T-646-74; T-4747-73
Sunshine Mining Company (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Heald—
Vancouver, le 21 mars; Ottawa, le 10 avril 1975.
Impôt sur le revenu—Déductions—La demanderesse a payé
des dommages-intérêts à la suite d'une action à la Cour
suprême—La déduction des dépenses afférentes à l'action est-
elle permise?—S'agissait-il de dépenses faites en vue de
gagner ou produire un revenu?—S'agissait-il de paiements à
compte de capital?—S'agissait-il de dépenses faites dans la
recherche de minéraux au Canada?—Loi de l'impôt sur le
revenu, S.R.C. 1952, c. 148, art. 12(1)a) et b), 83A(3b)b), f)(ii).
Un arrêt de la Cour suprême du Canada avait ordonné à la
demanderesse et à sa filiale canadienne de payer des domma-
ges-intérêts à la Dolly Varden Mines Ltd. pour rupture de
contrat. Le procès a coûté $537,837.67 à la demanderesse; de
cette somme, le Ministre aurait autorisé la déduction de $393,-
582.42, montant des dommages-intérêts alloués par l'arrêt, à
titre de dépenses d'exploration et de mise en valeur, si la
demanderesse avait exécuté les travaux prévus au contrat. La
demanderesse réclama des déductions pour le montant total et,
en conséquence, déclara une perte d'exploitation de $127,-
495.82 pour l'année 1969 et déduisit ce montant de son revenu
pour 1970. Le ministre a rejeté la déduction des montants
réclamés pour les années d'imposition 1968, 1969 et 1970.
Arrêt: l'appel est rejeté; les montants ne sont pas déductibles.
En ce qui concerne l'argument de la défenderesse, selon lequel
ces sommes ne représentaient pas des dépenses effectuées en
vue de gagner ou de produire un revenu tiré d'une entreprise et
n'étaient pas déductibles en vertu de l'article 12(1)a), parce que
ce paiement avait été effectué sur l'ordre de la Cour suprême, il
faut aller au delà du paiement lui-même et examiner si l'obliga-
tion, dont il découle, est liée à une opération faite en vue de
gagner un revenu. En ce qui concerne le second argument de la
défenderesse, ces sommes représentaient une dépense à compte
de capital et n'étaient pas déductibles en vertu de l'article
12(1)b). Si la demanderesse avait réalisé les travaux prévus aux
contrats, elle aurait eu droit à la moitié des concessions miniè-
res de la Dolly Varden. Les sommes payées conformément à
l'arrêt représentaient le montant nécessaire à la réalisation des
travaux prévus; les sommes payées, de par leur vraie nature,
représentaient en fait le prix d'achat de la moitié des conces
sions minières, l'acquisition d'un bien en vue du développement
de l'organisation commerciale de la demanderesse et consti-
tuaient pour cela une dépense à compte de capital. Les circon-
stances de l'espèce sont-elles de nature à conférer à la deman-
deresse le bénéfice des exemptions prévues à l'article 83A(3b),
J)(ii)? Il ne s'agissait pas de dépenses faites «dans la recherche
de minéraux au Canada».
Arrêt suivi: Imperial Oil Limited c. M.R.N. [1947] R.C.É.
527; arrêts appliqués: Associated Investors of Canada Ltd.
c. M.R.N. [1967] 2 R.C.E. 96 et Canada Starch Co. Ltd.
c. M.R.N. [1969] 1 R.C.E. 96. Distinction faite avec
l'arrêt: Asamera Oil (Indonesia) Ltd. c. La Reine [1973] 1
C.F. 534.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
P. Thorsteinsson et I. Pitfield, pour la
demanderesse.
M. Storrow et T.W. Ocrane, pour la
défenderesse.
PROCUREURS:
Thorsteinsson, Mitchell, Little, O'Keefe et
Davidson, Vancouver, pour la demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada, pour
la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Ces deux affaires ont été
entendues ensemble sur preuves communes, con-
formément à une ordonnance du juge Cattanach,
et sont des appels de cotisations d'impôt sur le
revenu, afférentes aux années d'imposition 1968,
1969 et 1970 de la demanderesse.
Au début de l'audience, les parties ont déposé un
exposé conjoint des faits ainsi libellé:
[TRADUCTION] 1. La demanderesse, Sunshine Mining Com
pany (ci-après appelée la «Sunshine») a été constituée en com-
pagnie en vertu des lois de l'état de l'Idaho, États-Unis d'Amé-
rique, et au cours des années d'imposition 1968, 1969 et 1970 et
antérieurement, elle exploitait au Canada et ailleurs une entre-
prise d'exploration minière, d'exploration et de production de
pétrole et de gaz.
2. La Sunshine Exploration Limited (ci-après appelée parfois
la «Sunshine Exploration») a été constituée en compagnie en
vertu des lois de la province de l'Alberta et est une filiale à cent
pour cent de la Sunshine.
3. La Sunshine possède et exploite une mine d'argent située
dans l'état d'Idaho, aux États-Unis d'Amérique, et elle a de
temps à autre, avant et après les événements en question, passé
des contrats pour la mise en valeur et l'exploitation de conces
sions minières.
4. Par acte en date du 5 mars 1964 et portant, pour référence,
la date du 1" février 1964, la Sunshine Exploration a conclu un
contrat avec la Dolly Varden Mines Ltd. (N.P.L.), une compa-
gnie constituée en vertu des lois de la province de la Colombie-
Britannique (ci-après appelée la «Dolly Varden»), ce contrat
étant désigné comme «le contrat principal». Le contrat principal
est joint aux présentes comme pièce 1.
5. Par contrat en date du 5 mars 1964, la Dolly Varden, la
Sunshine Exploration et la Sunshine reconnaissaient qu'en
signant le contrat principal la Sunshine Exploration agissait en
qualité de mandataire et pour le compte de la Sunshine. Le
contrat de mandat est joint aux présentes comme pièce 2.
6. Entre mars et octobre 1964, la Sunshine exécuta des travaux
à la mine et y a dépensé environ $348,000. Le 30 novembre
1964 ou vers cette date, la Sunshine avisa la Dolly Varden
qu'elle se proposait de commencer la deuxième phase d'aména-
gement. L'avis est joint aux présentes comme pièce 3. Le 14
janvier 1965 ou vers cette date, la Dolly avisa la Sunshine
qu'elle avait manqué à ses engagements et ledit avis précisait
les points sur lesquels la Dolly Varden prétendait que le contrat
a été violé. L'avis est joint aux présentes comme pièce 4.
7. Le 22 janvier 1965 ou vers cette date, la Dolly Varden et la
Sunshine ont conclu un avenant (ci-après appelé «le second
avenant»), dont une copie est jointe aux présentes comme
pièce 5.
8. La Sunshine n'a pas exécuté tous les travaux prévus à
l'annexe «A» du second avenant et le 31 août 1965 ou vers cette
date, le contrat a été résilié à compter du 30 septembre 1965.
Le 1»' octobre 1965 la Dolly Varden introduisit contre la
Sunshine et la Sunshine Exploration une action en dommages-
intérêts pour rupture de contrat.
9. Par jugement rendu le 7 octobre 1969, la Cour suprême du
Canada accorda à la Dolly Varden des dommages-intérêts pour
rupture de contrat. Les motifs du jugement sont joints aux
présentes comme pièce 6.
10. La Sunshine retint les services de Bull, Housser & Tupper,
avocats à Vancouver dans la province de la Colombie-Britanni-
que, pour assurer sa défense dans le procès intenté par la Dolly
Varden.
11. La Sunshine a dépensé un montant total d'environ $537,-
837.67 pour le procès intenté par la Dolly Varden; de ce
montant, le ministre du Revenu national aurait autorisé une
déduction de $393,582.42 à titre de dépenses d'exploration et
de mise en valeur effectuées dans la prospection minière au
Canada, si la Sunshine avait exécuté les travaux prévus à
l'annexe «A» du second avenant. La Sunshine réclama des
déductions pour le montant total au motif que ces sommes
représentaient des dépenses d'exploration et de mise en valeur
effectuées dans la prospection minière ou étaient autrement
déductibles de la manière suivante:
a) Dépenses faites au cours des années anté-
rieures et réclamées en 1968:
Services professionnels réglés à Bull, Hous-
ser & Tupper $ 22,733.32
Dépôt à la Cour en règlement des causes du
jugement et des intérêts dans l'affaire
Dolly Varden 34,202.11
Montant payé à Leslie Wright & Rolfe
Ltd. pour caution judiciaire dans l'af-
faire Dolly Varden 3,260.00
Services professionnels réglés en 1966 à
Bull, Housser & Tupper .... 14,938.02
Total $ 75,133.45
b) Dépenses effectuées et réclamées pour
l'année d'imposition 1968:
Services professionnels réglés à Bull, Hous-
ser & Tupper $ 3,436.00
Montant payé à Leslie Wright & Rolfe
Ltd. pour caution judiciaire dans l'af-
faire Dolly Varden 6,075.00
Total $ 9,511.00
c) Dépenses effectuées et réclamées pour
l'année 1969:
Montant du jugement définitif payé à
Dolly Varden $393,582.42
Intérêts sur jugement 41,978.60
Dépenses diverses relatives à l'affaire Dolly
Varden 17,632.20
Total $453,193.22
12. Par suite de la déduction du montant désigné au paragra-
phe 11, la Sunshine a déclaré une perte d'exploitation de
$127,495.82 pour son année d'imposition 1969 et, dans le calcul
de son revenu imposable pour l'année 1970, elle a déduit le
même montant, soit $127,495.82.
13. Dans les cotisations en date du 29 décembre 1971, le
ministre du Revenu national a rejeté la déduction des montants
réclamés par la Sunshine pour ses années d'imposition 1968,
1969 et 1970 indiqués aux paragraphes 11 et 12 de la présente.
Le «contrat principal» dont il est question au
paragraphe 4 de l'exposé conjoint des faits est un
document prolixe et détaillé; mais il avait pour but
de mettre à la charge de la demanderesse l'obliga-
tion, à titre d'exploitant, d'effectuer par étapes des
travaux dans les concessions minières de la Dolly
Varden à Kitsault Valley en Colombie-Britanni-
que, pour assurer la mise en valeur desdites con
cessions minières et de les amener au stade de
production. La mise en valeur devait se faire en
quatre étapes. La première étape devait s'étendre
de la signature du contrat au 31 décembre 1964 et
constituait la phase d'exploration. La deuxième
étape devait commencer à la fin de la première
étape et se poursuivre jusqu'à ce que la mine
atteigne une production commerciale raisonnable.
La troisième étape était la période au cours de
laquelle chacune des parties devait récupérer ses
frais de mise en valeur. La quatrième étape au
cours de laquelle les parties devaient se partager
également les bénéfices provenant de la produc
tion, devait s'étendre jusqu'à l'expiration du con-
trat (un maximum de 50 ans). La Dolly Varden a
consenti, à la signature du contrat, à céder et à
transférer à la demanderesse la moitié des conces-
sions minières décrites au contrat. La demande-
resse consentit à remettre en dépôt à un fidéicom-
mis des documents constatant la rétrocession
intégrale de la moitié des concessions à la Dolly
Varden, ils devaient être remis à la compagnie si la
demanderesse résiliait le contrat ou négligeait de
notifier son intention de passer à la seconde étape
d'aménagement. La demanderesse ayant négligé
de ce faire les actes de rétrocession furent donc
remis à la Dolly Varden.
Le «second avenant» dont il est question au
paragraphe, 7 de l'exposé conjoint des faits pré-
voyait que:
a) La demanderesse retirait et annulait son avis
d'intention de passer à la seconde phase de mise
en valeur.
b) la Dolly Varden retirait son avis dénonçant
l'inexécution et relevait la demanderesse de
l'obligation d'exécuter les autres travaux du
projet, décrits à l'annexe «F» du contrat
principal.
c) La première étape de mise en valeur était
prorogée au 30 septembre 1965., la demande-
resse ayant le droit de l'étendre au 31 décembre
1966, en donnant avis avant le 31 août 1965.
d) La demanderesse s'engageait à réaliser avant
le l ei octobre 1965 les travaux supplémentaires
décrits à l'annexe «A» du second avenant. Au cas
où les travaux prévus à ladite annexe «A» ne
seraient pas achevés avant le l ei octobre 1965, la
Dolly Varden avait le droit de résilier le contrat
principal. La demanderesse ne réalisa pas lesdits
travaux et la Dolly Varden résilia le contrat
comme indiqué au paragraphe 8 de l'exposé
conjoint. Les travaux prévus à l'annexe «A»
comprenaient la réalisation d'un programme de
forage à perforatrice diamantée et de dénoyage,
le sondage de la profondeur de l'un des filons, le
mesurage à l'aide de perforatrice diamantée de
l'étendue de la minéralisation dans certaines
parties du filon et la réalisation du nombre
prévu de forages à perforatrice diamantée dans
d'autres parties de la concession visées dans le
contrat principal.
Comme indiqué au paragraphe 11 de l'exposé
conjoint, la demanderesse a dépensé une somme
totale de $537,837.67 pour les procédures judiciai-
res visées aux paragraphes 8, 9 et 10 de l'exposé.
Cette somme se décompose comme suit:
a) Montants de l'indemnité accordée à la
Dolly Varden par la décision finale de la Cour
suprême du Canada $393,582.42
b) Intérêt sur ce montant 76,180.71
c) Honoraires d'avocats et caution judiciaire
dans l'affaire Dolly Varden 68,074.54
Total $537,837.67
A l'audience, les avocats de la défenderesse ont
reconnu que si l'indemnité d'un montant de $393,-
582.42 était déductible, les intérêts, les honoraires
d'avocats et les frais judiciaires visés aux alinéas b)
et c) ci-dessus le seraient également en raison du
caractère déductible de la matière pour laquelle ils
ont été payés. Ainsi le seul point à trancher en
l'espèce concerne le caractère déductible de l'in-
demnité accordé par la Cour suprême du Canada.
La défenderesse a exposé trois moyens à l'appui
de l'argument selon lequel ladite indemnité n'était
pas déductible. Dans son premier moyen, la défen-
deresse soutient que lesdites sommes ne représen-
taient pas des dépenses effectuées par la demande-
resse en vue de gagner ou de produire un revenu
tiré d'une entreprise (c'est moi qui souligne) et
n'étaient donc pas déductibles conformément à
l'article 12(1)a) de la Loi de l'impôt sur le reve-
nu '. La défenderesse soutient que la demanderesse
a fait les paiements en question à la Dolly Varden
pour la simple et bonne raison que la Cour
suprême du Canada lui en avait donné l'ordre. La
défenderesse soutient que la demanderesse a effec-
tué lesdits paiements pour se libérer des obliga
tions découlant des contrats conclus avec la Dolly
Varden et qu'elle n'a jamais eu l'intention de faire
S.R.C. 1952, c. 148.
12. (1) Dans le calcul du revenu, il n'est opéré aucune
déduction à l'égard
a) d'une somme déboursée ou dépensée, sauf dans la
mesure où elle l'a été par le contribuable en vue de gagner
ou de produire un revenu tiré de biens ou d'une entreprise
du contribuable,
ces débours en vue de gagner ou de produire un
revenu tiré de biens ou d'une entreprise et que, par
conséquent, les dispositions de l'article 12(1)a) ne
s'appliquent pas à la demanderesse.
Compte tenu de la décision du président Thor-
son dans l'arrêt Imperial Oil Limited c. M.R.N. 2 ,
je ne peux pas accepter le premier moyen de la
défenderesse. A la page 546 dudit arrêt, le savant
président déclarait:
[TRADUCTION] Ce n'est pas une réponse valable que de dire
qu'un poste de dépense n'est pas déductible au motif qu'elle
n'était pas effectuée principalement pour gagner un revenu
mais pour s'acquitter d'une obligation juridique. La Haute
Cour d'Australie dans l'arrêt Herald & Weekly Times, Ltd.
[(1932) 48 C.L.R. 113], a expressément rejeté ce genre d'argu-
ment et on doit aussi le rejeter en l'espèce. Dans un certain
sens, toutes les dépenses sont faites principalement pour s'ac-
quitter d'obligations juridiques. Le fait qu'on s'acquittait d'une
obligation juridique n'a, à mon avis, rien à voir avec la question.
Il faut aller au-delà du paiement et se demander si l'obligation
qui l'a rendu nécessaire—peu importe qu'elle fut de nature
contractuelle ou délictuelle—découle d'une opération dont le
contribuable tire son revenu. [C'est moi qui souligne.]
Dans son second moyen, la défenderesse soutient
que les montants controversés représentaient des
paiements à compte de capital et sont, de ce fait,
soumis aux dispositions de l'article 12(1)b) de la
Loi de l'impôt sur le revenu 3 .
Pour apprécier la validité de ce moyen, il faut
analyser la vraie nature des paiements en question,
à la lumière de la jurisprudence. Un examen du
contrat principal et des avenants qui s'y rapportent
révèle que la demanderesse devait exécuter les
travaux d'exploration prévus pour la première
étape de mise en valeur et en retour elle devait
recevoir la moitié des concessions minières de la
Dolly Varden.
Cependant elle n'a pas terminé ladite première
étape de mise en valeur à la satisfaction de la
2 [1947] R.C.É. 527.
3 12. (1) Dans le calcul du revenu, il n'est opéré aucune
déduction à l'égard
b) d'une somme déboursée, d'une perte ou d'un remplace-
ment de capital, d'un paiement à compte de capital ou d'une
allocation à l'égard de dépréciation, désuétude ou d'épuise-
ment, sauf ce qui est expressément permis par la présente
Partie,
Dolly Varden et un conflit s'éleva entre les parties
à la suite duquel elles adoptèrent un second ave-
nant, en vertu duquel la demanderesse devait exé-
cuter les travaux d'exploration décrits à l'annexe
«A» dudit avenant. La demanderesse n'ayant pas
réussi à terminer ces travaux, en fait la première
étape de mise en valeur n'avait jamais été termi-
née, ell n'a pas eu droit à la moitié des concessions
minières et, comme elle n'avait pas acquis ladite
moitié, les actes de cession de ladite moitié, qui
avait été déposés en fiducie, furent retournés à la
Dolly Varden.
Les sommes payées conformément à l'arrêt de la
Cour suprême représentaient le montant nécessaire
à la réalisation de travaux que la demanderesse
s'était engagée à faire en vertu de ladite annexe
«A». Si la demanderesse avait réalisé les travaux
décrits à l'annexe «A» dans les délais prévus au
contrat, elle aurait eu droit à la moitié des conces
sions minières de la Dolly Varden.
Le président Jackett (maintenant juge en chef)
déclarait dans l'arrêt Associated Investors of
Canada Ltd. c. M.R.N. 4 :
[TRADUCTION] Le principe général est qu'une transaction par
laquelle on acquiert un bien ou un avantage durable pour
l'entreprise est une opération en capital. (Voir British Insulated
& Helsby Cables Ltd. c. Atherton, [1926] A.C. 205).
Dans l'arrêt Canada Starch Co. Ltd. c.
M.R.N.S, le savant président a établi la distinction
entre dépense à compte de capital et dépense à
compte de revenu, de la manière suivante:
[TRADUCTION] Autrement dit, à mon avis, on peut dire qu'en
général,
a) d'une part, une dépense engagée en vue de l'acquisition ou
de la création d'une entité, structure ou organisation com-
merciale, dans le but de tirer un profit, ou en vue du
développement d'une telle entité, structure ou organisation,
constitue une dépense à compte de capital, et
b) d'autre part, une dépense consentie au cours de l'exploita-
tion d'une entité, structure ou organisation lucrative consti-
tue une dépense à compte de revenu.
En appliquant aux faits de l'espèce les principes
énoncés dans ces arrêts, je suis convaincu que les
sommes payées par la demanderesse à la Dolly
Varden représentaient, de par leur vraie nature, le
prix d'achat effectivement payé pour la moitié des
concessions minières de la Dolly Varden, c'est-A.-
4 [1967] 2 R.C.É. 96 à la page 103.
5 [1969] 1 R.C.É. 96 à la page 102.
dire une dépense manifestement faite pour «l'ac-
quisition d'un bien en vue du développement de
l'organisation commerciale de la demanderesse» et,
en tant que telles, représentaient, à mon avis, une
dépense à compte de capital.
Les avocats de la demanderesse ont cité ma
décision dans l'affaire Asamera Oil (Indonesia)
Ltd. c. La Reine' à l'appui de la thèse selon
laquelle les dépenses en question en l'espèce
étaient des dépenses à compte de revenu. Cepen-
dant à mon avis, il y a manifestement une distinc
tion à faire en raison des faits de l'affaire Asamera
(précitée). Dans cette affaire, je disais aux pages
542-3:
Il ne s'agit pas ici d'une compagnie de pétrole qui possède des
droits miniers ou des droits d'exploration qu'elle exploite et
utilise elle-même. La demanderesse ne possédait rien en Indo-
nésie; elle n'avait aucun droit sur les minéraux; elle ne possédait
ni les puits ni l'équipement; elle avait été engagée pour prêter
ses services et même le paiement de ces services dépendait de la
production pétrolière des terrains en question.
Les faits de l'espèce concernent la propriété de
droits et de permis miniers et de concessions miniè-
res; c'est là un exemple classique du genre de
situation envisagée dans la dernière citation et, à
mon avis, il s'agit d'un cas évident de véritables
biens de capital.
Ainsi j'ai conclu que les montants en question
représentaient des paiements à compte de capital
et n'étaient pas déductibles en vertu des disposi
tions de l'article 12(1)b) de la Loi.
La seule autre question à examiner est celle de
savoir si les faits et circonstances de l'espèce sont
de nature à conférer à la demanderesse le bénéfice
des exemptions prévues à l'article 83A(3b)b),/)(ii),
dont voici les dispositions pertinentes:
83A. (3b) Une corporation dont l'entreprise principale est
b) l'exploitation minière ou l'exploration pour la découverte
de minéraux,
peut déduire dans le calcul de son revenu, sous le régime de la
présente Partie pour une année d'imposition, le moindre des
deux montants suivants:
j) l'ensemble
(ii) des dépenses de prospection, d'exploration et de mise
en valeur, par elles faites, dans la recherche de minéraux
au Canada.....
c [1973] 1 F.C. 534.
Les faits de l'espèce indiquent clairement que les
sommes payées par la demanderesse à la Dolly
Varden ne constituaient «pas des dépenses faites
par celle-là dans la recherche de minéraux au
Canada» dans le sens où cette expression est
employée à l'article cité plus haut. Cela résulte de
la signification courante des termes utilisés dans la
Loi et se trouve confirmé par des décisions judi-
ciaires 7 . Si j'ai bien compris, les avocats de la
demanderesse reconnaissaient que l'article 83A ne
s'appliquait nullement aux faits de l'espèce.
Pour les motifs ci-dessus mentionnés, l'appel de
la demanderesse est rejeté avec dépens.
Voir par exemple: Johnson's Asbestos Corporation c.
M.R.N [1966] R.C.É. 212 et Farmers Mutual Petroleums Ltd.
c. M.R.N. [1968] R.C.S. 59.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.