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Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA BETWEEN : PREMIER MOUTON PRODUCTS INCORPORATED AND HER MAJESTY THE QUEEN RevenueExcise tax—"Furs"—"Mouton"—SheepskinsMoneys collected as taxes paid under protestAction to recover payment by Petition of Right—"Quasi-contract resulting from reception of a thing not due"—Excise Tax Act, R.S.C. 1952, c. 100, ss. 24(1), 46(5)(6)— Exchequer Court Act, R.S.C. 1952, c. 98, s. 86Civil Code, arts. 1047, 1048, 1140. 191 1958 Sept. 22 1959 SUPPLIANT Feb. 23 RESPONDENT.
192 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1959] 1959 The suppliant relying on s. 36 of the Exchequer Court Act sought by PREMIER petition of right to recover moneys it claimed were wrongfully exacted MOUTON from it by the Crown. It alleged that in the operation of its business PRODUCTS it processed raw sheep-skins into finished "mouton" and that the INC. Department of National Revenue contending such processed skins THE Q v U ' EEN were "furs" within the meaning of the Excise Tax Act illegally corn- pelled it between March 30, 1950 and January 29, 1952 to pay some $25,269 as excise tax thereon. That it had from the outset opposed payment and made all payments by cheques on the back of which it inscribed "tax paid under protest" or "paid under protest" and each time, at the suggestion of the respondent, made application for refund as provided by the Excise Tax Act and that although the Supreme Court of Canada in Universal Fur Dressers and Dyers Ltd. v. The Queen [1956] S.C.R. 632, decided that sheepskins as processed by the suppliant were not subject to excise tax, the Department refused to reimburse the suppliant the sums it had illegally and wrongfully collected from it. Held: That the suppliant's goods were not subject to the provisions of s. 24 of the Excise Tax Act and the Department of National Revenue acting in the name of the Crown, in imposing, levying and collecting an excise tax on goods which were not furs, acted illegally and committed an act ultra vires of the powers conferred upon it by Parliament. Universal Fur Dressers and Dyers Ltd. v. The Queen (supra) applied. 2. That as the Act imposed an excise tax on furs and not on "mouton", the sums claimed and levied as taxes on "mouton" were not taxes nor could the payments made by the suppliant be considered as the payment of taxes and the procedure set out in subsections (5) and (6) of s. 46, which refer only to the payment or overpayment of taxes by error of fact or law, could not be followed. 3. That when the respondent by its agents under pretext that the tax imposed was payable claimed amounts supposedly due, it obtained through an error of fact or of law sums not due it which it is bound to restore. (art. 1047 C.C.). 4. That the suppliant when called upon to pay did not believe it was indebted to the respondent, but the representations of officers in authority led it into error. Consequently it paid believing itself by error to be indebted to the respondent. (art. 1048 C.C.). 5. That the payments made by cheque "under protest" indicate that the suppliant intended to exercise its recourse against the respondent if the information the latter had furnished proved to be neither true or justified. This became the case following the Supreme Court judgment in Universal Fur Dressers & Dyers case, (supra). From that moment it was evident that the suppliant could not have recourse to the provisions of subsections (5) and (6) of s. 46 of the Act but there remained recourse by Petition of Right by virtue of the provisions of s. 36 of the Exchequer Court Act to claim that which it had erroneously and unduly paid. 6. That its claim was based on the provisions of the Quebec Civil Code relating to quasi-contracts resulting from the reception of "a thing not due" which gives the right of action to recover the thing
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 193 not due, and the suppliant having established all the elements 1959 required to support such a claim was entitled to recover from the PREMIER Crown the sums paid under the heading of taxes which the latter MOUTON had received without justification and should repay. PRODUCTS INC. PETITION OF RIGHT to recover moneys demanded THE QUEEN and collected as excise taxes, paid by the taxpayer under protest. The action was tried before the Honourable Mr. Justice Fournier at Montreal. Roch Pinard, Q.C. for suppliant. Yves Laurier, Q.C. for respondent. FOURNIER J. now (February 23, 1959) delivered the following judgment: Par sa pétition de droit, la requérante cherche à recouvrer de la Couronne une somme de $25,269.76 qu'elle allègue avoir payée "sous protêt" au ministère du Revenu national parce qu'elle aurait été imposée, prélevée et perçue comme taxe d'accise de 25 p. 100 sur la valeur marchande courante sur des fourrures apprêtées, des fourrures teintes et des fourrures apprêtées et teintes, alors que les marchandises de la requérante ainsi taxées n'étaient pas imposables en vertu de la Loi sur la taxe d'accise. La taxe fut réclamée et perçue du 30 mars 1950 au 24 janvier 1952. Pendant cette période, la taxe d'accise en question était exigible sur les fourrures en vertu des Statuts du Canada, 1947, c. 60. Cette disposition est main-tenant contenue au chapitre 100, article 24, des Statuts Revisés du Canada, 1952. Je cite: 24. (1) Est imposée, prélevée et perçue une taxe d'accise égale à vingt-cinq pour cent de la valeur marchande courante de toute fourrure apprêtée, fourrure teinte et fourrure apprêtée et teinte, a) importée au Canada, payable par l'importateur ou le cessionnaire de ces marchandises avant qu'elles soient enlevées de la garde du préposé compétent des douanes; ou b) apprêtée, teinte, ou apprêtée et teinte au Canada, payable par l'apprêteur ou le teinturier au moment il en donne livraison. Voici les faits. A l'enquête le procureur de l'intimée a admis que la requérante, pendant la période qui nous intéresse, achetait des peaux de moutons et des "shear-lings", c'est-à-dire des peaux de moutons qui n'avaient été tondus qu'une fois; qu'elle apprêtait et transformait ces peaux en produits finis communément appelés
194 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1959] 1959 "mouton" et qu'en sa qualité de grossiste elle vendait ces PREMIER produits finis des manufacturiers qui s'en servaient dans MOUTON PRODUCTS la fabrication de gants, manteaux, galoches et autres c. Iv articles de même nature. Se basant sur les dispositions de, THE QUEEN l'article 24 précité, le ministère du Revenu national Fournier J. entreprit d'imposer, prélever et percevoir de la requérante une taxe d'accise sur les dites peaux de mouton. Lorsque la requérante commença ses opérations, en 1950, elle reçut la visite de deux inspecteurs du ministère qui venaient faire l'évaluation ou l'estimation de ces marchan-dises pour fins d'imposition de la taxe d'accise. Il y eut discussion entre les inspecteurs et un représentant de la requérante. Ce dernier a exprimé l'opinion que les peaux de mouton n'étaient pas soumises à la taxe d'accise sur les fourrures. L'inspecteur lui aurait répondu "qu'il fallait payer cette taxe, que c'était la loi."—"S'il faut payer, nous paierons sous protêt."—"Très bien, payez comme vous voudrez, mais payez." L'inspecteur se rappelle avoir dis-cuté avec les représentants de la requérante, mais il ne peut se souvenir si ces derniers lui ont dit que la taxe n'était pas exigible. Toutefois, vers ce temps-là, il avait entendu dire par des personnes intéressées dans l'industrie et le commerce de fourrures que les peaux de mouton séchées, apprêtées et transformées n'étaient pas imposables. Un autre directeur de la requérante a souvent pris part aux discussions avec les officiers du ministère. Il prétend qu'il y était question des évaluations et cotisations et de la taxe. Dès les débuts, les paiements ont été faits sous protêt parce que la requérante croyait que les peaux de mouton apprêtées n'étaient pas des fourrures et qu'elles étaient, par conséquent, non imposables. Les gens du métier partageaient cette opinion. Même les inspecteurs auraient entendu des remarques à ce sujet. A la suite de ces discussions et après avoir été informée que ses permis pourraient être annulés si elle ne se con-formait pas à la loi, la requérante décida de payer les mon-tants cotisés, mais par chèques endossés "Taxe payée sous protêt" ou "Payé sous protêt". La requérante a produit une liasse de chèques comme pièce P-1, lesquels portent
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 195 l'endos susdit, sauf quelques exceptions. D'ailleurs, l'in-1959 timée dans sa défense admet que le montant payé par la PREMIER MOUTON requérante pour taxe, du 30 mars 1950 au 29 janvier 1952, PRODUCTS s''élève à $24,681. Iv a. Avant de passer à un autre point, je dois dire qu'il est THE QUEEN en preuve que la requérante, dans ses opérations, se servait Fournier J. de peaux de mouton de l'espèce "merino". Loin d'être contredit, ce fait semble avoir été admis implicitement. Les peaux de mouton de l'espèce "merino", traitées, apprêtées, teintes et transformées en "mouton" devant servir dans la fabrication de certains articles, peuvent-elles ètre considérées comme des fourrures et tombent-elles sous le coup des dispositions de l'article 24 du chapitre 100 des Statuts Revisés du Canada, 1952? Cette question avait d'abord été décidée dans l'affirmative par l'honorable juge Cameron de cette Cour en 1954: The Queen et Universal Fur Dressers and Dyers Limited'. La cause fut portée en appel et le jugement de première instance fut renversé par la Cour suprême du Canada le 11 juin 1956 2. L'honorable juge Cartwright, rendant le jugement du tribunal, fait les remarques suivantes: A consideration of all the evidence and of the authorities and dictionary definitions brings one to the conclusion that neither in technical terms nor in common speech nor in that of those who deal in such products would the skin of a mature merino sheep with the wool or hair attached to it be described as a fur. It does not appear to be possible to take an article or substance which is not fur and by dressing and dyeing it to produce a dressed or dyed fur. The merino sheep is a wool-hearing animal and not a fur bearing one. En conséquence, l'appel fut maintenu et l'action ren-voyée. Cela dispose de notre question puisque les faits dans les deux causes sont identiques en ce qui concerne les opérations des parties. Les produits de la requérante ne peuvent être considérés comme des fourrures et ne sont donc pas imposables. Il faut dans cete cause déterminer si la procédure suivie par la requérante est bien celle prévue par la loi. Le procureur de la requérante a procédé par voie de pétition de droit, se basant sur l'article 36 de la Loi de la Cour de l'Echiquier du Canada et sur certaines décisions. Je cite la partie pertinente de cet article. 1 [1954] Ex. C.R. 247. °[1956] S.C.R. 632.
196 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1959] 1959 36. (1) Toute réclamation contre la Couronne peut être poursuivie PREMIER par pétition de droit, ou peut être référée à la cour par le chef du MOUTON ministère dont l'administration a occasionné la réclamation. PRODUCTS INC. v. C'est une disposition générale qui n'impose aucune THE QUEEN limitation quant à la nature de la réclamation. Il semble Fournier J. que toute personne ayant une réclamation contre la Couronne peut intenter la poursuite par pétition de droit. Le procureur de la requérante dit qu'il ne conteste pas la validité du statut imposant une taxe d'accise sur les fourrures, mais soutient que les marchandises de la requé-rante ne sont pas des fourrures et qu'elles n'étaient pas assujetties aux dispositions de la loi concernant les four-rures. Le ministère n'avait aucune autorité légale pour imposer et percevoir une taxe d'accise sur ces articles. La requérante n'a payé qu'après avoir été induite en erreur. Elle a payé, non sans protester, des deniers qu'elle ne devait pas et l'intimée a reçu des argents auxquels elle n'avait aucun droit. Il s'ensuit qu'elle s'est enrichie au détriment de la requérante. La prétention du procureur de la Couronne est à l'effet que, si la requérante croyait que ses marchandises n'étaient pas imposables et que les taxes réclamées n'étaient pas exigibles, elle devait ou refuser paiement et contester toute réclamation devant les tribunaux ou se conformer aux dispositions de l'article 46 de la loi pour réclamer remise des montants payés. Je cite les parties pertinentes de cet article: 46. (1) Il peut être accordé une déduction ou remise de toute taxe imposée par la présente loi a) lorsque le contribuable a effectué un paiement en trop; b) lorsque la taxe a été payée par erreur; * * * (5) Nulle remise ou déduction de quelqu'une des taxes imposées par la présente loi ne doit être effectuée à moins que la personne y ayant droit ne produise une demande par écrit à cet effet dans les deux ans de la date à laquelle cette remise ou déduction est devenue en premier lieu exigible en vertu de la présente loi ou de règlements édictés sous son régime. (6) Si quelqu'un, par erreur de droit ou de fait, a payé ou a payé en trop à Sa Majesté des deniers dont il a été tenu compte à titre de taxes imposées par la présente loi, ces deniers ne doivent pas être remboursés à moins que demande n'ait été faite par écrit dans les deux ans qui suivent le paiement ou le paiement en trop de ces deniers.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 197 L'intimée ajoute que les procédures susdites auraient 1959 être suivies: Elle argumente que lors de l'imposition et de Pis la perception de cette taxe d'accise le mouton était con- P oD ë s sidéré comme une fourrure. Ce n'est qu'en 1957, plus d'une ixc v. année après le jugement de la Cour suprême du Canada THE QtEEx déclarant que le "mouton" n'était pas une fourrure, que Fournier J. la . requérante eut l'arrière-pensée de faire la présente réclamation, alors que le délai pour demander une remise des paiements effectués était, expiré. Maintenant, je veux résumer ce qui me semble être la position des parties dans la présente cause. L'article 24 de la Loi sur la taxe d'accise autorise l'imposition d'une taxe d'accise sur les fourrures. Cette taxe est imposée sur des marchandises de la requérante que le ministère con-sidère comme fourrures. Plus tard, la Cour suprême du Canada déclare que ces marchandises ne sont pas des four-rures. Pendant l'intervalle entre l'imposition de la taxe et le jugement de la 'Cour suprême, la requérante, convaincue que la taxe n,'est pas exigible sur ses marchandises, en avise qui de droit. Elle s'objecte au paiement de la taxe. Toutefois, elle paye la taxe sous protêt parce que les officiers du ministère l'informent qu'elle doit payer, parce que c'est la loi, et que, si elle ne paye pas, son industrie et son commerce seront fermés. ,Sa décision de payer résulte du fait que les autorités l'ont convaincue que c'était la loi et qu'elle a craint de voir ses opérations industrielles et commerciales mises en danger. Les paiements se con-tinuent, toujours sous protêt, après des pourparlers sur le quantum des évaluations et des cotisations. Le 8 octobre 1957, à la suite du jugement de la 'Cour suprême, elle se rend compte qu'elle a été induite en erreur; elle demande, par pétition de droit, le remboursement des sommes qui, sans cause et à son détriment, ont été ainsi payées. L'article 46 stipule que des remises de taxes peuvent être accordées lorsque le contribuable a effectué un paiement en trop ou lorsque la taxe a été payée par erreur. Le paragraphe (5) décrète que le contribuable ayant payé un montant de taxe en trop, ou ayant payé une taxe par erreur, doit produire une demande par écrit à cet effet dans les deux ans de la date à laquelle cette remise est devenue en premier lieu exigible en vertu de la loi ou des règlements. Je ne vois rien dans la loi qui détermine la
198 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1959] 1959 date à laquelle une remise s'appliquant aux cas ci-dessus PREMIER devient exigible. Cette dernière partie de la phrase pour- MOUTON PRODUCTS peut-être s'inter l p ~ réter comme devant sig g n ifier que INC. l'exigibilité de la remise date du jour du paiement de la V. THE QUEEN taxe payée en trop ou payée par erreur ou du jour de la Fournier J. connaissance de l'erreur. Encore faut-il qu'il s'agisse de taxe payée en trop ou par erreur. Est-ce le cas qui nous intéresse? S'agit-il de taxe au sens de la loi? La preuve est à l'effet que dès le début les représentants de la requérante ont soutenu que le "mouton" n'était pas taxable comme fourrure et qu'elle ne devait pas payer les montants réclamés. Avisée par les officiers du ministère que "c'était la loi et qu'elle devait payer si elle voulait continuer son industrie et son commerce", craignant de perdre ses permis, elle commença à payer après discussion sur la valeur des marchandises et le quantum des mon-tants cotisés. A l'article 46(6) il est dit que, si les paiements ont été faits par erreur de droit ou de fait, la demande de remise doit être faite dans les deux ans du paiement. Il n'y a pas de doute dans mon esprit que le mot "paiement" veut dire "paiement volontaire". Les paiements ont-ils été faits volontairement? Je reviendrai sur ce point. Je présume que le législateur dans toutes les dispositions sous étude veut dire "taxe légalement imposée, prélevée et perçue". Or, si cela est vrai, une taxe imposée sur des marchandises non imposables n'est pas une taxe au sens de la loi. Les sommes perçues par l'intimée sur la valeur de ces mar-chandises peuvent avoir été considérées par les officiers du ministère comme perçues à titre de taxes, mais ces sommes ne peuvent être considérées comme des paiements de taxes par la requérante puisque ses marchandises n'étaient pas assujetties à une taxe d'accise. Elle n'a payé les montants réclamés que lorsqu'elle y a été contrainte par les repré-sentations du ministère et non sans protester avec véhémence. Les paiements ont été effectués par erreur, mais erreur causée par les faits et paroles des officiers chargés de l'imposition, du prélèvement et de la perception de la taxe sur les fourrures. Je crois que les représentations étaient faites de bonne foi, mais qu'elles étaient erronées., Les sous-paragraphes (5) et (6) de l'article 46 sont-ils applicables dans les circonstances?
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 199 Examinons la procédure de la requérante. Elle poursuit 1959 la 'Couronne en vertu de la disposition générale de la Loi PREMIER de la Cour de l'Echiquier du Canada qui permet la pour- p o D i suite de toute réclamation par voie de pétition de droit. INC. . Elle prétend qu'elle a payé, sur les représentations des T HE V Q usEx officiers de l'intimée, une taxe non existante. Elle invoque Fournier J. l'article 1140 du 'Code Civil qui se lit: Tout paiement supposé une dette; ce qui a été payé sans qu'il existe une dette est sujet à répétition. Il s'ensuit que pour qu'il y ait répétition il faut qu'il y ait paiement, que ce paiement ne soit pas et qu'il ait été fait par erreur. Toutes ces conditions se rencontrent dans sa réclamation: il y a absence de dette vu le jugement de la Cour suprême déclarant que le "mouton" n'était pas une fourrure; il y a eu paiement (voir les chèques portant l'inscription "sous protêt") ; enfin l'erreur a été de payer, sur les instructions des officiers en autorité, ce qui n'était pas . 'Son action serait donc une action en répétition de l'indu. Dans son volume intitulé "The Doctrine of Unjustified Enrichment in the Law of the Province of Quebec", 2' éd., 1952, l'honorable George S. .Challies, juge de la Cour supérieure de la province de Québec, décrit cette action comme suit (p. 185) : The rule that no man may enrich himself unjustly at the expense of another is a general rule in Quebec law, sanctioned by the action de in rem verso. This action, which is of quasi -contractual origin, lies if there be enrichment; impoverishment; a causal connection between the enrichment and impoverishment; no contract, text of law, or natural obligation as justification for the enrichment or impoverishment; and no imperative rule of law contravened. The action is personal; lies for the least of two amounts, enrichment or impoverishment, that is in existence at the time of the action; lies both for and against incapables; and is prescribed by thirty years. Cette description semble couvrir tous les aspects d'une réclamation en répétition de l'indu. D'ailleurs, l'honorable juge Galipeault, dans la cause de Ville de Louiseville v. Ferrons, a exprimé l'opinion que cette action était ouverte dans tous les cas elle n'éludait pas des dispositions légales impératives. 1 [1947] B.R. 438, 443, 446.
200 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1959] 1959 On y voit dans ces autorités faisant jurisprudence et dans d'autres, PREMIER plusparticulièrement l'étude de l'honorable président actuel de la Cour MOUTON suprême, M. le juge Rinfret [(1937) 15 Can. Bar Rev. 331] qu'il ressort PRODUCTS que pour l'exercice de l'action prise, les éléments suivants doivent se V. trouver: THE QUEEN 1. Enrichissement d'une partie; 2. Appauvrissement d'autre part; 3. Fournier J. Lien causal entre les deux; 4. Absence de justification ou de cause; 5. Que ce ne soit pas un moyen d'éluder les dispositions légales impératives. En Angleterre, il n'existe pas, comme dans la province de Québec, de théorie relative au quasi-contrat de répéti-tion pour l'enrichissement sans cause; mais certaines règles sont généralement suivies dans les cas de répétition de l'indu (recovery of money as money had and received). Si le paiement est fait volontairement et en connaissance de cause, il n'y a pas de recours; mais s'il n'est pas fait volon-tairement, il y a droit d'action. Cette règle est expliquée dans "Halsbury's Laws of England", 30 éd., vol. 8, p. 240, n° 417. Je cite: 417. A person who voluntarily pays a sum of money on another person's demand cannot claim a return of it f rom a payee as money had and received to his use, for, since he might have resisted the demand, the payment must be taken to have been voluntary; but if the payment is made under duress or some form of compulsion other than legal compulsion, it is deemed to be involuntary, and the sum paid is recoverable in this form of action. A payment is not considered voluntary when made under threat of a penal action, or of an execution, even though no execution could lawfully issue; or when illegally demanded and paid under colour of an Act of Parliament or of an office, or under an arbitrator's award which is ultra vires; or when one party is in a position to dictate terms to the other; nor is a payment considered voluntary merely because the person making it has not waited to be sued or has been allowed time for payment. There may be "practical" as well as "actual legal" compulsion. Le jugement rendu dans Brocklebank Ltd. v. The King' semble faire autorité pour déclarer qu'un paiement effectué à la suite d'une demande illégale de paiement sous prétexte d'une loi du Parlement doit être considéré involontaire. La note explicative et le "jugé" en tête du rapport se lisent comme suit: The Shipping Controller, purporting to act under the authority of the Defence of the Realm Regulations, required as a condition of a licence to the suppliants to sell one of their ships to a foreign firm that they 1 [1925] 1 K.B. 52.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 201 should pay a percentage of the purchase money to the Ministry of 1959 Shipping, and the suppliants paid the said percentage. On a petition of P x I E n E 2 a right to recover back the money so paid:— MOUTON Held, (1.) That the imposition of the condition was illegal, and that PxoDIICTS INC. the payment was not a voluntary payment...." y, THE QUEEN Dans la cause de Maskell v. Hornerl, Lord Reading C.J. Fournier J. dit dans ses remarques: If a person with knowledge of the facts pays money, which he is not in law bound to pay, and in circumstances implying that he is paying it voluntarily to close the transaction, he cannot recover it. Such a payment is in law like a gift, and the transaction cannot be reopened. If a person pays money, which he is not bound to pay, under the compulsion of urgent and pressing necessity or of seizure, actual or threatened, of his goods he can recover it as money had and received. The money is paid not under duress in the strict sense of the term, as that implies duress of person, but under the pressure of seizure or detention of goods which is analogous to that of duress. Payment under such pressure establishes that the payment is not made voluntarily to close the transaction (per Lord Abinger C.B. and per Parke B. in Atlee v. Backhouse [3 M. & W. 633, 646, 650]). The payment is made for the purpose of averting a threatened evil and is made not with the intention of giving up a right but under immediate necessity and with the intention of preserving the right to dispute the legality of the demand (per Tindal C.J. in Valpy v. Manley [1 C.B. 594, 602, 603]). Les règles contenues dans les citations susdites ont beaucoup d'analogie avec les dispositions du Code Civil relatives au quasi-contrat résultant de la réception d'une chose non due. Toutefois, en Angleterre, il ne semble pas que la théorie de l'enrichissement sans cause donne tou-jours ouverture à l'action en répétition. Par contre, il y a une jurisprudence assez constante à, l'effet que celui qui a payé par erreur une somme non due à une personne qui l'a réclamée, peut la répéter si le paiement n'a pas été volontaire. Nous verrons si les paiements dont il s'agit dans la présente cause ont été faits volontairement. Il est en preuvefait d'ailleurs admis par le procureur de l'intimée au début du procèsque les marchandises étaient des peaux de mouton type "merino" apprêtées et transformées en un produit appelé "mouton". Au surplus, la requérante a établi que les peaux de mouton étaient de l'espèce "merino". Dans la cause type de Universal Fur Dressers et Dyers Ltd. (supra), il s'agissait de déter-miner si des peaux de mouton dites "merino" transformées 1 [1915] 3 K.B. 106, 118. 71110-1--4a
202 EXCHEQUER COURT' OF' CANADA [1959] 1959 en "mouton" étaient des fourrures, la Cour suprême du PREMIER Canada a décidé qu'an point de vue de la loi sur la taxe MOUTON PRODIIC S d'accise ces marchandises n'étaient pas des fourrures. INC. Toutefois, les marchandises de la requérante avaiént été THE QUEEN taxées pour droit d'accise en vertu des dispositions de Fournier f. l'article 24 de la loi taxant les fourrures, et ce, sans autorité légale. Je ne connais pas d'autre disposition de cette loi autorisant l'imposition d'une taxe ,d'accise sur le "mouton". Les procureurs des parties, au cours du débat, 'm'ont fait remarquer qu'il s'agissait de l'application de droit statutaire, c'est-à-dire de droit strict. Comme les dispositions de la loi sont clairement exprimées, le sens littéral doit s'appliquer et peu d'explications sont nécessaires. Je suis d'opinion que les marchandises de la requérante ne pouvaient être soumises aux dispositions de l'article 24 de la loi et que le ministère du Revenu national au nom de la Couronne, en imposant, prélevant et percevant une taxe d'accise sur ces marchandises, qui n'étaient pas des fourrures, a agi illégalement et a posé un acte ultra vires des pouvoirs accordés par le Parlement. 'Cet acte ne pouvait avoir d'effet juridique ni créer un lien de droit entre la 'Couronne et la requérante. En matière de droit fiscal il y a de nombreuses décisions â l'effet qu'une taxe ne peut être imposée ou perçue d'une personne à moins que le cas ne soit expressément compris dans les termes du statut qui l'impose. Dans une cause de Minister of National. Revenue v. Maclnnes1 le président de cette Cour a clairement exprimé la règle que je viens ' mentionner. Je cite: Held, That a tax liability cannot be fastened upon a person unless his .case comes within the express terms of the enactment by which it is imposed. It is the letter of the law that governs in a taxing Act. L'es marchandises de la requérante ayant été taxées illégalement, cette dernière pouvait difficilement recourir aux dispositions de l'article 46(5) (6) de la loi pour obtenir la répétition des montants payés sans cause à la Couronne. le ' r épète, "lorsque le paragraphe (5) de l'article 46 parle de 'remise ou déduction de quelqu'une des taxes imposées par la présente loi, il_ n'est même pas nécessaire de présumer ! qu'il s'agit ,de taxes dont' la dite loi , autorise l'imposition. 1. [1954] Ex. C.R. 181.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 203 La loi est claire: elle impose une taxe d'accise sur les 1959 fourrures et non sur le "mouton". En conséquence, les Punierou sommes réclamées et perçues comme taxes sur le "mouton" P o IIs ne sont pas des taxes et, partant, les paiements effectués INC. par la requérante ne peuvent être considérés comme des THE Q&EEN paiements de taxes. La requérante a tout de même payé Fournier J. à l'intimée des deniers qu'elle ne lui devait pas et que celle-ci a reçus sans aucun droit. Ce n'est que dans le cas de paiement de taxes, ou en trop, par suite d'erreur de fait ou de droit, que la procédure indiquée aux paragraphes (5) et (6) de l'article 46 doit être suivie. Il me paraît indubitable que lorsque l'intimée, par ses représentants, sous prétexte que la taxe imposée était exigible, a réclamé les montants supposés dus, elle n'a fait qu'obtenir, par suite d'erreur de fait et de droit, des sommes qui ne lui étaient pas dues et qu'elle est obligée de restituer (voir article 1047 C.C.). De plus, les circonstances et la preuve m'ont convaincu que la requérante, lorsqu'elle a été requise de payer, ne se croyait pas la débitrice de l'intimée, mais que les repré-sentations des officiers en autorité l'ont induite en erreur. Elle a, en conséquence, payé, se croyant erronément débi-trice de l'intimée (voir article 1048 .C.C.). Je suis d'opinion que les paiements qu'elle a faits par chèques "sous protêt" indiquent qu'elle entendait exercer son recours contre l'intimée si les renseignements qu'on lui avait fournis s'avéraient ne pas être véridiques ou justi-fiables. Ceci est devenu le cas par suite du jugement de la Cour suprême du Canada (voir Universal Fur Dressers & Dyers Limited et The Queen, supra). A compter de ce moment, il est évident qu'elle ne pouvait plus recourir à la procédure de l'article 46 (5) (6) de la loi. Mais il lui restait le recours par pétition de droit en vertu des dispositions de l'article 36 de la Loi de la Cour de l'Échiquier pour réclamer ce qu'elle avait erronément et indûment payé. Sa réclamation est basée sur les dispositions du Code Civil du Québec relatives au quasi-contrat résultant de la réception d'une "chose non due", qui donne ouverture à l'action pour répétition de l'indu. Certains éléments sont essentiels à la réussite de cette action: il faut un paiement
204 EXCHEQUER COURT' OF CANADA [1959] 1959 pour acquitter une dette qui n'était pas due et que le PREMIER paiement ait été fait par erreur, avec le résultat que celui M IIs ayant reçu le paiement s'est enrichi aux dépens de celui INC. qui a payé. Pourvu toutefois, suivant certains auteurs et THE Q UEEN de nombreux arrêts, que l'action n'ait pas été un moyen Fournier J. d'éluder des dispositions légales impératives. Ces éléments se présentent-ils dans la présente réclama-tion? La preuve est à l'effet que la requérante a fait des paie-ments de deniers par chèques endossés "sous protêt", réclamés à titre de taxe d'accise par le ministère du Revenu national pour et au compte de la Couronne. La loi n'autori-sait pas l'imposition de telle taxe sur les marchandises de la requérante; elle a donc payé ce qu'elle ne devait pas, après avoir protesté le paiement. La Couronne a reçu les deniers de la requérante sans justification ou cause, la taxe ayant été illégalement imposée et perçue et n'étant pas exigible. Il s'agit donc d'un cas d'inexistence de dette. La réception de ces deniers a certainement eu pour effet d'enrichir l'intimée, et ce, aux dépens de la requérante, car par suite de ses prestations elle a vu son actif diminué d'autant. Enfin, pour les raisons exprimées dans mes notes, je suis d'opinion qu'il n'y avait pas de dispositions légales impératives pouvant empêcher la requérante de poursuivre par voie de pétition de droit pour répétition de l'indu. La requérante a-t-elle payé ces deniers par erreur? Il n'y a pas de doute qu'elle ne les aurait pas payés si elle n'avait pas été intimidée par les remarques et informations des officiers du ministère du Revenu national, à l'effet qu'elle devait payer parce que c'était la loi et qu'au cas de refus elle pourrait voir son entreprise close. La preuve m'autorise, je crois, à conclure qu'elle a réellement pensé qu'elle devait payer et que la taxe était exigible; le paie-ment a donc été fait par erreur. Dans ces circonstances, il est logique de croire que son consentement au paiement a été vicié par les représentants des autorités et que les paiements n'ont pas été faits volontairement mais par suite d'erreur et de crainte d'un mal sérieux.
Ex' C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 205. Pour ces raisons, la requérante doit réussir et a droit 1959' de recouvrer de la Couronne les sommes payées à titre de PREMIER taxes. Cette dernière, qui a reçu ces montants de deniers p oDII rs sans cause ou justification, doit les restituer. INC. THE QuE" Il y a au dossier une liasse de chèques qui ont été émis par la requérante entre le 23 mars 1950 et le 7 septembre Fournier J. 1951 à l'ordre du Receveur général du Canada, lesquels indiquent le paiement d'une somme totale de $19,137.80. La requérante a retirer du dossier certains chèques dont le paiement avait été fait après le 24 janvier 1952, parce que sa requête n'alléguait pas ces paiements. La Cour maintient la réclamation de la requérante et déclare qu'elle a droit de recouvrer de la Couronne la somme de $19,137.80 avec dépens. Jugement en conséquence.
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