Pratique
Parties
Qualité pour agir
Contrôle judiciaire à l’égard de deux décisions de la Commission des libérations conditionnelles du Canada se rapportant à Philip James Baker à titre de défendeur — L’affaire était inhabituelle au motif que le demandeur n’a pas fait l’objet de l’instance de la Commission et n’y a pas par ailleurs participé, que M. Baker n’a pas participé à la présente instance et que la réponse du procureur général aux allégations du demandeur ne portait pas sur le fond des allégations de fraude et de parjure — Le demandeur a demandé réparation au titre de l’art. 18.1(4)e) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F‑7 — M. Baker a été reconnu coupable de fraude et condamné à la prison aux É.‑U. — Il a par la suite été transféré au Canada pour y purger le reste de sa peine — La Commission a accordé à M. Baker une libération anticipée sous réserve de certaines conditions — Elle a rendu une deuxième décision par laquelle elle a modifié les conditions de libération initiale, de manière à ce que M. Baker puisse se rendre en Allemagne en vue de témoigner au procès de son ex‑femme pour blanchiment d’argent — Ces décisions comportaient une condition intitulée [traduction] « Éviter certaines personnes » — Des journaux ont publié des articles sur le cas de M. Baker — Ces articles renvoyaient en détail au demandeur et indiquaient qu’il avait été un associé en affaires de M. Baker et qu’il était impliqué dans certaines des opérations liées à la fraude — Le demandeur a soutenu que la Commission, pour arriver à ses décisions, s’est considérablement appuyée sur le récit que M. Baker a transmis au Service correctionnel du Canada — Il a fait valoir également que les décisions, dans lesquelles il était mentionné qu’il [traduction] « s’adonne à des activités criminelles » et qu’il était un [traduction] « coaccusé » et un [traduction] « complice » de M. Baker, propageaient ce faux récit — La Commission a publié des versions modifiées des deux décisions afin de corriger une « erreur administrative » (les décisions corrigées) — Le qualificatif « coaccusés » ne précédait plus le renvoi au demandeur — Il s’agissait de savoir si la Cour fédérale avait compétence en ce qui a trait à la réclamation contre M. Baker — La présentation d’une demande de contrôle judiciaire n’était toutefois pas le moyen approprié de régler ces problèmes — Le demandeur a réclamé une ordonnance contraignante enjoignant à M. Baker de s’abstenir de présenter des observations sur le demandeur à toute source médiatique ou d’y renvoyer au demandeur — L’art. 18.1(4)e) prévoit que la Cour peut accorder une réparation discrétionnaire « si elle est convaincue que l’office fédéral, selon le cas […] e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages » — M. Baker ne faisait pas partie d’un « office fédéral » — La Cour fédérale n’a pas compétence à l’égard de personnes lorsque la cause d’action est précisément décrite comme étant la diffamation, le libelle ou la fraude — Il s’agissait de savoir si le demandeur avait qualité pour contester les décisions initiales ou corrigées de la Commission — Le demandeur n’avait pas qualité pour contester les décisions de la Commission au motif qu’elles découlaient d’une fraude ou de faux témoignages, aux termes de l’art. 18.1(4)e) — Le critère lié à la qualité pour présenter une demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale est énoncé à l’art. 18.1(1) — Afin d’avoir qualité directe pour agir au titre de cette disposition, une personne doit appartenir à l’une des trois catégories suivantes, à savoir que la décision « doit toucher directement les droits de la partie, lui imposer des obligations juridiques ou lui porter directement préjudice » — Il ne faut pas donner un sens restreint à l’expression « directement touchée » — Le demandeur n’était pas partie à l’instance de la Commission — Les décisions corrigées n’avaient aucune incidence directe sur ses droits ou ses obligations juridiques — Même si la couverture médiatique a eu une incidence négative sur le demandeur, la preuve ne permettait pas de conclure que les décisions ont été un facteur ayant contribué de façon directe ou importante à ces articles — Le contrôle judiciaire en l’espèce portait sur les décisions corrigées de la Commission — Le demandeur n’était pas désigné en tant que « coaccusé » dans les décisions corrigées — En présentant les décisions corrigées, la Commission a considérablement réduit les répercussions négatives possibles sur le demandeur — Demande rejetée.
Kurgan c. Canada (Procureur général) (T-659-19, 2021 CF 1084, juge Pentney, motifs du jugement en date du 15 octobre 2021, 26 p.)