La Reine (Demanderesse)
c.
Garry Bowl Limited (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Kerr—
Winnipeg, le 19 octobre 1973.
Pratique et procédure—Requête en jugement sommaire—
Règle 341—Inappropriée quand une question de droit est en
cause.
La Règle 341 ne permet pas de demander un jugement
sommaire quand il y a une question de droit en cause qui ne
peut être réglée par admission faite au cours des plaidoiries.
Dans ce cas, la question de droit était de savoir si une
cotisation à l'impôt sur le revenu portant la mention «nil»
est une cotisation.
REQUÊTE.
AVOCATS:
N. A. Chalmers, c.r., et C. H. Fryers pour la
demanderesse.
M. Greene et A. Fineblitt pour la dé-
fenderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
la demanderesse.
Buchwald, Asper, Henteleff & Co., Winni-
peg, pour la défenderesse.
LE JUGE KERR (oralement)—Il s'agit en l'es-
pèce d'une requête visant l'obtention d'un juge-
ment en faveur de la demanderesse sur la base
d'allégations contenues ou admises dans les
plaidoiries.
Les allégations portent surtout sur les soi-
disant avis de cotisation portant la mention
«nil» et relatifs aux années d'imposition de la
défenderesse 1967, 1968 et 1969. Des copies de
ces avis de cotisation sont jointes à la déclara-
tion de la demanderesse comme annexes 2, 3 et
4. La défenderesse a déposé des avis d'opposi-
tion et des copies de ces avis sont jointes à la
déclaration comme annexes 5, 6 et 7. Elle a
ensuite interjeté appel devant la Commission
d'appel de l'impôt (maintenant la Commission
de révision de l'impôt). Soutenant qu'il ne peut
être interjeté appel d'une cotisation portant la
mention «nil», le ministre du Revenu national a
présenté une requête à la Commission de révi-
sion de l'impôt lui demandant de rendre une
ordonnance mettant fin à l'appel de la défende-
resse. La Commission de révision de l'impôt a
rejeté cette requête et a admis l'appel après
jugement sur le fond. Sa Majesté, demande-
resse, a ensuite interjeté le présent appel par
une déclaration demandant, entre autres, que
soit admis l'appel de la Couronne et que soit
annulée la décision de la Commission de révi-
sion de l'impôt. Elle fait valoir que les avis
informant la défenderesse qu'elle n'avait pas
d'impôts à payer pour ses années d'imposition
1967, 1968 et 1969 n'étaient pas des «cotisa-
tions» au sens du paragraphe (4) de l'article 46
de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952,
c. 148 (avant la modification apportée par l'arti-
cle 1 du c. 63, S.C. 1970-71-72) mais qu'ils
n'étaient que de simples notifications qu'elle
n'avait pas d'impôt à payer pour ces années et
que, par conséquent,
[TRADUCTION] a) les documents appelés Avis d'opposition et
exposés dans les annexes 5, 6 et 7 ne constituent pas, en
droit, au sens de l'article 58 de cette loi, des oppositions à
des cotisations faites en vertu de la Partie I de la Loi de
l'impôt sur le revenu; et
b) vu l'article 59(1) de la loi, la Commission de révision de
l'impôt n'était pas compétente pour rendre la décision dont il
est interjeté appel car la défenderesse n'avait jamais signifié
un avis d'opposition à une cotisation en vertu de l'article 58
de la loi et, étant donné que la Commission n'était pas
compétente, la défenderesse ne pouvait pas interjeter un
appel visant à faire infirmer ou modifier la cotisation.
La déclaration porte également que les sommes
en question constituaient un revenu provenant
d'une entreprise.
La défenderesse a déposé une défense dans
laquelle elle affirme, entre autres arguments,
que les avis l'informant qu'elle n'était redevable
d'aucun impôt (les annexes précitées 2, 3 et 4)
sont bien des «cotisations» et que, par consé-
quent, les avis d'opposition (annexes 5, 6 et 7)
sont, en droit, des avis d'opposition au sens de
l'article 58 de la Loi de l'impôt sur le revenu.
Elle affirme de plus que c'est de bon droit
qu'elle a déposé son avis d'appel et que la
Commission de révision de l'impôt était compé-
tente pour entendre l'affaire et trancher le litige
au fond. La défenderesse a également soutenu
que la demanderesse était irrecevable dans ses
déclarations portant que lesdites annexes 2, 3 et
4 ne sont pas des cotisations et refusant d'ad-
mettre la validité des documents déposés par la
défenderesse.
La présente demande de jugement est présen-
tée en vertu de la Règle 341 de la Cour qui
remplace l'ancienne Règle 256B(2) de la Cour
de l'Échiquier. La similitude des deux règles est
évidente.
Dans l'arrêt Libbey-Owens-Ford Glass Com
pany c. Ford Motor Company of Canada, Ltd.
[1969] 1 R.C.É. 440, le président Jackett
(aujourd'hui juge en chef) a fait, à la page 444,
les observations suivantes au sujet de la Règle
256B(2):
[TRADUCTION] A mon avis, la Règle 256B(2) est là pour les
cas où, au cours d'une même action en justice, on voit
soulever plus d'une cause d'action alors qu'au vu de certains
éléments qui ne sont pas contestés il est possible de statuer
de manière définitive sur une des revendications en litige
sans devoir attendre qu'il soit statué sur les autres questions
posées.
Le présent litige porte sur un ou sur plusieurs
points de droit et la demande vise l'obtention
d'un jugement. Je ne pense pas que la Règle 341
puisse être invoquée dans une demande comme
la présente ou même qu'elle lui convienne. De
plus, la Règle 474 prévoit que la Cour peut
statuer de manière préliminaire sur un point de
droit mais qu'elle ne peut le faire que sur
demande et si elle le juge opportun; elle prévoit
aussi que la Cour peut, également sur demande,
donner des instructions quant au dossier sur
lequel doit se fonder le débat. Je pense qu'il
serait plus normal d'aborder le problème par
une demande déposée en vertu de la Règle 474
et dans laquelle on exposerait clairement le ou
les points de droit en demandant les instructions
idoines.
Par conséquent, la présente demande de juge-
ment est rejetée avec dépens à la défenderesse,
sans préjudice des droits qu'a la demanderesse
de déposer une nouvelle demande en vertu de la
Règle 474.
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