'agit d'une ques
tion d'équité, si une partie consent à l'adoption
d'une procédure en toute connaissance de
cause, cette partie se trouve alors mal placée
pour se plaindre de la procédure ainsi adoptée.
Il suffit de répondre en l'espèce que les par
ties s'opposant à la demande se sont plaintes de
la procédure au tout début de l'audience et
demandèrent que la procédure soit modifiée.
L'Office refusa d'accéder à cette demande.
Compte tenu de la décision de l'Office portant
que la requérante seule pouvait présenter une
preuve et une argumentation orales (qui fut par
la suite changée en argumentation écrite, ce qui
fut fait), que les opposants devaient se limiter à
des plaidoiries écrites et ne bénéficiaient pas du
droit de contre-interroger, les avocats auraient
droit de présumer que, s'ils avaient proposé ou
demandé ce qui leur avait été proposé de faire,
l'Office n'aurait pas entendu les suggestions ou
demandes et qu'il aurait été inutile de les faire.
L'utilisation fréquente et répétée de l'expres-
sion ex parte de pair avec le terme «publique-
ment» et quelques fois «en public» fut un choix
des plus malheureux. L'expression latine ex
parte, traduite littéralement, signifie d'un seul
côté ou d'une seule partie et, du point de vue
juridique, veut dire une procédure qui est insti-
tuée ou accordée à la demande ou à l'avantage
d'une seule partie sans donner avis à une per-
sonne dont les intérêts sont opposés ou sans
contestation de sa part.
L'Office ne fit rien de tel. Il donna avis aux
personnes intéressées et les invita à soumettre
des plaidoiries écrites. La demande ne devait
être ni présentée ni entendue ex parte. L'utilisa-
tion de cette expression dans le présent con-
texte était contradictoire et par conséquent
dénuée de sens.
Immédiatement après la décision de l'Office
rendue en avril 1974 selon laquelle l'éthylène
était du gaz au- sens de la Partie VI de la Loi sur
l'Office national de l'énergie, la Dow fit une
demande de licence en vue de l'exportation
d'éthylène.
Le 20 juin 1974, le gouverneur en conseil
approuva une modification aux Règlements sur
l'Office national de l'énergie (Partie VI) par l'in-
sertion, immédiatement après l'article 16 desdits
règlements, de la rubrique et de l'article suivant:
Éthylène
16.1 (1) Nonobstant les dispositions des présents règle-
ments, toute personne peut, sans licence, importer de
l'éthylène.
(2) L'Office peut, par voie d'ordonnance, autoriser une
personne à exporter de l'éthylène selon les modalités et aux
conditions qu'il peut prescrire.
(3) Toute personne qui exporte ou importe de l'éthylène
doit, à la demande de l'Office, fournir à ce dernier les
renseignements qu'il peut exiger au sujet de l'exportation ou
de l'importation.
(4) Lorsqu'une personne désignée dans une ordonnance
rendue en vertu du paragraphe (2) exporte de l'éthylène, elle
doit exporter l'éthylène selon les modalités et aux conditions
prescrites par l'Office dans ladite ordonnance.
2. Le paragraphe 24(2) desdits règlements est modifié par
le retranchement du mot «et» à la fin de l'alinéa g), par
l'addition du mot à la fin de l'alinéa h) et par l'adjonc-
tion de l'alinéa suivant:
i) éthylène.
Cette modification entra en vigueur le 24 juin
1974. Suivant les règles d'interprétation, lors-
qu'une loi a pour effet (ces règles s'appliquent à
un règlement autorisé en vertu d'une loi) de
supprimer un droit, elle ne s'applique pas prima
facie aux droits existants, mais lorsqu'elle ne
traite que d'une question de procédure, elle
s'applique prima facie à toutes matières pendan-
tes aussi bien que futures.
Présumant que la loi vise uniquement la pro-
cédure, comme ce semble être le cas, question
qu'il ne m'appartient pas de trancher pour les
motifs que j'exposerai, l'Office pouvait alors,
par voie d'ordonnance, autoriser un requérant à
exporter de l'éthylène et d'après les termes
mêmes de la modification, il est manifeste que
l'Office peut rendre cette ordonnance ex parte
suivant la signification précise de ces termes.
Au début de l'audience, l'avocat de la Dow fit
valoir que l'Office devrait considérer la
demande visant l'émission d'une licence pour
l'exportation d'éthylène comme une demande
d'ordonnance autorisant la Dow à exporter de
l'éthylène conformément à la modification
apportée aux Règlements (Partie VI).
L'Office n'a pas tranché cette question. A
mon avis, l'Office était tenu de déterminer le
caractère fondamental de la demande avant de
s'engager dans l'audience. La demande devait
être une chose ou l'autre et non participer des
deux parce que, selon qu'elle appartient à l'une
ou l'autre des deux catégories, il en résulte des
procédures et des conséquences différentes.
Puisque l'Office n'a pas tranché la question
ou n'a pas fait connaître sa décision, j'estime ne
pas avoir d'autre choix que d'examiner la
requête dont je suis saisi en prenant pour acquis
que la demande demeure telle qu'elle fut présen-
tée initialement devant l'Office, c'est-à-dire une
demande déposée par la Dow visant l'émission
d'une licence pour l'exportation d'éthylène.
Les avocats de l'Office cherchèrent à déposer
devant moi un communiqué de presse que
celui-ci avait émis antérieurement à l'audition de
la demande de la Dow, et des copies authenti-
ques de la décision et des motifs de l'Office
portant sur les demandes antérieures de la
Dome et de la Cochin. Les avocats des requé-
rants s'objectèrent à l'admission des documents
au motif que la présente requête se limitait à la
demande de la Dow et que les documents ne s'y
rapportaient aucunement. J'admis les docu
ments en preuve sous réserve de l'objection, au
motif que les décisions antérieures auraient une
incidence sur la question de savoir si la procé-
dure adoptée par l'Office accordait une
audience équitable, question sur laquelle je
pourrais bien être appelé à me prononcer, et
parce qu'il n'y avait eu aucune requête anté-
rieure demandant des directives sur les éléments
qui constitueraient le dossier d'une demande de
certiorari. Après l'admission de ces documents,
les avocats des requérants demandèrent de
déposer également la transcription de la preuve
présentée lors de ces audiences antérieures.
J'accédai à cette demande pour les mêmes
raisons.
Après mûre réflexion, je suis convaincu que
tous les éléments de preuve susmentionnés sont
recevables pour assurer que l'on puisse effica-
cement résoudre et trancher la question en
litige.
La Loi sur l'Office national de l'énergie com-
porte des dispositions de procédure et l'on a
établi, conformément à l'article 7, des règles
relatives à la pratique et à la procédure devant
l'Office.
Si l'Office se conforme aux dispositions de
procédure prévues expressément, il est maître
de sa propre procédure, mais, lorsqu'il y a une
plainte, comme en l'espèce, la Cour doit alors
décider s'il y a eu omission d'observer les prin-
cipes de justice naturelle en étant, d'une façon
appréciable, injuste ou partial envers les auteurs
de la plainte.
Dès lors, la question qu'il faut trancher en
premier lieu est celle de savoir si l'Office avait
le pouvoir de procéder comme il l'a fait.
Si l'on tranche cette question par la négative,
cela, à mon avis, met fin au débat et les requé-
rants ont droit au redressement.
Au contraire, si l'on répond par l'affirmative,
il se pose alors une seconde question, celle de
savoir si la procédure adoptée par l'Office était
juste et équitable à l'égard des requérants.
Les avocats m'ont cité une multitude d'arrêts.
Leur examen semblerait établir qu'il n'existe
pratiquement aucune règle portant sur un pro-
blème particulier applicable universellement à
chaque type d'affaires, quelles que soient les
circonstances. Dans chacune des décisions, il
fut jugé que ce que l'on avait fait dans cette
affaire était ou n'était pas conforme aux exigen-
ces de la justice naturelle dans les circonstances
de l'espèce, mais on n'a pas jugé que l'on devait
ou ne devait pas faire une chose en particulier,
quelles que soient les circonstances.
Indépendamment du caractère qu'on peut
attribuer à l'Office, quant à savoir s'il exerce
des fonctions administratives ou exécutives par
opposition à des fonctions judiciaires ou quasi-
judiciaires, le Parlement lui a imposé des obliga
tions relatives à la procédure.
L'article 20 de la Loi sur l'Office national de
l'énergie prévoit:
20. (1) Sous réserve du paragraphe (2), les auditions de
l'Office doivent être publiques en ce qui regarde la déli-
vrance, la révocation ou la suspension de certificats ou de
licences concernant l'exportation du gaz ou de la force
motrice ou l'importation du gaz ou donnant la permission
d'abandonner l'exploitation d'un pipe-line ou d'une ligne
internationale de transmission de force motrice.
(2) Lorsque l'Office révoque ou suspend un certificat ou
une licence sur demande ou du consentement de son déten-
teur, il n'est pas nécessaire de tenir d'audience publique si le
pipe-line ou la ligne internationale de transmission de force
motrice auxquels se rapporte le certificat ou la licence n'ont
pas été mis en opération commerciale aux termes de ce
certificat ou de cette licence.
(3) L'Office peut tenir une audition publique sur n'im-
porte quel autre sujet, s'il estime opportun de le faire.
Au paragraphe (3), l'expression utilisée est
«audition publique». L'exception au paragraphe
(2) énoncée au paragraphe (1) ne s'applique pas
aux circonstances de l'espèce. Néanmoins, l'ex-
pression «audience publique» est utilisée au
paragraphe (2). Le paragraphe (1) prévoit que
les «auditions» de l'Office doivent être publi-
ques en ce qui regarde la délivrance d'une
licence concernant l'exportation du gaz (j'ai
conclu pour les motifs exprimés précédemment
que c'était l'objet de la demande de la Dow). La
note marginale de l'article 20 indique «audition
publique». La note marginale ne fait pas partie
de la Loi mais constitue simplement un titre
abrégé. Bien que l'on ne doive pas l'invoquer
pour interpréter la Loi, elle est utile. Malgré que
les termes «audition» et «publique» ne soient
pas juxtaposés au paragraphe (1), néanmoins,
lorsqu'on considère l'article comme un tout, il
faut interpréter les termes du paragraphe (1)
comme synonymes d'«audition publique».
On a prétendu que le mot «publique» en tant
qu'adjectif modifiant le mot «audition» signifie
que les procédures de l'Office doivent se dérou-
ler «en public» par opposition aux procédures
ayant lieu à huis clos.
Je ne souscris pas à cette prétention. A mon
avis, le terme «publique» dans ce contexte signi-
fie que chaque personne, sous réserve qu'elle ait
un intérêt prouvable supérieur à celui du public
en général dans l'affaire portée devant l'Office,
doit avoir le droit de participer à l'audience.
Pour en conclure ainsi, je m'appuie sur les
termes de Lord Moulton dans l'arrêt Local Gov-
ernment Board c. Arlidge 1 . Lord Moulton exa-
mina le sens du mot «publique» dans l'expres-
sion «enquête locale publique». Il déclara aux
pages 147 et 148:
[TRADUCTION] L'insertion du mot «publique» me semble
avoir pour effet que chaque personne aurait un droit de
comparaître pour soulever devant le tribunal d'enquête tous
points pertinents, de façon à assurer que toutes questions
afférentes aux droits du propriétaire ou de l'occupant de la
maison en cause, ou aux droits du public en général, ou du
public demeurant dans le voisinage en question, soient por-
tées à la connaissance du Local Government Board pour lui
permettre de s'acquitter de ses devoirs au sujet de l'appel.
L'article 7 de la Loi sur l'Office national de
l'énergie prévoit:
7. L'Office peut établir des règles en ce qui regarde
a) ses séances;
b) la procédure à employer pour la présentation de
demandes, exposés et plaintes à l'Office, ainsi que la
conduite d'auditions devant ce dernier, et, d'une manière
générale, la manière d'accomplir les affaires dont il est
saisi;
(J'ai omis les alinéas c) et d) car ils n'ont aucune incidence
sur le sujet en litige.)
Conformément à ce pouvoir, l'Office a établi
des règles de pratique et de procédure.
L'article 6 de ces Règles prévoit:
6. (1) Sauf lorsque l'Office décrète qu'une demande peut
être entendue et jugée ex parte ou qu'il rend une ordonnance
d'accélération des procédures, l'Office doit, aussitôt que
possible après la production d'une demande, inscrire la
demande pour audition.
(2) Lorsqu'une demande a été inscrite pour audition, le
secrétaire doit aussitôt donner avis, au requérant, de la date,
de l'heure et du lieu déterminés pour l'audition de ladite
demande et indiquer, dans cet avis,
a) les personnes à qui le demandeur doit donner avis de la
demande, ainsi que le délai dans lequel cet avis doit être
donné,
b) la manière dont le demandeur doit donner avis de la
demande, soit par annonce publique, signification person-
nelle ou autrement, et
c) la forme et le contenu de l'avis que doit donner le
demandeur, ainsi que les renseignements à y inclure, y
compris la date, l'heure et le lieu déterminés pour l'audi-
tion de la demande, de même que le délai dans lequel
toute réponse ou plaidoirie doit être produite auprès du
secrétaire.
(3) Le demandeur doit donner avis de la demande sur
réception et en conformité de l'avis mentionné au paragra-
phe (2).
' [1915] A.C. 120.
L'article 7 prévoit une réponse ou plaidoirie
d'un intervenant qui a l'intention de former
opposition à une demande et à son contenu ou
d'y intervenir.
Les dispositions relatives aux auditions sont
contenues aux articles 15 à 19 dont voici le
texte:
15. Les auditions devant l'Office doivent ordinairement
être tenues à Ottawa, mais peuvent avoir lieu à d'autres
endroits au Canada selon que l'Office le juge nécessaire ou
opportun pour la bonne administration de ses affaires.
16. Lorsque l'audition relative à une demande quelconque
est commencée, elle doit se continuer de jour en jour, mais
peut à l'occasion être ajournée sur l'ordre ou avec l'autorisa-
tion de l'Office.
17. (1) Les témoins, lors d'une audition relative à une
demande quelconque, doivent être interrogés de vive voix,
mais l'Office peut en tout temps ordonner que la preuve
d'un fait particulier soit faite par affidavit ou que l'affidavit
d'un témoin soit lu lors de l'audition, selon les modalités et
conditions que l'Office juge raisonnables, ou qu'un témoin
qui, pour un motif valable et suffisant, devrait être dispensé
de comparaître, soit interrogé par un commissaire ou autre
personne autorisée à faire prêter le serment, devant qui .les
parties ou leurs procureurs devront se présenter.
(2) Un avis du jour, de l'heure et de l'endroit fixés pour la
prise de témoignages devant un commissaire ou autre per-
sonne autorisée à faire prêter le serment doit être donné de
la manière prescrite par l'ordre qu'a rendu l'Office aux
termes du paragraphe (1).
(3) Les témoignages recueillis devant un commissaire ou
autre personne autorisée à faire prêter le serment doivent
être restreints au sujet de la demande, et toutes les objec
tions à l'admission de la preuve doivent être notées par ce
commissaire ou autre personne et il sera statué à leur égard
par l'Office lors de l'audition; une copie de tous les témoi-
gnages ainsi recueillis doit être certifiée sous le seing de la
personne qui les a recueillis et doit être immédiatement
transmise au secrétaire.
(4) Une copie de tous les témoignages censés certifiés
sous le seing du commissaire ou autre personne autorisée à
faire prêter le serment est admissible en preuve sans qu'il
soit nécessaire d'établir la preuve de la signature de cette
personne ou du fait que les témoignages ont été recueillis au
jour, à l'heure et à l'endroit, ainsi que de la manière,
indiqués dans le certificat.
18. Les témoignages recueillis
a) lors d'une autre audition devant l'Office, ou
b) dans le cas d'une demande de certificat concernant un
pipe-line de gaz ou d'une licence d'exportation de gaz, lors
d'une audition devant tout conseil, commission, office ou
autre tribunal compétent d'une province en vue d'une
autorisation à prendre du gaz d'une province ou à achemi-
ner du gaz hors d'une province,
ou les rapports ou °enclosions établis, ou les ordonnances
rendues, à leur égard, peuvent, moyennant la permission de
l'Office, obtenue avant ou après le commencement de l'audi-
tion d'une demande, être admis en preuve lors de l'audition.
19. L'Office peut, chaque fois qu'il l'estime opportun,
exiger qu'un mémoire écrit soit soumis par les parties en
cause.
L'article 3 des Règles prévoit:
3. (1) Sous réserve de la Loi et des règlements et sauf
disposition différente des présentes règles, ces dernières
s'appliquent à toutes procédures devant l'Office, à l'occa-
sion d'une demande.
(2) Dans toutes procédures dont il est saisi à l'occasion
d'une demande, l'Office peut ordonner, soit oralement soit
par écrit, que les dispositions des présentes règles ou de
quelqu'une d'entre elles ne s'appliqueront pas ou ne s'appli-
queront qu'en partie et, sans restreindre la généralité de ce
qui précède, l'Office peut, pour assurer la prompte conduite
de ses affaires, et l'audition de toutes semblables procédures
ainsi que la décision en l'espèce,
a) prolonger ou abréger le délai fixé par les présentes
règles pour l'accomplissement de tout acte ou chose,
b) s'abstenir de se conformer à quelque disposition des
présentes règles exigeant l'accomplissement de quelque
acte ou chose, ou
c) remplacer par d'autres règles la totalité ou quelqu'une
des dispositions des présentes règles.
(3) Dans tout cas non expressément prévu par la Loi, les
règlements ou les présentes règles, l'Office peut, à sa discré-
tion, adopter et rendre applicable les règles générales de
pratique de la Cour fédérale du Canada, à toutes procédures
dont il est saisi à l'occasion d'une demande.
Il n'y a aucun élément de preuve me permet-
tant de conclure qu'on a demandé à l'Office de
déroger aux règles et on n'a pas non plus attiré
mon attention sur un élément de preuve suivant
lequel l'Office en a ainsi ordonné soit orale-
ment, soit par écrit.
Bien que l'Office n'ait sans doute pas estimé
qu'il était urgent d'examiner la demande de la
Dow, il n'en a pas fait une condition expresse
pour prendre l'initiative de remplacer les Règles
existantes par d'autres Règles pour assurer la
prompte conduite de l'audition de la demande
de la Dow.
On pourrait peut-être interpréter ainsi le mes
sage telex du 11 juin 1974, mais, à mon avis, il
aurait dû être fondé sur une déclaration
expresse qu'il existait une certaine urgence jus-
tifiant l'Office de déroger aux Règles ordinaire-
ment applicables à une audience, sans quoi les
destinataires du message pouvaient présumer
que les Règles habituelles s'appliquaient. Ceci,
je pense, découle de l'article 3(1).
En outre, l'article 3 comporte l'expression
«sous réserve de la Loi». La question capitale
est donc celle de savoir si le sens qu'il faut
attribuer au mot «audition» utilisé à l'article 20
de la Loi est celui d'une «audition orale» habi-
tuelle, c'est-à-dire, une audition où l'Office
serait disposé à entendre les deux parties, à
rendre possible et permettre aux deux parties de
commenter ou contredire tout renseignement
obtenu par l'Office, à permettre aux parties de
présenter une preuve orale et d'être représen-
tées par des avocats, à autoriser le contre-inter-
rogatoire de témoins qui adoptent une position
contraire à la leur, et où l'Office agirait unique-
ment à partir de renseignements ayant une
valeur probante.
Je me rends pleinement compte qu'en de
nombreux cas, il n'est pas nécessaire qu'une
audition soit tenue oralement; elle peut se faire
par plaidoiries écrites. Si la loi créant un tribu
nal lui accorde une discrétion absolue quant à la
procédure à suivre, ce dernier peut alors adop-
ter une procédure acceptable qui ne comporte
pas d'audition orale, mais même alors, il peut y
avoir des cas où l'équité peut commander uni
audition orale. C'est pourquoi je considère que
ce qui est visé par l'emploi du mot «audition» à
l'article 20 de la Loi sur l'Office national de
l'énergie, revêt une importance aussi cruciale.
Le Shorter Oxford English Dictionary définit
comme suit le mot «audition»:
[TRADUCTION] 3. Action d'entendre des témoignages et des
plaidoiries dans une cour de justiée; l'instruction d'une
cause; spec. un procès devant un juge sans jury 1576.
Cependant, le sens éthymologique d'un mot
n'est pas nécessairement celui qu'exige le con-
texte et on ne doit recourir aux dictionnaires
qu'aux fins de vérifier l'emploi d'un mot dans le
langage populaire.
Le sens d'un mot dans une loi, et c'est pour
moi une règle fondamentale, doit être interprété
non pas suivant son sens général ordinaire, mais
suivant le sens du mot appliqué à l'objet de la
loi, à moins que, dans le contexte, ce mot ne
soit utilisé dans le langage courant.
Je crois que le mot «audition» dans le con-
texte de l'article 20 de la Loi sur l'Office natio
nal de l'énergie est utilisé dans un sens
technique.
Pour chercher à découvrir le sens du mot
«audition», je dois tout d'abord considérer
l'article 20 lui-même et je peux également consi-
dérer les autres articles de la Loi et la Loi dans
son ensemble, de même que les règlements éta-
blis sous son régime.
Lorsque le mot «audition» est utilisé dans un
texte législatif, il signifie presque toujours une
audition où l'on présente une preuve et une
argumentation orales mais, bien que ce soit
généralement le cas, il peut y avoir des excep
tions où des plaidoiries écrites peuvent suffire.
L'article 10 de la Loi sur l'Office national de
l'énergie se lit comme suit:
10. (1) L'Office est une cour d'archives.
(2) L'Office a un sceau officiel, qui sera reconnu à toutes
fins de droit.
(3) En ce qui concerne la présence, l'assermentation et
l'interrogatoire des témoins, la production et l'examen des
documents, l'exécution de ses ordonnances, l'entrée en
jouissance des biens et leur inspection, de même que toutes
les autres matières indispensables ou appropriées à l'exer-
cice régulier de sa juridiction, l'Office a tous les pouvoirs,
droits et privilèges attribués à une cour supérieure
d'archives.
L'article 15 de la Loi prévoit:
15. (1) Toute décision ou ordonnance rendue par l'Office
peut, en vue de l'exécution de cette décision ou ordonnance,
devenir un arrêt, une ordonnance ou un jugement de la Cour
fédérale du Canada ou de toute cour supérieure de quelque
province du Canada. Elle doit être exécutée de la même
manière qu'un arrêt, une ordonnance ou un jugement d'une
telle cour.
(2) Pour qu'une décision ou ordonnance de l'Office
devienne un arrêt, une ordonnance ou un jugement de la
Cour fédérale du Canada ou d'une cour supérieure, on peut
suivre la pratique et la procédure de la cour habituellement
adoptées à cet égard ou, en remplacement, le secrétaire peut
produire au greffe de la cour une copie certifiée de la
décision ou de l'ordonnance sous le sceau de l'Office. La
décision ou l'ordonnance devient alors un arrêt, une ordon-
nance ou un jugement de la cour.
L'article 17(1) des Règles de pratique et de
procédure, précité, prévoit généralement que
des témoins doivent être assignés lors d'une
«audition» relative à une demande quelconque
et doivent être interrogés de vive voix et il me
semble que les termes «doivent être interrogés
de vive voix» impliquent nécessairement le con-
tre-interrogatoire de vive voix par ceux qui s'op-
posent à la demande ou par leurs avocats et ne
se limitent pas à l'interrogatoire ou au contre-
interrogatoire par les membres de l'Office ou
ses avocats. Le requérant, ou son avocat, béné-
ficie du même privilège à l'endroit des témoins
assignés par les opposants.
En vertu de l'article 10 de la Loi sur l'Office
national de l'énergie, l'Office est constitué en
«une cour d'archives».
Dans le Wharton's Law Lexicon, 14 e édition,
on définit les «cours d'archives» à la page 846
comme
[TRADUCTION] ... celles dont les actes judiciaires et les
actes de procédure sont consignés sur parchemin, pour
perpétuelle mémoire et attestation, lesquels sont appelés les
archives de la cour et font foi de leur contenu au point que
l'exactitude de leur contenu ne peut pas être contestée.
Le fait que la Loi désigne l'Office comme
«une cour d'archives» n'en fait pas une cour de
justice au sens juridique de ce terme.
La jurisprudence et la doctrine montrent clai-
rement qu'il existe des tribunaux qui, à plusieurs
égards, s'apparentent à une cour mais qui ne
sont pas des cours au sens strict.
En vertu de l'article 10 de la Loi, l'Office est
investi des pouvoirs d'une cour supérieure d'ar-
chives c'est-à-dire une cour proprement dite. En
vertu de ses Règles de pratique et de procédure,
il siège et tient des auditions. Il a entière auto-
rité pour assigner des témoins et les obliger à
comparaître, pour les assermenter, pour ordon-
ner la production et l'examen de documents,
pour entrer en jouissance d'un bien et l'inspec-
ter, pour faire exécuter ses décisions et ordon-
nances, pour procéder à l'interrogatoire des
témoins et exercer tous les droits et privilèges
qui sont attribués à une cour supérieure.
Dans plusieurs cas, ses décisions sont finales
et péremptoires, sous l'unique réserve de l'exa-
men prévu à l'article 28 de la Loi sur la Cour
fédérale et des recours extraordinaires prévus à
l'article 18 de la même loi.
Dans d'autres cas, ses décisions n'ont effet
qu'après avoir été approuvées par le gouverneur
en conseil.
Compte tenu des dispositions expresses con-
tenues dans la Loi sur l'Office national de l'éner-
gie, je ne pense pas qu'il soit nécessaire, à ce
stade, de s'engager dans une discussion de prin-
cipe pour déterminer si le rôle de l'Office est
purement administratif ou exécutif.
L'Office doit trancher des questions d'intérêt
public important. En décidant s'il doit accorder
une demande de licence en vue de l'exportation
de gaz naturel, l'Office a le devoir de la plus
haute importance de protéger cet intérêt. Ce
faisant, toutefois, il fait face à un conflit entre
celui qui demande la licence et les personnes
intéressées qui s'opposent à cette demande.
Bien qu'il puisse ne pas y avoir de litige entre
les parties au sens véritable de cette expression,
à cause de l'absence d'une tierce partie, qui est
l'intérêt public, il n'en existe pas moins un con-
flit entre le requérant et les objecteurs. Dans
certains cas, on peut dire que l'objecteur repré-
sente l'intérêt public et dans d'autres un concur
rent du requérant.
En l'espèce, il y avait une combinaison des
deux.
La jurisprudence et la doctrine ont décrit et
reconnu cette situation comme étant un quasi-
litige entre des quasi-parties.
Parce que la Loi sur l'Office national de
l'énergie a accordé à l'Office les attributs d'une
cour et parce que la Loi et les règlements envi-
sagent la panoplie d'une audition à caractère
pleinement contradictoire, il s'ensuit que l'arti-
cle 20 de la Loi doit avoir accordé au mot
«audition» le même sens qu'il a dans une cour
de justice.
En ce sens, une «audition» de l'Office est
analogue à un «procès» devant une cour de
justice et a la même signification.
Ceci étant, il faut traiter sur le même pied
celui qui fait la demande d'une licence et ceux
qui s'y opposent, sans accorder aux uns ou aux
autres d'avantages discriminatoires.
Par conséquent, si l'on permet à une partie de
présenter une preuve orale, il faut accorder le
même avantage aux opposants, ainsi que le droit
pour les deux parties de contre-interroger les
témoins qui ont fait une déposition orale con-
traire à leurs positions respectives. C'est ainsi
que l'on procède dans une cour de justice et
parce que j'ai conclu pour les motifs donnés
précédemment que l'on doit interpréter le mot
«audition» de l'article 20 de la Loi de l'Office
national de l'énergie comme étant analogue à un
«procès» devant une cour de justice et ayant la
même signification, il s'ensuit que l'Office doit
faire de même dans une audition de ce genre.
Cela, l'Office ne l'a pas fait. Il accorda à la
Dow, la requérante, le droit de présenter une
preuve et argumentation orales alors qu'il limita
les intervenants à des plaidoiries écrites ce qui,
je présume, signifie une preuve et argumenta
tion écrites.
Nul doute que des raisons valables ont incité
l'Office à agir ainsi, mais ceci n'enlève rien au
fait que la requérante et les intervenants furent
traités différemment.
Lors de l'audition devant l'Office, la Dow
présenta effectivement des dépositions orales.
A d'autres égards, les procédures furent modi
fiées. La Dow ne présenta pas d'argumentation
orale. On accorda aux intervenants la possibilité
de présenter avant une date spécifique, soit le 8
juillet 1974, des plaidoiries écrites en plus de
celles présentées au début. Deux le firent et les
autres pas. La Dow répondit par écrit à ces
plaidoiries additionnelles, mais on ne permit pas
aux intervenants de présenter une preuve orale
et ils ne contre-interrogèrent pas les témoins
cités par la Dow, même si les membres de
l'Office et ses avocats interrogèrent longuement
ces témoins.
La déposition orale des témoins cités au nom
de la Dow fut minime. Ils ont simplement con
firmé et reconnu, aux fins de cette audition, les
témoignages qu'ils avaient rendus lors de l'audi-
tion antérieure.
Si l'on ne permettait à la Dow de présenter
une déposition orale que dans ce seul but, je ne
peux voir comment ce but n'aurait pu être
atteint en admettant simplement les témoignages
dans l'audition en cours conformément à l'arti-
cle 18 des Règles de pratique et de procédure de
l'Office. Cependant, cela ne pouvait être le seul
but puisque l'Office et ses avocats soumirent
ces témoins à un long interrogatoire. Nul doute
que le but de cet interrogatoire était de vérifier
l'exactitude de ces témoignages antérieurs et
d'en convaincre l'Office. Ceci est compréhensi-
ble et normal. Il y avait sans doute un deuxième
but qui était d'obtenir les points de vue de ces
témoins sur des questions soulevées par les
intervenants dans leurs plaidoiries écrites. Cela
aussi est compréhensible et normal mais on en
arrive à usurper le privilège et le rôle de ceux
qui s'opposent à la demande et de leurs avocats
si on ne leur accorde pas le même droit.
Pour les motifs exprimés ci-dessus, j'ai conclu
que la manière dont cette audition fut conduite
devant l'Office n'est pas conforme à l'article 20
de la Loi sur l'Office national de l'énergie.
Il n'est pas nécessaire, par conséquent, d'exa-
miner si l'audition ainsi conduite, était équitable
et juste suivant les principes de justice
naturelle.
Il s'ensuit que les requérants en l'espèce ont
droit à un redressement.
On peut l'obtenir par voie de brefs de préro-
gative comme les brefs de certiorari, de prohibi
tion et de mandamus.
Ces brefs sont des recours extraordinaires et
la common law accorde discrétion pour les
accorder ou les refuser, celle-ci devant être
exercée suivant des principes bien définis et
reconnus par la common law.
Le recours approprié, à mon avis, est une
ordonnance de prohibition, comme celle deman-
dée au paragraphe b) de l'avis de requête modi-
fiée, mais sans toutefois revêtir les termes
mêmes de ce paragraphe.
Il y aura, par conséquent, ordonnance interdi-
sant à l'Office, suite à l'audition de la demande
tenue à Ottawa (Ontario), les 25, 26 et 27 juin
1974, de rendre une décision à l'égard de la
demande de licences, déposée par la Dow
Chemical of Canada Limited en date du 30 mai
1974, en vue d'exporter de l'éthylène hors du
Canada, d'en importer au Canada et d'en réex-
porter hors du Canada.
Je m'abstiens délibérément d'accorder une
ordonnance du genre du bref de certiorari visé
au paragraphe a) de l'avis de requête modifiée
parce que le redressement accordé est plus
approprié et adéquat.
Je m'abstiens également d'accorder une
ordonnance de prohibition dans les termes
mêmes visés au paragraphe b) de l'avis de
requête modifiée ainsi qu'une ordonnance de
mandamus visée au paragraphe c) de ladite
requête.
J'agis ainsi parce que l'audition mentionnée
au paragraphe b) étant complétée, une prohibi
tion à cet égard serait inutile et parce que l'audi-
tion ne fut pas conduite ex parte. Je fais une
distinction entre l'audition et la décision qui en
découle.
Je refuse d'accorder une ordonnance de man-
damus ordonnant à l'Office de tenir une audi
tion publique comme le demande le paragraphe
c) de l'avis de requête modifiée, d'inclure dans
l'ordonnance de prohibition toute directive ou
référence à une audition publique et aux inci
dences qui en découlent et interdisant à l'Office
de rendre une ordonnance.
Ce refus s'explique par la modification appor-
tée aux Règlements sur l'Office national de
l'énergie (Partie VI) par l'ordonnance en conseil
C.P. 1974-5457, en date du 20 juin 1974, en
vertu de laquelle toute personne peut, sans
licence, importer de l'éthylène et l'Office peut,
par voie d'ordonnance, autoriser toute personne
à exporter de l'éthylène selon les modalités et
aux conditions qu'il peut prescrire.
Comme je l'ai déjà indiqué et pour les motifs
donnés précédemment, j'ai fondé mon examen
de cette requête uniquement sur le fait que la
demande déposée par la Dow visait l'obtention
d'une licence d'importation et d'exportation
d'éthylène et n'était pas une demande adressée
à l'Office en vue d'obtenir une ordonnance d'ex-
portation d'éthylène.
La validité de l'ordonnance en conseil et le
pouvoir qu'il accorde à l'Office d'autoriser l'ex-
portation d'éthylène par voie d'ordonnance,
sans audition publique n'étaient pas en litige et,
par conséquent, ne furent pas pleinement et
complètement débattus et décidés.
Il n'y aura aucune adjudication de dépens.
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