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73-A-317
Ottawa Cablevision Limited, Terra Communica tions Limited, Cable TV Limited, Pineridge Cable TV Limited (anciennement la Oshawa Cable TV Ltd.), Grand River Cable TV Limited, Télé -Cable du Québec Inc., National Cablevision Limited, Transvision (Magog) Inc., Barrie Cable TV Lim ited, Association canadienne de Télévision par câble (Requérantes)
c.
Bell Canada (Intimée) ,
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, le juge Thurlow et le juge suppléant MacKay— Toronto, les 29 et 30 janvier 1974.
Pratique—Demande d'autorisation d'interjeter appel— Décision de la Commission canadienne des transports— Refus d'accorder aux requérantes un redressement à l'encon- tre de l'intimée, relativement d la transmission d'émissions télévisées—Autorisation d'interjeter appel refusée—L'article 5 de la Loi concernant la Compagnie de Téléphone Bell du Canada a été abrogé et remplacé par l'art. 6, c. 48, S.C. 1967-68, qui prévoit un droit d'appel en vertu de la Loi sur les chemins de fer—Art. 53(2) di la Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1952, c. 234, abrogé et remplacé par l'art. 64(2) de la Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c. N-17 tel que modifié par la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970, c. 10 (2e Supp.), Ann. II, item 32.
Les requérantes ont demandé à la Commission cana- dienne des transports un redressement à l'encontre de l'inti- mée en vertu de l'article 5 de la Loi concernant la Compa- gnie de Téléphone Bell du Canada, qui autorise l'intimée à transmettre des émissions télévisées provenant des requé- rantes. La Commission a rejeté la demande au motif qu'elle n'était pas compétente. Les requérantes demandent l'autori- sation d'interjeter appel.
Arrêt: (le juge Thurlow dissident) l'autorisation d'interje- ter appel doit être refusée.
Le juge en chef Jackett: il n'existe aucun fondement permettant de lire l'article 5 comme conférant à la Commis sion canadienne des transports la compétence pour obliger l'intimée à fournir des aménagements qu'elle refuse de four- nir ou pour remanier des contrats entre l'intimée et ses clients en vertu desquels l'intimée doit fournir des aménagements.
Le juge Thurlow (dissident): vu les points de droit soule- vés par la requête, il conviendrait d'accorder l'autorisation d'interjeter appel du refus de la Commission, en vertu de l'article 5(5) de la Loi concernant la Compagnie de Télé- phone Bell du Canada, de réviser les accords contractuels, appelés contrats de réseau partiel.
Le juge suppléant MacKay: l'article 5(4) et (5) limite la compétence de la Commission aux plaintes portant sur des restrictions imposées à l'égard du matériel qui n'est pas fourni par l'intimée, c'est-à-dire le matériel appartenant aux
requérantes. Étant donné que le redressement demandé ne porte que sur la propriété et l'utilisation du câble coaxial appartenant à l'intimée, la Commission n'a pas compétence.
DEMANDE d'autorisation d'interjeter appel. AVOCATS:
G. F. Henderson, c.r., et W. G. Robinson pour les requérantes.
E. E. Saunders, c.r., pour l'intimée.
W. G. St. John pour la Commission cana- dienne des transports.
PROCUREURS:
Gowling et Henderson, Ottawa, pour les requérantes.
O'Brien, Hall et Saunders, Montréal, pour l'intimée.
W. G. St. John, Ottawa, pour la Commis sion canadienne des transports.
LE JUGE EN CHEF JACKETT—Il s'agit d'une demande d'autorisation d'interjeter appel d'une décision de la Commission canadienne des transports sur une question de compétence; c'est de la signification d'une disposition ajoutée à la législation relative à l'intimée (ci-après appelée «Bell»), par le chapitre 48 des Statuts du Canada de 1967-68, que dépend la réponse. Voici le texte de cette disposition.
5. (1) 1l est par la présente loi déclaré que, sous réserve des dispositions de la Loi sur la radio et de la Loi sur la radiodiffusion, ainsi que de tous autres statuts du Canada concernant les télécommunications ou la radiodiffusion, et de leurs règlements, ordonnances ou décrets d'exécution, la Compagnie a le pouvoir de transmettre, d'émettre ou de recevoir des signes, signaux, écrits, images, sons ou rensei- gnements de toute nature par fil, radio, procédé visuel ou autres procédés électromagnétiques, ainsi que de fournir des services et des aménagements pour une telle transmission, émission ou réception et, en relation avec ce qui précède, de construire, établir, entretenir et exploiter, au Canada ou ailleurs, seule ou en association avec d'autres, soit de son propre chef, soit à titre de mandataire pour d'autres, tous les services et aménagements propres ou utiles à ces fins, en utilisant et adaptant toute amélioration ou invention ou tous autres moyens de communication.
(2) Nonobstant le paragraphe (1), la Compagnie et ses filiales n'ont cependant pas, directement, ni indirectement, ni par quelque autre moyen, le pouvoir de demander ou détenir une licence de radiodiffusion telle que définie dans la Loi sur la radiodiffusion, ni une licence pour exploiter un service commercial d'antenne de télévision communautaire.
(3) La Compagnie doit, dans l'exercice de ses pouvoirs en vertu du paragraphe (1), agir uniquement en qualité de transporteur public, et ne doit ni contr8ler la teneur du message émis, transmis ou reçu comme il est dit ci-dessus, ni influer sur le sens ou le but de ce message.
(4) Pour la protection des abonnés de la Compagnie et du public, tout matériel, appareil, ligne, circuit ou dispositif qui n'est pas fourni par la Compagnie ne doit être relié ou connecté aux aménagements de la Compagnie ni intercon necté ou utilisé en connexion avec eux que conformément aux exigences raisonnables que la Compagnie peut prescrire.
(5) La Commission canadienne des transports peut déter- miner, comme questions de fait, si certaines des exigences prescrites par la Compagnie en vertu du paragraphe (4) sont raisonnables ou non et elle peut rejeter toute exigence de ce genre qu'elle considère comme déraisonnable ou contraire à l'intérêt public et exiger que la Compagnie les remplace par des exigences satisfaisantes pour la Commission canadienne des transports ou elle peut prescrire d'autres exigences au lieu des exigences ainsi rejetées.
(6) Toute personne qui est affectée par certaines des exigences prescrites par la Compagnie en vertu du paragra- phe (4) du présent article peut demander à la Commission canadienne des transports de décider si une telle exigence est raisonnable, compte tenu de l'intérêt public et de l'effet qu'un tel branchement ou une telle connexion ou intercon- nexion sont susceptibles d'avoir sur le coût et la valeur du service pour les abonnés.
La décision de la Commission est susceptible de revision et d'appel en conformité de la Loi sur les chemins de fer.
Outre son entreprise téléphonique, qui est réglementée en vertu de la Loi sur les chemins de fer, Bell, conformément aux pouvoirs men- tionnés à l'article 5(1), a conclu avec chacune des compagnies requérantes des accords en vertu desquels on leur fournit des aménage- ments leur permettant d'acheminer les signaux nécessaires de leur antenne et appareil de trans formation aux «connexions» ou «branche- ments» par lesquels ces signaux sont acheminés chez les abonnés à leur service de télédistribution.
Lesdits accords ne satisfont pas les requéran- tes parce que
a) les contrats stipulent que les requérantes doivent utiliser le câble coaxial de Bell Canada alors qu'elles préféreraient un accord en vertu duquel leur propre câble coaxial serait raccordé aux aménagements de Bell;
b) elles s'opposent à une clause du contrat qui les astreint à n'acheminer des «messages» que dans une seule direction; et
c) elles estiment que les sommes qu'elles doi- vent verser à Bell aux termes des contrats sont excessives.
En vertu de la requête qui a donné lieu à la décision de la Commission qui fait l'objet de la présente demande d'autorisation d'interjeter appel, les requérantes ont en fait demandé à la Commission
a) d'ordonner à Bell de conclure avec chacune des compagnies requérantes un contrat en vertu duquel la compagnie signataire aurait le droit de raccorder son propre câble coaxial aux aménagements de Bell, et, à tout événement,
b) de revoir et réviser les modalités de l'ac- cord contractuel entre Bell et chacune des compagnies requérantes sur les questions
(i) de la limitation imposée pour les signaux acheminés par le câble coaxial, et
(ii) des sommes que les compagnies requé- rantes doivent verser à Bell en vertu de l'accord.
Les requérantes ont fondé cette requête à la Commission sur l'article 5 précité; la Commis sion l'a rejetée au motif qu'elle n'avait pas com- pétence en vertu de l'article 5 pour accorder le redressement demandé.
Devant cette cour, la demande d'autorisation était fondée sur l'argument qu'il existe au moins un argument soutenable à l'appui de la proposi tion selon laquelle la Commission a compétence en vertu de l'article 5 pour accorder le redresse- ment demandé.
Comme je ne suis pas d'accord avec le raison- nement qu'a suivi la Commission pour conclure que l'article 5 ne s'applique pas, mais que j'es- time, après le meilleur examen que je puis faire des allégations de l'avocat des requérantes, qu'il n'existe aucun argument soutenable permettant de conclure que l'article 5 confère à la Commis sion la compétence d'accorder une partie quel- conque du redressement demandé, je me sens tenu d'expliquer brièvement comment je con- çois la question.
Il est tout à fait notoire que Bell détient une charte prévue dans la loi lui permettant d'exploi-
ter un réseau téléphonique au Canada et que l'exploitation de ce réseau est régie par la Loi sur les chemins de fer en vertu de laquelle la Commission canadienne des transports est l'au- torité investie du pouvoir de réglementation.
L'article 5(1) précité est une disposition déclaratoire qui expose clairement que Bell a un pouvoir très étendu pour transmettre, émettre et recevoir des signes et renseignements de toutes sortes au moyen de procédés électromagnéti- ques ainsi que pour fournir des services et des aménagements pour ce genre d'activités exer- cées par d'autres. Considéré isolément, l'article 5(1) autoriserait Bell à fournir les aménage- ments y prévus aux compagnies requérantes, mais Bell ne serait aucunement tenue de fournir ces aménagements à qui que ce soit, si ce n'est suivant les modalités qu'elle pourrait considérer comme étant dans le meilleur intérêt de son entreprise. (Autrement dit, à l'égard de ces amé- nagements, Bell serait dans la même situation que toute autre personne qui exploite une entre- prise non réglementée.) Il faut donc se deman- der si les autres parties de l'article 5 modifient la situation ainsi que le soutiennent les requérantes.
Les autres parties de l'article 5 qu'il faut examiner sont les paragraphes (2), (3), (4) et (5). En premier lieu, les paragraphes (2) et (3) limi- tent la nature des activités que Bell peut entre- prendre en vertu du paragraphe (1), et, en second lieu, le paragraphe (4), lu en corrélation avec le paragraphe (5), impose une restriction sur la façon dont peuvent être utilisés les amé- nagements du réseau téléphonique de Bell (et éventuellement d'autres aménagements). C'est la nature de cette dernière restriction statutaire qu'on doit examiner parce que ce sont les para- graphes (4) et (5) (qui semblent, en tout cas superficiellement, imposer simplement une res triction à ce que Bell peut permettre aux autres de faire) que les requérantes invoquent comme donnant à la Commission
a) compétence pour obliger Bell à fournir les aménagements qu'elle refuse de fournir, et
b) compétence pour remanier un contrat par lequel un client et Bell avaient convenu que cette dernière fournirait des aménagements.
Voici comment je conçois le rôle du paragra- phe (4) dans le contexte de l'article 5: les trois premiers paragraphes confèrent à Bell le pou- voir d'exploiter une entreprise dans un certain domaine et le paragraphe (4) vient limiter ce qui peut être fait dans l'exploitation de cette entre- prise. Cette limitation porte qu'un certain genre de dispositifs «ne doit être relié aux aménage- ments»' de Bell ou utilisé «en connexion avec eux que conformément aux exigences raisonna- bles que ... (Bell) peut prescrire». Lorsqu'on lit le paragraphe (4) en corrélation avec le paragra- phe (5), la limitation imposée à ce que Bell peut faire dans l'exploitation d'une entreprise en vertu de l'article 5 devient une règle suivant laquelle un certain genre de dispositifs «ne doit être relié aux aménagements» de Bell «ou utilisé en connexion avec eux que conformément aux exigences raisonnables» que Bell peut prescrire sous réserve de révision par la Commission.
J'ai ainsi explicité l'économie de l'article 5, et plus particulièrement des paragraphes (4) et (5), non pour exprimer une conclusion définitive sur des caractéristiques pouvant être contestables, mais pour démontrer que, lorsqu'on le considère dans son ensemble, il n'existe aucun fondement permettant de lire l'article 5, ou quelque partie de cet article, comme conférant à la Commis sion la compétence pour obliger Bell à fournir des aménagements qu'elle refuse de fournir ou pour remanier des contrats entre Bell et ses clients en vertu desquels Bell doit fournir des aménagements.
Pour les motifs qu'a donnés le juge suppléant MacKay et pour les motifs qui précèdent, j'es- time que la demande d'autorisation doit être rejetée.
* * *
LE JUGE THURLOW (dissident)—Vu les points de droit que comporte la requête, j'accueillerais la demande d'autorisation d'interjeter appel du refus de la Commission canadienne des trans ports, en vertu de l'article 5(5) de la Loi concer- nant la Compagnie de Téléphone Bell du
' Le fait que cette limitation soit imposée au bénéfice des abonnés de Bell et du public démontre que la limitation s'applique principalement, sinon exclusivement, aux aména- gements du réseau téléphonique de Bell.
Canada, de réviser les clauses des présents accords contractuels, appelés contrats de réseau partiel, qui limitent la façon dont le matériel, les appareils, etc. non fournis par Bell, peuvent être utilisés en rapport avec les aménagements de cette dernière.
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LE JUGE SUPPLÉANT MACKAY—Je souscris à la conclusion de Monsieur le juge en chef que l'autorisation d'interjeter appel doit être refusée.
L'intimée, Bell Canada, s'est prévalue des pouvoirs que lui confère l'article 5(1) de trans- mettre des émissions télévisées provenant des compagnies requérantes. Ce paragraphe permet à Bell Canada d'effectuer la transmission en utilisant ses propres aménagements et son propre matériel ou en utilisant à la fois son matériel et celui des requérantes. Bell Canada a choisi d'utiliser son propre câble coaxial auquel sont fixés des survolteurs et des branchements (raccordements entre le câble et le poste de l'abonné) appartenant aux requérantes.
Une des conditions qu'a imposées Bell Canada était que les requérantes n'utiliseraient le câble que pour la transmission dans une seule direction.
Les requérantes soutiennent (1) qu'elles devraient avoir le droit de posséder leur propre câble coaxial et de le raccorder aux poteaux ou canalisations de Bell Téléphone et (2) qu'on devrait leur permettre la transmission dans les deux directions.
Les requérantes n'ont présenté aucune plainte à l'égard de leur propre matériel, c'est-à-dire les survolteurs et les branchements.
Les paragraphes (4) et (5) limitent la compé- tence de la Commission aux plaintes portant sur des restrictions imposées à l'égard du matériel qui n'est pas fourni par Bell Canada, c'est-à-dire le matériel appartenant aux compagnies requérantes.
Étant donné que le redressement demandé ne porte que sur la propriété et l'utilisation du câble coaxial appartenant à Bell Canada, j'es- time que la Commission n'a pas compétence.
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