Droit maritime
Contrôle judiciaire de la conclusion de Voie maritime et politique de transport intérieur, au sein de la Direction Générale de la politique maritime à Transports Canada, selon laquelle les activités de mise en disponibilité du navire Cable Innovator étaient considérées comme une activité maritime de nature commerciale au sens de l’art. 2(1)f) de la Loi sur le cabotage, L.C. 1992, ch. 31 — Le Cable Innovator est un bâtiment spécialisé dans la pose, la maintenance et la réparation de câbles sous-marins de fibre optique qui jette l’ancre dans le port de Victoria, à Victoria, en Colombie‑Britannique — La demanderesse assurait ces services dans le cadre du contrat de maintenance des câbles sous‑marins d’Amérique du Nord (« contrat de la ZAN ») — La demanderesse a présenté une Demande d’admission temporaire d’un navire pour fins de cabotage au Canada (demande C47) — L’Office des transports du Canada (OTC) a établi qu’il n’existait pas de navire canadien adapté et disponible pour assurer le service ou être affecté aux activités visées dans la demande C47 — Il a autorisé la demanderesse à importer temporairement le Cable Innovator au Canada à condition qu’elle obtienne une licence de cabotage (licence C48) avant que le navire puisse entreprendre ses activités — La demanderesse a affirmé que sa pratique avait consisté jusque‑là à faire renouveler son autorisation d’admission temporaire C47 d’année en année et de demander la licence C48 uniquement au besoin lorsqu’il lui fallait réaliser des travaux de maintenance ou de réparation sur des câbles sous-marins en eaux canadiennes — Transports Canada a avisé la demanderesse que le Cable Innovator était tenu de posséder une licence C48 lorsqu’il était en disponibilité dans le port de Victoria — La demanderesse a fait valoir que l’état de disponibilité opérationnelle n’est pas une activité maritime de nature commerciale et qu’il n’était donc pas nécessaire d’obtenir une licence C48 lorsqu’un navire se mettait en disponibilité opérationnelle — Dans un courriel daté du 20 juin 2019, Transports Canada a déterminé qu’il ne fait aucun doute que, si un navire mouille dans un port, avec son équipage, en restant prêt à appareiller pour réparer en urgence la rupture d’un câble dans un délai de 24 heures conformément au contrat de la ZAN encadrant son exploitation, il effectue une activité maritime — Il s’agissait de savoir si le courriel du 20 juin 2019 était susceptible de contrôle judiciaire; dans l’affirmative, si la décision du ministre était raisonnable — Transports Canada a tenté de forcer la demanderesse et le Cable Innovator à se conformer à l’interprétation ministérielle de l’art. 2(1)f) de la Loi sur le cabotage — Exception faite du recours en contrôle judiciaire, la demanderesse n’avait aucun moyen de contester l’interprétation de Transports Canada — Vu les circonstances, la lettre du 20 juin 2019 était une mesure administrative qui a porté directement atteinte aux droits et aux intérêts de la demanderesse et elle était à ce titre susceptible de contrôle — Elle ne pouvait être assimilée à une lettre de courtoisie — En ce qui concerne le caractère raisonnable de la décision du ministre, l’interprétation de l’art. 2(1)f) préconisée par Transports Canada était conforme au sens ordinaire des mots, à leur interprétation dans le contexte de la Loi sur le cabotage et à l’historique de la Loi sur le cabotage — Dans la présente affaire, la question était de savoir si le service de mise en disponibilité opérationnelle offert par le Cable Innovator était visé par la définition de « cabotage » de l’art. 2(1)f) — La question qui se posait, plus précisément, était celle du caractère raisonnable de la conclusion de Transports Canada, selon laquelle les services de mise en disponibilité opérationnelle relèveraient de « toute autre activité maritime » — Vu la description des services et de l’activité figurant dans la demande C47 et le fait que le navire était tenu, aux termes du contrat de la ZAN, d’offrir ses services en exclusivité 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, il ne faisait aucun doute que les services de mise en disponibilité étaient intimement liés aux services de réparation offerts par le navire — Pour être prêt à intervenir à tout moment, le navire devait se maintenir en état de disponibilité opérationnelle — Le navire était en état de préparation actif — Dans ces circonstances, il n’était pas déraisonnable de conclure, comme l’a fait Transports Canada, que le terme « activité maritime de nature commerciale » englobait, selon son sens ordinaire, le service de mise en disponibilité opérationnelle du Cable Innovator — Le service de disponibilité opérationnelle offert par le Cable Innovator et ses activités de réparation étaient indissociables — Le Cable Innovator est un bâtiment de mer doté d’un équipage complet et maintenu en permanence en état de préparation à l’intervention — Il n’était pas déraisonnable que Transports Canada assimile ce travail sur demande à une activité maritime visée par l’art. 2(1)f) — L’interprétation de Transports Canada ne conduirait pas à des résultats absurdes — En somme, la conclusion de Transports Canada selon laquelle l’activité de mise en disponibilité opérationnelle du Cable Innovator constituait une « activité maritime de nature commerciale » était le résultat logique de la description que Global Marine a donnée des services et de l’activité du navire dans sa demande C47 — Transports Canada n’a pas commis d’erreur d’interprétation de la demande présentée par Global Marine en vue d’obtenir une autorisation d’admission temporaire C47 — Prétendre qu’un navire en état permanent de disponibilité opérationnelle ne se livre à aucune activité « maritime » défiait toute logique — La décision de Transports Canada était raisonnable — Demande rejetée.
Global Marine Systems Ltd. c. Canada (Transports) (T-1188-19, 2020 CF 414, juge Strickland, motifs du jugement en date du 25 mars 2020, 59 p.)