Apotex Inc. c. Canada ( Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social )
T-2070-97
juge Gibson
29-7-98
19 p.
Demande de contrôle judiciaire visant à forcer le ministre à tenir le registre conformément au Règlement et à la jurisprudence-Les demanderesses sollicitent: 1) un bref de mandamus enjoignant au ministre de tenir à jour le registre des brevets prévu par le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) en conformité avec ledit Règlement; 2) une injonction interdisant au ministre de consigner au registre les brevets qui renferment uniquement des revendications portant sur des procédés ou des intermédiaires ou des revendications par ailleurs dépourvues de pertinence; 3) un bref de mandamus enjoignant au ministre de supprimer du registre tout brevet qui y figure présentement et qui comporte des revendications portant uniquement sur des procédés ou des intermédiaires ou qui comporte des revendications par ailleurs dépourvues de pertinence; 4) un bref de mandamus enjoignant au ministre de modifier le «formulaire IV» prescrit par le Règlement de manière à ce que le titulaire du brevet soit tenu de certifier que le brevet dont il demande l'inscription au registre comporte une revendication pour le médicament en soi ou pour son utilisation-Allusion au contexte et aux faits de l'affaire Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [1997] 3 C.F. 752 (1re inst.)-La présente demande représente, dans une certaine mesure, l'inverse de la demande en cause dans l'affaire susmentionnée-Les demanderesses reprochent au ministre de ne pas être allé assez loin dans son expurgation du registre en ne radiant pas tous les brevets renfermant uniquement des revendications portant sur des procédés-Qui plus est, le ministre n'a rien fait pour radier les brevets qui renfermaient uniquement des revendications portant sur des intermédiaires-La demande est rejetée-L'objet de la demande ne se prête pas à un contrôle judiciaire-L'objet de la demande n'est pas un «programme», mais la ligne de conduite générale suivie par le ministre à l'égard de la tenue du registre-La ligne de conduite du ministre se prête davantage à un contrôle dans le cadre de consultations publiques et dans le cadre général du processus politique-Le législateur fédéral, en édictant l'art. 55.2(4) de la Loi sur les brevets, et le gouverneur en conseil, en promulguant, en application de ce paragraphe, le régime réglementaire dont le registre constitue un élément, ne pouvaient concevoir que la façon dont le ministre tient à jour le registre pourrait faire l'objet d'un contrôle judiciaire-Les demanderesses, des fabricants de médicaments génériques, ne sont pas «directement touchées» au sens de l'art. 18.1(1) de la Loi sur la Cour fédérale par la façon dont le ministre tient le registre à jour-Les demanderesses ne sont pas des «secondes personnes» ayant des intérêts déterminés en jeu au sens du Règlement en vertu duquel le ministre tient le registre à jour-Il ne suffit pas que les demanderesses aient un intérêt général en ce qui concerne la façon dont le ministre tient le registre à jour; elles doivent démontrer qu'elles sont «directement touchées»-Les demanderesses disposent d'autres façons de saisir la Cour de la question lorsqu'elles mentionnent expressément un ou plusieurs brevets prévus dans une présentation de drogue nouvelle et qu'une instance est introduite contre elles conformément aux dispositions du Règlement-Par conséquent, même si l'objet de la présente demande peut régulièrement faire l'objet d'un contrôle judiciaire, les demanderesses n'ont pas la qualité pour introduire la demande-Même si cette analyse n'est pas nécessaire, la Cour examine les questions de fond soulevées par la demande ainsi que la question de la réparation appropriée-Compte tenu des éléments de preuve présentés, les difficultés et les coûts associés à l'expurgation complète du registre ne pouvaient être des facteurs déterminants-L'absence d'éléments de preuve de la part du ministre amène à conclure que le ministre n'était pas en mesure de présenter des éléments de preuve établissant que la décision de ne pas expurger complètement le registre en conformité avec les décisions de notre Cour était fondée sur des motifs légitimes et non sur des considérations étrangères-Compte tenu des conseils que le ministre a reçus de l'examinateur des brevets du Bureau canadien de la propriété intellectuelle suivant lesquels il ne faudrait qu'entre 15 et 20 jours ouvrables pour vérifier le registre au complet et compte tenu de l'absence de preuve de la part du ministre, si l'on faisait abstraction des considérations déjà évoquées dans les motifs, les demanderesses auraient droit à une réparation-Réparation appropriée, s'il en est-L'obligation que l'art. 3 du Règlement impose au ministre de tenir à jour un registre des renseignements fournis aux termes de l'art. 4 est une obligation d'ordre public-Il s'agit d'une obligation envers le public en général, et non exclusivement ni même principalement envers les premières et les secondes personnes-L'obligation imposée au ministre est de nature purement administrative et ministérielle-Les demanderesses disposent d'autres recours suffisants-L'exécution forcée de l'obligation que l'art. 3 du Règlement impose au ministre n'est pas une question qui justifie la délivrance d'un bref de mandamus en faveur des demanderesses eu égard aux faits de la présente affaire-Même conclusion, essentiellement pour les mêmes motifs, en ce qui concerne le bref de prohibition-Si l'on devait conclure que les demanderesses ont la qualité pour agir relativement à une question relevant des tribunaux, la réparation qui serait accordée serait une ordonnance déclarant que le ministre doit tenir le registre en conformité avec la loi et que, compte tenu de l'ensemble de la preuve soumise, il ne le fait pas-Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, art. 3 (mod. par DORS/98-166, art. 2), 4 (mod., idem)-Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.1 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5)-Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4, art. 55.4 (édicté par L.C. 1993, ch. 2, art. 4).