Apotex Inc. c. Canada ( Procureur général )
T-3099-92 / T-427-93
juge Dubé
16-7-93
28 p.
Demande visant à l'obtention d'une ordonnance de mandamus enjoignant au ministre de délivrer un avis de conformité (ADC) pour chaque dose du médicament appelé Apo-Enalapril -- Les intimées cherchent à obtenir une ordonnance interdisant au ministre de délivrer l'ADC -- Merck est titulaire d'une licence exclusive à l'égard de l'énalapril en vertu d'un brevet valide interdisant la fabrication non autorisée du médicament -- Avant de vendre un nouveau médicament, le fabricant pharmaceutique doit obtenir un ADC du ministre -- Il doit soumettre une présentation de drogue nouvelle (PDN) -- Si celle-ci est satisfaisante, le ministre délivre l'ADC -- En 1990, Apotex a demandé qu'un ADC soit délivré pour l'Apo-Enalapril -- En 1991, l'intimée a intenté une action en contrefaçon de brevet -- Le 3 février 1993, l'examen de la PDN était terminé et la délivrance de l'ADC a été recommandée -- Le 4 février, soit le jour oú l'autorité compétente a reçu l'ADC pour signature, la Loi de 1992 modifiant la Loi sur les brevets a reçu la sanction royale -- La plupart des dispositions entraient en vigueur le 15 février -- La disposition conférant le pouvoir de réglementation (art. 55.2) entrait en vigueur le 12 mars -- Des règlements ont été pris en vertu de la Loi, lesquels modifiaient radicalement la procédure d'obtention de l'ADC -- Ils interdisaient essentiellement au ministre de délivrer un ADC pour un médicament breveté tant que les brevets y afférents n'étaient pas tous expirés -- L'autorité compétente et le ministre ont demandé un avis juridique au sujet de la façon de procéder -- Demande visant à l'obtention d'une ordonnance de mandamus accueillie; demande visant à l'obtention d'une ordonnance de prohibition rejetée -- Le ministre possède un pouvoir discrétionnaire, dans le cadre de la procédure d'approbation de la PDN prévue par le Règlement sur les aliments et drogues (RAD), mais ce pouvoir n'est pas absolu -- L'étendue du pouvoir discrétionnaire est strictement limitée à l'examen des facteurs pertinents aux fins du RAD en ce qui concerne la procédure d'approbation des nouveaux médicaments devant être commercialisés au Canada -- Le pouvoir est limité à la détermination de la question de savoir si l'examen de la PDN effectué par la Direction générale de la protection de la santé (DGPS) établit l'innocuité et l'efficacité du médicament -- Dans l'affirmative, les autres considérations extrinsèques ne sont pas pertinentes -- Le ministre n'a pas le droit de refuser de délivrer l'ADC en se fondant sur les modifications qu'on prévoit apporter à la loi -- La procédure d'approbation de la PDN vise à déterminer l'innocuité et l'efficacité du médicament en cause -- La proposition selon laquelle même lorsque les fonctionnaires de la DGPS considèrent le médicament comme étant sûr et efficace, la PDN peut encore faire l'objet d'un refus de délivrance de l'ADC pour le motif que le contenu ne satisfait toujours pas le ministre, et ce, pour des motifs autres que l'innocuité et l'efficacité, est incompatible avec l'esprit du RAD et va à l'encontre du but recherché -- Le RAD ne prévoit pas et n'autorise pas l'exercice par le ministre d'un pouvoir discrétionnaire étendu dans le cadre de la procédure d'approbation de la PDN -- Ni le ministre ni son délégué n'ont le pouvoir discrétionnaire de refuser de délivrer l'ADC à Apotex pour d'autres motifs -- Cela est conforme à l'avis exprimé dans Glaxo Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [1988] 1 C.F. 422 (1re inst.) et dans Pfizer Canada Inc. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et autres (1986), 12 C.P.R. (3d) 438 (C.A.F.) -- Le ministre aurait principalement dû se préoccuper des questions relevant de sa compétence, plutôt que d'attendre d'avoir un avis juridique sur des questions extra-ministérielles -- La justification concernant l'obtention d'un avis juridique peut être sans limite -- Le ministre n'était pas certain que le Règlement serait promulgué le 12 mars -- En théorie, le Règlement aurait bien pu ne pas encore être en vigueur -- Le fait que le législateur n'a pas expressément prévu le cas d'une demande d'ADC menée à terme pendant la période transitoire renforce l'avis selon lequel l'ADC aurait dû être traité en vertu du RAD -- Du 4 février au 12 mars, le RAD était en vigueur et l'ADC concernant Apotex était prêt à être signé, alors que la disposition de réglementation n'était pas encore en vigueur -- Le retard du ministre, lorsqu'il s'est agi de délivrer l'ADC, n'était pas justifié -- Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. (1985), ch. F-27 -- Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870, art. C.08.001, C.08.002, C.08.004 (mod. par DORS/88-42, art. 1) -- Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4, art. 55.2 (édicté par L.C. 1993, ch. 2, art. 4) -- Loi de 1992 modifiant la Loi sur les brevets, L.C. 1993, ch. 2, art. 12 -- Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, art. 4, 5, 7 -- Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, art. 43.