Eng c. Canada
T-247-93
juge Gibson
4-4-97
17 p.
Action en dommages-intérêts généraux et non pécuniaires, majorés des intérêts par suite de l'agression qui s'est produite à l'établissement Bowden, une prison à sécurité moyenne exploitée par le Service correctionnel du Canada près de Red Deer, en Alberta-Le demandeur est né en Chine, mais il est citoyen canadien et vit à Vancouver-Il est arrivé comme détenu à l'établissement Bowden le 6 janvier 1992-Peu après son arrivée, il a été attaqué par derrière par un autre détenu qui l'a assommé de deux coups-Il a eu la gorge tranchée, presque d'une oreille à l'autre, le poignet gauche tailladé à quatre endroits-Il a été battu à coups de pied et à coups de poing-Il a eu le nez cassé-Dans l'après-midi du 6 janvier, le demandeur a rencontré un autre détenu (Fairfax) et ils ont échangé des propos amicaux-Fairfax n'a montré aucun signe de préjugé ou d'aversion au cours de cet échange-Fairfax servait sa première peine d'emprisonnement dans un pénitencier pour avoir commis envers un chauffeur de taxi un vol qualifié avec violence, pour conduite dangereuse et possession d'un véhicule volé-Il a été placé en isolement-Le psychiatre contractuel à l'établissement Bowden a rencontré Fairfax-Dans son rapport, il insiste sur l'obsession de Fairfax à l'égard des Chinois et des Italiens-Fairfax est décrit comme un détenu à «haute surveillance» et il était connu comme ayant des préjugés raciaux à l'encontre, notamment, des Chinois-Le demandeur a été averti de ne pas faire confiance à Fairfax, et de ne pas demeurer seul avec lui-La Cour s'est appuyée sur les rapports préparés au moment de l'incident et sur le propre témoignage du demandeur concernant ses souvenirs de cette soirée-Fairfax est le premier et le seul détenu interrogé relativement à l'agression-Il a été accusé de tentative de meurtre-Apparemment, il a avoué avoir commis l'infraction-Le demandeur a passé près de deux mois à l'hôpital-Il prétend qu'il prend plus de médicaments depuis cette agression-Il a déclaré dans son témoignage qu'il avait de l'anxiété, des maux de tête et des insomnies occasionnelles découlant des souvenirs qu'il a gardés de l'agression-La question à se poser est de savoir si les responsables de Bowden savaient ou auraient dû savoir que le demandeur pouvait avoir des difficultés avec un détenu incompatible et si, le sachant, ils ont pris les mesures appropriées pour le protéger contre un risque raisonnablement prévisible de préjudice-Les responsables de Bowden savaient que Fairfax entretenait des préjugés raciaux très forts contre les Chinois-Les responsables n'avaient aucune raison de savoir ni même de soupçonner que Fairfax pouvait essayer de traquer le demandeur ce soir-là-Il n'y a pas eu manquement à un devoir de prudence découlant d'un risque prévisible et déraisonnable envers le demandeur créé par les actes ou les omissions des responsables de l'établissement Bowden-D'après les renseignements dont les responsables disposaient, le risque prévisible n'était pas élevé au point d'être déraisonnable-Des mesures appropriées ont été prises pour protéger le demandeur-Action rejetée.