[2022] 1 R.C.F. F-19
Accès à l’information
Contrôle judiciaire de la réponse du ministère du Patrimoine canadien à une demande d’accès présentée en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A-1 (Loi) — Le décret C.P. 2017-1684 a approuvé une série de transactions foncières relatives au développement des îles Chaudière et Albert dans la rivière des Outaouais, situées à l’ouest de la Colline du Parlement — Le demandeur a déposé une demande d’accès à l’information auprès du cabinet du ministre du Patrimoine canadien et du Multiculturalisme — La demande visait à obtenir des réponses à des questions concernant l’application de la loi canadienne actuelle aux îles Chaudière et Albert — Le demandeur a notamment demandé les lois du Parlement ou l’ensemble des lois par lesquelles le Parlement a annulé le statut juridique des îles Chaudière et Albert — Patrimoine canadien a renvoyé le demandeur à la Commission de la capitale nationale et au ministère des Services publics et Approvisionnement Canada pour obtenir les documents demandés — Le demandeur a déposé une plainte auprès du Commissaire à l’information — Il a soutenu que Patrimoine canadien n’avait pas répondu à sa demande d’accès — L’enquêtrice du Commissariat à l’information a fait part de son intention de recommander que la plainte soit enregistrée comme non fondée — Dans son rapport final, le Commissaire à l’information a conclu que Patrimoine canadien avait effectué une recherche raisonnable et qu’aucun autre document pertinent quant à la demande n’avait pu être trouvé — Le défendeur a fait valoir que la Cour n’avait pas compétence pour examiner la présente demande — Il a fait valoir également que la réponse de Patrimoine canadien à la demande d’accès du demandeur n’était pas un refus de communiquer des documents — Il s’agissait principalement de savoir si la Cour avait compétence pour instruire la demande et s’il y avait lieu d’ordonner à Patrimoine canadien de fournir des copies des lois du Parlement ou de l’ensemble des lois demandés — La Cour était compétente pour instruire la demande — Avant les modifications de 2019, l’art. 41 prévoyait que seule la personne qui s’était vu refuser l’accès pouvait exercer un recours en révision de la décision — L’art. 41(1) ne se limite plus à une personne qui s’est vu refuser l’accès — La personne doit avoir déposé une plainte telle que celles décrites aux art. 30(1)a) à e) de la Loi — L’absence de l’art. 30(1)f) (plaintes portant sur toute autre question relative à la demande ou à l’obtention de documents) de cette liste est un choix législatif délibéré — Le Parlement a décidé que les personnes qui ont déposé une plainte auprès du Commissaire à l’information concernant des refus, des frais ou des prolongations déraisonnables, les langues officielles, l’accessibilité, ou des publications ou des bulletins, peuvent ensuite demander une révision judiciaire, mais pas celles qui ont déposé une plainte portant sur « toute autre question relative à la demande ou à l’obtention de documents » — La plainte déposée par le demandeur ne soulevait aucune question visée aux art. 30(1)b) à e) de la Loi (frais ou délais déraisonnables, langues officielles, accessibilité ou publication ou bulletin émis en vertu de l’art. 5 de la Loi) — Par conséquent, si le demandeur est en droit de déposer une demande de révision en vertu de l’art. 41 de la Loi, sa plainte doit avoir porté sur un refus en vertu de l’art. 30(1)a) de la Loi — Il s’agissait donc de savoir s’il y avait eu un refus d’accès en l’espèce — Patrimoine canadien a effectivement refusé de fournir des documents au motif qu’ils n’existaient pas, c’est-à-dire qu’ils n’étaient pas en sa possession — L’art. 10(1) exige que l’avis donné au demandeur mentionne « le droit de la personne qui a fait la demande de déposer une plainte auprès du Commissaire à l’information », que le motif du refus soit l’inexistence du document, en vertu de l’art. 10(1)a), ou une autre disposition de la Loi, en vertu de l’art. 10(1)b) — L’expression « n’existe pas » à l’art. 10(1)a) doit être comprise comme signifiant « n’existe pas dans les dossiers de l’institution fédérale » plutôt que nécessairement « n’existe nulle part » — Dans la décision Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2000 CanLII 15247 (C.A.F.), la Cour d’appel fédérale a confirmé qu’un refus fondé sur la non-existence pouvait faire l’objet d’une révision judiciaire par la Cour fédérale — La Cour est liée par cette décision — Elle est conforme aux dispositions de l’art. 10(1) et indique clairement que l’inexistence est un motif de refus qui peut être contesté lors d’une révision — Il est préférable de considérer que la détermination de l’existence des documents relève du bien-fondé de la demande, et non de la compétence de la Cour à entendre la demande — Par conséquent, la réponse selon laquelle un document n’existe pas dans les dossiers de l’institution fédérale constitue un refus de communication en vertu de l’art. 10(1)a), et permet au demandeur de recourir à une révision judiciaire en vertu de l’art. 41 — Cela dit, le demandeur n’a établi aucun motif pour lequel l’une ou l’autre des ordonnances demandées devrait être rendue — Patrimoine canadien était autorisé à refuser la communication des documents au demandeur — La Loi ne donne pas un droit général d’obtenir des réponses aux questions — Ni une demande d’accès à l’information ni une demande déposée en vertu de l’art. 41 ne constituent une contestation de la légalité des actions du gouvernement — Elles ne peuvent pas en devenir une à la suite d’une demande pour l’obtention des avis ou positions juridiques sous forme d’accès à des copies des lois — La Loi ne permet pas à la Cour d’ordonner à une institution gouvernementale d’entreprendre les recherches et l’analyse juridiques nécessaires pour répondre à une demande de la nature de celle du demandeur — La réponse de Patrimoine canadien ne peut raisonnablement être lue dans son contexte comme étant autre chose qu’un refus fondé sur la non-existence — Il n’y avait aucune raison d’ordonner la production des documents — Appel rejeté.
Lambert c. Canada (Patrimoine canadien) (T-220-20, 2022 CF 553, juge McHaffie, motifs du jugement en date du 19 avril 2022, 29 p.)