Ghayoumi-Moghadam c. Canada ( Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration )
IMM-442-97
juge Tremblay-Lamer
20-10-97
8 p.
Demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la SSR a refusé d'accorder le statut de réfugiés aux requérants au motif qu'ils n'avaient pas de crainte subjective ou objective d'être persécutés-Les requérants sont des citoyens iraniens-Ils prétendent que leur crainte d'être persécutés en raison de leur religion et de leurs opinions politiques est fondée-Depuis la Révolution de 1979, le requérant ne se considère plus comme un musulman, bien qu'il croie toujours en Dieu-Il n'a jamais publiquement renoncé à l'islam-En 1995, alors qu'il assistait à une réception, le requérant a fait des commentaires dans lesquels il critiquait les politiques du gouvernement et l'usage que celui-ci faisait de la religion-Le requérant prétend que les autorités iraniennes le recherchent en raison de ces commentaires-Il s'est enfui de l'Iran-La Commission a commis une erreur de droit lorsqu'elle a omis d'apprécier la revendication de la requérante en fonction du sexe de celle-ci-La requérante a soutenu que la politique de l'État iranien visait essentiellement à persécuter les femmes-Elle a relaté un incident au cours duquel elle a été arrêtée pour avoir violé le code vestimentaire islamique-La persécution fondée sur le sexe constitue une question que doit examiner la Commission-La Commission a fondé son opinion sur trois conclusions: 1) il était improbable que le requérant eût été exécuté pour avoir exprimé des opinions antigouvernementales, d'autant plus que son ami, qui a fait des commentaires similaires, a été arrêté puis libéré; 2) il ressort de la preuve documentaire que les membres de certains partis politiques ne font pas l'objet de discrimination lorsqu'ils expriment des opinions contraires à celles du gouvernement; 3) le requérant a pu quitter l'Iran sans difficulté en se servant de ses propres documents de voyage en règle-En fondant sa décision sur ces conclusions, la Commission a omis de tenir compte de la preuve produite-Elle n'a pas examiné la preuve relative à la libération conditionnelle de l'ami du requérant et à la disparition ultérieure de ce dernier même si, en toute logique, une telle preuve permettait de déduire que la vie du requérant serait en danger s'il rentrait en Iran-Les expériences vécues par des personnes dans des situations semblables à celle du revendicateur du statut de réfugié ont une importante incidence sur l'évaluation de la revendication de ce dernier: Chaudri c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1986), 69 N.R. 114 (C.A.F.)-La Commission aurait dû évaluer la revendication du requérant compte tenu de ce qui est arrivé à l'ami de celui-ci, qui avait fait des commentaires similaires à la même occasion-L'omission de la Commission à cet égard constitue une erreur de droit-La Commission a incorrectement cité un élément de preuve documentaire sur lequel elle s'est fondée pour déterminer si la crainte du requérant d'être persécuté était bien fondée-Contrairement à ce que la Commission a prétendu, il ressort de la preuve documentaire que certains membres de partis politiques qui ont exprimé des opinions allant à l'encontre de positions officielles ont fait l'objet de discrimination-L'intimé a soutenu qu'il s'agissait là d'une erreur bénigne qui n'était pas au coeur de la décision de la Commission-La Cour est d'avis que ce n'est que par pure supposition qu'elle pourrait conclure que la preuve documentaire n'était pas un élément persuasif de la décision de la Commission-Le rôle de la Cour ne consiste pas à élaborer des hypothèses sur la façon dont l'affaire aurait été réglée si la Commission n'avait pas tiré de conclusion erronée-La Commission a également omis d'examiner la preuve non contredite concernant la sortie des requérants, soit le témoignage du requérant selon lequel, d'autre part, un ami qui travaillait à l'aéroport avait vérifié si son nom figurait sur la liste noire et, d'autre part, il avait trompé les autorités en disant qu'il partait en vacances dans le nord de l'Iran-Demande accueillie.