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Le procureur général du Canada (Requérant)
c.
L'honorable William George Morrow (Intime')
Division de première instance, le juge Collier— Yellowknife, le 6 juillet 1973.
Prohibition—Juge de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest—Opposition au transfert, sauf sous réserve des droits des autochtones—Compétence assumée par le juge— Est-il une personne désignée—A-t-il excédé sa compétence— Loi sur les titres de biens-fonds, S.R.C. 1970, c. L-4, art. 154(1).
Le 2 avril 1973, un certain nombre de chefs indiens ont déposé une opposition auprès du registrateur des titres de biens-fonds des Territoires du Nord-Ouest pour faire inter- dire l'enregistrement d'une cession touchant certains biens- fonds dans les Territoires du Nord-Ouest, sauf sous réserve des droits des autochtones indiens. Conformément à l'article 154(1) de la Loi sur les titres de biens-fonds, S.R.C. 1970, c. L-4, le registrateur a déféré l'affaire à l'intimé qui était juge de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest. Le 3 avril, l'intimé a entendu la plaidoirie, notamment sur la question de compétence, et a différé son jugement. Le 7 juin, le procureur général du Canada a demandé la déli- vrance d'un bref de prohibition conformément à l'alinéa 18a) de la Loi sur la Cour fédérale. Le 14 juin, l'intimé a rendu jugement sur certaines questions de compétence.
Arrêt: il convient de refuser la délivrance d'un bref de prohibition. La Loi sur les titres de biens-fonds ne permet pas d'affirmer de façon incontestable que, lors d'une audience portant sur un renvoi en vertu de l'article 154 de ladite loi, l'intimé siégeait à titre de personne désignée plutôt qu'à titre de juge de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest; en conséquence, il n'y a pas lieu d'ordonner la délivrance d'un bref de prohibition. En outre, à supposer qu'il siégeait à titre de personne désignée, le renvoi soumis par le registrateur entre dans le cadre de l'article 154(1) de la Loi sur les titres de biens-fonds et l'intimé ne prétend pas excéder cette compétence puisque la question qu'on lui soumettait ne porte pas sur la validité de la réclamation vu les droits des autochtones, mais plutôt sur la validité de la demande de cession des terres et sur l'intérêt des personnes présentant la demande. A supposer même qu'on puisse mettre en doute l'existence de la compétence de l'intimé ou prétendre qu'il l'excède, la Cour est d'avis qu'elle doit utiliser son pouvoir discrétionnaire pour refuser la déli- vrance du bref de prohibition.
Arrêt suivi: Mayor of London c. Cox (1866-67) 2 L.R. (H.L.) 239.
DEMANDE de bref de prohibition. AVOCATS:
C. R. O. Munro, c.r., et I. G. Whitehall pour le requérant.
G. Sutton, G. Price et D. Sanderson pour l'intimé.
LE JUGE COLLIER (oralement)—Je m'excuse du retard, mais il me fallait un peu plus de temps. Je suis maintenant prêt à rendre la décision.
Les avocats des parties ont habilement pré- senté une argumentation fouillée et exhaustive; j'aurais donc préféré disposer de plus de temps pour pouvoir examiner de façon plus détaillée les arguments avancés. Les circonstances ne m'ont pas laissé ce loisir. Je ne veux cependant pas dire par que j'aie le moindre doute sur la conclusion à laquelle je suis arrivé.
Le procureur général du Canada demande la délivrance d'un bref de prohibition interdisant à l'intimé de continuer à entendre toute question relative à la validité d'une demande contenue dans une opposition en date du 24 mars 1973 déposée auprès du registrateur du Bureau des titres de biens-fonds, et relative à la nature de tout droit ou intérêt dans les terres décrites dans cette dernière. Le requérant s'appuie sur l'arti- cle 18a) de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970, c. 10 (2 e Supp.), pour demander à la présente Cour de délivrer le bref en question, faisant valoir que ledit article confère à la Cour compétence à cet effet. L'article 18a) confère à la Division de première instance de la présente Cour compétence pour délivrer un bref de pro hibition contre tout office, toute commission ou tout autre tribunal fédéral, au sens de l'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale.
Pour pouvoir évaluer les arguments présentés, il convient d'exposer les faits à l'origine du litige. L'opposition susdite a été produite auprès du registrateur des titres de biens-fonds des Territoires du Nord-Ouest le 2 avril 1973. Le chef François Paulette et un certain nombre d'autres chefs indiens y revendiquent pour leur propre compte et pour celui de tous les Indiens et de toutes les bandes d'Indiens des Territoires du Nord-Ouest, au titre des droits des autochto- nes, un intérêt dans des terres plus précisément décrites dans l'opposition.
L'opposition cherche à faire interdire l'enre- gistrement de tout transport touchant ces biens-
fonds ou la délivrance d'un certificat de titre à ces biens-fonds, sauf sous réserve de la pré- sente réclamation.
Le 3 avril 1973, le registrateur a soumis la question suivante au «juge»:
Les personnes qui ont présenté la demande visant à interdire l'enregistrement de tout acte de cession ont-elles le droit de le faire et ont-elles un intérêt suffisant? Enfin le registrateur est-il tenu, aux termes de la Loi sur les titres de biens-fonds, de procéder à l'enregistrement de ce document et à son inscription dans le journal?
Le renvoi est fait conformément à l'article 154(1) de la Loi sur les titres de biens-fonds, S.R.C. 1970, c. L-4. L'article en question porte que:
154. (1) Le registrateur peut soumettre les questions sui- vantes au juge, suivant la formule AA:
a) chaque fois qu'il s'élève une contestation touchant l'accomplissement de devoirs ou l'exercice de fonctions que la présente loi assigne ou impose au registrateur;,
b) chaque fois que, dans l'exercice de ces fonctions, il s'élève une contestation touchant la juste interprétation, la validité ou l'effet légal d'un instrument, ou visant les ayants droit, ou concernant l'étendue ou la nature des droits, intérêts, pouvoirs ou autorité d'une personne ou d'une classe de personnes;
c) chaque fois qu'il y a contestation sur la manière dont doivent se faire les inscriptions ou notes dans le journal, ou dans le registre, ou sur les certificats de titres ou leurs doubles; et
d) chaque fois qu'il y a contestation touchant un droit ou intérêt douteux ou incertain, qui a été exposé ou qu'on prétend relever de la compétence du registrateur.
Il me semble manifeste que le registrateur, en formulant la question qu'il a renvoyée, cherchait à se placer dans le champ d'application de l'arti- cle 154(1)b). Je vais commencer par indiquer les questions qui, selon moi, sont susceptibles de faire l'objet d'un renvoi par le registrateur en vertu dudit article. Ces questions sont les sui- vantes: (1) la juste interprétation d'un instru ment; (2) la validité d'un instrument; (3) l'effet légal d'un instrument; (4) une contestation visant les ayants droit (je ne suis pas sûr de comprendre le sens de cette expression, mais je ne crois pas qu'elle s'applique en l'espèce); (5) une contestation concernant l'étendue ou la nature des droits d'une personne ou d'une classe de personnes; (6) une contestation concernant les droits d'une personne ou d'une classe de personnes; (7) une contestation concernant les
pouvoirs ou l'autorité d'une personne ou d'une classe de personnes.
Je dois aussi préciser, même si cela n'est pas tout à fait nécessaire en l'espèce, qu'à mon avis, une opposition est un «instrument» au sens que l'article 2 de la Loi sur les titres de biens-fonds donne à ce terme.
J'en reviens maintenant aux faits à l'origine du litige. La question a fait l'objet d'un renvoi devant l'honorable juge Morrow (ci-après appelé le juge Morrow). Une audience a eu lieu le 3 avril de cette année. Après avoir entendu les plaidoiries, en particulier celles présentées pour le compte du procureur général du Canada et pour celui des auteurs de l'opposition, le juge Morrow a différé son jugement sur un certain nombre de questions, y compris celle de sa compétence pour trancher le renvoi du registra- teur. L'audience a été remise au 9 juillet. La transcription déposée n'indique pas clairement, me semble-t-il, la forme que prendra la procé- dure le 9 juillet, mais, aux fins de la présente requête, cela n'a pas d'importance. Le 7 juin, une requête visant la délivrance d'un bref de prohibition a été présentée, mais elle n'a pas été signifiée. Une requête révisée réclamant le même redressement a été déposée le 13 juin. Le 14 juin, le juge Morrow a rendu un jugement portant surtout sur certaines des questions de compétence soulevées le 3 avril.
En l'espèce, le requérant invoque les moyens suivants: (1) pour l'audition de la question sou- mise en vertu de l'article 154(1), le juge Morrow siégeait en qualité de personne désignée et non comme représentant de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest ou comme un juge de cette Cour; (2) déterminer si le juge Morrow siégeait à titre de représentant de la Cour ou en qualité de juge de celle-ci ou à titre de personne désignée, est une question de droit, et la forme sous laquelle ont été rendus jusqu'à maintenant tous jugements, décisions ou ordonnances en l'espèce n'a aucune importance. L'avocat des auteurs de l'opposition accepte cet argument; (3) en sa qualité de personne désignée en vertu de l'article 154, le juge Morrow est «un office, une commission ou un autre tribunal fédéral» à l'égard duquel la présente Cour peut ordonner la délivrance d'un bref de prohibition. L'avocat
des auteurs de l'opposition ne conteste pas le principe général selon lequel une cour supé- rieure peut ordonner la délivrance d'un bref de prohibition à l'égard d'une personne siégeant en qualité de personne désignée, même si cette personne peut à un autre titre être aussi juge d'une cour supérieure. Je cite à titre d'exemple l'arrêt Re Grys and Stratton [1972] 2 O.R. 227; (4) le juge Morrow, siégeant en qualité de per- sonne désignée, a entrepris d'entendre et de trancher, ou est sur le point de le faire, une question qui sort du champ de sa compétence, ce qui donne ouverture à la délivrance d'un bref de prohibition.
Examinons maintenant le premier moyen invoqué par le requérant, savoir, que le juge Morrow siège en l'espèce en qualité de personne désignée. C'est un problème difficile, une grande partie de la difficulté provenant de l'em- ploi des mots «au juge» (qui figurent dans les premiers mots de l'article 154) et du terme «juge», tel que défini à l'article 2 de la Loi sur les titres de biens-fonds:
«juge» signifie un fonctionnaire autorisé, dans les Territoi- res, à connaître des affaires civiles le titre à des biens-fonds est contesté.
Je cite en outre la définition du mot «cour» donnée par la loi:
«cour» signifie tout tribunal autorisé à adjuger en matières civiles, dans les Territoires, quand le titre des biens-fonds est contesté.
Je ne suis pas convaincu que le juge Morrow, en entendant ce renvoi présenté conformément à l'article 154, siège en qualité de personne désignée. A mon avis, il ne semble y avoir aucune jurisprudence portant précisément sur cette question. Les quelques décisions judiciai- res qui existent datent de bien des années, à une époque les conditions géographiques, politi- ques, économiques et autres dans les Territoires étaient bien différentes. Les articles de la Loi sur les titres de biens-fonds invoqués en l'espèce ont été promulgués il y a de cela bien des années, à une époque les conditions susdites étaient bien différentes des conditions actuelles. J'estime qu'une interprétation correcte du texte de l'article 154 consiste à donner à l'heure actuelle au mot «juge» le sens de juge de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest,
siégeant en qualité de juge de cette Cour, et non en qualité de «personne désignée». (Je signale au passage que je partage tout à fait l'opinion exprimée par le juge Middleton dans l'arrêt Hynes c. Swartz, [1938] 1 D.L.R. 29, à la p. 31, selon laquelle l'expression personne désignée est mal choisie.) Je vois mon opinion confirmée dans une certaine mesure par la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire North British Canadian Investment Company c. St. John School District No. 16 of the North West Territories (1904) 35 R.C.S. 461. Dans cette affaire, des terrains situés dans les Terri- toires du Nord-Ouest avaient été vendus pour couvrir des arrérages de taxes scolaires. Les acheteurs ont inscrit une opposition et ont ensuite présenté une demande en vertu de l'arti- cle 97 de la Loi sur les titres de biens-fonds pour faire confirmer la validité du transfert. Ils ont notamment soutenu que l'ordonnance du juge confirmant cette vente avait été rendue par un juge siégeant en qualité de personne désignée, et non comme représentant de la cour, et qu'aucun appel ne pouvait donc être interjeté. Les mots figurant à l'article pertinent de la Loi sur les titres de biens-fonds étaient les suivants: «un ordre d'un juge». La Cour suprême du Canada, à la majorité, a rejeté l'argument selon lequel le juge était une personne désignée, sans toutefois être plus explicite. La question est traitée de façon plus complète dans la dissidence du juge Killam, et il ne fait pas de doute que la question de la compétence dépendait du point de savoir si le juge siégeait en qualité de personne dési- gnée. L'article équivalent dans la présente Loi sur les titres de biens-fonds est l'article 131. Je vois peu de différence entre l'emploi de l'ex- pression «un juge» ou «une ordonnance d'un juge» à l'article 131 et celui de l'expression «au juge» à l'article 154.
A mon avis, en tentant d'interpréter le sens des mots «au juge» que l'on trouve à l'article 154, il faut considérer la loi dans son ensemble et certains de ses articles sont employés des mots analogues ou identiques. Il ne semble tou- tefois y avoir dans la loi ni uniformité ni logique dans l'emploi des expressions «cour», «cour ou un juge», «cour ou juge», «le juge» et «un juge». Ces expressions me semblent employées presque indifféremment dans divers articles de
la Loi sur les titres de biens-fonds. A titre d'illus- tration, je renvoie aux dispositions suivantes, liste qui est loin d'être exhaustive: les articles 22, 38, 39, 61, 62, 64 à 66 inclusivement, 99 à 103 inclusivement, 107(2), 122, 123, 127(1), 128, 130, 131, 136 à 140 inclusivement, 146, 150, 152(1), 153 à 157 inclusivement, 159(2), 166, 167, 169 à 172 inclusivement, 177, 179 à 184 inclusivement, 185, 187 et 192.
Je n'ai pas l'intention de m'arrêter aux articles susmentionnés, si ce n'est pour signaler que, selon moi, plusieurs sont inconciliables avec l'affirmation selon laquelle le terme «juge» est employé dans le sens de «personne désignée».
Si le juge Morrow ne connaît pas du renvoi en question en qualité de personne désignée, les parties semblent convenir qu'il siège en qualité de représentant de la Cour suprême des Terri- toires du Nord-Ouest ou en sa qualité de juge de ladite Cour, exerçant les fonctions et la compé- tence de ladite Cour ou de ses juges. Dans ce cas, personne ne soutient, et je ne crois pas qu'il serait possible de le faire sérieusement, que la Division de première instance de la Cour fédé- rale ou un de ses juges a compétence pour ordonner la délivrance d'un bref de prohibition.
J'estime donc, en me fondant sur les éléments de preuve portés à ma connaissance, que le juge Morrow ne siège pas nécessairement et incon- testablement en qualité de personne désignée; en conséquence, il n'y a pas lieu en l'espèce d'ordonner la délivrance d'un bref de prohibition.
J'en viens maintenant au quatrième moyen avancé par le requérant, à savoir que le juge Morrow, siégeant en qualité de personne dési- gnée, a entrepris d'entendre et de trancher, ou est sur le point de le faire, une question qui sort du champ de sa compétence, ce qui donne donc ouverture à la délivrance d'un bref de prohibi tion. Aux fins dudit argument, je vais considérer que le juge Morrow est une personne désignée. J'estime que le renvoi soumis par le registrateur entre dans le cadre de l'article 154(1); il en va de même des procédures tenues devant le juge Morrow. Le requérant en l'espèce fait valoir que ce qu'on demande au juge Morrow de tran-
cher, et ce qu'il se propose de trancher, c'est la question de la validité de la réclamation faite par les auteurs de l'opposition. A mon avis, ce n'est pas la question soumise par le registrateur; ce n'est pas le genre de question dont l'article envisage le renvoi par le registrateur et ce n'est pas non plus la question que le juge Morrow a l'intention de trancher.
En toute déférence, la question ou les ques tions soumises ne sont pas aussi claires qu'elles pourraient l'être, mais il est possible de leur donner une interprétation raisonnable. Je cite un passage du renvoi:
... les personnes qui ont présenté la demande visant à interdire l'enregistrement de tout acte de cession ont-elles le droit de le faire et ont-elles un intérêt suffisant? .. .
Le texte précité ne vise en aucune façon à demander au juge une décision quant à la recon naissance des droits des autochtones. A mon avis, on demande simplement au juge de décider de la validité de la demande d'interdiction ou de délivrance d'un avis d'interdiction de tout acte de cession. L'autre question semble porter sur l'intérêt qu'ont les personnes ayant présenté la demande, et non sur sa validité. Sur cette ques tion, il se peut bien que le registrateur se soit demandé si les auteurs de l'opposition qui ont présenté la demande représentaient les autres Indiens et les autres bandes d'Indiens dans cette opposition ou si les auteurs de l'opposition en question ont un droit ou un intérêt dans lesdites terres.
Je ne souscris pas à la prétention selon laquelle, en matière d'enregistrement d'une opposition, le seul devoir d'un registrateur est de procéder à l'enregistrement, les seules procé- dures possibles relativement à une telle opposi tion devant être menées conformément aux arti cles 136 à 140 de la loi et s'y limiter.
Je conclus donc que les éléments de preuve portés à ma connaissance n'indiquent en aucune façon qu'il y a, qu'il y a eu ou qu'il y aura nécessairement excès de compétence ou exer- cice de pouvoirs autres que ceux prévus par la loi. J'estime que le juge Morrow a exposé de façon juste et correcte le rôle que l'article 154(1) attribue au tribunal dans le cas d'un
renvoi comme celui-ci. Je cite un passage des motifs de son jugement, tiré de la page 28:
1. Que l'enregistrement de l'opposition ne doit avoir lieu qu'une fois tranchée(s) la question ou les questions soule- vée(s) dans le renvoi.
2. Qu'aux termes de la Loi sur les titres de biens-fonds, c'est moi, en ma présente qualité, qui dois trancher cette question ou ces questions.
3. Que c'est moi, et non la cour fédérale, qui, en ma présente qualité, ai compétence pour connaître de ladite question ou desdites questions, mais que je dois me limiter à établir la nature des droits des autochtones faisant l'objet de la réclamation ainsi que des droits réclamés en vertu de l'arrêté en conseil, et à décider s'ils sont susceptibles de fonder l'enregistrement d'une opposition.
4. Que d'après les éléments de preuve qui me seront présen- tés, il m'appartient de décider s'il y a lieu de permettre l'enregistrement d'une opposition visant à protéger ce qui, selon ce qui aura été établi, constituera l'objet de ladite réclamation.
5. Que si l'enregistrement de l'opposition est permis, la question de savoir quel bénéfice les opposants en tireront, ou encore comment ils en poursuivront l'exécution aux fins d'obtenir une compensation, est de la nature d'une réclama- tion contre la Couronne et c'est la Cour fédérale qui devra connaître de ces questions dans le cadre d'une procédure devant ladite cour.
Je répète que la procédure attaquée en l'es- pèce ne vise pas à fixer l'étendue des droits des autochtones, ce n'est pas du tout ce qui est en cause. En substance, il s'agit de décider s'il y a lieu d'inscrire l'opposition dans le journal.
Je suis convaincu qu'il n'y a pas en l'espèce défaut apparent ou manifeste de compétence, au sens cette expression a été employée dans l'arrêt Mayor of London c. Cox (1866-67) 2 L.R. (H.L.) 239. En supposant qu'il existe un doute sur la compétence du juge Morrow, j'exercerais en l'occurrence ma discrétion pour refuser la délivrance d'un bref de prohibition. Sur cette question qui relève de ma discrétion, je fais mien le raisonnement exposé par Lord Parker, le savant auteur de la partie du volume 11, Halsbury, 3e édition, p. 116, au paragraphe 215, traitant des procédures instituées contre la Couronne. Je renvoie en outre aux observations du juge McCardie dans l'arrêt Turner c. Kings-
bury Collieries Limited [1921] 3 K.B. 169, à la p. 182.
La requête est rejetée. Seuls les auteurs de l'opposition auront droit à leurs dépens relatifs à la présente requête.
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