A-182-73
Babatunde Agiri (Requérant)
c.
Le ministre de la Main-d'œuvre et de l'Immigra-
tion (Intime')
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges
Thlirlow et Pratte—Toronto, le 30 janvier et
les 11 et 12 mars 1974.
Examen judiciaire—Immigration—Requête visant l'annu-
lation d'une ordonnance d'expulsion—Réponses mensongè-
res d des questions posées par un fonctionnaire d l'immigra-
tion.—Rapport du fonctionnaire d l'immigration d l'enquêteur
spécial—Ordonnance d'expulsion rendue par l'enquêteur spé-
cial—Aucune erreur de droit—Loi sur la Cour fédérale, art.
28—Loi sur l'immigration, S.R.C. 1970, c. I-2, art. 19(2) et
22.
Un enquêteur spécial a ordonné l'expulsion du requérant
au motif qu'il n'avait pas donné de réponses véridiques aux
questions posées par un fonctionnaire à l'immigration. Le
requérant a prétendu que le fonctionnaire à l'immigration
aurait dfl présenter un rapport à l'enquêteur spécial en vertu
de l'article 19(2) de la Loi sur l'immigration et que l'ordon-
nance était fondée sur une erreur de droit quant à l'effet de
ce paragraphe.
Arrêt: il n'est pas nécessaire de présenter un rapport en
vertu de l'article 19(2) étant donné qu'un rapport a été fait
en vertu de l'article 22 de la Loi. En examinant le rapport,
on ne demandait pas à l'enquêteur spécial d'exercer sa
faculté de ne pas rendre l'ordonnance d'expulsion; il n'a rien
dit qui indique qu'il ignorait avoir cette faculté; les réponses
mensongères étaient manifestement destinées à tromper le
fonctionnaire à l'immigration sur l'objet réel de la visite du
requérant au Canada. L'ordonnance ne comporte aucune
erreur de droit et la requête est rejetée.
REQUÊTE.
AVOCATS:
Paul D. Copeland pour le requérant.
E. A. Bowie et L. S. Holland pour l'intimé.
PROCUREURS:
Copeland & King, Toronto, pour le
requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
LE JUGE EN CHEF JACKETT (oralement) —La
présente demande introduite en vertu de
l'article 28 visant l'annulation d'une ordonnance
d'expulsion rendue contre une personne qui
n'est pas un citoyen canadien ou qui n'a pas de
domicile canadien était fondée au départ sur des
motifs qui ont été rejetés par le tribunal lors-
qu'elle a été entendue la première fois; toute-
fois, d'autres motifs défendables s'étant alors
présentés, il y a eu ajournement jusqu'à hier de
façon à permettre aux parties de préparer leurs
arguments sur ces nouvelles questions.
L'ordonnance d'expulsion était fondée sur la
conclusion de fait que le requérant n'avait pas
donné de réponses véridiques à toutes les ques
tions que lui avait posées un fonctionnaire à
l'immigration lors d'un examen ainsi que l'exige
l'article 19(2) de la Loi sur l'immigration dont
voici le texte:
(2) Chaque personne doit donner des réponses véridiques
à toutes les questions que lui pose, lors d'un examen, un
fonctionnaire à l'immigration, et tout défaut de ce faire doit
être signalé par ce dernier à un enquêteur spécial et consti-
tue, en soi, un motif d'expulsion suffisant lorsque l'enquê-
teur spécial l'ordonne.
En fait, les autres moyens plaidés hier pro-
viennent du fait que l'enquêteur spécial avait
traité l'affaire sans se reporter particulièrement
à la partie de l'article 19(2) qui suit les mots:
(2) Chaque personne doit donner des réponses véridiques
à toutes les questions que lui pose, lors d'un examen, un
fonctionnaire à l'immigration ... .
En premier lieu, l'avocat du requérant a sou-
tenu que la dernière partie de l'article 19(2)
exigeait un rapport spécial du fonctionnaire à
l'immigration, distinct du rapport qui a effecti-
vement été rédigé en vertu de l'article 22 de la
Loi sur l'immigration, et que, ce rapport distinct
n'ayant pas été fait, une ordonnance d'expulsion
fondée sur le défaut de se conformer à l'article
19(2) ne peut être maintenue. J'estime que cette
prétention doit être rejetée. A mon avis, le rap
port envisagé à l'article 19(2) peut à bon droit
être inclus dans le rapport visé à l'article 22. Je
n'émets aucune opinion sur la question de
savoir s'il existe d'autres façons de le faire
légalement.
L'argument subsidiaire porte que l'ordon-
nance d'expulsion était fondée sur une erreur de
droit quant à l'effet de l'article 19(2).
Les parties reconnaissent que l'enquêteur
spécial jouit d'un pouvoir discrétionnaire en
vertu de l'article 19(2) en ce sens qu'il a la
faculté de rendre ou de ne pas rendre une
ordonnance d'expulsion fondée sur une viola
tion de l'article 19(2).
Par conséquent, j'estime que si un enquêteur
spécial
a) refusait d'examiner une requête lui deman-
dant de ne pas rendre d'ordonnance d'expul-
sion au motif que l'article 19(2) ne lui accorde
pas cette faculté, ou
b) indiquait qu'il aurait envisagé de ne pas
rendre d'ordonnance d'expulsion si, à son
avis, il avait eu légalement la faculté de déci-
der de ne pas la rendre,
il serait évident que l'ordonnance d'expulsion
était fondée sur une erreur de droit et devrait
être annulée. J'irai plus loin en disant que si la
réponse mensongère avait trait à un élément
superficiel et non pertinent au point qu'on aurait
pu s'attendre à ce que l'enquêteur spécial exerce
sa faculté de ne pas rendre d'ordonnance s'il
avait su qu'il avait cette faculté, il faudrait
admettre qu'il a rendu une ordonnance d'expul-
sion fondée sur une erreur de droit quant à ses
pouvoirs.
En l'espèce, on n'a pas demandé à l'enquêteur
spécial d'exercer sa faculté de ne pas rendre
l'ordonnance d'expulsion, il n'a rien dit qui indi-
que qu'il ignorait qu'il disposait de cette faculté
et les réponses mensongères étaient manifeste-
ment destinées à tromper le fonctionnaire à
l'immigration sur l'objet réel de la visite propo
sée du requérant au Canada. Vraiment, je ne
vois aucun motif permettant de conclure que
l'ordonnance d'expulsion était fondée sur une
erreur de droit.
J'estime que la demande introduite en vertu
de l'article 28 doit être rejetée.
* *
LES JUGES THURLOW et PRATTE ont souscrit
à l'avis.
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