T-2983-74
Union Gas Limited, le ministre de l'Énergie de
l'Ontario et The Consumers' Gas Company
(Requérants)
c.
TransCanada PipeLines Limited, l'Office national
de l'énergie, Greater Winnipeg Gas Company,
Gaz Métropolitain, Inc., Alberta Gas Trunk Line
Company Limited, Pan-Alberta Gas Limited,
Saskatchewan Power Corporation, Rio Algom
Mines Limited, le procureur général, du Manitoba
et le procureur général du Québec (Intimés)
Division de première instance, le juge Maho-
ney—Ottawa, les 19, 20 et 21 août 1974.
Recours extraordinaires—Requête en annulation des déci-
sions provisoires de l'Office—Bref de certiorari inadéquat—
Loi sur l'Office national de l'énergie, S.R.C. 1970, c. N-6,
art. 20, 44a) à d)—Loi sur la Cour fédérale, art. 18 et 28.
Les requérants cherchent à obtenir des ordonnances par
voie de certiorari pour faire annuler deux décisions de
l'Office national de l'énergie rendues au cours de l'audition
d'une demande déposée par l'intimée, la TransCanada Pipe -
Lines Limited en vue d'obtenir un certificat prévu à l'article
44 de la Loi sur l'Office national de l'énergie.
Arrêt: la demande est rejetée; de toute évidence, la pre-
mière décision de l'Office, visant à déterminer l'ordre dans
lequel il entendrait les témoignages et autoriserait le contre-
interrogatoire des témoins, relève de ses fonctions. Quant à
la seconde décision, qui restreignait la portée de l'enquête de
l'Office prévue à l'article 44 de la Loi sur l'Office national
de l'énergie, le bref de certiorari n'est pas le recours appro-
prié pour traiter une décision provisoire comme celle en
cause, si applicable soit-il à la décision que l'Office doit
rendre. L'Office avait le pouvoir de décider de bonne foi de
restreindre la portée de son enquête; il a agi de bonne foi en
rendant cette décision; le certiorari est inadéquat à l'égard
d'une telle décision.
Arrêt appliqué: In re la Loi antidumping et in re
Danmor Shoe Company Ltd. [1974] 1 C.F. 22. Arrêts
examinés: La Compagnie des chemins de fer nationaux
du Canada c. Canada Steamship Lines, Limited [1945]
A.C. 204 et Toronto Newspaper Guild c. Globe Printing
Company [1953] 2 R.C.S. 18.
DEMANDE.
AVOCATS:
David W. Scott et George Hunter pour la
requérante, Union Gas Limited.
Robin Scott, c.r., et D. Rogers pour le
requérant, le ministre de l'Énergie de
l'Ontario.
R. A. Smith, c.r., et Jerry H. Farrell pour la
requérante, The Consumers' Gas Company.
L. H. Pilon pour l'intimée, TransCanada
PipeLines Limited.
F. H. Lamar, c.r., et L Blue pour l'intimé,
l'Office national de l'énergie.
Charles Gonthier, c.r., et Michael Cuddihy
pour l'intimée, Gaz Métropolitain, Inc.
A. Lorne Campbell, c.r., et M. E. Rothstein
pour l'intimée, Greater Winnipeg Gas
Company.
G. J. Gorman, c.r., pour les intimées, Alber-
ta Gas Trunk Line Company Limited et
Pan-Alberta Gas Ltd.
John Sopinka et R. W. Cosman pour l'inti-
mée, Rio Algom. Mines Limited.
T. J. Waller pour l'intimée, Saskatchewan
Power Commission.
J. F. Sherwood pour l'intimé, le procureur
général du Manitoba.
Robert Dulude, c.r., et Pierre R. Fortin pour
l'intimé, le procureur général du Québec.
PROCUREURS:
Scott & Aylen, Ottawa, pour la requérante,
Union Gas Limited.
Contentieux, le ministre de l'Énergie de
l'Ontario et Thompson, Rogers, Toronto,
pour le requérant, le ministre de l'Énergie
de l'Ontario.
Smith, Lyons et Associés, Toronto, pour la
requérante, The Consumers' Gas Company.
Contentieux, TransCanada PipeLines Limi
ted, Toronto, pour l'intimée, TransCanada
PipeLines Limited.
Contentieux, Office national de l'énergie,
pour l'intimé, l'Office national de l'énergie.
Laing, Weldon et Associés, Montréal, pour
l'intimée, Gaz Métropolitain, Inc.
Aikins, MacAulay et Thorvaldson, Winni-
peg, pour l'intimée, Greater Winnipeg Gas
Company.
Honeywell, Wotherspoon, Ottawa, pour les
intimées, Alberta Gas Trunk Line Company
Limited et Pan-Alberta Gas Ltd.
Fasken & Calvin, Toronto, pour l'intimée,
Rio Algom Mines Limited.
Griffin, Beke et Associés, Régina, pour l'in-
timée, Saskatchewan Power Commission.
Contentieux, le procureur général du Mani-
toba, Winnipeg, pour l'intimé, le procureur
général du Manitoba.
Geoffrion & Prud'homme, Montréal et le
ministère des Richesses naturelles du
Québec pour l'intimé, le procureur général
du Québec.
Les parties suivantes ont reçu signification de
la requête introductive d'instance, mais n'ont
pas été désignées comme parties et elles
n'étaient pas représentées à l'audience:
Consolidated Natural Gas Limited et
Consolidated Pipelines Company.
Northern and Central Gas Corporation
Limited.
Industrial Gas Users Association.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement prononcés par
LE JUGE MAHONEY: La présente demande
visant l'obtention d'ordonnances par voie de
bref de certiorari résulte de deux décisions ren-
dues par l'Office national de l'énergie (ci-après
appelé «l'Office») au cours de l'audition d'une
demande déposée par la TransCanada PipeLines
Limited (ci-après appelée «TCPL») en vue d'ob-
tenir un certificat visé à l'article 44 de la Loi sur
l'Office national de l'énergie' portant sur des
additions projetées à son réseau.
Au début de l'audience du 7 août 1974, l'Of-
fice ordonna que les dépositions principales des
témoins de la requérante, la TCPL, et des diffé-
rents intervenants qui ont comparu devant lui
ainsi que leur contre-interrogatoire se déroulent
suivant un certain ordre. Cette directive, que
j'appellerai à toutes fins utiles «la décision du 7
août», avait pour effet de permettre aux auteurs
de la demande de contre-interroger les témoins
des co-auteurs de la demande et, en raison de
l'ordre ainsi établi, de permettre que ce contre-
interrogatoire ait lieu après le contre-interroga-
toire des témoins par les parties qui s'opposent
à la demande. On s'est objecté à la décision et
l'Office a entendu l'argumentation, après quoi il
a décidé:
[TRADUCTION] M° Rogers, l'Office ne voit aucune raison
de modifier l'ordre des comparutions. L'Office a choisi cet
ordre parce qu'il lui est commode, en gardant à l'esprit
l'impression que nous avions alors quant au moment où
toute la preuve serait rassemblée. Quant au contre-interroga-
toire des témoins, nous croyons qu'il faut y procéder. Vous
êtes évidemment libre de vous objecter, M' McOuat est libre
de s'objecter et tous les avocats sont libres de s'objecter à
1 S.R.C. 1970, c. N-6.
44. Sous réserve de l'approbation du gouverneur en con-
seil, l'Office peut délivrer un certificat à l'égard d'une pipe
line ou d'une ligne internationale de transmission de force
motrice si l'Office est convaincu que la commodité et la
nécessité publiques requièrent présentement et requerront à
l'avenir la canalisation ou la ligne internationale de transmis
sion et, en étudiant une demande de certificat, celui-ci doit
tenir compte de toutes les données qui lui semblent pertinen-
tes, et, sans limiter la généralité de ce qui précède, peut
considérer ce qui suit:
a) l'accessibilité du pétrole ou du gaz au pipe-line, ou de
la force motrice à la ligne internationale de transmission
de force motrice, selon le cas;
b) l'existence de marchés, effectifs ou possibles;
c) la praticabilité économique du pipe-line ou de la ligne
internationale de transmission de force motrice;
d) la responsabilité et la structure financières de l'auteur
de la demande, les méthodes de financement de la canali-
sation ou de la ligne internationale de transmission, ainsi
que la mesure dans laquelle les Canadiens auront l'occa-
sion de participer au financement, à l'organisation et à la
construction du pipe-line ou de la ligne internationale de
transmission de force motrice; et
e) tout intérêt public qui, de l'avis de l'Office, peut être
atteint par l'octroi ou le rejet de la demande.
toute question que vous croyez avantageuse ou préjudicia-
ble à votre point de vue. 2
L'ordonnance demandée à l'égard de la décision
du 7 août, subsidiairement à une ordonnance
portant annulation des procédures intentées jus-
qu'à maintenant, visait à annuler cette décision
et à enjoindre l'Office de considérer certains
intervenants, savoir la Gaz Métropolitain Inc., la
Greater Winnipeg Gas Company et la Pan-
Alberta Gas Limited, comme co-requérantes au
même titre que la TCPL, dans la mesure où cela
permettait de refuser à ces intervenants le droit
de contre-interroger les témoins de la TCPL et
les témoins cités par l'une ou l'autre d'entre
elles.
Les parties, autres que la TCPL, doivent leur
présence devant l'Office à des décisions prises
en application de l'article 45 de la Loi. 3 Lè droit
de l'Office de déterminer l'ordre dans lequel il
entendra les témoignages et permettra le contre-
interrogatoire des témoins, si exceptionnel que
puisse en être le résultat lorsque les procédures
sont considérées comme des procédures conten-
tieuses, me semble tellement manifeste que j'ai
rejeté cet aspect de la demande immédiatement
à la fin de l'audience. Je le mentionne briève-
ment ici uniquement pour consigner mes
opinions.
On a avancé contre l'autre décision, rendue le
9 août (ci-après appelée «la décision du 9
août»), des arguments beaucoup mieux fondés.
Les requérants en l'espèce affirment qu'elle a
pour effet de les priver du droit de contre-inter-
roger les témoins et de présenter des témoins
sur une question importante dont la TCPL a été
autorisée de traiter lors des dépositions de ses
témoins. Il est essentiel de brosser un tableau
général pour juger de leur point de vue.
La demande déposée dont l'Office était saisi
comprenait le projet de construction, avant la
venue de l'hiver, d'une ligne d'évitement de 15.5
milles en Saskatchewan et au Manitoba et d'une
2 Transcription, page 88. M° Rogers représentait le minis-
tre de l'Énergie de l'Ontario; M° McOuat représentait l'Un-
ion Gas Limited.
3 45. Lors d'une demande de certificat, l'Office doit étu-
dier les objections de toute personne intéressée, et la déci-
sion de l'Office sur la question de savoir si une personne est
intéressée ou non, pour les objets du présent article, est
péremptoire.
autre de 43 milles en Ontario, entre Toronto et
Montréal, afin d'assurer le transport de gaz
acheté en Alberta par la Greater Winnipeg Gas
Company et la Gaz Métropolitain, Inc., et des-
tiné à être livré sur leurs territoires de vente
respectifs, savoir Winnipeg, Montréal et leurs
environs. La demande comprenait également
une ligne d'évitement additionnelle de 7.8 milles
en Ontario, n'ayant, semble-t-il, aucun rapport
avec les exigences de la Gaz Métropolitain; elle
visait essentiellement à fournir des installations
subsidiaires au cas d'interruption de la ligne
principale. Il s'agissait, quant à la TCPL, d'une
demande sans précédent dans la mesure où
c'était la première fois qu'elle projetait de cons-
truire des installations dans le but de satisfaire
aux exigences de transport d'autres compagnies.
Jusqu'à maintenant, la TCPL achetait du gaz en
Alberta, en prenait livraison aux frontières de
l'Alberta, le transportait sur les territoires de
vente de ses différents clients et là, le leur
vendait. Pour la première fois, elle projetait
d'agir uniquement à titre de transporteur. Cette
demande déposée devant l'Office a eu pour
conséquence que la TCPL n'a pas évoqué elle-
même la commodité et la nécessité publiques
présentes et futures mais a déclaré:
[TRADUCTION] 13. La Gaz Métropolitain Inc. et la Greater
Winnipeg Gas Company, respectivement, prouveront que la
commodité et la nécessité publiques requièrent présente-
ment et requerront à l'avenir des installations supplémentai-
res de pipe-lines.
La preuve quant à l'approvisionnement en gaz
pour l'avenir que comportait la demande de la
TCPL n'appuierait que très peu, semble-t-il, la
proposition selon laquelle les nouvelles installa
tions rencontreraient le critère de la nécessité
publique pour l'avenir, si «l'avenir» commençait
dans plus d'une année ou deux. La personne
citée par la TCPL pour témoigner sur cet aspect
de leur preuve fit l'objet d'un contre-interroga-
toire vigoureux de la part des avocats de la
Pan-Alberta Gas, de la Consumers' Gas, de
l'Union Gas, du ministre de l'Énergie de l'Onta-
rio, de la Gaz Métropolitain et, enfin, de l'Of-
fice. La Pan-Alberta vend à la Gaz Métropoli-
tain le gaz dont on projette le transport et je
pense qu'il est juste d'affirmer que leur contre-
interrogatoire avait pour but d'attaquer la vali-
dité du projet d'approvisionnement de la TCPL,
en ce sens qu'ils prétendent qu'il ne correspond
pas à la réalité. A titre de clientes de la TCPL,
sans autres fournisseurs, l'Union et la Consu
mers', deux distributrices ontariennes, bénéfi-
ciant de l'appui du Ministre ontarien, ont mené
le contre-interrogatoire d'un point de vue diffé-
rent. L'interrogatoire et la déposition principale
concernaient non seulement l'approvisionne-
ment garanti et possible provenant de la TCPL,
mais aussi l'ensemble de l'approvisionnement
disponible en Alberta à l'intention de la Colom-
bie-Britannique et des autres territoires situés à
l'est.
Le 9 août, la Gaz Métropolitain a cité un
groupe de témoins. Faisait partie du groupe, le
directeur du service d'approvisionnement en gaz
de la Pan-Alberta Gas qui, par coïncidence,
avait antérieurement occupé un poste de cadre à
la Westcoast Transmission Company Limited,
contrepartie de la TCPL dans le transport du
gaz effectué à l'ouest de l'Alberta. Sa déposition
principale s'est limitée aux réserves de gaz pro
mises à la Gaz Métropolitain en vertu du con-
trat intervenu entre les deux compagnies. En
contre-interrogatoire, l'avocat de l'Union Gas a
commencé à poser des questions portant sur les
nouvelles installations en Alberta qui étaient
nécessaires à l'exécution du contrat et, après
objection, l'Office a décidé:
[TRADUCTION] LE PRÉSIDENT: M ° McOuat, l'Office est d'avis
qu'il a pour mandat en l'espèce de trouver quels sont l'inté-
rêt public et la commodité des installations demandées que
la TransCanada PipeLines doit construire; nous concluons
que l'interrogatoire dans lequel vous vous engagez n'est pas
suffisamment pertinent pour nous autoriser à le poursuivre
et n'apporte rien à la décision que l'Office doit rendre à
l'égard de la commodité publique résultant des installations
de la TransCanada.
M` MCOUAT: Merci . 4
Le contre-interrogatoire s'est poursuivi et, à
la page 407 de la transcription, se référant à une
question soulevée par l'avocat de la Pan-Alberta
au cours du débat sur une requête d'ajourne-
ment de la procédure présentée le 7 août au
nom du ministre ontarien de l'Énergie, il
demanda si le témoin était au courant «d'une
insuffisance particulière des réserves de la
Colombie-Britannique destinées à satisfaire la
demande dans cette province». L'avocat de la
Pan-Alberta s'objecta immédiatement. On a
4 Transcription, page 402.
entendu l'argumentation et il devint alors mani-
feste que ceux qui y prenaient part s'intéres-
saient principalement à la portée de l'audience
et non seulement à la pertinence ou à l'impor-
tance de ladite question. Au nom des auteurs de
la demande, l'avocat de la Gaz Métropolitain dit
notamment:
[TRADUCTION] ... cette demande vise certains moyens très
limités de transport d'une quantité de gaz ... qui est bien
minime par rapport à l'ensemble des approvisionnements; la
seule véritable question soumise à cet Office consiste à
déterminer si le transport à Montréal de cet approvisionne-
ment disponible faisant l'objet d'un engagement répond pré-
sentement à un intérêt public et à une nécessité. Voilà la
question. Transformer cette audience de façon à la faire
porter sur l'ensemble des approvisionnements et des besoins
canadiens ou sur l'ensemble des besoins d'installations de
transmission au Canada est, je pense, tenter de lui attribuer
une importance qu'elle n'a tout simplement pas . . . . S
Au nom des opposants, l'avocat de l'Union Gas
répondit notamment:
[TRADUCTION] ... ce que réclame la Gaz Métropolitain en
l'espèce, ... est l'approbation de plans d'expansion qui lui
permette d'acheter un approvisionnement en gaz pouvant
fort bien s'avérer nécessaire au maintien de leurs possibilités
de livraison aux termes de leurs contrats actuels de même
que des contrats actuels appartenant à d'autres .... Cette
question porte alors sur la capacité des approvisionnements
albertains de satisfaire tous les marchés canadiens, y com-
pris les contrats actuels de la TransCanada et y compris tout
projet d'extension ou d'expansion .... Si vous devez envi-
sager la capacité de cet approvisionnement albertain, le
problème des demandes canadiennes supplémentaires que
subit maintenant cet approvisionnement est tout à fait
pertinent. 6
Après avoir cité certains articles de la Loi,
l'avocat de l'Office a déclaré:
[TRADUCTION] ... le pipe-line dont nous parlons est précisé-
ment l'installation faisant l'objet de la demande de la Trans-
Canada et la seule préoccupation de cet office porte sur
l'approvisionnement disponible pour ce pipe-line, les mar-
chés qu'il doit approvisionner et sa justification économi-
que. Je soumets donc qu'il n'est pas pertinent de discuter
cette question d'approvisionnement en gaz.
M. EDGE: A titre de précision, M° Blue, sur quoi votre
déclaration porte-t-elle ou quel rapport a-t-elle avec le
témoignage de M. Larson?
M. BLUE: On ne m'a pas demandé mon opinion sur le
témoignage de M. Larson, M. le Président.
M° GIBBS: Je pense également, M. le Président, que M.
Larson a témoigné parce que personne ne s'est objecté.
Lorsqu'on a posé ces questions, nous sommes demeurés
s Transcription, page 409.
6 Transcription, p. 410.
silencieux parce que son témoignage ne semblait pas perti
nent ....
7
LE PRÉSIDENT: ... nous entendrons toutes remarques
que d'autres désirent faire sur ce point, puisque nous
sommes engagés dans une discussion sur la portée de
l'audience, 8
Après discussion sur ce sujet, on a ajourné
l'audience à midi et, à la reprise, le Président a
lu la déclaration suivante:
[TRADUCTION] Messieurs, l'Office est disposé à se pronon-
cer sur l'objection de M° Gibbs portant sur la pertinence de
la question posée par M° McOuat au témoin au sujet de la
connaissance de ce dernier de l'approvisionnement en gaz
de la Westcoast Transmission.
Ce faisant, l'Office désire également examiner les argu
ments portant sur la pertinence des conséquences des instal
lations demandées sur la disponibilité du gaz naturel alber-
tain pour la TransCanada et ses clients présents et futurs.
Avant de pouvoir délivrer un certificat, l'Office doit arri-
ver à la conclusion que la commodité et la nécessité publi-
ques requièrent présentement et requerront à l'avenir les
installations dont on fait la demande. Ce faisant, l'Office est
expressément tenu de prendre en considération toutes les
questions qui lui semblent pertinentes et il peut en outre
tenir compte des questions énumérées aux alinéas a) à d) de
l'article 44 de la Loi.
La question de l'insuffisance de l'approvisionnement de la
Westcoast Transmission et ses implications sur la disponibi-
lité du gaz albertain pour les clients de la TransCanada ne
sont pas des questions que l'Office juge pertinentes en
l'espèce.
En outre, compte tenu des circonstances de cette
demande et des quantités de gaz impliquées, l'Office n'atta-
che pas une grande importance à l'affirmation selon laquelle
l'approvisionnement de la TransCanada peut ou non suffir à
approvisionner les clients à qui elle vend du gaz.
Il en est ainsi parce que considérant le problème de la
possibilité de livraison de la TransCanada, l'ensemble du gaz
destiné à être vendu à la Gaz Métro et à la Greater Winnipeg
est minime et, par conséquent, la commodité et la nécessité
publiques ne justifient pas l'examen de ces questions en
l'espèce. L'Office estime que le temps requis pour fouiller
ces questions dans toutes leurs ramifications et les inconvé-
nients que cela impliquerait dépassent la valeur probante
que ce témoignage aurait sur la décision qu'il doit rendre
dans cette demande, et l'objection à la question de M°
McOuat est donc maintenue.
Transcription, pp. 411 et 412. M' Edge est un membre
de l'Office, M° Blue représente ce dernier et M° Gibbs
représente la Pan-Alberta Gas. M. Larson était le témoin de
la TCPL susmentionné.
8 Transcription, p. 414.
De toute évidence, ces témoins peuvent être interrogés
sur tous les aspects afférents à la possibilité qu'a la Pan
Alberta de respecter ses engagements contractuels envers la
Gaz Métro. Merci. 9
En plus de déclarer irrecevable la question
particulière relative à la Westcoast Transmis
sion, l'Office a, à ce stade, restreint la portée de
son enquête en vertu de l'article 44 de la Loi
portant sur la demande dont elle était saisie, aux
installations dont on projetait la construction, à
la disponibilité du gaz pour ces installations, à
l'existence de marchés pour ce gaz et à la viabi-
lité économique de ces installations. Il a refusé
d'entendre d'autres témoignages ou d'autoriser
le contre-interrogatoire de témoins sur les ques
tions plus vastes de l'approvisionnement en gaz
à l'échelle nationale ou l'approvisionnement de
la TCPL pour ses clients actuels. C'est la portée
que les parties ont attribuée à cette décision et
je suis convaincu que c'est ce qu'elles avaient à
l'esprit malgré les protestations subséquentes au
contraire.
Quant à la décision du 9 août, les requérants
en l'espèce demandent une ordonnance par voie
de certiorari annulant les procédures intentées à
date ou, subsidiairement, annulant la décision et
enjoignant l'Office d'entendre les témoignages
portant sur les conséquences du projet sur l'ap-
provisionnement futur en gaz de ses clients
actuels.
Sauf pour certaines parties, le problème en
l'espèce ne ressemble aucunement à celui que
mon collègue le juge Cattanach a étudié dans
l'arrêt: Le procureur général du Manitoba c.
L'Office national de l'énergie. '° Dans cette
affaire, le point litigieux sur lequel les requé-
rants ont eu gain de cause, consistait à détermi-
ner si l'Office, en dirigeant l'audience comme il
l'a fait, s'est conformé à l'article 20 de la Loi.
Cela n'est pas allégué en l'espèce.
Il convient de reprendre ici les parties essen-
tielles de l'article 44 de la Loi:
44.... l'Office peut délivrer un certificat à l'égard d'un
pipe-line ... si l'Office est convaincu que la commodité et
la nécessité publiques requièrent présentement et requerront
à l'avenir la canalisation ou la ligne internationale de trans -
9 Transcription, pp. 423 et 424.
10 Décision non encore publiée, rendue le 9 août 1974. No
du greffe: T-2669-74.
mission et, en étudiant une demande de certificat, celui-ci
doit tenir compte de toutes les données qui lui semblent
pertinentes, et, sans limiter la généralité de ce qui précède,
peut considérer ... .
Y font suite les alinéas a) à e) qui sont cités au
renvoi des présents motifs. C'est moi qui ai
souligné.
Dans l'arrêt La Compagnie des chemins de fer
nationaux du Canada c. Canada Steamship
Lines, Limited", le Conseil Privé a examiné une
disposition de la Loi sur les transports de
1938 12 qui autorisait la Commission des trans
ports du Canada à entendre des demandes
visant à faire approuver, à proroger ou retirer
son approbation de taxes convenues et de fixer
des taxes dans certains cas.
35. (13) Lorsqu'une demande est formulée sous le régime
du présent article, la Commission doit tenir compte de
toutes les considérations qui lui paraissent pertinentes et, en
particulier, de l'effet que l'établissement de la taxe convenue
ou la fixation d'une taxe peut vraisemblablement avoir ou a
eu sur
a) Le revenu net du voiturier, et
b) Les affaires d'un expéditeur ... .
C'est moi, à nouveau, qui ai souligné. En exami-
nant l'article, leurs Seigneuries ont déclaré à la
page 211:
[TRADUCTION] Il serait difficile de concevoir une plus
grande discrétion que celle qui est conférée à la Commission
sur les considérations dont elle doit tenir compte ... Non
seulement n'est-elle pas empêchée, du point de vue négatif,
de tenir compte de toutes considérations, mais on l'enjoint,
du point de vue positif, de tenir compte de chacune des
considérations qu'elle juge pertinente. Pour autant que cette
discrétion est exercée de bonne foi, la décision de la Com
mission sur la pertinence des considérations semblerait être
inattaquable.
Je ne peux pas dire, d'après la preuve qui
m'est soumise, que l'Office était de mauvaise
foi en décidant, en cours d'audience, de res-
treindre la portée de son enquête. Il est officiel
qu'à partir du 3 septembre, l'Office tiendra des
audiences portant sur l'ensemble des approvi-
sionnements en gaz au Canada. Il appert égale-
ment que le gaz et les installations qui font
l'objet de la présente demande affectent un pour
cent du volume de la TCPL et de la valeur de
son réseau. Cela ne signifie pas qu'en modifiant
la portée de cette audience durant son cours,
11 [1945] A.C. 204.
12 2 George VI, c. 53.
l'Office ne s'expose pas, du point de vue prati-
que, à une révision au moyen de procédures
appropriées engagées devant une cour
supérieure.
La décision que l'on veut faire annuler n'est
pas le jugement que l'Office est autorisé à
rendre en vertu de l'article 44; elle porte plutôt,
et cela constitue un fait déterminant, sur les
considérations dont il doit tenir compte pour
parvenir à sa décision finale en vertu de
l'article 44. On ne m'a cité aucune jurisprudence
établissant l'octroi d'une ordonnance de la
nature d'un bref de certiorari relativement à une
telle décision. Il existe, évidemment, plusieurs
exemples, comme l'affaire Globe Printing 13 , où
une décision rendue au cours d'une audience a
constitué le fondement de l'annulation de la
décision finale au moyen d'un bref de certiorari.
A cause du facteur temps dont toutes les
parties sont conscientes, je n'ai pas l'intention
de m'étendre sur ce sujet maintenant; cepen-
dant, je suis d'avis que l'opinion exprimée par le
juge en chef aux deux avant-derniers paragra-
phes de la décision récente de la Cour d'appel
fédérale dans l'affaire Danmor Shoe 14 s'appli-
que mutatis mutandis, autant à une demande
visant l'obtention d'un bref de certiorari en
vertu de l'article 18 de la Loi sur la Cour
fédérale 15 qu'à une demande faite en vertu de
l'article 28. Le bref de certiorari n'est pas le
recours approprié pour disposer d'une décision
provisoire comme celle en l'espèce, si applicable
soit-il à la décision finale que l'Office doit
rendre en vertu de l'article 44.
Ayant conclu que l'Office avait le pouvoir, en
vertu de l'article 44, de décider de bonne foi, au
cours de l'audience, de restreindre la portée de
son enquête, qu'il a agi de bonne foi en rendant
cette décision et qu'une demande visant l'obten-
tion d'un bref de certiorari n'est pas un recours
approprié contre une telle décision, la demande
est rejetée. Il n'y aura pas adjudication de
dépens.
13 Toronto Newspaper Guild c. Globe Printing Company
[1953] 2 R.C.S. 18.
14 In re la Loi antidumping, etc. [1974] 1 C.F. 22 aux pp.
30 et 31.
15 S.R.C. 1970 (2* Supp.), c. 10.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.