Fiches analytiques

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[2016] 2 R.C.F. F-3

Peuples autochtones

Obligation de consulter — Appel interjeté à l’encontre d’une décision datée du 6 mars 2014 par laquelle l’Office national de l’énergie (In the Matter of Enbridge Pipelines Inc., OH-002-2013) a approuvé la demande de Pipelines Enbridge Inc. relative à un projet d’inversion de la canalisation et d’accroissement de la capacité — Enbridge a présenté sa demande en vertu de l’art. 58 de la Loi sur l’Office national de l’énergie, L.R.C. (1985), ch. N-7, pour demander l’approbation du projet — L’appelante a demandé l’annulation de l’approbation du projet par l’Office au motif que l’Office n’avait pas la compétence pour émettre des exemptions et des autorisations à Enbridge avant que la Couronne ne s’acquitte de son obligation de consulter et qu’elle trouve des accommodements aux préoccupations de l’appelante — Dans sa décision, l’Office a reconnu la menace éventuelle que poserait le projet sur l’utilisation traditionnelle des terres par l’appelante mais était satisfait des déclarations d’Enbridge concernant la sécurité et les opérations de contingence en cas de rupture du pipeline — Par conséquent, l’Office a indiqué que toute incidence sur les droits de l’appelante serait minime et atténuée — Il s’agissait de savoir : 1) si l’Office détient lui-même le pouvoir délégué d’exécuter l’obligation établie dans l’arrêt Nation haïda c. Colombie-Britannique (Ministre des Forêts), 2004 CSC 73, [2004] 3 R.C.S. 511 de consulter l’appelante et de trouver des accommodements aux préoccupations de l’appelante relativement aux effets potentiels du projet sur les Autochtones et sur les droits issus de traités; 2) si l’Office doit déterminer, comme condition d’exécution du mandat en ce qui a trait à la demande d’Enbridge visant l’approbation du projet, si la Couronne, en tant que tiers à la demande, devait s’acquitter de l’obligation découlant de l’arrêt Nation haïda; dans l’affirmative, si la Couronne s’est acquittée de son obligation en vertu de cet arrêt — Cette dernière question a été abordée en premier — L’arrêt Première nation dakota de Standing Buffalo c. Enbridge Pipelines Inc., 2009 CAF 308, [2010] 4 R.C.F. 500 (Standing Buffalo) a statué qu’il n’était pas interdit à l’Office d’exercer sa compétence d’entendre les demandes dont elle est saisie en dépit du fait que la Couronne est un tiers aux demandes — Ce même mois, la Cour suprême du Canada a rendu une décision dans l’arrêt Rio Tinto Alcan Inc. c. Conseil tribal Carrier Sekani, 2010 CSC 43, [2010] 2 R.C.S. 650 (Carrier Sekani), dans lequel elle a déterminé que la British Columbia Hydro and Power Authority (BCUC) avait à bon droit conclu qu’elle avait le pouvoir de rendre des décisions en vertu de l’arrêt Nation haïda — Toutefois, l’arrêt Carrier Sekani ne va pas jusqu’à établir qu’avant d’entreprendre l’examen de la question en litige dans le cadre de procédures dont il est saisi, le tribunal doit rendre une décision en vertu de l’arrêt Nation haïda indépendamment du fait que la Couronne participe aux procédures — Les circonstances dans l’arrêt Carrier Sekani diffèrent considérablement des circonstances de l’arrêt Standing Buffalo — En particulier, dans l’arrêt Carrier Sekani, la partie cherchait à obtenir l’approbation de la BCUC elle-même — En revanche, la Couronne ne participait pas à la procédure d’approbation devant l’Office dans l’arrêt Standing Buffalo — L’arrêt Standing Buffalo n’a pas été invalidé par l’arrêt Carrier Sekani — Aucune distinction ne peut être faite entre l’arrêt Standing Buffalo et le contexte factuel du présent appel et le principe qui y a été établi a été suivi en l’espèce — En l’absence de la Couronne à titre de participante dans la demande présentée en vertu de l’art. 58 de la Loi relativement au projet, l’Office n’était pas tenu, comme condition préalable à l’examen de la demande, de déterminer si la Couronne devait s’acquitter de l’obligation découlant de l’arrêt Nation haïda et, dans l’affirmative, si elle s’est acquittée de cette obligation — Quant à la question de savoir si l’Office devait s’acquitter de l’obligation découlant de l’arrêt Nation haïda, l’Office avait clairement l’obligation d’exécuter son mandat de manière à respecter les dispositions de l’art. 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, nº 44] et de s’assurer que les intérêts des groupes autochtones relativement au processus d’approbation des projets étaient considérés par l’Office et par les promoteurs de projet — En exigeant qu’Enbridge engage un dialogue avec l’appelante et d’autres Premières nations, l’Office s’assurait qu’il respectait ses obligations constitutionnelles en vertu de l’art. 35(1) — La lettre de réponse de la Couronne ne constituait pas une délégation effective à l’Office de la responsabilité d’exécuter toute portion de l’obligation découlant de l’arrêt Nation haïda si cette obligation découle du projet — Une délégation effective par la Couronne de ses obligations découlant de l’arrêt Nation haïda exige l’existence d’une disposition législative à cet effet — En l’espèce, il n’y avait aucune délégation de la part de la Couronne envers l’Office en vertu de la loi ou autrement du pouvoir d’assurer l’exécution de toute obligation de la Couronne applicable découlant de l’arrêt Nation haïda en ce qui concerne la réalisation du projet — Appel rejeté — Le juge Rennie, J.C.A. (dissident) : Le raisonnement sur lequel l’arrêt Standing Buffalo s’est fondé a été modifié par l’arrêt Carrier Sekani — L’arrêt Standing Buffalo ne devrait plus être suivi — Les contextes factuels et juridiques dans le présent appel sont nettement différents des contextes de l’arrêt Standing Buffalo à un point tel que cela exige le réexamen de cette décision — Le libellé de l’arrêt Carrier Sekani est sans équivoque; l’Office devait examiner la question de savoir si une consultation était requise et si elle a eu lieu — Que la Couronne se présente ou non aux processus réglementaires ne modifie en rien les responsabilités qui lui incombent en ce qui concerne l’obligation de consulter — En l’espèce, l’obligation de la Couronne de consulter a pris naissance et la consultation n’a pas eu lieu — Dans la mesure où le ministre a prétendu s’être appuyé sur l’Office pour s’acquitter de l’obligation de consulter, il l’a fait par erreur.

Première nation des Chippewas de la Thames c. Pipelines Enbridge Inc. (A-358-14, 2015 CAF 222d, juges Ryer et Rennie, J.C.A., jugement en date du 20 octobre 2015, 41 p.)

* Veuillez noter que la référence neutre pour cette décision est 2015 CAF 222. Le « d » a été ajouté afin de différencier cette fiche analytique de la décision qui sera publiée sous forme intégrale dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.