A-277-72
Frank H. Galway (Appelant) (Demandeur)
c.
Le ministre du Revenu national (Intimé)
(Défendeur)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges
Thurlow et Pratte -.Ottawa, les 3 et 6 juin 1974.
Impôt sur le revenu—L'appelant demande un jugement sur
consentement—La Cour n'est pas compétente pour déférer
l'affaire pour nouvelle cotisation et mettre en oeuvre un
compromis au moyen d'un jugement sur consentement.
D s'agit d'une demande de jugement sur consentement qui
entraînerait l'annulation du jugement de la Division de pre-
mière instance et la présente cour rendrait un jugement par
lequel la cotisation de l'appelant, pour l'année d'imposition
1961, serait déférée à l'intimé afin «de procéder à une
nouvelle cotisation du requérant fixant l'impôt et l'intérêt au
montant total de $100,000 en conformité du procès-verbal
de transaction modifié, tel que versé au dossier.
Arrêt: la Cour ne peut accueillir sur consentement un
jugement qu'elle ne serait pas habilitée à accorder après le
procès ou l'audition de l'appel. Il s'ensuit que, dans la
mesure où la Cour ne peut, après le procès ou l'audition,
déférer une affaire pour cotisation, excepté dans les formes
prévues par la Loi et ne peut donc, à un tel stade, déférer
une affaire pour qu'on procède à une nouvelle cotisation
pour donner effet à un compromis, la Cour ne peut déférer
une affaire au moyen d'un jugement sur consentement pour
nouvelle cotisation ou à cette fin.
DEMANDE par écrit en vertu de la Règle 324.
AVOCATS:
Richard R. Walker pour l'appelant.
W. J. Hobson et N. A. Chalmers, c.r., pour
l'intimé.
PROCUREURS:
Wilson, Barnes, Walker, Montello, Beach &
Perfect, Windsor, pour l'appelant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR—Il s'agit
d'une demande par écrit en vertu de la Règle
324 visant à obtenir un jugement sur consente-
ment. Ledit jugement sur consentement entraî-
nerait l'annulation du jugement de la Division de
première instance et la présente cour rendrait un
jugement par lequel la cotisation de l'appelant,
pour l'année d'imposition 1961, serait déférée à
l'intimé en vertu de la Partie I de la Loi de
l'impôt sur le revenu afin «de procéder à une
nouvelle cotisation de l'appelant fixant l'impôt
et l'intérêt au montant total de $100,000 en
conformité du procès-verbal de transaction
modifié, tel que versé au dossier».
Au départ, lorsque nous avons examiné cette
demande, nous n'étions pas certains qu'elle
puisse être accueillie. Dans les motifs de juge-
ment prononcés le 22 avril dernier, nous avions
exposé les difficultés et donné aux avocats l'oc-
casion de plaider à cet égard.
Les avocats ont saisi l'occasion. A l'audience
qui s'ensuivit, il fut admis que le jugement ne
pouvait se conformer au consentement, mais on
chercha à persuader la Cour qu'il pouvait être
accordé à des conditions différentes qui permet-
traient aux parties de concrétiser l'intention
réelle du procès-verbal de transaction.
A l'appui des plaidoiries prononcées à l'au-
dience, l'avocat de l'intimé déposa un affidavit
et, au cours des débats, on se référa à certains
éléments de preuve dont disposait le savant juge
de première instance. A ce propos, il convient
de souligner qu'à notre connaissance, il n'existe
aucun moyen par lequel cette cour peut trancher
un appel interjeté d'un jugement de la Division
de première instance en l'annulant ou en le
modifiant, si ce n'est d'entendre l'appel au fond
ou de rendre un jugement sur consentement. En
outre, lorsqu'on peut rendre un jugement sur
consentement, ce dernier devrait, selon nous, se
fonder exclusivement sur le consentement. Tî
n'entre pas dans les attributions de la Cour,
dans le cas d'une demande de jugement sur
consentement, d'examiner les questions de fait
ou de droit soulevées par l'appel sauf dans la
mesure où il peut être nécessaire pour la Cour
de s'assurer que le jugement recherché relève
de sa compétence et qu'il peut être rendu. A
cette fin, la preuve par affidavit peut être appro-
priée dans certains cas, mais, en règle générale,
les documents devraient être rédigés de telle
façon qu'on puisse s'en dispenser.
Laissant de côté les difficultés mentionnées
dans nos motifs du 22 avril dernier qui excluent,
comme l'ont admis les avocats, le jugement sur
consentement aux conditions agréées à l'origine
par les parties, nous allons essayer d'exposer le
problème en suspens aussi brièvement que
possible.
Les motifs du jugement du savant juge de la
• Division de première instance ont révélé que
dans les procédures engagées devant lui, soit la
contestation de la cotisation de l'appelant pour
1961, la question en litige portait sur le point de
savoir si un montant de $200,500 avait été
perçu dans des circonstances telles qu'on devait
l'inclure dans le calcul du revenu de l'appelant
pour l'année d'imposition 1961 aux fins de la
Partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu et que
le montant du prétendu bénéfice n'était pas con-
troversé. Si ce montant faisait à bon droit partie
du revenu, l'impôt supplémentaire se chiffrait à
$133,381.58. La Division de première instance
a décidé qu'on avait inclus ce montant à bon
droit dans le calcul du revenu et, par consé-
quent, elle n'a pas modifié la cotisation. Le
jugement sur consentement qu'on recherchait
au départ était un jugement qui aurait réduit le
montant de l'impôt découlant de la transaction
en cause sans le faire disparaître pour autant.
Compte tenu du fait que le quantum n'est pas en
litige entre les parties, le jugement proposé
semble vouloir donner effet à un compromis
plutôt qu'à un accord conclu entre les parties
sur la façon dont on aurait dû calculer la cotisa-
tion en appliquant la Loi aux faits. Ceci étant, il
ne nous semblait pas certain que la Cour ait
compétence pour accorder le jugement proposé.
Ainsi qu'il ressort de nos motifs du 22 avril,
ce doute découle du fait qu'à notre avis, le
Ministre a l'obligation, aux termes de la Loi, de
fixer le montant de l'impôt exigible d'après les
faits qu'il établit et en conformité de son inter-
prétation de la loi. Il s'ensuit qu'il ne peut établir
une cotisation pour un certain montant fixé afin
de donner effet à un compromis et que, lorsque
la Division de première instance ou la présente
cour d'appel défère une cotisation au Ministre
pour nouvelle cotisation, cela ne peut s'effec-
tuer que d'après les faits et en conformité de la
loi, et non pour donner effet à un compromis.
Peut-on adopter une attitude différente lors-
que les parties conviennent du jugement? Ordi-
nairement, dans un litige entre des personnes
privées, majeures et saines d'esprit, il n'incombe
normalement pas à la Cour de mettre en ques
tion le consentement des parties au jugement. A
première vue, il pourrait sembler que la même
règle s'applique lorsque la Couronne, représen-
tée par ses conseillers juridiques, est l'une des
parties. Il existe cependant au moins une excep
tion à l'admission inconditionnelle des juge-
ments sur consentement, quelles que soient les
parties, à savoir que la Cour ne peut accueillir
sur consentement un jugement qu'elle ne serait
pas habilitée à accorder après le procès ou l'au-
dition de l'appel. Il s'ensuit que, dans la mesure
où la Cour ne peut, après le procès ou l'au-
dience, déférer une affaire pour cotisation
excepté dans les formes prévues par la Loi et ne
peut, à un tel stade, déférer une affaire pour
qu'on procède à une nouvelle cotisation pour
donner effet à un compromis. La Cour ne peut
donc déférer une affaire au moyen d'un juge-
ment sur consentement pour nouvelle cotisation
à cette fin.
Rien de ce que les avocats ont prétendu ne
nous semble contraire à Cette façon de voir. Ils
ont effectivement plaidé que, nonobstant les
apparences découlant des circonstances que
nous avons mentionnées, le procès-verbal de
transaction était conçu pour donner effet à un
accord auquel étaient parvenues les parties sur
la cotisation par l'application de la loi aux faits
de l'espèce. Dans ces circonstances, il n'y a
aucune raison de s'opposer à une nouvelle
demande des parties se fondant sur un jugement
sur consentement visant à donner effet à leur
accord sur la façon d'établir la cotisation en
appliquant la loi aux faits. S'il devait y avoir une
nouvelle demande de ce genre, nous proposons
que, compte tenu de l'historique de l'affaire, le
consentement contienne un exposé précisant
qu'il vise à donner effet à un tel accord. Nous
proposons aussi, dans les circonstances de l'es-
pèce, que le jugement approprié entraîne l'annu-
lation du jugement de la Division de première
instance et défère la cotisation pour que l'on
procède à une nouvelle cotisation sur la base de
l'accord conclu sans essayer de déterminer le
montant de l'impôt ou de l'intérêt exigible.
Nous avons conclu au rejet de la demande
visant à obtenir un jugement sur consentement,
sans les dépens, et sans préjudice du droit de
l'une ou l'autre partie ou des deux de présenter
une demande visant à obtenir un jugement sur
consentement à des conditions différentes de
celles du jugement demandé en l'espèce.
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