Cercast Inc. et Vestshell Inc. (Demanderesses)
c.
Shellcast Foundries Inc., Bodo Morgenstern et
Vera Stibernik (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Walsh—
Montréal, le 18 janvier; Ottawa, le 30 janvier
1973.
Pratique—Règles de la Cour—Suspension du jugement en
attendant l'appel—Est-ce applicable à un jugement interlocu-
toire ordonnant le dépôt de la défense dans un délai de deux
semaines—Règles 2(2), 1213.
La Règle 1213 de la Cour fédérale prévoit que:
L'exécution d'un jugement porté en appel doit être sus-
pendue en attendant le règlement de l'appel si l'appelant
a) fournit une garantie assurant à la satisfaction de
l'intimé que, si le jugement est confirmé en tout ou
partie, l'appelant exécutera le jugement tel qu'il aura été
confirmé, ou
b)" fournit la garantie qui est exigée par une ordonnance
de la Division de première instance et fait les autres
choses qui sont exigées par cette ordonnance, pour
assurer que, si le jugement est confirmé en tout ou
partie, le jugement tel qu'il aura été confirmé sera
exécuté.
La Règle 2(2) de la Cour fédérale prévoit que:
Les présentes Règles visent à faire apparaître le droit et
en assurer la sanction; elles doivent s'interpréter les unes
par les autres et autant que possible faciliter la marche
normale des procès plutôt que la retarder ou y mettre fin
prématurément.
Arrêt: compte tenu de la Règle 2(2), la Règle 1213 ne
s'applique pas à un appel d'un jugement interlocutoire
ordonnant aux défendeurs de faire quelque chose dans un
délai donné, en l'espèce, de présenter une requête pour
détails ou de déposer une défense dans un délai de deux
semaines.
REQUÊTE.
AVOCATS:
K. Plumley pour les demanderesses.
M. McLeod pour les défendeurs.
PROCUREURS:
Gowling et Henderson, Ottawa, pour les
demanderesses.
Ogilvy, Cope, Porteous, Hansard, Marier,
Montgomery et Renault, Montréal, pour les
défendeurs.
LE JUGE WALSH—Le 18 janvier 1973 j'ai
entendu à Montréal quatre requêtes supplémen-
taires qui sont venues s'ajouter en l'espèce à
une série de requêtes et d'appels ayant rendu
vaine la diligence des demanderesses qui s'ef-
forcent depuis mon jugement du 7 novembre
1972, rejetant la requête d'injonction interlocu-
toire des demanderesses, d'accélérer les procé-
dures pour obtenir un jugement sur le fond le
plus tôt possible. Il est clair qu'en raison de ce
jugement, dont il n'a pas été interjeté appel, les
défendeurs n'ont aucun intérêt à accélérer les
procédures jusqu'au procès au fond alors qu'au
contraire la demanderesse' considère avec
raison que le temps est un facteur déterminant
puisque si ses droits ne sont pas reconnus par
un jugement définitif condamnant les défen-
deurs, ceux-ci pourront continuer à agir de la
manière qu'elle leur reproche et même à divul-
guer à des tiers les renseignements techniques
qui, selon la demanderesse, sont de nature con-
fidentielle et lui ont été soustraits alors que le
défendeur Morgenstern travaillait chez elle.
Afin de mieux comprendre ces nouvelles
requêtes, il est utile, une fois encore, de résumer
rapidement l'affaire. Par un jugement en date du
14 mars 1972, le juge Pratte a rejeté une
requête des défendeurs visant à faire radier un
nombre important de paragraphes de la déclara-
tion des demanderesses. Dans cette requête, les
défendeurs ont prétendu que la Division de pre-
mière instance de la Cour fédérale du Canada
n'avait pas compétence pour statuer sur cette
déclaration et pour accorder les redressements
recherchés. Les défendeurs ont soulevé la cons-
titutionnalité de l'article 7 de la Loi sur les
marques de commerce et la question de l'appli-
cation de celui-ci en l'espèce. Il a été interjeté
appel de ce jugement du juge Pratte et jugement
n'a pas encore été rendu. Entretemps, ce même
point de droit a été soulevé devant la Cour
d'appel dans l'affaire MacDonald, Railquip
Enterprises Ltd. c. Vapor Canada Ltd. [1972]
C.F. 1156: elle a rendu sa décision le ler novem-
bre 1972, maintenant la constitutionnalité de cet
article. Au cours de la longue audience relative
à la requête visant à obtenir une injonction
interlocutoire déposée devant moi, le même
point de droit a été soulevé et j'ai indiqué à ce
moment que j'entendrais les arguments relatifs
aux questions de fait mais que je n'entendrais
aucun argument sur la constitutionnalité; que
sur ce point je réservais mon jugement en
entendant la décision de la Cour d'appel dans
l'affaire Vapor, qui était imminente et que je me
conformerais à cette décision. Après le juge-
ment de la Cour d'appel, daté du ler novembre
1972 j'ai rendu jugement sur la requête d'in-
jonction interlocutoire le 7 novembre 1972 et
j'ai écarté l'exception d'incompétence de la
Cour fondée sur l'inconstitutionnalité, confor-
mément à l'arrêt de la Cour d'appel. Depuis lors,
il a été interjeté appel de cet arrêt devant la
Cour suprême mais il s'écoulera normalement
un temps considérable avant que l'affaire soit
entendue et que jugement soit rendu.
Par la suite, deux nouvelles requêtes ont été
déposées devant moi à Montréal le 12 décembre
1972. Par la première, la demanderesse deman-
dait à la Cour d'ordonner au défendeur Mor-
genstern de déposer les dossiers et documents
concernant ses relations avec certaines sociétés
européennes, réclamait de nouveau une injonc-
tion interlocutoire et demandait finalement que
soit rendu contre les défendeurs un jugement
par défaut faute de produire une défense à la
déclaration du 24 janvier 1972 ou subsidiaire-
ment, d'ordonner aux défendeurs de déposer
cette défense dans un délai d'une semaine. Par
seconde requête, les défendeurs demandaient à
la Cour de rejeter la requête de la demanderesse
au motif que la Cour fédérale du Canada n'avait
pas compétence pour accorder le redressement
demandé par cette requête et que, de toute
façon, la Cour avait déjà rejeté une telle
demande de redressement recherché par voie
d'injonction interlocutoire dans un jugement du
7 novembre 1972 et qu'il n'a pas été interjeté de
ce jugement. J'ai rendu jugement sur ces deux
requêtes: le 19 décembre 1972 j'ai rejeté la
partie de la requête de la demanderesse deman-
dant la production de documents par Morgen-
stern, le contre-interrogatoire de celui-ci et la
nouvelle demande d'injonction interlocutoire
mais j'ai accepté de rendre une ordonnance
enjoignant aux défendeurs de produire une
défense dans les termes suivants:
... il est ordonné aux défendeurs de déposer une requête
pour détails, si telle est leur intention, ou de présenter une
défense à cette déclaration dans un délai de deux semaines à
compter de la date de ce jugement.
Par contre j'ai rejeté la requête des défendeurs
qui soulevaient une fois encore l'incompétence
de la Cour à accorder le redressement recherché
pour inconstitutionnalité. Dans les motifs de
mon jugement sur la requête de la demande-
resse, j'ai déclaré entre autre:
Toutefois il se dégage de la requête des demanderesses
qu'il est urgent de procéder à l'instruction de l'affaire au
fond. Si les demanderesses parviennent à établir, lors du
procès au fond, que le défendeur Morgenstern s'est appro-
prié et a utilisé pour son propre compte des documents et
des renseignements confidentiels appartenant aux demande-
resses, le fait qu'il communique actuellement ces renseigne-
ments à des tiers, en Europe, qui sont des concurrents du
titulaire de la licence des demanderesses accroît certaine-
ment le préjudice que les demanderesses déclarent subir. De
plus, d'après les nouveaux affidavits qui me sont présentés,
il me semble que, si les demanderesses réussissent à établir
les faits qui y sont allégués—et je ne tire aucune conclusion
sur ce point à ce stade—les demanderesses auraient une
meilleure cause d'action que celle qu'elles ont fait valoir à
l'audience sur la requête visant à obtenir une injonction
interlocutoire. Dans cette hypothèse, les circonstances de
cette affaire se rapprocheraient davantage de celles de l'af-
faire Vapor Canada Limited c. John A. MacDonald, Rail -
quip Enterprises Ltd., et Vapor Corporation Limited (N° du
greffe T-2517-71, jugement du 19 avril 1972) dans laquelle
une injonction interlocutoire a été accordée. Je suis donc
convaincu que la troisième partie de la requête des deman-
deresses, qui vise à obliger les défendeurs à déposer une
défense dans un court délai fixé par la Cour, doit être
accordée afin que la Cour puisse statuer sur le fond le plus
rapidement possible.
En ce qui concerne la requête des défendeurs
j'ai déclaré:
De plus les défendeurs opposent à nouveau l'inconstitution-
nalité de la Loi sur les marques de commerce et ils préten-
dent que la Cour fédérale du Canada n'a pas compétence
pour faire droit à cette requête. Vu la décision de la Cour
d'appel dans l'affaire John A. MacDonald, Railquip Enter
prises Ltd. c. Vapor Canada Limited (N° du greffe A-85-72,
[[1972] C.F. 1156] jugement du 1°' novembre 1972 actuelle-
ment devant la Cour suprême du Canada) cet argument
d'inconstitutionnalité doit être rejeté au même titre que
lorsqu'il a été soulevé pour la première fois devant moi lors
de l'audience relative à l'injonction interlocutoire dans cette
affaire.
Les défendeurs ont soutenu d'autre part que la
Cour ne pouvait les obliger à produire une
défense en l'espèce puisqu'ils avaient interjeté
appel du jugement du juge Pratte sur ce même
moyen d'inconstitutionnalité relativement au
refus d'accorder la radiation de certains para-
graphes de la déclaration de la demanderesse
ainsi que la suspension des délais de production
de la défense. Sur ce point j'ai déclaré:
Il a été interjeté appel de ce jugement mais celui-ci
demeure exécutoire. La Règle 1213 prévoit la suspension de
l'exécution d'un jugement dont il est fait appel si la partie
qui a succombé fournit une garantie, mais cette règle ne
semble pas s'appliquer à un jugement portant simplement
refus de radier certains paragraphes de la déclaration des
demanderesses. Il s'ensuit donc qu'à ce stade de la procé-
dure, la déclaration originelle des demanderesses reste par-
faitement valide et produit tous ses effets alors que les
défendeurs ont négligé de produire une défense bien que la
déclaration ait déjà été déposée le 24 janvier 1972. Les
défendeurs sont fondés à continuer leur appel dans la pré-
sente affaire, malgré la décision de la Cour d'appel dans
l'affaire Vapor (précitée). Un juge de la division de première
instance ne peut se fonder sur ce dernier jugement pour
déclarer à l'avance qu'elle sera la décision de la Cour
d'appel sur le jugement du juge Pratte.
Il semble que j'ai ensuite commis une erreur
lorsque j'ai déclaré que les défendeurs dans
l'affaire Vapor n'avaient déposé aucun autre
acte de procédure utile. Le factum ne figurait
pas au dossier que j'ai examiné à l'époque mais
un examen attentif de ce dossier montre que
l'avis d'appel a bien été déposé le 23 mai con-
formément à la Règle 1207(3). Cette méprise
n'altère en rien la ratio de mon jugement énon-
cée un peu plus loin (page 8):
Le fait d'obliger les défendeurs à déposer une défense sans
délais dans la présente instance, afin que l'audience soit
fixée le plus tôt possible, ne porte en rien préjudice à leur
droit de continuer l'appel qu'ils ont interjeté du jugement du
juge Pratte refusant de radier certains paragraphes de la
déclaration.
Il a été interjeté appel de ces deux jugements du
19 décembre 1972 devant la Cour d'appel.
Les quatre requêtes qui ont été déposées
devant moi sont les suivantes:
1. Requête des défendeurs demandant
premièrement que la Cour exige une
garantie conformément à la Règle 1213 b)
et rende toute autre ordonnance aux fins
de s'assurer que, si le jugement du 19
décembre 1972 ordonnant aux défen-
deurs de déposer une requête pour détails
ou de produire leur défense à la déclara-
tion dans un délai de deux semaines à
compter du 19 décembre 1972 est con
firmé par la Cour d'appel, ce jugement
sera exécuté tel qu'il aura été confirmé;
deuxièmement qu'une ordonnance porte
suspension de l'instance jusqu'à ce que la
Cour d'appel fédérale rende un jugement
final sur la requête des défendeurs visant
à faire radier certains paragraphes et les
conclusions de la déclaration des deman-
deresses (requête refusée par le juge
Pratte) et, également jusqu'à ce que la
Cour suprême du Canada rende jugement
s'il est interjeté appel devant elle du juge-
ment de la Cour d'appel fédérale.
2. Autre requête des défendeurs visant à
obtenir d'autres détails sur la déclaration
sous réserve de la requête précédente. La
demanderesse a répondu à cette requête
par un, document intitulé «Réponse à la
requête pour détails» déposée le 12 jan-
vier 1973.
3. Requête de la demanderesse deman-
dant de nouveau que soit rendu contre les
défendeurs un jugement par défaut faute
d'avoir produit une défense ou, subsidiai-
rement, que ceux-ci déposent leur
défense avant le 25 janvier 1973 au plus
tard.
4. Requête des défendeurs visant à obte-
nir une fois encore la radiation de cer-
tains paragraphes de la déclaration et des
conclusions de la demanderesse au motif
que [TRADUCTION] «les précisions qu'ap-
porte la réponse des demanderesses à
leur requête pour détails du 12 janvier
1973 sont insuffisantes» ou subsidiaire-
ment visant à obtenir une ordonnance
enjoignant la demanderesse à fournir
d'autres détails plus précis.
Les défendeurs appuient la première requête
mentionnée sur les dispositions impératives de
la Règle 1213 qui énonce: «L'exécution d'un
jugement porté en appel doit être suspendue . .»
et dans la version anglaise: «Execution of a
judgment appealed against shall be stayed ..».
Ils soutiennent que le juge de la Division de
première instance n'a dans ce cas aucun pouvoir
d'appréciation et qu'il doit, en attendant le règle-
ment d'un appel interjeté d'un jugement de la
Division de première instance, fixer une garan-
tie et suspendre l'instance. Je pense toutefois,
malgré les termes impératifs de cette règle, qu'il
faut interpréter les règles en tenant compte de
l'ensemble et plus particulièrement de la Règle
2(2) qui énonce:
(2) Les présentes Règles visent à faire apparaître le droit
et en assurer la sanction; elles doivent s'interpréter les unes
par les autres et autant que possible faciliter la marche
normale des procès plutôt que la retarder ou y mettre fin
prématurément.
Le juge en chef Jackett a déclaré au sujet des
règles dans son ouvrage intitulé La Cour fédé-
rale du Canada: Manuel de pratique (page 43):
Il faut malheureusement établir tellement de règles détaillées
pour répondre aux exigences créées par des circonstances
occasionnelles rarement rencontrées en pratique qu'il
devient difficile d'y voir clair car les arbres cachent la forêt.
En fait, c'est tellement vrai qu'il n'est pas rare de voir un
avocat estimer qu'il a le devoir, étant donné que son client
en a le droit, de se prévaloir d'une règle pour provoquer des
retards ou de la confusion, même si la raison d'être de la
règle n'a aucun rapport avec les circonstances de son
affaire. J'estime que c'est là un point de vue indûment
cynique qui est incompatible avec les principes régissant la
conduite de la profession juridique. En tout cas, quoi que
l'on ait pu penser jusqu'ici au sujet de la bonne façon
d'appliquer les règles de cour, la Règle 2(2) des nouvelles
Règles - de la Cour fédérale met fin à tous les doutes en des
termes clairs et non équivoques inspirés de ceux d'une
disposition comparable du Code de procédure civile du
Québec. Nous rappelons ici le texte de la Règle 2(2).
2. (2) Les présentes Règles visent à faire apparaître le
droit et en assurer la sanction; elles doivent s'interpréter les
unes par les autres et autant que possible faciliter la marche
normale des procès plutôt que la retarder ou y mettre fin
prématurément.
A ceux qui pensent que j'ai trop insisté sur cet aspect de
la procédure, je dirai que je suis fermement convaincu du
fait que, si les procès n'arrivent pas à régler d'une façon
aussi rapide et économique que possible les véritables litiges
entre membres de la société, cela résulte directement de la
façon dont on en a usé—pour ne pas dire abusé.
Cette remarque, à laquelle je souscris entière-
ment, s'applique particulièrement bien en l'es-
pèce. La Règle 1213 semble viser à faire sus-
pendre l'exécution d'un jugement condamnant
une personne à payer une certaine somme d'ar-
gent et je ne considère pas qu'elle puisse s'appli-
quer à un appel d'un jugement interlocutoire
enjoignant au défendeur de faire quelque chose
dans un certain délai. Il n'est pas raisonnable de
dire que les défendeurs peuvent suspendre l'e-
xécution du jugement en fournissant une garan-
tie d'exécution pour le cas ou ce jugement serait
confirmé alors que ce jugement leur ordonne
précisément d'accomplir certains actes dans un
délai très court (en l'espèce, avant le 3 janvier).
En pareil cas, il est clair que le jugement ne
pourrait jamais être exécuté puisque le délai
serait expiré depuis longtemps lorsque le juge-
ment d'appel serait rendu. J'ai énoncé le même
principe dans un jugement du 19 décembre
1972: les défendeurs demandaient la suspension
de l'exécution d'un jugement du juge Pratte au
motif que celui-ci était frappé d'appel. J'ai alors
déclaré:
La règle 1213 prévoit la suspension de l'exécution d'un
jugement dont il est fait appel si la partie qui a succombé
fournit une garantie, mais cette règle ne semble pas s'appli-
quer à un jugement portant simplement refus de radier
certains paragraphes de la déclaration des demanderesses.
Les défendeurs soutiennent d'autre part que
lorsqu'un point de droit est soulevé dans une
instance il est souhaitable que ce point de droit
soit réglé avant de passer à l'étude des questions
de fait, et que ce principe est confirmé par de
nombreux arrêts. Il est certain qu'il existe une
règle générale en ce sens, mais comme toutes
les règles générales, elle peut aboutir à des
absurdités s'il n'y est pas fait exception dans
certains cas particuliers. Si l'on admet que parce
qu'un important problème de constitutionnalité
a été soulevé dans une autre instance mettant en
cause d'autres parties et qu'un appel d'un juge-
ment maintenant cette constitutionnalité vient
d'être interjeté devant la Cour suprême, aucune
autre affaire mettant en cause le même point de
droit ne peut être entendue avant qu'il ne soit
statué sur celui-ci. Il en résultera à mon avis un
préjudice et une injustice plus grave pour la
demanderesse, légitimement pressée de faire
reconnaître ses droits, que ceux qui pourraient
être causés aux défendeurs si la Cour les oblige
à procéder au fond sous réserve de leur argu
ment d'inconstitutionnalité, arguments qu'ils
sont toujours en droit d'opposer. Ce problème
s'est présenté à moi exactement de la même
façon lors de la requête pour injonction interlo-
cutoire lorsque, sous réserve de l'appel alors
pendant sur le problème de la constitutionnalité,
j'ai ordonné aux parties de procéder à l'au-
dience de la requête pour injonction. Cela a
évité des pertes de temps et lorsque j'ai été prêt
à rendre jugement la question avait été tran-
chée, du moins par la Cour d'appel. En l'espèce,
il me reste encore à régler la question des détails
et il faudra ensuite que j'entende la défense des
défendeurs puis la réplique des demanderesses.
Il y aura vraisemblablement de longs interroga-
toires préalables de sorte qu'il s'écoulera un
certain temps avant que la date du procès puisse
être fixée. Il y aura ensuite un long procès et
avant de statuer sur le fond, le juge de première
instance devra décider s'il doit attendre la déci-
sion de la Cour suprême dans l'affaire Vapor
sur la question de la constitutionnalité. Si la
Cour suprême infirme l'arrêt de la Cour d'appel
et fait droit à l'exception d'inconstitutionnalité
des défendeurs, il est bien certain que beaucoup
d'efforts et beaucoup de temps auront été
perdus du fait que l'affaire aura été plaidée au
fond. Toutefois, à mon avis, cela serait moins
grave que de suspendre aujourd'hui toutes les
procédures en attendant l'arrêt de la Cour
suprême, ce qui peut très bien représenter une
période de deux ans. Des délais supplémentaires
viendront ensuite s'ajouter au titre d'actes de
procédure et des interrogatoires préalables dans
la présente affaire si la Cour suprême confirme
la décision de la Cour d'appel, laquelle décision
doit en l'état actuel des choses, être considérée
comme constituant le droit. De plus, la deman-
deresse n'a en l'espèce aucun moyen d'action
sur l'appel dans l'affaire Vapor et ne peut rien
faire pour les accélérer si les avocats des parties
à cette dernière affaire ne font pas diligence.
Les défendeurs répondront peut-être que non
seulement un appel sur la question de la consti-
tutionnalité est pendant devant la Cour suprême
dans l'affaire Vapor mais encore d'autres appels
sont-ils aussi pendants devant la Cour d'appel
sur cette même question dans la présente affaire
et que c'est précisément la raison pour laquelle
ils demandent que la présente instance soit sus-
pendue. Cependant, d'un point de vue pratique,
il est peu probable que la Cour d'appel accepte
d'entendre dans la présente affaire les mêmes
arguments sur ce problème de constitutionna-
lité, y compris les plaidoiries des procureurs
généraux vu qu'elle a déjà rendu un jugement en
bonne et due forme sur cette question dans
l'affaire Vapor. Si elle accepte de le faire, il est
certain qu'elle statuera dans le même sens. De
même, s'il était interjeté appel d'un tel jugement
devant la Cour suprême, cette dernière refuse-
rait certainement de l'entendre avant d'avoir
statué sur la même question dans l'affaire
Vapor. Par conséquent, en ce qui concerne les
appels interjetés devant la Cour d'appel, il est
clair que le statu quo sera maintenu pendant un
certain temps et il faut éviter que les défendeurs
puissent l'utiliser pour gagner davantage de
temps et ne pas accomplir les actes susceptibles
d'amener l'affaire au jugement final. La requête
des défendeurs visant à obtenir que la Cour
suspende l'instance et exige une garantie est
rejetée avec dépens.
L'avocat de la demanderesse m'a informé à
l'audience que la demanderesse désirait se
désister de sa requête (requête n° 3 mentionnée)
visant à ce que soit rendu contre les défendeurs
un jugement par défaut faute d'avoir produit
une défense ou, subsidiairement, qu'il soit
ordonné à ceux-ci de déposer une défense avant
le 25 janvier 1973. J'ai accordé le désistement
de cette requête sans dépens.
Les requêtes désignées par les numéros 2 et 4
ci-devant peuvent être examinées ensemble.
Étant donné que j'ai rejeté la requête de suspen
sion d'instance des défendeurs, je peux mainte-
nant passer à l'examen de leur requête pour
détails, vu qu'elle a été faite sous réserve de la
première. Toutefois, avant même que je sois
saisi de cette requête ou que j'entende des argu
ments sur celle-ci, la demanderesse y a répondu
dans un document intitulé «réponse à la requête
pour détails». La demanderesse a déclaré que
cette réponse n'a pas pour objet de fournir des
détails supplémentaires et qu'elle constitue une
contestation de la requête pour détails. Dans
cette réponse, la demanderesse indique aux
défendeurs à quel endroit dans les documents et
les transcriptions des contre-interrogatoires
figurant déjà au dossier ils pourront trouver les
détails demandés. Vu le sens de ce document, la
requête des défendeurs visant à faire radier
certains paragraphes de la déclaration et des
conclusions de la demanderesse au motif que les
détails fournis sont insuffisants est prématurée
puisque la Cour n'a pas encore ordonné à la
demanderesse de fournir ces détails et que cel-
le-ci ne les a pas encore fournis comme tels. On
peut donc passer à l'examen de la deuxième
partie de cette requête demandant que la Cour
ordonne à la demanderesse de fournir des
détails plus précis et je statuerai en même temps
sur la question de savoir si des détails supplé-
mentaires sont nécessaires, pour chacun des
paragraphes.
Avant d'examiner comme telle la question des
détails il est utile de faire des observations
générales sur l'objet d'une requête pour détails
sans perdre de vue que le but général est de
mener les procédures à terme le plus rapidement
possible, d'amener les parties à déposer les con
clusions les plus précises possibles et d'organi-
ser la procédure en sorte que les questions de
fait présentées à l'adjudication de la Cour soient
délimitées et précisées au maximum. Les con
clusions des parties doivent être les plus conci-
ses possibles et il n'y a pas lieu d'obliger un
demandeur à exposer dans sa conclusion des
détails qu'il serait plus indiqué de mettre en
preuve à l'audience. Il n'y a pas lieu, non plus,
d'ordonner au demandeur de communiquer aux
défendeurs des détails déjà bien connus de
ceux-ci, lorsqu'ils savent très bien ce qu'on leur
reproche. D'autre part, des affirmations aussi
générales que celles qui figurent dans la déclara-
tion qui nous occupe élargissent le champ de la
preuve qui s'ouvre à la demanderesse de
manière susceptible d'allonger considérablement
l'audience du fait de la présentation d'un grand
nombre de preuves et de témoignages plus ou
moins pertinents, et plus ou moins utiles à la
Cour aux fins de déterminer les véritables ques
tions de fait en cause. Il ressort clairement de
l'emploi fréquent du terme «confidentiel» tout
au long de la déclaration, que la demanderesse
considère que l'ensemble de l'outillage qu'elle
utilise, la manière dont elle l'utilise, les différen-
tes cires, les techniques de moulage, les diffé-
rents alliages, les coulis de céramique, les tech
niques de coulage sous vide, le matériel
d'injection pour la cire, finalement tout ce
qu'elle fait et tout ce qu'elle utilise dans la
fabrication des pièces de fonderie en métal non
ferreux et à double paroi engoujonnée coulées
selon le procédé du moulage à la cire perdue, est
confidentiel et que rien de cela ne peut être
utilisé par les défendeurs en raison du long
emploi du défendeur Morgenstern au service de
la demanderesse Cercast Inc. D'autre part, les
témoignages déposés devant moi lors de la
requête pour injonction interlocutoire des
demanderesses prouvent clairement qu'un outil-
lage semblable à celui utilisé par la demande-
resse ainsi que les cires, les alliages, le coulis
céramique, le matériel d'injection et de coulis
sous vide etc.... sont largement utilisés dans
l'industrie du moulage à la cire perdue et que la
nature de cet outillage et de ce matériel ne peut
donc être considérée comme confidentielle
(dans la mesure où l'outillage et le matériel de la
demanderesse ainsi que la manière de les utiliser
ne sont pas différentes de ce qui se pratique
généralement dans la profession). M. Morgen-
stern a consacré une grande partie de sa vie à
étudier ces techniques, il a assisté à des confé-
rences techniques et à des congrès profession-
nels, il a visité d'autres installations et a néces-
sairement été amené à se documenter
énormément dans ce domaine en dehors de ce
qu'il a pu apprendre au cours de son travail chez
la demanderesse. Il a donc le droit d'utiliser ces
connaissances, d'acheter ou de mettre au point
son outillage dans la mesure où il ne se sert que
de ses connaissances personnelles. Pour réussir
dans son action, la demanderesse doit donc éta-
blir avec précision premièrement, en quoi son
propre matériel, son outillage ou ses techniques
diffèrent de ce qui était utilisé jusqu'alors dans
la profession et constituent une amélioration et
deuxièmement, dans quelle mesure les défen-
deurs ont copié cet outillage ou utilisé du maté
riel ou des techniques mises au point tout spé-
cialement par la demanderesse pour son propre
usage et n'ont pas conçu un outillage entière-
ment différent de celui de la demanderesse. La
demanderesse aura gain de cause si elle parvient
à établir que le défendeur Morgenstern a, de
quelque manière, copié un outillage confidentiel,
utilisé des renseignements confidentiels, permis
à sa société, la Shellcast Foundries Inc., de les
utiliser ou de divulguer à des tiers des détails
sur cet outillage ou ces renseignements confi-
dentiels. Elle n'est pas pour autant fondée à
prétendre dans sa déclaration que la plupart des
techniques et l'ensemble de l'outillage qu'elle
utilise pour fabriquer ces pièces coulées sont
originaux et confidentiels (cette thèse est insou-
tenable). Elle doit restreindre ses prétentions
aux parties de l'outillage qu'elle a elle-même
conçues ou modifiées ou aux techniques qu'elle
a mises au point et qu'elle est la seule à connaî-
tre et à utiliser puis établir ensuite que ce maté
riel ou ces techniques ont été copiés par les
défendeurs.
Le document de la demanderesse intitulé
«réponse à la requête pour détails» ne constitue
pas une communication valable de détails et
constitue plutôt un argument portant que la plu-
part des détails demandés ne sont pas nécessai-
res puisqu'ils se trouvent déjà au dossier de
l'affaire, notamment dans les affidavits et les
contre-interrogatoires sur ceux-ci produits lors
de la requête pour injonction interlocutoire. Ce
document indique simplement dans quelle partie
du dossier se trouvent les renseignements. Les
défendeurs soutiennent qu'il en est ici exacte-
ment comme en matière de brevet. Dans ce
domaine, il est maintenant établi en jurispru
dence qu'il ne suffit pas qu'un demandeur allè-
gue la propriété d'un brevet, indique simplement
le numéro d'enregistrement du brevet et déclare
que les actions qu'elle reproche au défendeur
constituent une contrefaçon de ce brevet sans
préciser en quoi elles constituent une contrefa-
çon mais qu'il doit également décrire dans ses
grandes lignes l'invention faisant l'objet du
brevet. Le même raisonnement s'applique à une
requête pour détails: la partie visée doit fournir
les renseignements demandés et non simplement
indiquer où ils se trouvent. Je ne veux tirer
aucune conclusion sur la question de savoir si la
jurisprudence en matière de contrefaçons de
brevet s'applique en l'espèce, mais je souscris
néanmoins à cet argument. Les détails sont nor-
malement destinés à compléter les paragraphes
d'une déclaration ou d'une défense et ils doivent
constituer un tout par rapport aux paragraphes
qu'ils précisent, indépendamment des preuves
sur lesquelles ils s'appuient. Le fait que le docu
ment de la demanderesse intitulé «réponse à la
requête pour détails» renvoie simplement les
défendeurs aux parties du dossier contenant les
renseignements demandés doit donc être consi-
déré comme un argument portant que les défen-
deurs n'ont pas besoin des détails qu'ils deman-
dent et non comme un document visant à
fournir les détails demandés comme tels.
Face à cette requête pour détails la demande-
resse a deux possibilités. Elle peut fournir les
détails demandés et la défenderesse pourra, si
elle les juge insuffisants, demander à la Cour de
prendre une ordonnance enjoignant la communi
cation de détails plus précis. Elle peut égale-
ment s'opposer à la requête pour détails et le
cas échéant, la Cour lui ordonnera alors de
fournir les détails qu'elle juge nécessaires. En
l'espèce, la demanderesse a compliqué les
choses en mélangeant les deux formules dans
son document intitulé «réponse à la requête
pour détails»; elle déclare d'une part que les
détails demandés sont inutiles et, d'autre part,
elle fournit certains détails supplémentaires sur
certains paragraphes sans attendre que la Cour
rende une ordonnance. Les défendeurs ont alors
présenté la requête numéro 4 (déjà mentionnée)
qu'ils jugeaient indispensable pour le cas où le
document de la demanderesse serait considéré
comme fournissant réellement les détails
demandés. Dans cette hypothèse, les détails
auraient été insuffisants, et la Cour aurait rendu
une autre ordonnance précisant les détails à
fournir.
Je me propose donc de statuer sur ces deux
requêtes par une même ordonnance et je crois
que la meilleure façon de procéder est de consi-
dérer que les défendeurs ont simplement pré-
senté une requête pour détails à laquelle la
demanderesse s'est opposée et de rendre une
ordonnance précisant quels détails doivent être
fournis, le cas échéant.
Ceci étant posé, je peux maintenant passer à
l'étude des différents paragraphes de la requête
pour détails des défendeurs et de la réponse à la
requête pour détails de la demanderesse, ci-
après appelée plus simplement la «réponse»:
Les numéros des paragraphes sont ceux de la
requête pour détails des défendeurs.
Paragraphe 1: se rapporte au paragraphe 5 de la
déclaration. La réponse de la
demanderesse est insuffisante. Il
est ordonné à la demanderesse
de préciser quels sont les «ren-
seignements confidentiels» que
l'employée Vera Stibernik a eu
en sa possession, le cas échéant.
Paragraphe 2: se rapporte au paragraphe 8 de la
déclaration. Les détails deman
dés au sous-alinéa (i) seront con-
sidérés comme fournis si la
demanderesse, en se soumettant
à la présente ordonnance, renou-
velle la réponse donnée au sous-
alinéa 2(i) de sa réponse en y
supprimant la référence au con-
tre-interrogatoire de Bodo Mor-
genstern sur son affidavit.
En ce qui concerne les sous-ali-
néas (ii) et (iii), il est ordonné à la
demanderesse de préciser dans ses
grandes lignes quelle est la partie
«confidentielle» de la documenta
tion technique utilisée dans la
fabrication des pièces coulées en
cause. Comme je l'ai déjà indiqué,
la thèse portant que toute la docu
mentation technique qu'elle utilise
est confidentielle est insoutenable.
La déclaration de la demanderesse
ainsi que les témoignages et les
preuves déposées à l'audience doi-
vent se limiter aux techniques
qu'elle a elle-même mises au point
et qui ne sont pas normalement
utilisées ailleurs dans l'industrie, et
qui, selon ce qu'elle croit être en
mesure d'établir, ont été apprises
par Morgenstern chez elle et sont
maintenant utilisées par la défen-
deresse Shellcast Foundries Inc.
Les renseignements fournis au
sous-alinéa 2(ii) de la réponse sont
donc insuffisants. Il peut être
exact de dire que «toutes les tech
niques mises au point par la Cer-
cast sont confidentielles» mais
cela n'indique pas quelles sont les
techniques précises qu'elle a mises
au point.
Paragraphe 3: se rapporte au paragraphe 10 de
la déclaration. Il est fait remar-
quer que la formule «tout ceci
constituant des renseignements
confidentiels qui sont la pro-
priété de la Cercast» qui conclue
chacune des clauses a) à h) de ce
paragraphe 10, énonce, comme
je l'ai déjà indiqué, une thèse
insoutenable au motif que ces
paragraphes englobent tout le
processus de moulage à la cire
perdue, dont les principes et l'ou-
tillage sont parfaitement connus
de la profession. La demande-
resse devra donc indiquer quelles
sont, parmi ces connaissances et
ces techniques, celles dont elle
peut prouver la nature confiden-
tielle et donc elle réclame l'exclu-
sivité. En ce qui concerne le
sous-alinéa 3(i) de la requête des
défendeurs, je considère que la
réponse apportée par le sous-ali-
néa 3(i) de la réponse est suffi-
sante et qu'il suffira de la répéter
aux fins de la présente ordon-
nance. La réponse apportée dans
la clause 3(ii)a) de la réponse à la
clause 3(ii)a) de la requête des
défendeurs n'est pas suffisante
puisqu'elle indique où l'on peut
trouver les renseignements
demandés au lieu de les fournir.
Les réponses à la clause 3(ii)b) et
c) est suffisante et il suffira de la
répéter dans le document four-
nissant les détails demandés. Il
en est de même pour les répon-
ses données au sous-alinéa 3(iii).
Paragraphe 4: se rapporte au paragraphe 11 de
la déclaration. La demanderesse
devra préciser quelles sont,
parmi les pièces d'outillage
qu'elle mentionne, celles qui se
distinguent suffisamment de l'ou-
tillage utilisé généralement dans
la profession pour que l'on
puisse considérer que ces diffé-
rences constituent des améliora-
tions de «nature confidentielle»
qui, selon elle, auraient été
copiées par les défendeurs.
Paragraphe 5: se rapporte au paragraphe 12 de
la déclaration. Il s'agit d'un para-
graphe d'une portée très générale
traitant de l'ensemble des dos
siers techniques, des plans et des
documents appartenant à la
demanderesse depuis le début de
son activité en 1959, et il semble
qu'il soit peu réaliste d'obliger la
demanderesse à préciser quels
sont, parmi ces dossiers, ceux
qui sont confidentiels. A l'au-
dience, la demanderesse aura
toujours la charge d'établir la
nature confidentielle de tout
matériel d'information dont elle
aura prouvé le détournement par
les défendeurs. La Cour n'or-
donne la production d'aucun
détail en vertu de ce paragraphe.
Paragraphe 6: se rapporte au paragraphe 13 de
la déclaration. Il a perdu toute
utilité puisque la demanderesse
Vestshell s'est désistée de son
action.
Paragraphe 7: se rapporte au paragraphe 14 de
la déclaration et plus précisément
aux clauses a) à d). Ces préten-
tions au sujet de pièces finies ou
de modèles-maîtres particuliers
ne sont pertinentes que dans la
mesure où les défendeurs ont
fabriqué des pièces ou modèles-
maîtres identiques. Le dossier
établit clairement que la fabrica
tion de chaque modèle en cire
exige une conception du modèle-
maître, des techniques d'assem-
blage et de coulée entièrement
différentes et que si l'expérience
acquise en concevant un modèle-
maître et en coulant une pièce
donnée peut parfois être utile
pour la conception d'un autre
modèle-maître et le coulage
d'une autre pièce, les cotes et les
chiffres de fabrication précis que
l'on peut avoir sur un modèle-
maître ou sur une pièce donnés
n'ont que peu d'utilité pour une
autre personne, à moins que cel-
le-ci ait à fabriquer le même
modèle-maître ou la même pièce.
Le problème est cependant diffé-
rent pour les clauses f) à h) qui
traitent de l'outillage et du maté
riel utilisé en termes généraux.
Aucun détail ne sera donc exigé
au sujet des clauses a) à d) mais
des détails devront être fournis
au sujet des clauses f) à h) du
paragraphe 14 de la déclaration.
La demanderesse devra égale-
ment préciser quelle est la partie
de cet outillage qu'elle juge être
«confidentielle».
Paragraphe 8: se rapporte au paragraphe 15 de
la déclaration. Il suffira à la
demanderesse de répéter la
réponse donnée au paragraphe 8
de la réponse.
Paragraphe 9: se rapporte au paragraphe 17 de
la déclaration. La réponse
donnée au paragraphe 9 de la
réponse est insuffisante puis-
qu'elle se réfère simplement à la
transcription du contre-interroga-
toire de M. Morgenstern. Elle ne
précise pas ce que la demande-
resse considère être la cause du
départ de Morgenstern de la Cer-
cast. Il est ordonné à la deman-
deresse de fournir des détails sur
ce point.
Paragraphe 10: se rapporte au paragraphe 19 de
la déclaration. Le sous-alinéa (i)
demande des détails supplémen-
taires au sujet de la clause d) de
ce paragraphe. Il suffira de
répéter la réponse donnée au
sous-alinéa 10(i) de la réponse,
en supprimant la mention rela
tive au témoignage de Rausch.
Le sous-alinéa (ii) demande des
détails supplémentaires au sujet
de la clause e) du paragraphe 19
de la déclaration et il constitue
quant à lui une demande simi-
laire à celle qui est faite pour le
paragraphe 14 de la déclaration.
Je prendrai la même conclusion
que pour ce dernier paragraphe:
j'ordonne à la demanderesse de
fournir des détails indiquant
quels étaient les dossiers qui
contenaient des données et des
formules «confidentielles» ainsi
que des procédés «mis au
point» par la demanderesse.
Le sous-alinéa (iii) demande des détails sup-
plémentaires au sujet de la
clause f) du paragraphe 19
de la déclaration: il suffira
de répéter la réponse
donnée à la clause 10(iii)a)
et b) de la réponse, en
supprimant les mentions
relatives aux parties du
dossier où ces détails peu-
vent être trouvés. Quant
au sous-alinéa (iv), relatif
à la clause j) du paragra-
phe 19 de la déclaration et
demandant des détails sur
les renseignements confi-
dentiels exclusifs conte-
nus dans les classeurs et
les dossiers de fabrication
du département de fonde-
rie de la demanderesse, la
réponse donnée au sous-
alinéa (iv) paragraphe 10
de la réponse est suffi-
sante. Je souligne toute-
fois, comme je l'ai déjà
indiqué, que cela ne pré-
sente pas un grand intérêt
puisque les chiffres de
fabrication pour une pièce
donnée n'ont pu être utile-
ment copiés que s'il est
établi que les défendeurs
ont fabriqué des pièces
identiques. La réponse
donnée au sous-alinéa (y)
du paragraphe 10 de la
réponse au sous-alinéa (y)
demandant des détails
supplémentaires au sujet
de la clause (1) du paragra-
phe 19 est trop imprécise
et n'est pas satisfaisante.
La demanderesse doit
fournir des détails précis
indiquant en quoi ses
techniques sont différen-
tes de celles qu'utilisent
les autres fabricants
compte tenu du fait que,
comme la réponse elle-
même le mentionne, l'as-
semblage des modèles en
cire et la disposition des
canaux de coulée sont dif-
férents pour chaque pièce
fabriquée. Le principe
général de ces techniques
est parfaitement connu et
ne peut constituer une
information confidentielle
de la demanderesse.
Paragraphe 11: se rapporte au paragraphe 20 de
la déclaration. La réponse
apportée à la clause 11a) de la
réponse ne donne aucun détail
précis sur les dossiers et les
renseignements «confidentiels»
que les défendeurs « auraient
emportés et qu'ils utiliseraient
actuellement. Pour ce qui con-
cerne la clause b), les détails
fournis à la clause 11b) de la
réponse sont insuffisants puis-
qu'ils ne précisent pas quelle
partie de l'outillage que les
défendeurs auraient utilisé
après l'avoir copié sur celui de
la demanderesse, est de nature
confidentielle pour la demande-
resse et possède des caractéris-
tiques propres qui la différencie
suffisamment de l'outillage
similaire utilisé par d'autres per-
sonnes dans la profession.
Paragraphe 12: se rapporte au paragraphe 21 de
la déclaration. Le paragraphe
21 semble suffisamment précis
et la Cour n'ordonne la produc
tion d'aucun détail supplémen-
taire au sujet de ce paragraphe.
Paragraphe 13: se rapporte au paragraphe 23 de
la déclaration. Il est ordonné à
la demanderesse de fournir des
détails sur les brochures et le
matériel publicitaire auxquels
elle se réfère. Le paragraphe 13
de la réponse renvoie simple-
ment à l'affidavit et au contre-
interrogatoire du défendeur et
cela ne constitue pas une
réponse suffisante.
Paragraphe 14: se rapporte au paragraphe 30 de
la déclaration. La demanderesse
doit fournir des détails supplé-
mentaires au sujet de la nature
exacte de l'information techni
que confidentielle lui apparte-
nant à laquelle ont eu accès ses
employés Jerry Wintgens,
Ercole Mangiante, Peter Mensl
et Pascual Martin. Il y a égale-
ment lieu de répéter la réponse
fournie au sous-alinéa 1400 de
la réponse.
Paragraphe 15: se rapporte au paragraphe 36 de
la déclaration. La demanderesse
doit fournir des détails au sujet
des renseignements et des pro-
cédés «confidentiels» dont les
défendeurs auraient fait usage
pour fabriquer l'outillage en
cause.
Paragraphe 16: se rapporte au paragraphe 39 de
la déclaration. Il a perdu toute
utilité puisque la demanderesse
Vestshell Inc. s'est désistée de
son action.
Paragraphe 17: se rapporte au paragraphe 40 de
la déclaration. La Cour n'or-
donne la production d'aucun
détail au sujet de ce paragraphe
mais ces allégations devront
évidemment être prouvées par
la demanderesse.
Paragraphe 18: se rapporte au paragraphe 41 de
la déclaration. La Cour n'or-
donne la production d'aucun
détail au sujet de ce paragraphe
vu qu'il est suffisamment
précis. La Cour décidera si les
preuves qui lui seront présen-
tées établissent les faits allégués
aux différents sous-alinéas de
ce paragraphe 41.
Paragraphes 19 - 23: Ces paragraphes se rap-
portent aux conclusions
de la demanderesse, elles
sont suffisamment préci-
ses et ne nécessitent
aucun détail. Il appartien-
dra à la Cour de détermi-
ner, au vu des preuves qui
lui seront présentées, si
l'une quelconque de ces
conclusions doit être
acceptée.
La demanderesse devra fournir les détails
ainsi requis dans un délai de quatorze jours à
compter du prononcé de cette ordonnance, dans
un document intitulé «détails fournis par la
demanderesse en vertu de l'ordonnance du 30
janvier 1973 sur la requête pour détails des
défendeurs».
Il est ordonné aux défendeurs de déposer une
défense à l'action principale dans un délai de dix
jours à compter du dépôt des détails en vertu de
la présente ordonnance.
La partie II des conclusions de la requête
pour détails des défendeurs, demandant que
soient radiées la clause 41a) de la déclaration
ainsi que les clauses 1 a), b), c) et g) des conclu
sions se rapporte à l'exception d'inconstitution-
nalité et est donc rejetée.
Les dépens de cette requête pour détails ainsi
que de l'autre requête des défendeurs portant
sur l'insuffisance des détails fournis dans le
document de la demanderesse intitulé «réponse
à la requête pour détails». (Numéros 2 et 4
mentionnés ci-dessus) suivront le sort du
principal.
' La demanderesse Vestshell Inc. s'est désistée de son
action par un avis déposé le 12 décembre 1972.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.